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La Maraîchine Normande
22 février 2014

LA CHOUANNERIE D'OUTRE SEINE - "L'ARMÉE DE L'ARME AU BRAS" - GÉNÉRAL MALLET-BUTTINI DIT DE CRÉCY

LA CHOUANNERIE D'OUTRE-SEINE

Quoique les principaux champs d'action de la Chouannerie soient la Bretagne, la Vendée, le Maine, la Basse-Normandie, il y a lieu d'ajouter à cette liste de provinces, troublées par les guerres de l'Ouest, la Haute-Normandie, c'est-à-dire les départements de l'Eure et de la Seine-Inférieure.

Si la Chouannerie de l'Eure a été en partie traitée par Montier et légèrement esquissée par la Sicotière dans sa très importante étude sur le général de Frotté, celle de la Seine-Inférieure a été complètement passée sous silence, seul ce dernier auteur se contentant de dire, à la fin de son livre, qu'il existait au nord de la Seine des organisations peu importantes de Chouans dont l'ensemble fut dénommé ironiquement "l'Armée de l'arme au bras", complètement inactives, sous les ordres d'un baron Mallet de Crécy, qui s'était contenté de créer des cadres ouverts.
Cependant, nous lisons dans "L'avènement de Bonaparte" par Vandal : "En 1799, des bandes d'insurgés, tenant la Basse-Seine, interceptaient les convois de vivres remontant le fleuve et gênaient les approvisionnements de Paris."

 

SEINE INFERIEURE


D'où provenaient ces bandes ? D'outre-Seine ; de la région nord de ce fleuve : du département de la Seine-Inférieure.


Avant d'aborder l'étude, jetons un coup d'oeil sur cette région, compartimentée par de petits affluents enserrant des plateaux en partie couronnés de bois et même d'importantes forêts, terrain propice aux rassemblements, attaques et ruptures de combats si familiers au Chouans.
De l'Ouest à l'Est, entre l'embouchure du fleuve et celle de l'Andelle, les Pays de Caux et de Bray, avec leurs nombreux écarts, leurs cours de fermes quadrangulaires, dont les épais talus, dénommés fossés, garnis d'imposantes hêtrées se bastionnant réciproquement, limitent considérablement la vue et les champs d'action ; pays sillonné de nombreux cours d'eaux plus ou moins ravinés, s'écoulant tant sur le versant côtier de la Manche, que sur celui de la Seine.
Entre l'Andelle et l'Epte, le Vexin normand avec, à l'Ouest, la forêt de Lyons, l'une des plus importantes de France et à l'Est, une vaste plaine, parsemée de boqueteaux, traversée par la grand'route de Paris au Havre, sur laquelle se comptaient alors les centres habités.
Si géographiquement, la Seine-Inférieure se prêtait tout aussi bien que les autres départements de la Normandie aux embuscades et aux coups de main des Chouans, l'émigration ne pouvait y escompter le succès comme dans ceux de la Basse-Normandie.
En effet les nobles et les hobereaux de la Seine-Inférieure étant, ainsi que dans l'Eure, en très petit nombre, proportionnellement aux départements de la Basse-Normandie, leur influence sur les paysans s'en ressentait, et de plus, la piété religieuse des populations de l'Ouest étant moins vive à mesure qu'on se rapproche de Paris, la lutte pour la défense des prêtres réfractaires intervenait dans cette région moins que partout ailleurs.
En Seine-Inférieure, les principaux éléments que pourront rassembler les émigrés seront les réfractaires et les déserteurs, réfugiés en grande partie dans les forêts.

