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La Maraîchine Normande
1 février 2013

LA SOCIÉTÉ POPULAIRE DE SAINT-ARNOULT (76) EN 1794 ♣ 3ème et dernière partie

3ème et dernière partie

 

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VINGTIEME SEANCE - 20 fructidor (6 septembre 1794=

Nouvelle épuration des membres de la Société.
L'épuration commence par celle du président et du secrétaire.
Deux commissaires sont élus pour les interroger et prennent place au Bureau.
Les deux "épurés" montent ensuite à la tribune et son interrogés sur différentes époques de la Révolution et sur les principes qu'ils ont professés. Ils répondent "d'une manière satisfaisante".
"Tous les membres de la Société et des tribunes consultés ayant déclaré qu'ils sont dignes de la confiance publique, qu'ils ont toujours professé les principes de la Liberté et de l'Egalité, et qu'ils ont toujours montré un attachement particulier à la Révolution française et au Gouvernement républicain, il a été déclaré par le vice-président qu'ils étaient dignes d'être membres de la Société et sont descendus aux cris de : "Vive la République ! Vive la Montagne !"
Sont ensuite épurés et admis de la même manière vingt autres membres anciens et un nouveau. Huit anciens membres absents seront épurés aux séances suivantes.
En somme, cette nouvelle épuration n'a servi à rien, puisque, comme la première fois, pas un seul membre n'est exclu. La société se compose à ce moment de trente et un membres.

VINGT-ET-UNIEME SEANCE - 30 fructidor (16 septembre)

Malgré l'épuration qui vient d'avoir lieu, l'enthousiasme des premiers jours s'est considérablement refroidi ; aussi un membre monte-t-il à la tribune pour dénoncer avec indignation tous les faux frères qui ne respectent plus ni le règlement de la Société, ni les lois de la République.
La délibération tout entière mérite d'ailleurs d'être conservée pour montrer l'état des esprits dans nos campagnes après la chute de Robespierre. Nous la transcrivons ci-dessous, quoiqu'elle soit un peu longue.

Repos décadaires non observés
"Un membre voit avec peine que la majeure partie des membres de la Société et des citoyens ne célèbre plus les jours de décadi, tandis que le fanatisme renaît plus que jamais. Les jours de ci-devant dimanches et festes, non-seulement dans cette commune, mais dans la majeure partie de ce district sont observés au point qu'on ne voit personne travailler ; que les femmes se parent dans ces jours pour se promener au lieu de les employer à des travaux utiles ; qu'aucun cultivateur ne fait travailler dans ses terres ; que le peu qui s'en trouve qui se sont dépouillés des anciens préjugés ne peuvent trouver aucun ouvrier qui veuillent travailler dans ces jours, tandis que presque tout le monde travaille les jours de décadi sans assister à la lecture des lois ; que les femmes surtout montrent un tel mépris pour ces jours qu'elles s'attroupent pour travailler dans les rues, en dérision des patriotes qui assistent aux instructions publiques qui se font dans les temples, et à la lecture des lois ; que les pères et mères retiennent leurs enfants sans les envoyer aux écoles primaires dans lesdits jours des ci-devant festes et dimanches ; qu'ils les empêchent aussi de se rendre avec l'instituteur les jours de décadi à la lecture des lois et aux instructions patriotiques qui se font au temple ; que le mal sera bientôt à son comble si on n'y apporte un prompt remède."
En conséquence, il dépose une motion tendant :
1° A ce qu'il soit écrit à la Convention nationale pour l'inviter à rendre une loi qui force tous les républicains "à s'absenter de tout travail les jours de décadi et de fêtes civiques par elle instituées" ;
2° Que la Société écrive à la Municipalité pour l'inviter à donner à la fête du dernier jour de l'année toute la solennité possible ;
3° Que cette fête soit annoncée à son de tambour dans tous les carrefours et places publiques de la commune ;
4° Qu'il soit également annoncé que "tous pères et mères qui n'enverront pas leurs enfants aux écoles primaires les jours de ci-devant dimanches et fêtes, sans excuses légitimes, seront regardés comme suspects, et poursuivis comme tels et punis suivant la Loi" ;
5° Qu'il sera écrit à l'instituteur "afin de dénoncer ceux desdits pères et mères qui retiendraient leurs enfants lesdits jours" ;
6° Que la Municipalité sera invitée à faire prendre les armes à la garde nationale ledit jour 5e complémentaire aux fins de donner plus d'éclat à la fête.
Cette motion est adoptée à l'unanimité.

