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La Maraîchine Normande
16 janvier 2014

UNE "RÉTRACTATION" SOUS LA TERREUR - M. BENOIST DELANOE, CURÉ DE CONGÉ PRES D'ALENCON (Orne)

UNE "RÉTRACTATION" SOUS LA TERREUR
M. Benoist Delanoë, curé de Congé près d'Alençon (Orne)

Par un matin de décadi, le brûle-gueule en bonne place, le chef surmonté d'un bonnet phrygien garni de la cocarde nationale, les mains dans les poches de sa carmagnole, le citoyen Pierre Maygnan, agent national de Congé, l'air satisfait et tout gonflé de sa vaniteuse importance, déambulait béatement, faisant sa tournée habituelle dans "sa commune".
Pour mieux tromper les "patriotes" il se donnait ces allures de "sans-culotte", car religieux comme toute sa famille, la Révolution le verra souvent fournir, ainsi que son père, un asile aux prêtres "réfractaires" qui feront plusieurs baptêmes dans la grange de sa demeure.

(Beaucoup de personnes à cette époque, afin de détourner les soupçons, affectaient semblables sentiments. Il en était ainsi notamment dans les maisons d'Aché, du Val, de Pontchalon, de la Guérivière, où l'on cachait les prêtres qui y exerçaient en secret. Dans ces deux dernières familles, en particulier, sous les dehors d'un profond attrait pour la Révolution, mais en réalité pour mieux cacher leur attachement à la religion, on donnait volontiers asile aux prêtres traqués, ce qui faisait dire plus tard de cette dernière demeure : "Là, on était tout à la fois, Dieu et diable".)

C'était, d'après le jargon révolutionnaire de l'époque, le 30 germinal an 2, ou pour parler plus humainement, le samedi 19 avril 1794.
On était en pleine Terreur !
Passant devant "la cy-devant" église, superbement dénommée "le temple de la raison" par d'intelligents citoyens, libres et conscients, quelle n'est pas sa stupéfaction d'y voir, affiché sur la grande porte un immense placard aux allures provoquantes !
Intrigué il s'approche, et lentement se met à lire ce libellé dont, plus vivement que lui, nous allons prendre connaissance :

Rétractation du citoyen Benoît Delanoë, prêtre, originaire de la paroisse de St-Martin-l'Aiguillon, ci-devant vicaire des Ventes-de-Bourses, et depuis la Révolution, curé constitutionnel de la paroisse de Congé, département de l'Orne, district d'Alençon, canton de Radon.
Citoyens,
En prêtant le serment prescrit aux ecclésiastiques fonctionnaires publics, je l'avoue, mais trop tard, je suis tombé dans une multitude d'erreurs condamnées formellement par l'Église.
En acceptant la place du sieur Lavallée, seul légitime curé de la paroisse de Congé, j'ai commis la plus grande des injustices.
Je me suis rendu coupable du crime affreux de l'INTRUSION ; en reconnoissant l'évêque INTRUS, je me suis séparé de l'église catholique. Je suis tombé dans le SCHISME. Je l'ai réalisé en lisant sa lettre pastorale.
Persévérant dans mes erreurs sans vouloir me rétracter dans le délai accordé par le Souverain Pontife, j'ai encouru la CENSURE et l'IRRÉGULARITÉ.
Manquant donc de pouvoirs et de juridiction, toutes les absolutions que j'ai données sont nulles, EXCEPTÉ A L'ARTICLE DE LA MORT ; tous les mariages que j'ai bénis en qualité de curé constitutionnel de Congé sont INVALIDES de plein droit ; tous les actes du saint ministère que j'ai exercés sont autant de nouveaux crimes.
Pour remédier donc à tant de maux, je conjure au nom de Dieu ceux qui auroient reçu de moi ces deux sacrements de se pourvoir au plus tôt par devant les ministres catholiques, prévenant surtout ceux qui se sont adressés à moi pour le mariage, dans la paroisse de Congé et de Valframbert, qu'ils sont obligés, en conscience, de se partager (1), jusqu'à ce qu'ils aient fait réhabiliter leurs mariages.
Pénétré de la plus profonde douleur d'avoir tenu pendant trois ans une conduite si peu chrétienne et si scandaleuse, je rétracte formellement le serment que j'ai eu la lâcheté de prêter ; je réitère solennellement celui que j'ai fait au baptême de vivre et mourir dans l'église catholique, apostolique et romaine.
Je proteste devant Dieu, devant les hommes, que je ne veux plus désormais reconnoître pour le spirituel d'autre autorité que celle de l'église romaine ; que je veux toujours être uni à son chef visible, et ne regarder désormais pour mon légitime évêque que M. d'Argentré et ses successeurs canoniquement élus et institués, à qui dans mon ordination j'ai promis respect et obéissance.
Tels sont les principes religieux dont j'aurois toujours du faire profession et dont j'ai eu le malheur de m'écarter pour suivre les dangereuses impulsions d'une aveugle concupiscence, séduit par les faux raisonnements d'une philosophie mensongère.
Revenu à Dieu, à l'Eglise, à mon devoir, je suis dans la disposition de prendre tous les moyens possibles pour réparer tous les maux, torts et scandales dont j'ai été la cause, MEME PAR L'EFFUSION DE MON SANG, s'il en étoit besoin.
De tous ces maux et scandales je demande à Dieu pardon du plus profond de mon coeur ; pardonnez-le moi aussi, citoyens, je vous en supplie.
Implorons tous avec confiance les puissans secours du Ciel dont nous avons un si puissant besoin pour rester fidèles à notre vocation ; soumettons-nous toujours avec joie aux tribulations que le Seigneur pourra nous envoyer, et n'oublions jamais que ce seroit l'outrager que de chercher à nous soustraire au malheur par le crime.
Revenez tous, à mon exemple, et Dieu sera glorifié.
Mourons pour lui comme il est mort pour nous.
Du lieu de ma retraite, ce 20 mars 1794.
LANOE, prêtre.

