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La Maraîchine Normande
14 avril 2012

LE CRIME NE PAIE PAS

 

Le crime ne paie pas : Pâris

 

 

Bien moins connu que Charlotte Corday – sans doute en raison de sa victime qui contrairement à Jean-Paul Marat et en dépit de deux stations de métro parisien demeure pour beaucoup aujourd’hui un parfait inconnu – Philippe Nicolas Marie de Pâris (1763-1793) partageait cependant avec la jeune Normande un tempérament tout aussi exalté et une dangereuse fascination pour les armes blanches qu’ils ne tardèrent pas à transformer l'un comme l'autre en une coupable activité contre les régicides.

Contrairement à une rumeur tenace, alimentée entre autres dans la littérature enfantine par le couple Kupferman dans Le Complot du télégraphe, nous savons désormais que Pâris ne réussit pas à gagner l’Angleterre après son crime atroce, mais fut finalement rattrapé par le sort qui lui était réservé depuis le début de la Révolution et auquel il avait réussi à échapper pendant de longues années.

C’est que ce jeune homme de bonne maison avait pu longtemps bénéficier en cette période cruciale de la coupable mansuétude des braves patriotes qui avaient pris les armes contre la tyrannie, malgré son implication répétée et prouvée dans un nombre invraisemblable de mauvais coups contre la Révolution.

Remontons à l’année 1789. À cette époque, Pâris est encore membre du corps des « Gardes du Corps », quatre compagnies d’élite attachées à la protection des personnes de la famille royale. Le fait qu’on ne pouvait entrer aux Gardes que lesté de ses seize quartiers de noblesse, mais qu’on était assuré d’en sortir les poches pleines de récompenses plus consistantes qu’un arbre généalogique, explique fort bien l’attachement fanatique que montrèrent aux Bourbons ces desperados de la monarchie.

 

 

C’est à eux qu’on doit, en pleine période de disette, le fameux « banquet » du 1er octobre 1789, pendant lequel fut piétinée la cocarde tricolore. Cette orgie imbécile, à laquelle participa le couple royal, peut presque être considérée aujourd’hui, comme le pot de départ des représentants les plus caractéristiques du parasitisme féodal à la croulante et dispendieuse monarchie française. De fait, une semaine plus tard, la foule des Parisiens criant famine, venue chercher à Versailles, « le boulanger, la boulangère et le petit mitron », s’emparait sans coup férir du Château. Lors de cet événement, les « Gardes du Corps », après avoir abattu sans sommation un malheureux ouvrier, provoquant de ce fait la charge furieuse de la foule, se ridiculisèrent, en s’enfuyant ou en se rendant en masse – au point de laisser Antoinette en péril de mort n’être défendue que par quelques laquais. En fait, à l’exception d’une poignée d’entre eux qui eurent le bon goût de se faire tuer, tous les autres mirent bas les armes sans panache et ne durent leur salut qu’à cette future vieille mule de La Fayette qui, réveillé sur le tard, arriva cependant à temps pour les sauver de la pendaison groupée, en exhibant l’un d’eux à une fenêtre du château, cocarde tricolore bien en vue et beuglant lamentablement « Vive la Nation ». Puis ce fut le retour triomphal à Paris, auquel prirent part les Gardes du Corps, désarmés, têtes basses, encadrés par la garde Nationale parisienne et houspillés par la foule. On imagine fort bien que le jeune Pâris dut être, tout comme ses compères, assez défavorablement impressionné par ces événements.

Les « Gardes du corps » officiellement dissous peu de temps après, ces gentilshommes désormais sans occupation continuèrent de grenouiller auprès des Capets et de mener une agitation factieuse.

 

 

La « Journée des Poignards » du 28 février 1791, durant laquelle ces sémillants jeunes gens qui s’étaient regroupés aux Tuileries en vue d’une prise d’armes furent désarmés sans peine par les Gardes Nationaux et une nouvelle fois houspillés par les Parisiens goguenards, ne sembla pas le moins du monde calmer leurs ardeurs. Désormais connus sous le ridicule sobriquet des  « Chevaliers du Poignard », ils s’entêtèrent dans de chimériques projets d’évasions (on les retrouve cochers et postillons lors de la fuite à Varenne) et redorèrent leurs blasons écornés pendant la journée du 10 août en ouvrant sans sommation le feu sur les sans-culottes assemblés, provoquant ainsi la sanglante bataille qui allait se terminer de manière funeste pour la monarchie et surtout pour les malheureux Gardes Suisses et domestiques du château, qui furent promptement égorgés par les vainqueurs de la journée, pendant que nos coquets gentilshommes – dont le dénommé Pâris – qui ce jour ne portaient pas d’uniformes se dispersaient tranquillement parmi la foule.

 

 

Enfin, après avoir participé à tant de mauvais coups, Pâris se décida à frapper plus fort encore, visant, pas moins, que cette mazette de Philippe-Egalité qui jouissait encore à cette époque d’un certain prestige, mais dont on devait découvrir quelque temps après qu’il n’était qu’un vulgaire ambitieux. Du reste, il était trop entouré pour être facilement atteint, et ce fut vers l’un des proches de celui-ci, Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, fils de l’ignoble persécuteur de Jean-Jacques soit dit en passant, que ce jeune désespéré tourna sa rage homicide. Gaillardement attablé à la table du sieur Février, cafetier de son état au Palais-Royal, Lepeletier prenait dans la soirée du 20 janvier, un repas bien mérité après avoir voté la mort du roi, quand il fut soudainement massacré à coup de sabre par Pâris, sous les yeux ébahis des badauds qui n’en demandaient pas tant. Une fois son crime accompli, ce furieux qui disposait visiblement de plus de cruauté que d’imagination, ne trouva rien de mieux à faire que d’aller tranquillement se « cacher » chez sa parfumeuse de maîtresse, sise quelques pas plus loin, place du Palais-Royal !

Finalement, ayant pris conscience que la République, quoique bonne fille, ne saurait souffrir qu'on assassinât ses conventionnels pour un oui ou pour un non, cette canaille décida de migrer vers l'Angleterre. Après un voyage sans hâte, sans crainte et sans remords, et quoique presque arrivé à bon port, il fut stupidement démasqué en faisant quelques emplettes au marché, où il se livra à un grotesque scandale d'ivrogne, insultant outrageusement la Révolution. Scandalisé d'un tel langage qui trahissait quelque peu son aristocrate, un marchand de lapins lui demanda, en vain, de modérer sa fureur, sous peine d’avertir la milice. Pris d’un accès de démence meurtrière, Pâris se saisit finalement d'un de ses pistolets et l'appliquant contre son crâne, fit feu à bout pourtant, apposant une fin sans gloire à une vie sordide.

La Convention gratifia l'héroïque marchand de lapins de 1200 livres dont on espère qu'il les convertit bien vite en biens nationaux arrachés au Clergé.

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