Rappel d'un sociétaire rayé
Sur la motion d'un autre membre, il est décidé qu'on écrira à D.... (rayé le 20 prairial), pour lui faire savoir que la Société le rappelle dans son sein, puisqu'il n'est pas plus "criminel" que d'autres membres qui ont travaillé depuis à pareils jours ; - mais que, cependant, il sera invité comme tous les autres à célébrer le décadi "jusqu'à ce que la Convention ait parlé".

Offrandes patriotiques
Sur la motion d'un membre, deux commissaires sont nommés pour presser les citoyens à faire leur offrande patriotique pour la fourniture d'un vaisseau, conformément à l'arrêté du département du ...

Acquisition de bustes
Un autre membre demande que la Société fasse l'acquisition des bustes de "Marat, Pelletier, Brutus et autres grands hommes en Révolution". - Remis à la prochaine séance pour trouver les fonds nécessaires.

Invitation à un officier municipal
Il sera écrit au citoyen M...., officier municipal, pour qu'il rende compte au peuple au moment de la fête prochaine de l'emploi des graines qui lui ont été délivrées par la Municipalité de Caudebec pour tous les habitants de la commune.
C'est ce jour que le procès-verbal constate que l'instituteur n'a plus que deux élèves pour chanter avec lui les hymnes patriotiques accoutumés.

VINGT-DEUXIEME SEANCE - 5e Sans-culottides (21 septembre 1794)

Lecture de plusieurs lettres et adresses.
Lecture est donnée :
1° D'une lettre de la Convention nationale annonçant que l'adresse envoyée le 23 thermidor dernier a été lue à la Convention "qui en a ordonné mention honorable et inscription au Bulletin" ;
2° D'une adresse de la Société populaire de Rouen du 20 fructidor aux habitants des communes rurales de la Seine-Inférieure, pour les prémunir contre les factions des ennemis de l'Etat et contre le fanatisme "qui semble relever la tête plus que jamais" ;
Il est ordonné que cette adresse sera lue pendant trois décades aux séances de la Société, et qu'une lettre de remerciement sera adressé à la Société de Rouen pour l'assurer que la "Société d'Arnoult" fait tout ce qui est en son pouvoir pour ramener les habitants "dans les principes du vrai républicanisme" ;
3° Du jugement qui condamne le nommé Danfernet dit Debures, ex-noble et ex-prêtre, à la peine de mort, pour "n'avoir point sorti du territoire de la République dans le délai fixé par la Loi et y avoir prêché le fanatisme" ;
4° De l'adresse votée à la précédente séance pour être envoyée à la Convention, et ainsi conçue :