Sa lecture achevée, agité et mécontent, du moins en apparence, à cause des regards inquisiteurs et dangereux de "patriotes" toujours à craindre, le citoyen agent rentre chez lui, et là, sans se presser, alors pourtant que toute négligence de sa part à signaler un tel factum pouvait lui être fatal, il écrit à son collège d'Alençon la lettre suivante qu'un espress ! remettra, de sa part, le lendemain seulement, à son destinataire qui, lui, en prendra aussitôt connaissance.

"De Congé, ce 1er floréal an 2 de la Rpb.
L'agent national de Congé à l'agent national près le district d'Alençon,
Républicain,
Je t'écrit celle cy pour te prévenir que samedy decady 30 germinal, ayant passé devant la porte de notre église cy devant, jay trouvé un placart affiché à laditte porte concernant une rétractation du serment prêté par le citoien Benois Lanoë, cy devant curé de notre commune, concernant ces mots quil déclare au citoien de ma commune que toute les absolution ainsy que mariage ou autre foncion quil ayt pu exercer depuis le serment prêté par luy mesme sont nulle et que cest autant de crime quil a commis, dont il prévien les citoien quil a marié tant dans la commune de Congé ainsi quand celle de Valframber, de se partagé jusqua ce quil naist fait réhabiliter leur mariage, et quil ne connoistra pas dautre evesque que Duplessis Dargentré et ces successeur canoniquement élus et institués à qui dans son ordination il a promis respect et obéissance.
Sur un pareil atentas je crois de mon devoir te prévenir de ce fait et le regarder comme un homme rebelle à la loy et en le cas destre mis en état darestation, mais netant plus dans ma commune depuis viron un mois, je ne puis pas te donner les rensaignement de sa personne.
Voila ce que je puis te marquer pour le présent.
Salut et fraternité.
Pierre MAYGNAN
Agt. nat."

De colère froissant cette lettre en proférant un horrible juron, le citoyen Jean-Jacques Chauvin (c'est le nom de l'agent national d'Alençon) "ardent patriote et pur sans culotte", fait prendre plusieurs copies du subversif et incendiaire placard ; il en expédie une au Comité de Salut Public et l'autre au Comité de Sûreté Générale, ce pendant qu'il dépêchait un express aux membres du Comité de surveillance de Congé, porteur d'une missive leur recommandant "de faire, dans leur commune, des recherches de Benoist Lanoë, ci-devant curé constitutionnel de Congé, et d'apposer les scellés sur ses meubles et effets."

Des estafettes partaient également pour Saint-Mars-l'Aiguillon et la Vente-de-Bourses pendant que, par ses soins, le Comité de Sûreté Générale et de Surveillance faisait placarder dans tout le District, contre le nommé Delanoë, un mandat d'arrêt ainsi libellé :
"Convention Nationale - Comité de Sûreté Générale et de Surveillance.
Du Quartidi floréal, l'an 2e de la Rép.
Le comité arrête que Benoist Delanoë, curé de la commune de Congé, canton de Radon, district d'Alençon, sera saisi en quelque lieu il sera rencontré, conduit par la gendarmerie nationale de brigade en brigade dans les prisons de la Conciergerie à Paris, et que la copie de sa rétractation certifiée par ce Comité de surveillance d'Alençon sera envoyée à l'accusateur public près le tribunal révolutionnaire pour être dirigé toutes poursuites convenables ; que les scellés seront apposés sur les papiers suspects et qui seront pareillement envoyés à l'accusateur public dudit Tribunal ..."

