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La Maraîchine Normande
10 août 2012

MASSACRES A REIMS LES 2 ET 3 SEPTEMBRE 1792

 

MASSACRES A REIMS LES 2 ET 3 SEPTEMBRE 1792

 

cathédrale de Reims

 

Dans cette ville encore plus qu'à Paris, à la même époque, le crime a un caractère et des circonstances qui font frémir.

Lors de la première levée en masse, le rendez-vous était Soisson : de ce camp partaient des bataillons pour aller contre les Prussiens ; toutes ces troupes traversaient Reims, où le général Duhoux les passait en revue. Il n'y avait aucun détenu dans cette ville. Le 2 septembre, une vingtaine de soldats de nouvelle recrue, dont plusieurs n'avaient pas encore l'habit d'uniforme, suivis par quelques mauvais sujets, se portèrent au bureau de la poste aux lettres pour s'emparer du citoyen Guérin, directeur, et du nommé Carton, son facteur, sous prétexte de royalisme et comme soupçonnés d'avoir brûlé des assignats qu'ils avaient volés. La Municipalité y envoya un détachement de grenadiers qui ne put empêcher qu'on ne les trainât à la Maison commune ; là on leur coupa la tête, qui fut portée en triomphe ; leurs corps furent mutilés et traînés par la ville ; les meurtriers dirent qu'il fallait brûler ceux des prêtres qui ne voulaient pas prêter serment. En conséquence, ils dressèrent un bûcher sur la place, et obligèrent tous les citoyens d'apporter des fagots.

Des paysans amenèrent l'abbé de Lescur à Reims pour prêter serment. Parvenu vers la Maison commune, il est arrêté : les assassins lui coupent la tête, et ils exercent toutes sortes d'horreurs sur son cadavre, avant de le jeter dans le feu. L'abbé Pacot, curé de St-Jean ; l'abbé Levacher, grand-vicaire, et le curé de Rilly, furent égorgés avec un rafinement abominable de barbarie : on jeta aussi leurs corps dans les flammes.

On chercha M. de Monrosier, ancien lieutenant du Roi à Lille et domicilié à Reims. On lui coupa non seulement la tête, mais auparavant les bras et les jambes, que chacun des meurtriers tira jusqu'à sa porte pour montrer à sa femme cet horrible spectacle. Heureusement l'infortunée était absente : mais son beau-père, municipal, fut obligé d'être témoin de l'assassinat de son gendre, M. de Monrosier. Le coeur se soulève à ce récit : est-ce bien en 1792, est-ce en France, que se passèrent des scènes aussi atroces ?

Il y avait sous les armes toute la garde nationale, d'environ cinq mille hommes : le Commandant général sollicitait la Municipalité de donner des ordres pour arrêter ces infâmes bouchers d'hommes. La Municipalité assemblée répondait : nous n'avons pas reçu d'ordres nous-mêmes. Les citoyens disaient : nous répondons que cinquante d'entre nous seulement suffiraient pour contenir ces scélérats, malgré environ 3 à 4000 recrus qui sont à Reims, quand même ceux-ci voudraient donner main-forte aux égorgeurs. (Mais ils n'avaient pas d'armes, et la garde nationale, au contraire, était très bien armée.

Le Maire, nommé Hurtaut, vieillard vénérable, fondait en larmes ; mais sa timidité naturelle et son âge le rendirent impuissant : d'ailleurs les Autorités constituées s'étaient laissé comprimer par le procureur de la Commune, Couplet, dit Baucour, homme inconnu à Reims, où il demeurait depuis fort peu de tems : c'était un ex-moine, liégeois réfugié, l'intrigant le plus dangereux, grand meneur de la Société populaire et partisan de Marat.

Dans de tels momens, le Procureur de la Commune aurait dû être à la Municipalité, c'était là son poste : mais, nommé électeur, il affecta de rester à l'Assemblée électorale, malgré les sollicitations les plus vives de venir à la municipalité : il ne répondait que par des défaites. Pourtant il vint haranguer les assassins, qui cessèrent leurs terribles fonctions à sa voix. Ils recommencèrent aussitôt. Le Procureur de la Commune avait-il reçu le mot d'ordre des égorgeurs de Paris ? On ne saurait en douter.

La garde nationale se retire, chacun rentre chez soi ; mais hélas ! le lendemain 3, les assassins reprennent leurs boucheries : ils vont par-tout obliger les bourgeois d'apporter du bois pour dresser de nouveaux bûchers. Nouvelle terreur ! l'on amène l'abbé Romain : à la vue du bûcher on lui propose le serment. Il déclare qu'il ne le prêtera pas, qu'il est tout prêt à mourir : on le jette tout vivant dans un brasier, et avec des fourches on attise le feu, tandis que des citoyens sont forcés d'aller chercher des fagots et de les placer autour du bûcher. Les cris horribles de la victime étaient couverts par les vive la Nation des scélérats : comme si la nation était capable et complice de pareilles horreurs !

L'abbé Alexandre, doyen de la Cathédrale de Reims, témoin du supplice de son collègue, déclara qu'il prêterait le serment. Les monstres ne l'en jetèrent pas moins dans les flammes à travers desquelles il agitait un bras en criant qu'il ferait le serment. Les cannibales (la révolution n'en a pas fourni de plus atroces), le retirèrent du bûcher pour jouir de ses convulsions. Ils poussèrent le rafinement de leur cruauté, jusqu'à aller chercher Heyberger son neveu, et ils le forcèrent à donner les fagots nécessaires pour le martyre de l'oncle ... Ce spectacle se passait toujours sur la place de la Maison commune où la Municipalité était assemblée, mais il n'y avait plus de force armée sur pied.

