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La Maraîchine Normande
24 juin 2014

LAVAUFRANCHE (23) - IMPRESSIONS DU CURÉ DE LAVAUFRANCHE SUR LA PREMIERE ANNÉE DE LA RÉVOLUTION



IMPRESSIONS DU CURÉ DE LAVAUFRANCHE
SUR LA PREMIERE ANNÉE DE LA RÉVOLUTION

Les registres paroissiaux de Lavaufranche remontent à 1649. J'y ai remarqué des notes historiques dont la naïveté m'a paru curieuse, et, à titre de spécimen, j'en reproduis une, inscrite à la suite des actes de 1789 (Extrait du rapport de M. Autorde, archiviste de la Creuse, sur la situation des archives communales inspectées en 1906) :

"Les États généraux ont commencé cette année le 27 avril et ont été orageux dans le commencement, par les tracasseries de la noblesse et du haut clergé. Les esprits s'aigrissant de plus en plus, le roi, par le conseil des princes, de la noblesse et du haut clergé, a fait avancer des troupes de Paris au nombre de 25.000 hommes. Alors le peuple parisien, se voyant investi, et les États généraux sur le point d'être dissous, a pris les armes, le 12 juillet, à la nouvelle que le roi avait disgracié M. Necker (dans l'original, ce nom est écrit Necquer), premier ministre, l'idole du peuple français. Le peuple en armes s'est porté à la Bastille, l'a prise d'assaut, étant dirigé par les gardes françaises, en a saisi le gouverneur Lanney, qui avait commis une trahison en laissant entrer beaucoup de peuple dans une première cour, feignant de vouloir lui donner audience, et, ayant fait lever les ponts et fermer les portes, avait fait tirer le canon sur ce peuple sans défense ; il a donc été saisi, comme dit est, conduit à la place de Grève et assommé ; sa tête coupée a été portée au bout d'une pique ; le nommé Puget, masson (1) de la Bastille a eu le même sort que son commandant, le dit de Launay.


Le même jour a été encore massacré le nommé Le Fresselle (sic. Il faut lire de Flesselles), prévôt des marchands, dont les desseins ont été connus par une lettre qu'il avait écrite au gouverneur de la Bastille, et qu'il avait dans sa poche, quand on le saisit. Il paraît qu'on voulait faire mettre Paris à la raison, et que la troupe qui l'environnait y aurait commis bien des excès, si on n'eût prévenu tous les projets des grands. La troupe a eu ordre de s'éloigner de Paris, et elle a décampé le 20 juillet, emmenant avec elle beaucoup de princes, de grands seigneurs qui s'étaient mis sous son escorte pour fuir hors du royaume.


Il a eu, à l'occasion de la révolution qu'a occasionnée Paris par sa résistance, des réjouissances publiques par tout le royaume, et, le 30 juillet, il s'est répandu tout d'un coup une alarme générale dans tous le royaume : on a publié qu'il y avait des ennemis, que les Anglais y avaient fait une descente et y mettaient tout à feu et à sang. A l'effroi qu'a inspiré cette nouvelle a succédé de fermes résolutions de se défendre. Tout le royaume a pris les armes et on a compté onze cents milliers d'hommes armés pour la défense de la patrie. Peu à peu, on s'est rassuré ; on a établi des milices bourgeoises, qui se sont peu à peu disciplinés, pour le besoin, s'il se trouve, et sur la fin de cette année on a compté quatre cents milliers de soldats patriotes.


Le pain a été excessivement cher pendant toute cette année : le blé a constamment valu, depuis la moisson, depuis 12 livres jusqu'à 16 livres : le vin a été rare : il a coûté, après la vendange, 12 sols le pot ou 20 écus la pièce de cent pots.


La misère a été très grande, et, dans l'état d'anarchie où se trouve le royaume, pendant la tenue des États, il y avait tout à craindre pour une guerre civile ; mais les riches ont cherché à amadouer le peuple ; ils ont recherché son estime ; ils ont fait le bien, qui était peut-être hors de leur coeur. Par nécessité ou par vertu, ils ont fait des charités abondantes et l'ont amusé, tantôt par des fêtes publiques, tantôt par l'exercice des armes ; par des caresses et par une fermeté juste et raisonnable, on a contenu la tranquillité, et jusque là tout s'est bien passé.


Les bestiaux sont devenus à très bas prix ; vers le mois d'octobre, la viande se vendait six blancs et trois sols la livre à la boucherie, viande excellente ; et vers le courant de janvier 1790, elle a considérablement augmenté et elle se vendait cinq sols la livre.


Il est réglé que les privilégiés payeront les impôts comme le peuple, et j'ai été imposé pour les six derniers mois de 1789 à la somme de 18 livres 3 sous, ce qui est beaucoup plus que beaucoup d'autres curés plus riches, qui partout ont été imposés très modérément : voilà comme le mal va toujours aux malheureux."

 

signature curé de Lavaufranche



(1) Peut-être faudrait-il lire major de la Bastille : mais du Pujet, dont il semble être question ici, n'était que lieutenant du château de la Bastille, et il ne fut pas tué. Le major de la Bastille était Antoine-Jérôme de Losne de Salbray, qui, lui, subit le même sort que de Launay. N'y a-t-il pas eu confusion dans l'esprit du curé de Lavaufranche ?
Extrait :
Revue La Révolution Française
Tome cinquante-deuxième
Janvier-Juin 1907

Janvier 1793 : dernier acte signé par l'abbé Nicolas de Saincthorent.

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