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La Maraîchine Normande
15 juin 2015

CHÂLONS-EN-CHAMPAGNE (51) - 1793 - MARTIN DUPUIS, LOUIS LE MOINE - JEAN GUIDEL, PRÊTRES MARTYRS

Martin Dupuis, curé de Saint-Nicaise à Châlons, et Louis Le Moine, curé de Colligny, diocèse de Châlons, refusèrent le serment constitutionnel et furent expulsés de leurs cures.

La loi de la déportation vint ensuite les forcer à s'expatrier. Ils se fixèrent à Liège en 1793 avec un troisième, le P. Jean Guidel, religieux prémontré de Pont-à-Mousson (diocèse de Toul), et logèrent ensemble chez madame Villemotte, pieuse veuve qui leur céda une chambre, la seule dont elle pût disposer. Ils y vivaient en prêtres édifiants, en vrais confesseurs de cette foi dont ils devaient bientôt être les martyrs.

En effet, les armées françaises ayant fait irruption en Belgique et occupé Liège, les impies révolutionnaires de la ville en devinrent les maîtres, et avec eux y régna la terreur.

 

LIÈGE

 

Le dimanche 3 mars 1793, quatre de ces brigands se présentent inopinément chez la veuve. "Vous recelez, lui dirent-ils, des espions, des émigrés chez vous.  Voyons : si la chose est vraie, ils passeront par nos mains." La veuve s'écrie qu'elle n'a point d'espions chez elle. Ils la repoussent avec violence, forcent l'entrée et pénètrent dans la chambre des trois prêtres. "Que fais-tu là ?" dit un des Liégeois au premier qui se présente. Celui-ci répond : "Nous sommes tranquilles ; nous ne faisons ni ne voulons du mal à personne. - "Vous êtes des espions, réplique le Liégeois ; faites le serment civique, ou suivez-nous à la municipalité. - Nous ne sommes pas des espions : nous avons nos papiers en règle, vous pouvez les voir. Quant au serment civique, nous sommes sortis de France pour l'avoir refusé ; il est contraire à la conscience, à la religion : plutôt mourir que de le prêter !".

A ces mots on répond par des cris de rage et de blasphème ; le sabre à la main, on les somme de se rendre sur-le-champ à la municipalité. Il leur fallut y marcher, escortés de la populace qui remplissait les rues, et comparaître devant les officiers municipaux que la révolution toute récente de ce pays venait de lui donner. On les accuse d'avoir refusé le serment, et l'on ajoute qu'il faut l'exiger d'eux. A la voix du peuple souverain on se hâte d'obéir. Aussitôt donc un des municipaux liégeois interroge les trois prêtres français : "Avez-vous prêté le serment ? - Non, monsieur, répond l'un d'eux pour tous les trois. - Voulez-vous le prêter ? A cette condition vous serez libres. - Non, monsieur - Pourquoi ? - Parce qu'il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes. - Eh bien ! vous allez voir ce qui vous en arrivera. - Peuple liégeois, dit un autre municipal, que faut-il faire de ces gens-là ? - Il faut les guillotiner, crient plusieurs voix. - Non, disent quelques municipaux, il vaut mieux les mettre en prison. Ils y seront examinés, et s'ils sont coupables on les punira."

Aussitôt des gardes nationaux français mêlés avec des démocrates liégeois saisissent les trois confesseurs, et les font marcher vers la prison au milieu des huées, des imprécations, des cris de mort, et des coups de sabre ménagés pour les blesser sans les tuer promptement. Ils arrivèrent aux portes de la prison déjà couverts de sang, soutenant de leurs mains déchirées les lambeaux de chair qui se détachaient de leurs joues entamées.

L'officier national à qui ils avaient été confiés les eut à peine introduit dans la cour de la prison qu'il disparut, abandonnant les trois victimes à toutes les fureurs des assassins qui les suivaient.