Grands Dieux ! quelle tâche nous nous sommes imposée, tout notre courage suffit à peine : poursuivons cependant. Le Procureur de la Commune restait impassible et neutre ; son substitut de même. Celui-ci était un ancien procureur de Rheims. On serait bien fondé à croire ces autorités initiées dans le complot. Le fait pourtant est que le camp de Soissons et les trois à quatre mille hommes de recrue à Reims, mirent la terreur dans cette ville ; mais nous persistons à signaler le Procureur de la Commune complice du massacre, par une obstination à refuser de requérir des ordres, son ministère lui en fesant un devoir.

Enfin, ce spectacle effroyable se termina par le supplice du nommé Laurent, ouvrier en serge : on fut le chercher dans son logis avec sa femme. La malheureuse fut présente à l'exécution : elle vit jeter son mari sur le brâsier, où il éprouva les tourmens les plus affreux. Elle attendait son tour à genoux, les mains levées au ciel. Les brigands s'amusaient d'avance des souffrances auxquelles ils se proposaient de la livrer ; elle se déclara enceinte. L'un des bourreaux dit : qu'est-ce que cela fait ? mais un cri général se fit entendre : il faut la visiter : on la reconduisit donc à l'hôpital pour faire cette visite. Par ce moyen, on gagna du tems, et elle fut sauvée.

On n'a jamais su les motifs de ce dernier forfait : Laurent passait à Reims pour un mauvais sujet, mais sa femme ! ... On répandit qu'il avait fait une liste assez nombreuse de ceux qui devaient être sacrifiés ; et qu'un marchand de tabac qui lui en avait refusé la surveille, était couché sur cette liste. Laurent l'avait menacé en lui disant : tu auras affaire à moi sous peu.

Eût-il été aussi grand scélérat que ses assassins, fallait-il le livrer aux flammes ? et les autres victimes ! ... c'est donc encore dix victimes qu'il faut ajouter au 2 septembre. Mais nous en revenons toujours là : eh quoi ! cinq mille citoyens sous les armes, immobiles ! une Municipalité reste dans l'inaction, demeure témoin de ce spectacle de cannibalisme ! les cris des malheureux, leur sang qui ruisselle, les membres palpitans de leurs cadavres, rien n'a pu électriser le peuple de Reims ! Un génie infernal s'était donc emparé de cette Commune, ainsi que celle de Paris ? Vraisemblablement le Procureur de la Commune avait reçu la circulaire signée Tallien, Sergent, Marat. Les habitans de Reims sont reconnus pour être doux et humains peu propres à figurer dans les scènes affreuses que nous venons de décrire avec tant de répugnance.

Après le 7 thermidor, on a guillotiné à Reims un nommé Souris, crieur de peau de lapins, et le nommé Leclerc, crieur de journaux, comme complices des massacres des 2 et 3 septembre. Il est probable qu'ils n'étaient pas les coupables. Le Procureur de la Commune s'est sauvé au moment de l'instruction.

Peuple de Paris, de Versailles, d'Orléans, de Reims, de Lyon, de Meaux, il n'est pas en votre pouvoir d'effacer les taches livides de votre histoire : mais il vous reste un moyen de prouver à vos contemporains et à la postérité, combien, les premiers, vous avez ressenti d'horreur pour ces massacres inouis ; c'est de livrer à la justice ceux qui les ont commandés, organisés, légalisés, pour ainsi dire.

On se plaint de la renaissance du fanatisme religieux. Les républicains gémissent en voyant l'opinion publique rétrograder chaque jour : eh ! à qui la faute ? Aux crimes qu'on a laissé commettre et à l'impunité dont jouissent encore aujourd'hui, les Magistrats du peuple qui, dans le tems, ont payé des bourreaux, ont inventé des supplices pour faire exécrer une révolution qui aurait pu se conserver si belle et si pure. Un père de l'Eglise a dit : ... Le sang des Martyrs enfante des chrétiens.

Disons : le sang des victimes de la révolution enfante la haine, alimente la superstition, intéresse en faveur des prêtres et des royalistes. La justice et l'humanité nous auraient valu l'attachement, le respect et les bénédictions de toute la terre. Hélas ! gémissons sur le passé, mais n'y retournons plus.

Histoire générale et impartiale

des erreurs, des fautes et des crimes

commis pendant la révolution française

Tome 4

Louis Prudhomme

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Commentaires
H
Merci de ces rappels qui sont souvent mis volontairement dans les flammes de l'oubli.<br /> <br /> <br /> <br /> Vivat Rex, et à Dieu soit.
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L
Tu fais très bien d'exhumer le travail de Prudhomme. Beaucoup d'historiens négationnistes payés par la république pour raconter des âneries comptent sur l'oubli de ce genre d'ouvrage, inconnu du grand public et pourtant écrit par un républicain. Il ne faut rien lâcher et fureter partout afin de bien montrer aux français d'où viennent leur drapeau et ce chant de haine censé symboliser la nation. La France est ou plutôt était un pays, la république est un système politique. Ce sont deux choses totalement différentes.
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La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
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