Malgré cette activité et ce zèle, les perquisitions faites à Congé restent sans effet.
Ce sont les membres du Comité de Surveillance de cette commune qui, par la plume de l'un d'eux, va nous l'apprendre dans une lettre à Jean-Jacques Chauvin :
"Républicain, Je t'acrit cette lettre pour répondre à celle que tu nous a envoyée par laquelle tu nous demandes que nous fassions les recherches dans notre commune de Benoist Lanoë ci devant curé constitutionnel de Congé.
D'après les recherches par nous faites, nous certifions et attestons qu'il n'est point dans notre commune.
Tu nous mandes de mettre les scellés sur lé papié et autres effets qui peuvent estre dans son domicile.
Nous certifions qu'il n'y a plus rien dans son presbitaire ; par conséquent, ajoutent-ils avec une pointe d'ironie, il nous seroit inutile d'y mettre les scellés.
A Congé, ce 2 floréal an 2. Salut et fraternité."

Etait-on plus heureux à Saint-Martin-de-l'Aiguillon ?

Un gendarme de la résidence d'Alençon, le citoyen Nanot va nous l'apprendre dans son procès-verbal où "il certifie s'être transporté, en vertu des ordres du citoyen Chauvin, en la commune de l'Aiguillon, aux fins de remettre un paquet adressé par ce dernier au Comité de surveillance de ladite commune."
Ayant remis son pli, il commence ses perquisitions, mais "après plusieurs recherches et démarches néssésaires, accompagné des membres dudit Comité, ils n'ont rien trouvé
Sur quoy le dit gendarme recomende au susdit Comité de ne rien négliger pour de nouvelles recherges dans la ditte commune, ainsy que d'en adresser procest verbal à l'agent national d'Alençon, ce à quoy ils se soubmettent et s'engagent."
Tenant à leur "engagement et soubmission", les membres se transportent chez le père du récalcitrant Lanoë ; transport inutile et infructueux, ils font chou blanc.
Ecoutons-les informer de leur insuccès le citoyen Jean-Jacques Chauvin :
"Nous, membres du Comité de Surveillance de l'Aiguillon, au reçu de ta laitre, nous sommes transportés chés le citoien Benoist Lanoë, père du ci-devant curé de Congé.
Après les perquisitions les plus exactes dans tous les bâtimens dudit Lanoë, nous n'avons pu découvrir ledit Lanoë, prêtre ; mais avons néanmoins apposé les scellés sur deux armoires que nous avons trouvé dans les bâtimens.
Le cachet porte les lettres I.M.R.
Ensuite nous avons interpellé François Lanoë, oncle dudit prêtre, à nous dire où étoit son neveu, lequel nous a répondu ne l'avoir point vü depuis plus d'un mois."

Cette est assez explicite, et marque suffisamment le zèle et la bonne volonté des membres du Comité de l'Aiguillon ; toutefois le président de ce Comité ne s'en contentera pas, et pour accentuer son civisme, il enverra à l'agent national d'Alençon une lettre libellée à peu près dans les mêmes termes que celle que nous venons de lire, et qu'il terminera en "assurant son collègue qu'il mettra tous en oeuvre pour découvrir le fanatique."

Introuvable à Congé, à "l'Aiguillon", comme l'on disait alors, le "fanatique" Lanoë se sera peut-être réfugié aux Ventes-de-Bourses, lieu de son ancien vicariat ?

Alors qu'il se cache bien, car, en même temps que les "perquisitions les plus exactes" se faisaient dans ces deux premières communes, le gendarme Desmarets, sans crainte de la fatigue, bravant les ténèbres et le sommeil, accourait aux Ventes-de-Bourses, "à 1 heure après minuit", avec mission de découvrir et d'arrester le fameux Lanoë et le conduire à la maison d'arrêt d'Alençon".

Le conduire à la maison d'arrêt, ce sera facile ; le trouver, ce sera plus dur.
N'importe ; en fin limier, Desmarets s'adresse de suite "chez le citoyen Leboul, secrétaire de la commune, et l'interpelle à lui dire s'il avoit quelque connoissance où pouvait être le curé de Congé."
En bon Normand, celui-ci lui répond que "peut-être il pouvoit être chez le citoyen curé de l'endroit".
Vite, le brave gendarme "s'y transporte, y fait les perquisitions nécessaires", et naturellement, "ne trouve rien".

