USAGES D'AUTREFOIS - LE PRÉSENT DU VIN
USAGES D'AUTREFOIS
LE PRÉSENT DU VIN
Dans un grand nombre d'usages féodaux, nous voyons le vin jouer un grand rôle.
Ainsi lorsqu'un étranger était admis aux droits de cité, c'est-à-dire à être considéré comme habitant de la bonne ville d'Angers, il payait aux maires et échevins le "vin de bourgeoisie".
Sous Philippe-Auguste s'introduisit en Anjou l'usage du "pot-de-vin" : le vendeur ne terminait jamais un marché sans que l'acquéreur ne lui donnât un pot rempli de vin ; de là l'origine du mot pot-de-vin qui a bien dégénéré de nos jours, car on entend généralement par pot-de-vin, une petite gratification accordée par l'acheteur en sus du pris principal.
Quand un plaideur gagnait son procès, le greffier du tribunal où il avait été jugé ne remettait les pièces qu'après avoir reçu un broc de vin ; cela s'appelait le "vin de clerc".
Quand un criminel était conduit au gibet, il avait droit, pendant le trajet de la prison au lieu de son supplice, d'exiger du bourreau deux coups de vin.
Cet usage était général par toute la France. Sainte-Foix nous apprend qu'on servait du vin aux juges chargés d'assister à l'exécution, et c'était le bourreau qui le fournissait : au moins, c'est ce qui arriva, en 1477, à l'éxécution du duc de Nemours. Dans un compte de la prévôté de Paris, rapporté par Sauval, on voit une somme de 12 livres 6 deniers, allouée au bourreau pour "du pain, des poires, et onze pintes de vin fournis à Messieurs du Parlement et officiers du roi, estant aux greniers de la salle, pendant que ledit duc se confessait."
Sous Louis XV, lorsqu'une exécution devait avoir lieu, le bourreau allait prendre les ordres soit chez le président de la sénéchaussée, soit chez le colonel de la maréchaussée. Là on lui mettait un verre de vin sur le carreau ; il l'avalait sans mot dire, puis un domestique venait avec des pinces enlever le verre, et le jetait dehors comme objet immonde.
On trouve, dans un grand nombre de donations aux XVe et XVIe siècles, ceci : "vin pour faire la Cène le Jeudi-Saint, à l'église de ... ; vin pour la communion le jour de Pâques."
Le clergé, dans certaines circonstances, recevait du vin pour salaire. Ainsi le parrain et la marraine devaient offrir au prêtre qui baptisait un enfant du vin, qu'on appelait le "vin du curé", et ce n'était généralement pas le plus mauvais de la cave. Ce vin variait de qualité suivant la position des gens. Quand il s'agissait de mariage, les époux envoyaient du vin au curé qui les unissait. On appelait ce vin, le "vin de noces". Dans certains diocèses, tels que ceux d'Angers, d'Amiens, etc., on bénissait le lit nuptial. Le prêtre mêlait ensemble, dans une coupe, du vin blanc et du vin rouge, comme symbole de l'union des conjoints ; puis, après l'avoir béni, il présentait la coupe au mari et à la femme qui la vidaient alternativement.
Dans plusieurs parties de l'Anjou, cette cérémonie se faisait avec quelques changements. Ainsi, dans le Saumurois, le prêtre bénissait du pain et du vin qu'on remettait au maître-queux, qui en faisait une excellente rôtie, divisée en trois parts, une pour le curé, l'autre pour les époux, et la troisième pour le reste de la noce ; ensuite il bénissait le lit.
Bulletin historique et monumental de l'Anjou
1869