HOCHE 3Le 14 septembre 1796, le général Hoche, le commandant de l'armée des côtes de l'océan, le pacificateur de la Vendée, adressera au ministre de la guerre un rapport concernant le Havre où se lisent les lignes suivantes :
"Le Havre fourmille d'émigrés sous costumes anglo-américains. Ils s'y vantent d'avoir parmi les honnêtes gens des amis qui leur procurent des certificats de résidence ... On ne demande aucun passeport à qui que ce soit ... Il se fait des rassemblements dans les communes des environs ... l'esprit du peuple est perverti. On lui a persuadé que c'était le gouvernement et le militaire qui entretenaient la guerre, qui ruine le commerce. S'il y avait un mouvement royaliste, où ce parti fut en force, le peuple se prononcerait pour lui."
L'esprit des campagnes est aussi mauvais depuis qu'on a tracassé les prêtres constitutionnels. Les habitants ont accueilli les réfractaires qui ont pris pour preuve de la destruction de la religion les persécutions qu'éprouvaient les prêtres qui étaient soumis aux lois républicaines.
Bellot chargé de faire auprès des autorités les démarches nécessaires pour rechercher la maison où pouvaient être déposés les 2.000 louis annoncés par Frotté, n'a rien fait. (Hoche fait allusion à une lettre trouvée sur un chef Chouan, Picot, lors de son arrestation, au début de 1796, à Bayeux. Il en sera parlé plus loin).
Quant à l'adjudant général Boyer, il a refusé de s'en mêler disant que cela ne le regardait pas ... "Cet officier qui commande au Havre n'y voit que des Chouans de haut parage et ne fait que ce qui est de forme indispensable pour justifier qu'il est un  ennemi de la République."
Ce rapport peut être mis en parallèle avec un autre de mars 1797 des administrateurs du district de Rouen visant le Département que "les marchands d'Oissel qui s'approvisionnent au débarcadère du bac préfèrent des assignats imprimés à l'effigie de Louis XVIII à la monnaie républicaine et qu'au théâtre de Rouen vient de se dérouler une manifestation royaliste à la suite de laquelle a courut le bruit que le régiment de chasseurs à cheval avait promis à la jeunesse dorée et aux Chouans de ne pas marcher contre eux, s'il en était requis."
Il y a lieu d'observer qu'effectivement le dit régiment était si bien vu par les royalistes de Rouen que beaucoup de jeunes muscadins portaient des boutons d'uniformes de ce corps.

L'ARMÉE DE L'ARME AU BRAS

En 1795, la première manifestation chouannique fut la désertion successive de deux détachements des dragons de Rouen provoquée, la première, par Billard de Vaux, lieutenant du général Comte de Frotté, le commandant des Chouans bas-normands ; la seconde par un nommé Picot, également lieutenant de Frotté, natif de Rouen et futur chef des Chouans du Lieuvin.
Ces détachements assez importants de déserteurs rallièrent avec armes et bagages Frotté, dans l'Orne aux environs de Flers, d'où il organisait ses divisions.

 

FROTTÉ


Dès cette époque, de la Basse-Normandie, ce général cherchait à étendre son influence jusqu'en Haute-Normandie dont il eut embrigadé les deux départements, sans les intrigues néfastes de l'Agence royale de Paris, qui, hostile à la politique offensive de ce brave général, mit tout en oeuvre pour lui arracher le commandement de l'Eure et de la Seine-Inférieure.


Qu'était donc cette Agence royale de Paris ?
Un comité de brouillons, pour la plupart, qui à la lutte à main armée préconisée par le Comte de Puisaye, généralissime des Chouans, voulait lui substituer celle des bulletins de vote, préparée par la corruption des fonctionnaires.
Aussi, sous le fallacieux prétexte que Frotté ne pouvait fructueusement embrasser le commandement de toute la Normandie, s'employèrent-ils à faire élire par le Comte d'Artois, lieutenant général du royaume de France, au lieu et place de Frotté, deux de leurs créatures : pour l'Eure, le comte de Bourmant qui commandait déjà le Maine, et pour la région au nord de la Seine, le baron Mallet de Crécy, un Suisse parent de l'Anglais Wickam, le dispensateur en France de tous les postes contre-révolutionnaires soudoyés par l'Angleterre.
Leurs intrigues réussirent :
Si Bourmant n'eut que nominalement le commandement de l'Eure dont les diverses divisions, créées par Frotté, passèrent bientôt sous le commandement effectif du brave Hingant de Saint-Maur, la région d'outre-Seine (la Seine-Inférieure) fut attribuée malheureusement pour elle au baron Mallet de Crécy qui ne fera jamais rien de bon.


