LE GENERAL MOULIN AU GENERAL EN CHEF TURREAU (Chollet)
LE GENERAL MOULIN AU GENERAL EN CHEF TURREAU (Chollet)
Du 6 Février 1794
Je viens de recevoir ta lettre qui m'annonce que n'es pas sans inquiétude sur le compte des généraux Cordellier et Crouzat. Je t'avoue que j'en suis très-inquiet aussi ; car enfin non seulement ils ne paraissent point au poste de Tiffauges mais encore je ne puis, par aucune patrouille ni découverte apprendre où ils sont retirés.
Le détachement de cinq cents hommes que tu m'as ordonné de placer à Tiffauge ne peut y ternir. Les brigands entourent ce poste journellement. Tu connais l'esprit du soldat sur la manière dont les brigands nous cernent ; tous tremblent, et je crains qu'à la plus petite attaque, ce poste ne nous soit enlevé avec beaucoup de perte.
Le commandant de Mortagne m'annonce que les brigands sont en force de l'autre côté du Longeron, ils viennent tous les jours l'insulter. Je ne puis renforcer ce poste pour le mettre à l'abri de toute attaque. Boucret avec sa brigade est à découvert à Chambretaud ; si tu voulais lui donner l'ordre de se rendre à Mortagne, nous pourrions nous secourir l'un l'autre.
Il ne faut pas se le dissimuler, les brigands sont plus forts qu'on ne se le persuade. Ils occupent Lasalle-de-Vihiers, les Gardes, Chemillé, Vezin, Jallais, Tout-le-Monde, etc. Le poste de Coron a été obligé de se replier sur Vihiers. Tu vois qu'ils sont autour de moi sur tous les points.
La position de Chollet étant difficile, la moitié de ma troupe bivouaque toutes les nuits, et l'autre est habillée et prête à marcher, mais le soldat se fatigue.
Depuis que je suis sur Chollet, je n'ai cessé de demander des cartouches à Saumur, je n'en reçois point et la moitié de ma garnison n'en a que sept à huit.
Je suis vraiment inquiet de Cordellier. Une fusillade assez vigoureuse s'est fait entendre ce soir du côté de Gesté. Je désire que ma lettre te parvienne."