Aussi est-il reçu plutôt froidement par le citoyen Jean-Jacques Chauvin quand, au lieu du fugitif que celui-ci escomptait, le gendarme Desmarets, fourbu et piteux, lui remet ... le procès-verbal ci-dessus, en bonne et due forme, qu'il a rédigé de sa moins mauvaise écriture, après qu'il a eu soin de le faire enregistrer, collationner et signer par un de ses collègues, le sieur Deshayes, lequel le datait du 3 floréal en 3 de la République une, indivisible et inépuisable, ajoutait ce dernier, en sa qualité sans doute de secrétaire-greffier de la maréchaussée d'Alençon.
Ne pouvant s'emparer du "pigeon au nid", selon les expressions des agents nationaux d'Ecouché et du Merlerault qui, à l'occasion de "l'arrestation de prètres venus pour confesser et faire faire la pâque à des gens qu'ils avoient fanatisés", écrivaient à leur districts "qu'ils avaient trouvé les oiseaux ou pigeons au nid et les avaient mis en cage pour qu'ils ne puissent s'évader, les bêtes féroces n'étant pas apprivoisées", le citoyen Jean-Jacques Chauvin, en bon patriote et digne rejeton de sa rapace et sanguinaire marâtre, tentait du moins de faire main basse sur les biens du cy devant Lanoë.
"Sans désemparer", il envoyait, aux membres du Comité de surveillance de Congé, une nouvelle estafette leur enjoignant de "préciser si véritablement le citoyen Lanoë n'avoit plus aucun bien bien dans la commune."

Las sans doute de toutes ces inquisitions, le Comité prendra son temps pour répondre.
Ce ne sera que quinze jours plus tard qu'il enverra au sans-culotte Chauvin la lettre suivante où perce une pointe de mauvaise humeur.

"De Congé, ce 20 floréal an 2e de la Rép.
Le Comité de surveillance de Congé à l'agent national près le District d'Alençon.
Citoyen, en conformité de la lettre en date du 4 floréal qui nous enjoint de te vérifié si au cas ledit Lanoë ci-devant curé de notre commune n'a plus aucun effet dans notre commune, nous t'assuront que plusieurs individu ont acheté son bois et son fumier ; pour à légard de ses effet meubles il les a vendu au nommé Homé demeurant à Alençon, rue de la Juiverie, qui dit estre son cousin.
Nous ne pouvons te donner d'autre renseignement que ceux ci-dessus détaillé.
Ensuite tu nous enjoint de te faire passer son désignalement. Le voici : Ayant l'âge de 32 à 33 ans taille 4 pieds 4 ou 5 pouces, cheveux noirs, sourcils de même, les yeux bruns, nez long, bouche grande, menton plat, la face ovale, un cicatrice au-dessus de l'oeil droit, un autre cicatrice au milieu du front, une épaule haute.
Salut et fraternité".

Pendant qu'estafettes et express arpentent les routes, que pleuvent procès-verbaux, que les perquisitions "les plus exactes" et aussi les plus infructueuses succèdent aux "mandats d'amener" les plus terribles en quête de l'introuvable Delanoë, mettons-nous donc, nous aussi, à la recherche de ce vaillant confesseur de la foi, et plus heureux que ses ennemis, faisons plus ample connaissance avec lui.

Né, le 29 novembre 1759, à Saint-Mars-l'Aiguillon, de parents chrétiens, Benoist Delanoë ne tardait pas à donner des signes de vocations ecclésiastique.
Encouragé dans cette voie par ses pieux parents, et après de bonnes études d'humanités, il entrait bientôt au Grand-Séminaire où il donnait à ses maîtres toute satisfaction au double point de vue de la piété et du travail.
Petit, malingre, légèrement difforme, s'il ne payait pas de mine, il était loin de manquer d'esprit et d'à-propos.
Passant son examen de prêtrise devant son évêque, celui-ci, le voyant si chétif, se permit cette réflexion à son sujet : "Mon petit ami, avez-vous fait votre 1re communion ?"
Sans se laisser intimider (pourtant il était en présence de son évêque, et pour passer un examen), le séminariste de lui répondre avec une certaine crânerie qui se retrouvera plus tard dans toute sa vie et dans le ton de ses sermons : Monseigneur, interrogez-moi, et vous répondrez ensuite vous-même à votre question.
Tel était le prêtre qui, ordonné vers 1783, était envoyé comme vicaire aux Ventes-de-Bourses.
Nous avons sous les yeux plusieurs de ses sermons à cette époque, et déjà ils démontrent chez lui un prêtre de savoir et de doctrine.
C'est d'ailleurs ce que dira de lui plus tard un vicaire-général de Sées.
Mais n'anticipons pas.