Quels étaient les antécédents de ce Mallet de Crécy ?
François Mallet-Butini dit de Crécy ou Grand Alcandre, né le 9 avril 1765, à Genève, de Jean Mallet et de Dame Charlotte-Marie Butini, appartenant tous les deux à la religion réformée, baptisé au Temple de Saint-Germain, officier suisse passé au service de la France, le baron Mallet de Crécy quitte l'armée pour passer à la contre-révolution.
Il prend part en 1796 à l'insurrection du Sancerrois, prépare ensuite les élections contre-révolutionnaires de la Seine-Inférieure, puis, au titre de favori de l'Agence royale de Paris, il obtient comme nous l'avons dit, au préjudice du comte de Frotté, le commandement de la rive droite de la Seine et de ce qu'il pourra organiser de la Picardie.
Voici son signalement : "Sept pieds, six pouces, grand, mince, voûté, yeux bleus mais très petits, nez petit bien fait et pointu, bouche grande, tête beaucoup trop petite pour son corps, cheveux noirs."
Peu de temps avant sa prise de commandement en 1796, il s'était porté à la tête de quelques volontaires près de l'embouchure de la Somme pour y favoriser le débarquement de sacs de guinées, provenant d'Angleterre.
L'opération réussit ; il put enlever le numéraire, malgré l'intervention d'un détachement républicain qu'il repoussa. Malheureusement, il employa fort mal l'argent qui fut réparti entre les blessés des deux partis et même dit-on les prisonniers.
Ce fut le seul combat livré par Mallet au cours de la Chouannerie normande.
Au service de l'Agence royale de Paris, il ne pouvait être agissant.
Son armée eut cela de particulier qu'elle ne présenta guère que des cadres ouverts et par conséquent que des chefs, mais peu de soldats.


Quelle fut la composition de ses cadres ?
Citons à l'état-major résidant à Rouen même :
La Martilière (Desnoyer), ex-officier d'artillerie, faisant fonctions de major général et d'officier payeur, caché dans une maison d'éducation de jeunes filles, rue des Arsins ; et son adjoint, Amyot de Saint Cyr, près de Bellesme (Orne), ancien canonnier de sa compagnie, qui lui assurait sa liaison avec Mallet ; quelques officiers d'état-major parmi lesquels : Messieurs de Valory, demeurant rue de la Chaîne ; de Gerville, de la Rivière, de Neuville de la Risle, Roger Marie bonnetier, demeurant rue de la Vicomté, Najac, tailleur demeurant rue Etoupée, Ducorps, Canel.
Les deux la Barre de Nanteuil, les deux Legendre de la Ferrière sont les aides de camp de Mallet ; Bouvier de Lozier est son adjudant-général.
Messieurs de Vendeuvre, de Saint-Sauveur, l'abbé Ratel, ce dernier membre de l'Agence royale de Paris, détaché à Rouen près de Mallet, sont les membres du conseil de l'armée. Le journaliste rouennais Robert et le député des Cinq-cents Pavie, tous les deux de farouches réacteurs, sont leurs suppléants.
Les séances de ce conseil se tiennent près de la Mare rouge chez un Monsieur Marguerie, très lié avec le maire de Rouen, Monsieur de Fontenay, ancien confiseur et chez Monsieur de Viomesnil, ex-membre du Parlement de cette ville.
Fauchecourt l'aîné, dit la Grange, ancien officier du génie est le commandant d'une artillerie qui n'existe que sur le papier et dont les pièces débarquées d'un bateau anglais à la pointe de la Roque, près de l'embouchure de la Risle, avaient été, dit-on transportées et enterrées dans la forêt de Breteuil (Eure), où des boulets de fonte auraient été préparés.
Monsieur de Calonne est le trésorier payeur général et Monsieur Acquet de Férolles, ex-officier, le commissionnaire habituel de Mallet.


