Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Maraîchine Normande
25 août 2014

UNE PANACÉE AU XVIIIe SIECLE - LA BOULE DE MARS OU BOULE D'ACIER

UNE PANACÉE AU XVIIIe SIECLE

LA BOULE DE MARS

apothicaire

Nos ancêtres, grands collectionneurs de recettes médicales, conservaient soigneusement dans leurs papiers ces réclames plus ou moins bizarres que les vendeurs de remèdes faisaient distribuer à domicile ou sur la place publique. Dans les campagnes, le chef de famille à son retour d'un voyage à la ville voisine, aimait à lire et relire au coin du feu ces belles promesses de guérison non seulement pour les siens, mais encore pour ses bestiaux. Mon ami M. Dujarric-Descombes, vice-président de la Société historique et archéologique du Périgord, a bien voulu enrichir ma collection de deux pièces très curieuses qu'il a trouvées entre les feuillets d'un livre de raison tenu par son trisaïeul Jean Merlhie, sieur de Lafon, né en 1711, d'une famille originaire de Lisle, en Périgord, bourgeois de Celles, paroisse faisant aujourd'hui partie de l'arrondissement de Ribérac. Il avait épousé en 1742 Jeanne Plumentie et mourut à Celles le 23 janvier 1776. Sa fille aînée, Jeanne épousa le 26 mars suivant Jean-Baptiste Dujarric, notaire royal à Celles.

La pièce qu'on va lire est un placard aux armes de France, sans nom d'imprimeur, mesurant 31 c. sur 21.

PAR BREVET DU ROI
Sur l'approbation de M. Bagard, Médecin du Roi et Président du Collège Royal de Nanci, chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, etc.
Le sieur Nicolas Anciaux, Bourgeois de Nanci, demeurant au haut de la rue Notre-Dame-Ville-neuve, fait, vend et distribue la véritable BOULE DE MARE (1) dite DACIER VULNÉRAIRE. Les vertus et effets de cette Boule sont merveilleux, tant pour le corps humain, que pour toutes sortes de bestiaux. Elle est très nécessaire dans les familles pour la guérison de toutes sortes de blessures, tant internes qu'externes, meurtrissures, morsures, coupures, brûlures, pleurésies, dislocations, fluxions, migraines, hémorragies, pertes de sang des femmes, hémoroïdes, rhumatismes, sciatiques, coups de fer et d'épée, ou duretés et enflures de rate, mal de dents ou d'oreilles.
Il faut mettre une bonne compresse et s'en étuver, se coucher du côté opposé au mal. Pour la colique l'on peut en boire tiède, pour les maux de mère également.
Pour les plaies, il faut prendre la moitié d'eau de fontaine, la faire chauffer un peu plus que tiède, dans laquelle on roulera ladite Boule, jusqu'à ce que l'eau soit noircie de la couleur de la Boule, la retirer et y ajouter moitié d'eau-de-vie, de laquelle on bassinera et étuvera la plaie ou contusion. Il ne faut pas laisser chesser [sécher] la compresse, avoir soin de l'humecter de temps en temps, sans la lever qu'au bout de deux fois vingt-quatre heures. Pour la migraine, il faut en tirer cinq ou six gouttes par les narines. Pour les maux de dents ou d'oreilles, fièvres, flux de sang excessif, on trempera un peu de coton dans ladite eau de Boulle, et on le mettra dans l'oreille où la douleur se fera sentir, et sur la dent. Pour les maux extérieurs, le malade sera couché du côté opposé au mal l'espace de 24 heures, et ensuite on le pansera, ainsi qu'il est porté ci-dessus, et en peu de temps il sera guéri. Il ne faut pas s'étonner si le malade perd beaucoup de sang le premier jour, puisque c'est une nécessité. Se servant de ce remède, il ne fait aucune suppuration ; c'est ce qui cause sa prompte guérison. Pour les angelures, il faut s'en servir aussi, y mettre une bonne compresse ; ladite Boule est généralement bonne à l'égard des bestiaux, comme chevaux, boeufs, vaches, etc., l'on peut s'en servir ainsi que pour le corps humain. Si ce sont des maux au-dedans, il en faut faire boire auxdits bestiaux, et en dehors en étuver la plaie telle qu'elle puisse l'être ; ladite Boule se fait de plusieurs grosseurs, il y en a de plusieurs prix.
Nous conseiller, premier médecin ordinaire de feu Sa Majesté le Roi de Pologne, certifions avoir visité et examiné en qualité de médecin ordinaire et stipendié de la ville de Nanci, les drogues et ingrédiens qui entrent dans la composition de la Boule vulnéraire noire, à Nous présenté par le Sieur ............... dont nous avons été satisfait, laquelle a été faite avec fidélité et bonnes drogues.
A Nanci, ce 3 janvier 1767. Signé BAGARD, Médecin du roi. Lu et approuvé, ce 10 février 1767.
Vû l'approbation, permis d'imprimer, ce 10 février 1767. DE SARTINE, Lieutenant général de Police de Paris.
Vû, permis d'imprimer et distribuer. A Tours, ce 20 janvier 1768.
Il est logé chez
LOISEAU.