Les premiers  bruits de la Révolution grondaient, troublant même les meilleurs esprits.
Notre jeune abbé ne fut pas à l'abri de ce vent pernicieux qui soufflait en tempête ; d'autant qu'il eut le malheur de tomber chez un curé qui, donnant dans les mauvaises doctrines, ne tardait pas à prêter le serment schismatique à la Constitution civile du clergé.
Soit ignorance, soit faiblesse, Benoit Delanoë imitait bientôt la triste conduite de son curé, en prêtant comme lui le fatal serment qui le fera tant souffrir dans la suite.
Son apostasie toutefois lui valut de devenir curé intrus de Congé où, en 1792, il ne craignait pas de venir usurper la place de deux saints prêtres ayant préféré l'exil à un repos et à une tranquillité qu'ils n'eussent pu obtenir qu'au prix d'un coupable serment : l'un dont nous avons dit un mot, était Jean Margault Lavallée ; le second, nommé Georges Louée, après avoir été pendant sept ans vicaire à Congé, venait de quitter cette paroisse pour fuir la persécution et ne tardera pas à succomber aux douleurs de l'exil.
C'est là que, pendant trois ans, Delanoë exercera, sans mission légitime, les coupables fonctions d'un sacrilège ministère.
Mais ce ne sera pas sans remords.
Honteux de son apostasie qu'il comparaît à l'héroïque attitude des abbés Loiseau avec ses trois compagnons massacrés à Gacé, et du capucin Valframbert martyrisé à Alençon, touché de l'arrestation, à Saint-Denis-sur-Sarthon, de six prêtres de Tours qui, plus courageux que lui avaient préféré l'exil avec tous ses périls à l'abandon de leurs devoirs, vaincu par les exhortations de nombreux confrères insermentés restés dans Alençon et aux environs, sinon à Congé même, afin d'y continuer en cachette un périlleux mais fructueux et consolant ministère, écoeuré des abominations commises par les soi-disant patriotes et des agissements scandaleux des intrus, notamment de son confrère voisin, sentant toute la fausseté de sa situation, Benoît Lanoë, coupable et repentant, allait bientôt revenir à ses devoirs.
Au commencement de 1794, ayant liquidé le peu de meubles et effets en sa possession, y compris "son bois et son fumier qu'il vendait à un sien cousin, demeurant dans la rue Juive, à Alençon", il quittait pour toujours sa paroisse.
Mais il avait à coeur de réparer le scandale qu'il avait causé aux vrais chrétiens par sa sacrilège conduite.
Aussi, un mois après son départ, une personne dévouée et sûre, peut-être un de ses confrères resté caché au pays, sinon lui-même de ses propres mains, affichait dans la nuit du 19 mars 1794, le placard que nous avons lu plus haut, qui réjouissait grandement les fidèles pendant qu'il ameutait contre son courageux auteur toute la horde révolutionnaire et impie et lui valait l'honneur d'être déféré au tribunal révolutionnaire.

Que devint-il alors ? Nous ne saurions le dire précisément.
Mais son nom ne figurant sur aucune liste d'émigrés, il est permis de croire qu'il resta, comme tant d'autres, cachés dans son pays, exerçant ça et là son dangereux ministères, après s'être toutefois réconcilié avec Dieu. Lui-même, d'ailleurs, dans de curieux sermons que nous donnerons plus loin, semble indiquer qu'il passa dans le pays les mauvais jours de la Révolution.
Et pourtant, par "le cicatrice qu'il portait au-dessous de l'oeil droit, et celui qu'il avoit au milieu du front, ainsi que par son épaule haute", d'après son "désignalement" envoyé au District par ses compagnons de "l'Aiguillon", il était facile à reconnaître.
Mais, grâce sans doute à la fidélité des personnes qui le cachaient, jointe aux précautions de prudence qu'il prenait, il ne fut jamais découvert, de sorte qu'aucun document, de nous connu du moins, nulle indiscrétion ne révéla, ni aux agents nationaux et autres sbires lancés à sa poursuite, ni à qui que ce soit, la trace de son existence à cette époque.
Toutefois, il nous est permis de croire qu'il resta longtemps caché chez son père, dans la vieille maison familiale, de Saint-Mars-l'Aiguillon.
Une nuit, entr'autres, on vint perquisitionner chez ce dernier.
L'abbé, qui se trouvait là, dormait profondément, insoucieux du danger.
Vite son père le réveille, et pendant qu'il parlemente avec la patrouille, l'abbé, à peine vêtu, fuyait au plus vite en sautant par une fenêtre donnant sur la campagne, alors qu'une de ses soeurs le remplace dans son lit afin de déjouer les recherches défiantes des perquisitions.
Cette fois encore, il était sauvé.
Si Delanoë avait des ennemis acharnés à sa perte, il avait aussi des amis influents qui aidèrent le prêtre proscrit à échapper à ses persécuteurs.
A Paris même, il serait possible qu'un de ses parents se fut efficacement employé à endormir la vigilance du Comité de Sûreté Général et du Tribunal révolutionnaire.