Quant au territoire de la rive droite de la Seine, il est réparti en cinq divisions :

La première, celle du Pays de Caux, est sous les ordres de Deville, dit Tamerlan, Tata, Lenoir, Duroc, vrai type de Chouan, "possédant tous les avantages extérieurs qui impressionnent vivement les masses."
"A des proportions herculéennes, il joignait une tête magnifique et une régularité admirable de traits ; chef redoutable par ses talents, sa bravoure et l'ascendant qu'il exerçait sur les populations, il était un puissant auxiliaire près de Mallet."
Résolu, courageux, prudent et tacticien, il respirait, dit-on, un air de sagesse qui lui avait valu la plus grande considération dans son parti, et il espérait exercer une grande influence sur les habitants des campagnes de la classe desquels il était sorti.
Il était très comme il faut et était reçu dans les meilleures familles de la région.
Son signalement est le suivant : "Cinq pieds, six pouces, grand, fort, se tenant droit, front haut, cheveux et sourcils noirs bien arqués, oeil brun noir, nez grand aquilin et pointu, bouche ordinaire, menton fourchu ; il portait souvent une redingote bleue et un chapeau à trois cornes, couvert de toile cirée".
Il était le fils d'un médecin cultivateur de Thiberville (Eure) dont le curé prit soin de son éducation.
Dès l'âge de 19 ou 20 ans, il quittait ses deux frères et servait à Darnétal, près de Rouen, chez un nommé Caron épicier, puis à Rouen, Grande rue chez un marchand de toiles nommé Dupont. Il s'engageait bientôt dans le 2e bataillon de la Montagne et partait de Rouen pour combattre les Vendéens.
Muté ensuite dans le 13e bataillon de réquisitionnaires de la Seine-Inférieure à Dieppe, il désertait et revenait à Rouen où il avait une soeur mariée à un sieur Verger chez laquelle il se cacha, pour retourner en Vendée où il prenait rang dans l'armée royale et y devenait officier.
C'est de là qu'il revenait en 1796 dans la Seine-Inférieure et fut pris, comme sous ordre, par Mallet.
On lui connaissait quatre maisons de refuge.
A Rouen : rue d'Ecosse n° 15 ; rue des Champs-Maillets, chez un nommé Harel ; rue du Cormier, n° 3, dans une maison entourée de jardins.
Il se rendait aussi chez une dame de Grainbouville à Gonneville et il séjournait assez souvent sur les bords de la Seine aux environs de la Bouille.
Il franchissait de temps en temps le fleuve pour opérer sur la rive gauche dans la forêt de Brotonne. Dans ce cas, il se rendait à Duclair chez un nommé Desson, dont il voyait souvent le père à Rouen.

La seconde division, celle du Pays de Bray est sous les ordres de Raoul Gaillard, de Saint-Jacques de Darnétal près de Rouen, l'aîné de trois frères, à son exemple très dévoués à la cause royale, ami de Tamerlan et comme lui, déserteur en 1793, du bataillon de la Montagne.
Prudent, habile, ce second lieutenant de Mallet ne manquait ni de résolution ni de courage. Ecouis était son principal poste de commandement, d'où son influence s'étendait jusqu'au delà de la forêt de Lyons.
Il avait pour sa division un dépôt d'armes, chez un nommé Goujon, au château de Musignon près d'Ecouis, où particularité fort curieuse, un détachement de la garnison républicaine de la région, cantonnée là quelque temps, mangea souvent avec lui sans se douter de rien.
Dans toutes les circonstances, son caractère était invariable. Il sera très actif et heureux, en 1800, dans les attaques de diligences, époque à laquelle il profitera du débandement du dévaliseur Pelletier l'un de ses sous-ordres et de ses gens.
C'était un officier de grands moyens, ayant sous ses ordres pas mal d'hommes depuis Charleval jusqu'aux Andelys.
Sa correspondance se faisait avec plus d'activité même que celle de Mallet, parce que la nuit, il était capable de parcourir quinze à vingt lieues avec ses affiliés.
Il se rendait souvent à Saint-Jacques de Darnétal, chez sa mère ou chez un nommé Lerat chez lequel il fut une fois arrêté.
Quand il voyageait, il montait un petit cheval gris pommelé, appartenant à une dame de Saint-Paer dont nous parlerons ultérieurement, qui l'avait reçu du comte de Bourmont et qu'il prenait dans son écurie d'Etrepagny.
Son signalement était le suivant : "Cinq pieds, sept pouces, élancé, blond, yeux bleus clairs, nez petit et pointu, bouche grande, sourcils blonds, trente ans, caractère gai, redingote américaine, chapeau rond, poignard à manche d'ivoire."
Il prenait souvent le nom de Dawinski.