(1) Je reproduis l'orthographe incorrecte de l'imprimé. On appelait aussi la Boule de Mars, Boule de Nancy ou de Molsheim.

La seconde pièce que M. Dujarric-Descombes m'a donnée et dont la rédaction est analogue à la première, mesure 18 c. sur 16 et ne mentionne non plus aucun lieu d'impression. Elle débute ainsi :

PAR PERMISSION DU ROY
Sur l'approbation de son premier Médecin.
Le Public est averti que la Veuve du sieur PERUCHOT, ancien Huissier en la Chambre des Comptes de S.A.R. demeurant à Nancy Ville-Neuve, proche le Pont Maujat chez le sieur Adam sculpteur, vent et distribue la véritable Boule de Mars, dite d'Acier vulnéraire.
Cette pièce est signée :
RENOLD, premier médecin du Roy.
Avec permission.

Bulletin de la Société Archéologique, Historique & Artistique.
LE VIEUX PAPIER
Quatrième année - Fascicule n° 18
1er mai 1903

On appelle boule de mars, un mélange de limaille de fer & de crême de tartre, réduit en consistance solide, & formé en boule, dont on se sert pour imprégner l'eau, ou d'autres liqueurs, d'une dissolution de fer par le tartre.
Pour faire ces boules, on prend une partie de limaille de fer & deux parties de crême de tartre pulvérisée ; on les mêle bien ensemble : on met ce mélange dans un vase de terre ou de fer ; on y ajoute de l'eau, ensorte qu'il soit comme une bouillie : on laisse ce mélange, en le remuant de temps en temps, jusqu'à ce qu'il soit presque sec ; on y rajoute encore de l'eau, & on le traite comme la première fois : on continue de le traiter ainsi jusqu'à ce qu'on s'apperçoive qu'étant presque sec, il ait une consistance & une ténacité approchante de celle d'une résine ramollie ; alors on le roule pour lui donner la forme de boule ; on enferme ces boules dans un nouet ; & quand on veut s'en servir, on les fait infuser dans l'eau jusqu'à ce qu'elle ait pris une couleur fauve.
L'infusion de la boule de mars est tonique, vulnéraire, discussive & apéritive ; on l'emploie à l'extérieur & intérieurement.
Le fer, étant dissoluble par presque toutes  les matières salines, est attaqué dans cette préparation par le tartre, qui le réduit en une sorte de sel neutre, lequel n'est point susceptible de se cristalliser : ce sel resteroit en liqueur, & formeroit un tartre martial soluble, qu'on nomme teinture de mars tartarifée, si l'on employoit les justes proportions de limaille de fer & de crême de tartre, & qu'on les traitât assez long-temps pour que la combinaison fût entière & complète ; on n'obtiendroit qu'une liqueur ou un magma, qu'on ne pourroit conserver en forme solide, & qui s'humecteroit continuellement. Il reste donc dans la boule de mars beaucoup de crême de tartre & de limaille de fer qui ne sont point combinés, & cela est nécessaire pour lui conserver sa solidité.
Il suit de-là, que l'infusion de la boule de mars est absolument de même nature que la teinture de mars tartarifée, & qu'on peut employer indifféremment l'une ou l'autre de ces préparations.

Dictionnaire de chimie contenant la théorie et la pratique de cette science
Pierre Joseph Macquer - Pierre-Théophile Barrois (Paris) - 1778

Publicité
Commentaires
La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
Publicité