Ce parent est Jacques-François Desnos, avocat au Parlement de Paris, né au Grais, aujourd'hui du canton d'Ecouché, alors du canton de Rânes, le 22 août 1747, fils de Jacques Desnos et de Jeanne Le Maire, frère du curé d'Ambrières, et par conséquent oncle de notre Benoist Delanoë.
J.-F. Desnos, en effet, était intimement lié avec Mlle Anne Jourdeuil qui possédait une maison à côté de la sienne, rue des Amandiers, division de Popincourt, n° 14.
Or, parmi les hommes influents de l'époque, c'est-à-dire au beau temps de la terreur, si bien peint par l'auteur de "Les Dieux ont soif" (de sang), se trouvait le frère de cette demoiselle, Didier Jourdeuil, né en 1760, huissier à Paris, nommé membre de la commune du 10 Août, administrateur de la police qui siégea au Tribunal Révolutionnaire de Mars 1793 jusqu'au 7 juillet de la même année, ensuite adjoint au ministre de la guerre, arrêté, puis relâché après le 9 thermidor.
Rien ne prouve évidemment que Jourdeuil ait usé de son influence pour endormir le monstre dont il était lui même un des pourvoyeurs, en réussissant à faire placer le dossier de Delanoë au fond des placards qui contenaient les papiers accusateurs dans lesquels Fouquier-Tinville puisait jour et nuit pour fournir à la guillotine sa ration habituelle.
Mais cependant, en voyant que Delanoë ne tomba jamais au pouvoir de ses ennemis, on peut croire que l'administration de Paris se soit relâchée de sa sévérité première à son égard.

Enfin, vinrent des jours meilleurs, les églises se rouvraient peu à peu, le culte commençait à se restaurer.

Aussi, dès 1801, la petite paroisse de Longuenoë (petite paroisse du canton de Carrouges) était tout heureuse et fière de voir à sa tête un prêtre que l'administration diocésaine lui avait envoyé comme "pieux et zélé, doux et conciliant, laborieux, d'une saine morale, ayant de l'esprit et prêchant bien."

Ce saint prêtre, "né à Saint-Mars-l'Aiguillon le 29 novembre 1759, d'abord vicaire à Saint-Georges des Ventes-de-Bourses, puis curé intrus à Congé, non inscrit sur la liste des émigrés, ayant un certificat de son évêque, et qui avait rétracté son serment dans les temps les plus difficiles au péril de sa vie", le lecteur l'a reconnu, n'était autre que Benoît Delanoë.
Et pour qu'on n'ait aucun doute sur l'identité du pieux personnage, le juge de paix de Carrouges écrira au Préfet de l'Orne, le 7 vendémiaire an XI : "Lanoë, originaire de Saint-Martin-l'Aiguillon, avait prêté le serment, s'est rétracté environ deux ans après, et depuis ce temps s'est caché jusqu'à il y a environ un an qu'il exerça le ministère, et a fait sa promesse de fidélité à la Constitution."
L'ex-petit Séminariste d'autrefois prouvait bien qu'il avait fait sa 1re communion.
Ayant fait, en plus, de bonnes études théologiques, Delanoë justifiait les bonnes notes que ses supérieurs ecclésiastiques donnaient de lui, en prouvant "qu'il prêchait bien".
Ses nouveaux paroissiens s'en apercevaient quand à la fête de la Toussain 1801, réunis tous dans leur église qui venait d'être rouverte, ils l'entendaient leur dire "que tout en redoutant le ministère qui lui était confié au milieu d'eux, il l'acceptait cependant avec confiance, fondé sur l'infaillible apuy de Dieu fort qui fait briller sa toute puissance dans notre infirmité.
"Animé du même zèle qui embrasa mon prédécesseur, continue-t-il, je me propose d'entrer dans toutes ses vues pour travailler à votre salut, comme il auroit fait s'il eut vécu plus longtemps parmi vous.
N'oubliez donc jamais, fidel troupeau, les solides et saintes instructions, les religieux exemples qu'il vous donna autrefois.
De son côté, il "ose leur promettre qu'ils trouveront en lui un père tendre et compatissant aux besoins de ses enfans, un frère, un ami fidel qui les consolera dans leurs peines, un pasteur zélé pour les conduire dans les sentiers qui les mèneront au vrai bonheur.
Il ose aussi se flatter qu'il trouvera en eux toute l'amitié et l'attachement qu'un fidel troupeau doit à son pasteur, et surtout de la docilité à écouter et suivre les sages avis et les solides instructions qu'il ne cessera de leur donner.
Pour remplir toutes ces obligations les uns envers les autres, dont il célèbrent aujourd'hui la fête.
Si je ne craignois de vous ennuyer (continue-t-il, après plusieurs considérations sur l'exemple des saints qu'il propose à leur imitation), j'aurois bien d'autres réflexions à vous faire à ce sujet, mais je finirai en vous disant que vous ne pourrez vous sanctifier, vous sauver qu'en les imitant.
Il n'y a pas deux Evangiles. J.-Ch. a parlé à tous quand il a dit : "Si vous voulez entrer dans la vie, gardez mes commandements."
Je me propose de vous les expliquer clairement dans la suitte des instructions que je vous ferai avec la grâce de Dieu ..."