Troisième adresse à la Convention nationale
"LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE
La Société populaire et républicaine de la comme d'Arnoult, département de la Seine-Inférieure, district d'Yvetot, canton de Caudebec,
LEGISLATEURS,
En anéantissant le calendrier romain, vous en avés établi un républicain. Dans le premier les jours du repos étaient les dimanches et fêtes.
Dans le second, vous avés ordonné que ces jours de repos seraient les jours décadaires, ceux représentant les 14 juillet 1789, 10 août 1792, 21 janvier et 31 mai 1793 et le dernier des sans-culotides.
Vous avés institué des fêtes pour chacun de ces jours et nous voyons avec douleur que vos Lois à cet égard sont absolument oubliées dans presque toutes les communes de ce district, même dans la plupart de notre département, notamment dans les campagnes.
Au mois de germinal dernier, nous vous annoncions avec bien du plaisir que le fanatisme était terrassé dans notre commune. Aujourd'huy, malgré nos efforts, nous sommes obligés de changer de langage et de vous dire que nos fêtes décadaires sont désertes, il ne se trouve presque personne à la lecture des Lois et aux instructions patriotiques qui se font dans ces jours. Tandis que dans les jours des ci-devant dimanches et fêtes romaines, on voit presque tous les habitans des campagnes, cultivateurs, marchands, ouvriers, etc., etc., cesser leurs travaux, se parer, se divertir et se promener, au lieu que dans les fêtes républicaines, ils osent travailler publiquement en quelque sorte pour insulter à Vos décrets.
Il y a plus, on voit des officiers municipaux de la plupart de nos communes chaumer les anciens dimanche et fêtes et faire travailler leurs charrues les jours des fêtes décadaires, et lorsque les Sociétés populaire leur en font des reproches, lorsqu'on leur dit que comme magistrats du peuple, ils doivent donner l'exemple de l'obéissance aux Lois, lorsqu'on leur fait voir Votre décret du ... qui institue les fêtes décadaires et les motifs de celui qui porte qu'il n'y aura que le 5e sans-culotides de fêté, ils soutiennent qu'aucun de ces décrets n'obligent impérativement à cesser le travail dans ces jours. Ils sont bien condamnables ces magistrats infidèles ; au lieu de prêcher l'obéissance aux Lois, ils donnent eux-mêmes l'exemple de la désobéissance.
Déjà, citoyens représentants, vous avez reçu des plaintes à cet égard entr'autres de la commune de Verneuil. Cette commune a sollicité de Votre sagesse une loi positive pour faire respecter les fêtes décadaires et pour atterrer le fanatisme qui lève la tête plus que jamais.
Si c'est une ci-devant ville qui vous a fait cette invitation, souffrés que, du fond des campagnes, quelques patriotes qui y restent imitent son exemple, persuadés qu'il faut pour consolider la République que tous ses habitans se réunissent dans les temples aux mêmes jours pour rendre à l'Eternel l'homage qui luy est du et attendre la lecture de vos décrets que nous nous ferons toujours un devoir de respecter et d'exécuter jusqu'à la mort.
"Vive la République !"
Cette adresse est approuvée à l'unanimité et il est décidé qu'elle sera envoyée dans le plus bref délai.

Fête du 5e sans-culotides - Invitation à la Municipalité
Un membre se plaint :
1° Que la Municipalité ne donne pas assez d'éclat aux fêtes décadaires et aux autres fêtes républicaines ;
2° Qu'à la fête de ce jour, à laquelle le Conseil général de la commune devait assister, ainsi que les autorités constitutées revêtues de leurs marques distinctives, il n'y avait qu'un seul officier municipal en écharpe.
Le lieutenant de la garde nationale se plaint aussi que la Municipalité n'ait pas envoyé de réquisition écrite aux capitaines, lesquels n'en ont pas donné à leurs subalternes, ce qui fait qu'il ne s'est présenté presque personne sous les armes.
Il sera écrit à la Municipalité pour que pareils faits ne se reproduisent plus.

Assistance aux séances
Sur la motion d'un membre, il est décidé que les sociétaires seront invités à assister plus régulièrement aux séances et que ceux qui sans excuse légitime seront trois décades sans y venir, seront rayés de la liste de la société.

Acquisition de deux bustes
Deux commissaires sont nommés pour l'acquisition des bustes de Marat et de Pelletier.

VINGT-TROISIEME SEANCE - 10 vendémiaire an III (1er octobre 1794)

Liste de présentation de notables
Il est procédé à la formation d'une liste de présentation de huit notables en remplacement des démissionnaires. Cette liste sera présentée au "Représentant du Peuple en mission dans le département".

