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La Maraîchine Normande
13 août 2014

FLORAC (48) - SERMENTS ET MORT DE L'ABBÉ JEAN TOURNEMINE

SERMENTS ET MORT DE L'ABBÉ JEAN TOURNEMINE,

curé de Florac à la Révolution de 1789

Florac


(Article publié par l'abbé Albert Solanet, professeur au Grand Séminaire de Mende dans la Semaine Religieuse de Mende, 1910. Résumé dû à l'auteur).

L'abbé Jean Tournemine était curé de Florac au moment de la grande Révolution. Il prêta, le 6 février 1791, conditionnellement serment à la Constitution Civile du Clergé, le fondant sur ce que plusieurs députés de l'Assemblée Constituante, entr'autres le Président de la séance du 6 janvier 1791, Emery, avaient déclaré que par cette Constitution l'Assemblée nationale n'avait pas voulu toucher au spirituel, l'abbé Tournemine fit un serment purement politique. Ayant reçu le Bref du Pape Pie VI du 13 avril adressé au Clergé et aux fidèles de France, portant condamnation de la Constitution civile, il la lut, du haut de la chaire, le 22 mai 1791, avec la lettre pastorale de Mgr de Castellane qui l'accompagnait. Il refusa le même jour d'assister à l'Assemblée électorale chargée de pourvoir à la vacance des cures, en remplacement des curés qui avaient refusé le serment ou dont le serment n'avait pas été accepté.


Cette abstention et surtout la lecture qu'il avait faite du bref du Pape et de la lettre de son Evêque, le firent traduire devant le tribunal du district de Florac. Une enquête fut ordonnée, à la suite de laquelle l'accusateur public demanda l'incarcération de l'abbé Tournemine. Mais le commissaire du roi auprès du même tribunal fut d'avis qu'il n'y avait pas lieu de le punir pour ce motif de sa liberté et les juges prononcèrent son acquittement. L'enquête avait d'ailleurs aussi relevé que l'abbé Tournemire avait dissuadé plusieurs de ses confrères soit de prêter le serment schismatique, soit de demander l'institution canonique à l'évêque constitutionnel.


Le serment de l'abbé Tournemine n'était pas agréé de tout le monde. Le 28 juillet 1792, la municipalité de Florac se disant autorisée par le Directoire du district, manda le curé pour lui faire déclarer que son serment était défectueux. L'abbé Tournemine dit qu'il avait réservé le spirituel dans son serment. Cette déclaration fut envoyée à l'administration départementale. Pour se défendre, l'abbé Tournemine se plaint dans un acte passé devant notaire et plusieurs témoins que la municipalité de Florac n'avait pas qualité pour le rechercher sur son serment, que celui-ci avait été reçu par l'administration du district et qu'il était disposé à le réitérer dans la forme où il avait été donné. L'Administration du département décida que l'abbé Tournemine ferait à nouveau le serment devant l'Administration du district.


Le curé de Florac se présenta, le 6 septembre, devant celle-ci, réitéra le serment tel qu'il l'avait prêté une première fois et y ajouta celui que venait de prescrire (le 16 août 1792) l'Assemblée législative obligeant de jurer de maintenir la liberté et l'égalité ou de mourir en les défendant. Les termes de ce serment ne visaient pas le spirituel. L'Administration du district reçut ce nouveau serment de l'abbé Tournemine. Ce qui n'empêche pas la majorité des membres de l'Assemblée électorale de le considérer encore comme défectueux et de nommer un successeur à l'abbé Tournemine dans la personne du citoyen Soubal, vicaire à Trest.


L'abbé Tournemine attaqua cette élection pour vice de forme. Il fit valoir que l'Administration du district n'ayant pas jugé qu'il fallut opérer son remplacement, le procureur syndic du district n'avait pas, en conséquence, compris la cure de Florac parmi les cures vacantes. Or la loi du 17 octobre 1791 demandait que les assemblées électorales ne procèdent qu'à l'élection des cures portées comme vacantes par le procureur syndic du district ou du département. L'administration départementale reconnut valable l'opposition faire par le curé de Florac à la nomination du citoyen Soubal qui fut annulée.


A cette même époque, l'abbé Tournemine dut se défendre de l'inculpation de correspondre avec les émigrés. Une lettre dont l'écriture était contrefaite, datée du 5 août, que l'on prétendait lui être écrite par Fabre de Montvaillant, était arrivée à son adresse portant le timbre de Chambéry. Elle contenait le manifeste de Brunswick et l'annonce que deux armées ennemies allaient se rendre à Paris et une troisième en Bourgogne et à Lyon. La lettre fut saisie et le curé de Florac fut interrogé. Il répondit qu'il n'avait jamais eu de correspondance en Savoie et il ne fut pas autrement inquiété.


L'abbé Tournemine put donc continuer encore son ministère à Florac. Un décret du 21 avril 1793 avait encore aggravé les mesures contre les prêtres. Il portait la peine de mort à subir dans les 24 heures contre les prêtres qui seraient dénoncés pour cause d'incivisme par six citoyens du canton. Le Comité de surveillance de Florac fit arrêter l'abbé Tournemine qui, disait-il, "avait toujours été un personnage suspect et n'avait cessé de donner des preuves de son incivisme". L'arrestation est du mois de décembre 1793. Le 20 mars 1791 (30 ventôse an II) Châteauneuf de Randon, commissaire de la Convention en Lozère, décida qu'il serait jugé par le tribunal criminel du département. Mais l'accusateur public près de ce tribunal, Dalzan, craignant qu'à la faveur des récusations du jury, il ne fut acquitté et "n'échappât, écrit-il à Fouquier Tinville, à la punition, car certainement tu seras aussi bien convaincu que moi qu'il ne doit pas y échapper" le fit déférer au tribunal révolutionnaire de Paris. Le curé de Florac comparut devant une section de ce tribunal le 25 juin 1794 (6 messidor an II). Son acte d'accusation était dressé en ces termes : "Tournemine est un des ennemis de la révolution, agent direct de l'infâme Castellane, évêque de Mende (massacré le 9 septembre 1792 à Versailles). Il n'a pas tenu à lui que le département de la Lozère ne fût livré à toutes les horreurs de la guerre civile. Tournemine ne prêta le serment exigé par la loi que pour pouvoir servir les trames et complots de l'évêque de Rome et des autres conspirateurs qui voulaient annuler la souveraineté et la liberté du peuple, avec les armes du fanatisme. C'est lui, en effet, qui était le distributeur, le colporteur de tous les ouvrages destinés à corrompre et empoisonner l'esprit public. C'est lui qui lisait au prône les prétendues lettres pastorales et les prétendues bulles du Vatican, et qui défendait à tous les prêtres des communes environnantes de prêter le serment. Outre ces manoeuvres contre révolutionnaires, Tournemine entretenait encore des intelligences et correspondait avec les émigrés". Le jury conclut à sa culpabilité et les juges prononcèrent la peine de mort. Le curé de Florac subit la peine capitale le jour même de sa condamnation, 14 juin 1794.

Chroniques et mélanges
Tome II, 1909-1915
Société d'agriculture, industrie, sciences et arts du département de la Lozère

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