Ces instructions, notre zélé curé n'eût pas le loisir de les expliquer longtemps ni souvent à ses ouailles, car, l'administration diocésaine, manquant de prêtres, rattachait Longuenoë à la paroisse de St-Ellier, et députait Benoît Delanoë à une cure plus importante, St-Patrice-du-Désert.

Navré de quitter ses ouailles qui le vénéraient, le pasteur obéit à ses supérieurs, et en 1803, prenait possession de sa nouvelle église où il adressait à ses nouveaux paroissiens un discours qui mériterait d'être cité en entier, et dont nous ne pouvons donner ici que quelques extraits :

"De quel sujet plus digne et plus consolant pourrais-je vous entretenir aujourd'hui, que du merveilleux changement opéré par le Tout-Puissant en faveur de son peuple !
Les fêtes du Seigneur n'étoient plus célébrées, ses solennités étoient abolies, son temple étoit renversé, son sanctuaire profané.
Tout à coup une grande lumière brille, une voix éclatante retentit.
Bonaparte, comme un envoyé de Dieu, sort du fond de l'Egypte, reparoît en France, et nous fait entendre ces consolantes paroles : "Sortès de vos tombeaux, vos fers sont brisés, quittès les lieux d'exil, retournès dans votre patrie, allès réparer les ruines des temples".
Nous vîmes alors de toutes parts les temples du Seigneur sortir de leurs ruines, et les prêtres y accourir avec empressement ; les pierres du sanctuaire dispersées dans les places publiques, à la voix du nouveau Cyrus viennent se placer et élever la maison du Seigneur ; la croix replacée sur le sommet y brille et répand ses rayons au loin ; le peuple y accourt et vient en foule s'y rallier, et il nous est permis de reparoître au milieu de vous pour vous porter des paroles de paix ...
Cette grâce insigne me fit désormais oublier tous mes malheurs, et plût à Dieu qu'elle vous fasse oublier tous les vôtres, en me plaçant parmi vous."
Et après avoir fait un tableau navrant mais fidèle de la religion à cette époque, où les fidèles ne pouvaient recevoir, si ce n'est en cachette et au milieu des plus grands périls, ni sacrement ni aucun secours religieux, il ajoute :
La seule idée de ces maux irréparables nous pénétrait de douleur, nous glaçait d'effroi et troubloit nuit et jour notre tranquillité.
Ne pouvant plus vous parler, nous parlions à Dieu pour vous.
Aussi ne craignez pas les effets du ressentiment et de l'esprit de vengeance de la part de ceux qui ont pleuré sur vos maux et prié pour vous ...
Loin de regarder comme nos ennemis ceux de nos frères qui, trompés, séduis ou égarés par un faux zèle ont été les instrumens des miséricordes de Dieu sur nous, nous les regarderons comme nos frères, puisqu'ils nous ont fourni l'occasion de manifester notre foi ...
C'est pour votre utilité, pour votre salut que Dieu nous a donné de souffrir pour la deffence de la religion.
Ne vous troublès point sur ce qui nous est arrivé et sur ce qui fait le juste sujet de notre joie.
C'est Dieu qui a permis tout cela, à cause de nos fautes à tous, et qui, comme toujours, a tiré et tirera le bien du mal ...
Non, mes frères, je ne puis déjà me refuser à la douce satisfaction de croire que vous serès tous mes amis par la suite, parce que je suis déjà le vôtre.
Aucun de vous ne m'a jamais offensé, et quelqu'ait été votre conduite dans la Révolution, vous ne trouverès en moi qu'un zèle mêlé de douceur pour vous éclairer ...
Je n'épargnerai ni peines ni fatigues ...
Avant de paroître parmi vous, plusieurs m'avoient manifesté le désir de m'y revoir comme un envoyé de Dieu.
L'accueil que vous me faites aujourd'hui est déjà pour moi une preuve que vous ferès tous les sacrifices pour m'y conserver, tout ouvrier étant digne de salaire ; j'aurai droit à une honnête suffisance, et j'aime à croire que chacun y contribuera selon ses facultés ; autrement, vous vous feriez beaucoup plus de tort qu'à moi-même, étant bien à même de plusieurs places très avantageuses.
Si je viens aujourd'hui parmi vous, ce n'est que par obéissance à la volonté des premiers pasteurs et par soumission aux arrêtés du gouvernement.