Ceux-ci, devenus les maîtres de leur sort, les font revenir dans la rue, leur demandent de nouveau le serment ; à ce prix sera leur délivrance. Les trois héros rendent à la foi catholique un solennel et dernier hommage. "Non, disent-ils ; nos corps sont entre vos mains, mais nos âmes sont à Dieu." A ces mots on les fait mettre à genoux ; des volontaires de ce qu'on appelait alors le bataillon de Paris frappent les premiers sur eux, et de manière à prolonger leur supplice pendant une demi-heure, mais sans pouvoir lasser leur patience. En vain l'on épuisa tous les raffinements de la cruauté : on leur jetait des pierres, on leur assénait des coups de crosse de fusil, des coups de sabre ; on leur plongeait le glaive en différentes parties du corps et à plusieurs reprises ; on prenait plaisir à leur enlever des lambeaux de chair qu'on déchiquetait ensuite sous leurs yeux.

Ils avaient demandé et avec instances, le temps de se confesser avant de mourir. L'un d'eux ayant renouvelé cette humble prière, "Tiens, dit un des assistants en assénant un coup de sabre sur la tête de celui qui avait parlé, voilà qui te tiendra lieu de confession." Le malheureux ! il dit beaucoup plus vrai qu'il ne pensait. Nous ne pouvons répéter toutes les paroles atroces et blasphématoires qui à chaque instant et à chaque coup excitaient le rire d'une multitude aussi féroce que stupide. Pendant ce long et cruel supplice, les généreux martyrs ne cessèrent de prier pour eux-mêmes et pour leurs bourreaux. Les dernières paroles de M. Dupuis furent celles-ci : Loué soit Jésus-Christ ! La mort des trois victimes ne put assouvir la rage des assassins : ils coupèrent la tête de M. Dupuis, la mirent au bout d'une pique et la promenèrent dans plusieurs rues ; puis ils la jetèrent dans la boue, où on la fit rouler à coups de pied jusqu'à ce que la justice du peuple fût satisfaite.

Vers le soir le curé de Saint-André vint recueillir avec un pieux respect cette tête d'autant plus vénérable qu'elle était plus défigurée, et l'ensevelit honorablement. Le reste du corps et ceux des deux autres martyrs avaient été jetés, près de la prison, dans le fossé du rempart. Ils y restèrent jusqu'à la fuite des Français, c'est-à-dire jusqu'au mercredi suivant.

Ce jour-là même, on les retira des fossés, et on leur donna une honorable sépulture. Les personnes qui s'étaient chargées de ce religieux devoir remarquèrent, en enlevant la boue dont ils étaient couverts, qu'ils n'exhalaient aucune mauvaise odeur. Après avoir été déposés dans l'église de Saint-Thomas, ils furent transportés, au milieu d'un nombreux clergé et d'un grand concours de peuple, au son de toutes les cloches, dans l'église Saint-Folien, leur paroisse. Ce spectacle édifiant fit couler les larmes de tous les fidèles. Les corps des vénérables Dupuis et Le Moine furent déposés dans un caveau de la chapelle des larmes de cette église.

Le corps du vénérable P. Guidel, réclamé par les religieux prémontrés de Liège, fut transporté le même jour et avec la même solennité à leur église et placé dans un caveau particulier.

L'évêque de Liège, dans une lettre pastorale qu'il adressa la même année à son peuple, sur les ravages de l'incrédulité, fit un magnifique éloge des trois martyrs. Sa lettre se termine ainsi : "La Providence voulut nous montrer par un épouvantable spectacle, si tant d'autres exemples ne nous l'eussent déjà appris, jusqu'où va la fureur de l'impiété, et quelle est l'héroïque fermeté de la foi, puisque tant de barbarie n'a pu la vaincre."

Ajoutons ici qu'à l'exception du petit nombre d'impies, presque tous de la populace, que nous avons désignés, les habitants de Liège furent étrangers à ces forfaits, et que même ils sauvèrent la vie à plusieurs prêtres français qui vivaient cachés dans cette grande ville.

Extrait de : Vie de M. MUsart, curé de Somme-Vesle et de Poix - mort à Reims pour la foi, le 11 mars 1796 - 1845

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