Offrandes patriotiques
Un membre se plaint que les deux commissaires nommés pour recueillir les offrandes patriotiques pour la construction d'un vaisseau n'ont point encore terminé leur tournée. L'un des commissaires, présent, promet que ce sera fait bientôt.

VINGT-QUATRIEME SEANCE - 20 vendémiaire an III (11 octobre 1794)

Démissions
Lecture est donnée de deux lettres :
1° du Maire de la commune l'informant qu'il vient de remettre entre les mains de la Municipalité sa démission, ainsi que celle d'assesseur du juge de paix, pour cause d'incompatibilité et d'infirmités, et demandant au Président qu'il soit écrit à la Municipalité pour annoncer à son de tambour qu'à la séance d'aujourd'hui de la Société Populaire, il sera procédé au choix de deux candidats à présenter pour le remplacer ;
2° De l'agent nationale de la commune donnant également sa démission, vu ses infirmités et son grand âge.

Renouvellement du Bureau
La Société renouvelle d'abord son Bureau. Le chassé-croisé recommence, le président redevient secrétaire, et le secrétaire redevient président. Deux nouveaux membres occupent les sièges de vice-président et de secrétaire-adjoint.

Démission du Maire acceptée
La Société procède à la discussion des démissions annoncées et au choix des candidats destinés au remplacement.
La démission du Maire est acceptée par la Société et par le peuple des tribunes. Deux candidats sont choisis immédiatement pour le remplacer et sont proposés au Représentant du Peuple en mission :
1° Le citoyen A.... fils, "père de famille", bon patriote, qui a toujours montré son attachement à la Révolution, depuis environ trois ans qu'il habite cette commune ayant fait différents dons pour les défenseurs de la Patrie, choisi par le Conseil général de la Commune pour faire couper et convertir en cendres les herbes et arbustes, commission dont il s'est acquitté gratuitement ;
2° Le citoyen Pierre G.... père, "officier municipal, père de famille, ayant deux enfants au service de la République, l'un cavallier qu'il a habillé, monté et équipé à ses frais, et l'autre dans les charrois militaires."
Pour le cas où ce dernier serait choisi, la Société propose deux candidats pour les fonctions d'officier municipal :
1° Guillaume T.... ayant exercé pendant près de deux ans les fonctions de procureur de la commune ;
2° Pierre D.... ayant rempli pendant quatre ans celles de greffier de la Municipalité,
"Tous deux ayant donné des preuves de patriotisme, de zèle et d'intelligence à remplir leurs fonctions".

Démission de l'Agent national refusée
Quant à l'agent national, malgré qu'il se dise "accablé de maux de tête et de poitrine, et frère d'un officier municipal", sa démission n'est pas acceptée par la Société et le peuple des tribunes, "considérant qu'il ne paraît pas mal portant, qu'il agit journellement à ses affaires particulières, qu'étant garçon et sans aucun état, et jouissant d'un revenu honnête et d'un patriotisme reconnu, en état de remplir les fonctions d'agent national".

Feux dans les champs et ramonage des fours et cheminées.
De grands malheurs étant survenus dans les communes environnantes par suite de feux allumés trop près des maisons, la Société, sur la demande d'un de ses membres, invite la Municipalité à faire respecter sans délai "par ses gardes-messiers", la loi rurale du 16 octobre 1791.
Un arrêté devra être pris et publié à son de tambour, défendant de faire du feu à moins de cinquante toises des maisons, bois, bruyères, vergers, haies, meules de grains, de paille ou de foin. (Titre X de la loi.)
La Municipalité devra aussi sans retard procéder elle-même à la visite des fours et cheminées des maisons de la commune, comme l'ordonne le titre IX de la même loi.

Fête du 30 vendémiaire. - Invitation à la Municipalité
La Municipalité sera invitée à donner toute la pompe possible à la fête du 30 de ce mois "à l'occasion de l'évacuation entière du territoire de la République", et d'avoir soin de donner des réquisitions écrites à la garde nationale pour qu'elle se trouve sous les armes.