Il a "beaucoup regretté de quitter ses anciens paroissiens qui eux aussi le regrettent profondément. Ce qui peut calmer sa douleur, c'est qu'il espère trouver auprès de ses nouvelles ouailles la même docilité et la même bienveillance. Il vient d'ailleurs au milieu d'eux comme un ami et un père qui ne leur demande ni leurs biens ni leurs richesses, mais leurs âmes".
Puis après avoir fait à Dieu une émouvante amende honorable, il termine par une éloquente prière pour "le Chef de l'Église, Pontife vénérable suscité par Dieu pour être le régénérateur de la terre, pour la paix et la gloire de son Église", pour "Bonaparte, ce jeune héros appelé par le Tout-Puissant à sauver la France et à être le pacificateur du monde", pour les consuls, pour toutes les autorités qui gouvernent, sans oublier les fidèles ici présents et confiés à ses soins".

Benoît Delanoë ne resta qu'une dizaine d'années à peine à Saint-Patrice, car le 29 décembre 1812, il était transféré à Menil-Scelleur.
L'Annuaire de l'Orne de 1821 nous le montre encore dans cette paroisse à cette époque ; puis, chargé d'années, de mérites et aussi d'infirmités, il se retirait à Sainte-Marie-la-Robert, où, après avoir fait une fondation pieuse en faveur de sa paroisse natale, il mourait le 15 janvier 1835, âgé de 76 ans.

Telles sont les quelques notes, bien incomplètes et très imparfaitement utilisées, que nous avons pu recueillir sur ce saint confesseur de la foi qui répara si bien ses quelques moments de faiblesse, qu'on serait tenté de lui appliquer, sans les justifier, les vers du poëte :
Du devoir il est beau de ne jamais sortir,
Mais plus beau d'y rentrer avec le repentir

H.-M. LEGROS
Curé d'Arconnay
Annales Fléchoises et la Vallée du Loir
Janvier-Décembre 1914


(1) D'eux-mêmes, les paroissiens qui, en ces temps malheureux, étaient forcés lors de leur mariage ou du baptême de leurs enfants, de se présenter devant les curés constitutionnels, J.M. Mignon pour Valframbert et Benoît Delanoë pour Congé, ne se tenaient pas pour satisfaits, et en cachette allaient trouver les prêtres insermentés et non jureurs, qui n'abandonnèrent jamais, même au plus fort de la terreur, ces pays, et les priaient de consacrer leur union et de baptiser leurs enfants.
Nous permettra-t-on d'en citer un exemple :
Jean-François Lemarié, fils du fermier de la Touchardière, s'était marié à Gabrielle Ruel, de la Grange, le 24 floréal an IV (14 mai 1796) devant l'officier civil.
Voulant régulariser leur union, les deux conjoints se rendent à Alençon un Jeudi, jour de marché, pour leurs affaires. Celles-ci terminées, ils se rendent séparément dans une maison de la place à l'Avoine. Jean, arrivé le dernier, attache son attelage à la porte et entre dans la maison, en tenue de charretier, le fouet sur l'épaule, de façon à écarter toute défiance. Un prêtre, habillé en civil, les attendait. Il confessa les jeunes gens, reçut leurs serments et bénit leur union.
Deux ans et demi plus tard, le 2 pluviôse an VII (21 janvier 1799), une fille leur naissait, Madeleine Gabrielle ; ils voulurent pour elle le baptême et le lui firent administrer par un prêtre proscrit, caché dans le Logis du Val (ancienne maison disparue vers 1880). Le prêtre, pour détourner l'attention, était déguisé en peintre revêtu de la grande blouse blanche propre aux gens de ce métier. (Recueilli par l'auteur de ces lignes, de la bouche des descendants de ces familles, qui conservent une tasse ayant appartenu à leur bisaïeulle, Gabrielle, la mariée de 1796. Ce vase porte l'inscription suivante : "Je suis à Gabrielle Reul (Ruel), femme de Jean Lemarié. Fait le 10 juillet 1798. (Manuscrit de Mlle Jouvencel).

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Commentaires
S
Malheureusement, je l'ignore ; en vain, j'ai cherché un peu partout et les Archives Départementales de l'Orne ne proposent rien dans ce domaine.
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C
savez vous ou on peut trouver les manuscrits de mademoiselle Jouvencelle<br /> <br /> merci
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S
Merci, Guillaume, pour cette information.
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G
Je crois que la photo de l'église n'est pas la bonne. En effet, Congé sur Orne n'est pas le Congé de Valframbert (en effet, c'est une commune qui a été annexée par Valframbert en 1839)
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