Offrandes patriotiques
Le président se plaint que H.... fils n'a point encore fait pour l'agent national de la Commune "la paire de souliers" qu'il a promise pour les défenseurs de la Patrie, malgré qu'il y ait près de six mois que cette paire soit commandée, et "qu'il ait toujours promis et que ses promesses soient restées sans effet."

Incompabilités
Le président est chargé de consulter l'Administration au sujet de certaines incompatibilités de places et de famille.

VINGT-CINQUIEME SEANCE - 30 vendémiaire an III (21 octobre 1794)

Offrande patriotique d'un vaisseau
Il est donné lecture d'un nouvel arrêté du département en date du 2, pour l'équipement d'un vaisseau "dont il a déjà été question dans l'arrêté du 19 messidor".
La Société, "vu le peu de personnes qui se rendent aux fêtes décadaires et aux séances de la Société Populaire", nomme deux nouveaux commissaires, lesquels, "avec les deux déjà nommés, se partageront la commune en deux pour aller dans toutes les maisons réchauffer le zèle et le patriotisme des habitans et les exhorter à contribuer par tous les moyens à la construction de ce vaisseau".

Magistrats superstitieux à dénoncer, Invitation à la Municipalité.
Il est également donné lecture d'une lettre de l'agent national du district en date du 14, invitant les Municipalités, agents nationaux et Sociétés populaires du district "à tenir strictement la main à l'exécution de la loi du maximum, engageant les Sociétés Populaires à faire passer sans délai les listes doubles de candidats pour les postes vacants de leur commune, et à dénoncer tous les magistrats superstitieux que le flambeau de la philosophie n'aurait pas éclairés, qui tenteraient à faire rétrograder l'esprit public en ne solennisant pas les décades avec la pompe qui doit embellir les fêtes de la Liberté".
La Municipalité est invitée à exécuter avec précision l'arrêté qu'elle prendra à cet effet.

Huile et chandelles introuvables
Un membre se plaint qu'il est impossible de se procurer ni chandelles, ni huile dans la commune, ni aux environs au prix fixé par la Loi, que "maintenant, la chandelle vaut quatre francs à cent sols la livre et l'huille à bruller, huit à neuf livres le pot".
Il dit qu'on pourrait se procurer de l'huile à meilleur compte dans les moulins. Il est désigné avec un autre membre pour se transporter dans les moulins à huile, soit du district, soit de celui de Cany, et y faire des "achats légaux" pour le compte de la Société, "proportionnés aux besoins de la commune qui contient 912 individus, à prendre sur le lieu parce que les cultivateurs membres de la Société désirant faire le bien de leurs concitoyens se chargent du transport desdits moulins en ce lieu".

VINGT-SIXIEME SEANCE - 10 brumaire an II (31 octobre 1794)

Plus que neuf citoyens présents
Le procès-verbal relate les noms des citoyens présents. Ils ne sont plus que neuf. L'enthousiasme se refroidit considérablement. Il est vrai que ce jour est la veille de la ci-devant fête de la Toussaint.

Nouvelle démission du greffier du juge de paix
Le secrétaire renouvelle encore une fois sa démission de greffier de la justice de paix du canton de Caudebec pour la section de la rive droite de la Seine, "vu qu'il remplit en même temps les fonctions d'instituteur salarié par la République" et que ces deux fonctions sont incompatibles d'après le décret consigné dans le Bulletin n° 73.
Il requiert la Société Populaire de désigner deux candidats pour le remplacer, "ce qu'il a signé".
Sont immédiatement désigné les citoyens :
1° Jacques H...., cultivateur à Arnoult, vingt-huit ans, marié, ayant fait plusieurs dons patriotiques pour les défenseurs de la Patrie, "et devant officier de la garde nationale de Gilles de Crétot, porte-drapeau du 9e bataillon de la 3e légion du district d'Yvetot" ;
2° Antoine A...., vingt-six ans, père de famille, "inscrit sur le registre de la garde nationale d'Arnoult où il réside depuis environ trois ans, ayant fait dons civique pour les défenseurs de la Patrie".
Le vice-président est désigné comme commissaire pour porter le procès-verbal à Yvetot entre les mains du Représentant du Peuple en mission.

VINGT-SEPTIEME SEANCE - 20 brumaire an III (10 novembre 1794)

Nouvelle démission.
D.... déclare sa démission de membre de la Société "vu qu'il est de garde des forêts nationales, et que par cet état il est obligé d'être à tous les instants, à toutes heures du jour et de nuit à ses fonctions, et y voyant une incompatibilité".
Il demande acte de sa déclaration et inscription au procès-verbal.
Le président demandera des renseignements auprès de l'Administration à ce sujet.

Quatre invitations de la Municipalité
1° Heure des séances
Un membre fait la motion que du 1er ... au 1er germinal, la lecture des lois ait lieu à neuf heures et demie du matin, "parce que, immédiatement après, la Société tiendra ses séances, vu que pendant ces six mois il est impossible aux membres de la Société et aux citoyens d'être présents, vu l'éloignement de leurs demeures du lieu où se font ces cérémonies".
2° Assistance aux fêtes civiques
Il demande aussi que la Municipalité soit invitée à prévenir les membres du Conseil général de la commune à être plus soigneux, d'assister aux fêtes civiques "sous peine d'être dénoncés", conformément à la lettre de l'agent national du district du 14 vendémiaire dernier.

Observance du décadi
Il demande encore que la Municipalité fasse fermer "le bureau de ses séances" les jours de décadi pendant la lecture des Lois, - qu'elle ne souffre pas "que son greffier tienne son bureau ouvert et donne audience à autant de citoyens qu'il s'en trouve", - qu'elle lui enjoigne de l'assister à ladite cérémonie "vu qu'un corps constitué doit toujours être accompagné de son greffier."

4e distribution de savon et de morue
Il demande enfin qu'il soit rappelé à la Municipalité qu'elle a reçu depuis longtemps une première livraison de savon, qu'elle a dû en recevoir une seconde ; et aussi une livraison de morue, non seulement pour les citoyens de la commune, mais aussi pour plusieurs communes voisines, - "et que c'est étonnant qu'elle ne se soit point occupée d'en faire la livraison au peuple", - et qu'il lui soit déclaré que "si dans le courant d'une décade elle ne distribue ces livraisons, la Société sera forcée de la dénoncer".
Cette quadruple motion est adoptée. La lettre à la Municipalité est faite immédiatement et signée par tous les membres présents.

VINGT-HUITIEME SEANCE - 30 brumaire an III (20 novembre 1794)

Tableau des membres de la Société
La Société s'occupe de la confection du tableau de tous ses membres "au désir de la Loi du 25 vendémiaire, troisième année républicaine, article 5".
La page est restée en blanc. Le tableau n'a jamais été fait.

VINGT-NEUVIEME SEANCE - 10 frimaire an III (30 novembre 1794)

Nouvelle démission
Il est donné lecture d'une lettre du citoyen D.... aîné, datée du 6, "par laquelle il expose que depuis que la Société est établie, il s'est toujours rendu aux séances le plus exactement possible où il s'est toujours comporté en vrai républicain, que se trouvant aujourd'hui dans l'impossibilité de s'y rendre avec la même exactitude vu son âge et pour causes légitimes, il donne sa démission."
Le procès-verbal ajoute laconiquement : "Il n'a rien été arrêté sur cette lettre".

TRENTIEME SEANCE - 20 frimaire an III (10 décembre 1794)

Nomination de deux commissaires pour rédiger une adresse à la Convention nationale
Un membre fait la motion qu'il soit fait une adresse à la Convention nationale pour la féliciter sur ses immortels travaux depuis le 9 thermidor et qu'il soit nommé deux commissaires pour rédiger cette adresse qui sera présentée à la Société dans sa prochaine séance.
Cette motion est adoptée ; le président et le secrétaire sont désignés comme commissaires.

TRENTE ET UNIEME SEANCE - 30 frimaire an III (20 décembre 1794)

Confection de l'adresse à la Convention nationale
Le président dit qu'il s'est occupé avec le secrétaire de l'adresse à la Convention, mais "qu'ils ont cru que les principes qu'elle contient sont ceux que professe la majeure partie des habitans de la commune". En conséquence, ils n'ont pas cru devoir le faire au nom de la Société seulement, parce qu'ils croient que "lorsque les citoyens composant les autorités constituées et les autres habitans présents à la séance en auront entendu lecture, ils s'empresseront de la signer".
Le secrétaire en fait lecture.
"Tous les citoyens présents à la séance se sont empressés de la signer et comme on avait laissé en blanc au nom de qui elle serait adressée, elle a été déffinitivement arrêtée et conçue en ces termes :

Quatrième adresse à la Convention nationale
"LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE
Les Officiers municipaux, les Membres du Tribunal de paix, la Société Populaire et les habitans de la commune de Saint-Arnoult, canton de Caudebec, district d'Yvetot, département de la Seine-Inférieure,
A la Convention nationale
REPRESENTANTS,
Les principes sacrés proclamés dans votre addresse au peuple français ;
La substitution du reigne de la Justice au reigne de la Terreur qui a enfanté tant d'atrocités ;
Votre addresse au peuple de la Vendée ;
Et le grand acte de justice que vous avés rendu le dix huit de ce mois en rappelant dans Votre sein les fidèles et courageux mandataires du peuple, Vous attachent à jamais tous les coeurs des Français et Vous feront admirer de l'Europe entière.
Ces dignes collègues qui, par amour pour la justice, l'humanité et la représentation nationale, méritèrent les haines et la vengeance de ces conspirateurs qui sous le masque du patriotisme avaient juré de Vous anéantir et avec Vous, notre Liberté, ne se sépareront point de ceux qui viennent non seulement de leur rendre un acte de justice, mais à toutte la Nation française.
Restés tous unis à votre poste, continués les actes de justice qui Vous animent, et nous Vous répétons le serment que nous avons déjà fait d'estre les fidèles observateurs de Vos décrets. Notre seul point de raliment est la Convention et nous n'en reconnaîtrons jamais d'autre, puisque tout autre serait destructif de la Liberté, de l'Egalité et de l'Indivisibilité de la République".
Le procès-verbal ajoute que l'original de cette adresse est signé de seize citoyens, dont le maire, six officiers municipaux, le secrétaire de la municipalité, l'agent national, le juge de paix et son greffier-instituteur. Le reste, c'est-à-dire cinq noms, représente les membres de la Société et les neuf cent douze habitans de la commune !

CONCLUSION

Cette quatrième adresse à la Convention, si différente de ton de ses devancières, constitue le chant du cygne de la Société.
Après cette séance, en effet, le registre s'arrête brusquement et se transforme en un livre de comptes d'un propriétaire avec ses fermiers.
La Société cessa-t-elle alors d'exister par ordre supérieur ? - ou bien continua-t-elle de se réunir encore quelque temps et les procès-verbaux ne furent-ils plus transcrits vu le peu d'assistants aux séances ? - Notre registre est muet sur toutes ces questions.
Il n'est pas douteux que la fermeture, à Paris, du Club des Jacobins, dut porter un coup funeste aux Sociétés affiliées des départements. De plus, la chute de Robespierre, la fin de la Terreur, avaient calmé les esprits et tempéré les ardeurs. Personne dans nos campagnes ne voulut plus passer pour un jacobin et pour un terroriste. Les chefs de la Société s'effacèrent volontairement et la Société elle-même disparut sans bruit et sans laisser d'autre trace de son existence que ce registre de délibérations que nous avons heureusement retrouvé.

La Frenaye, le 22 octobre 1911.

 

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