La troisième division, celle du pays de Neufchâtel, est sous les ordres d'un nommé Gesme, dont le véritable nom est complètement ignoré et de Decorde, officier municipal de cette ville, qui antérieurement à l'organisation chouannique actuelle avait distribué des fusils et des cartouches lors de premiers troubles et aussi, sous ceux d'un Lépine Avocat.

Les quatrième et cinquième divisions, celles de Magny et des Andelys sont respectivement commandées par MM. de la Houssaye de Pont-Audemer, ex-officier de marine et par un nommé Cahagues.

Le commandement de Mallet s'étendait même en Picardie où un certain Franqueville recrutait pour lui jusqu'à Amiens.


Par ses ressources pécuniaires, tirées de l'Angleterre et obtenues grâce au précieux patronage de l'Agence royale de Paris, Mallet assurait une fort belle solde à ses cadres :
Les officiers touchaient mensuellement 72 francs et pour débuter d'accord avec l'Agence, Mallet ne leur demandait ni de s'exposer, ni même d'agir.
Dans aucune armée chouannique on ne trouve une aussi forte paye et autant de sécurité.


Connaissant l'organisation de l'armée des Chouans de la rive droite de la Seine, jetons un coup d'oeil sur ses principales manifestations.


Le 19 août 1796, après la pacification, Picot, le recruteur des dragons, déserteurs de Rouen, cité plus haut, devenu le commandant de la division des Chouans du Lieuvin, était arrêté à Bayeux porteur d'une lettre de Frotté, alors à Londres adressée au comte de Chambray son représentant en Basse-Normandie, lui prescrivant de poursuivre les armements, tout en différent la reprise des armes, après les élections, et lui annonçant qu'il lui envoyait un émissaire qui débarquerait du Havre et lui ferait parvenir 2.000 louis par l'intermédiaire de Bureau de Placène le trésorier de l'armée. Cette somme était destinée aux armements en question et à la création de maisons de correspondance sur la route du Havre à Rouen.
Bientôt, le comte de Chambray était arrêté près d'Alençon et incarcéré à Rouen, d'où un ordre supérieur prescrivait son transfert à la prison de Caen. Mais prévenu d'un complot d'enlèvement organisé en sa faveur, Chambray sut, pour faciliter son exécution, retarder son départ sous prétexte de maladie.
Quelques jours plus tard encadré de trois gendarmes, le prisonnier prenait, dans une voiture, la route de Caen.
A peine engagé dans la forêt de Moulineaux, quarante hommes armés, répartis en deux pelotons, arrêtaient la voiture et délivraient le comte de Chambray sans qu'un coup de fusil ait été tiré.
Les chefs de ce coup de main étaient le comte de Mauduit, le commandant de la division de la Risle et Tamerlan, celui de la division du pays de Caux, dont, comme nous l'avons dit plus haut, les détachements passaient souvent sur la rive gauche de la Seine.
En l'année 1798 eut lieu l'évasion de la prison du Temple à Paris et la fuite à travers la Seine-Inférieure, pour se réembarquer sous le Havre du commodore Sidney Smith capturé l'année précédente par des marins de ce port dans l'estuaire de la Seine.
Ce prisonnier fut délivré par un groupe de chefs chouans auxquels s'était joint Mallet lui-même dans le but de conserver particulièrement pour lui et l'Agence royale, les faveurs de l'Angleterre, en ne restant pas en arrière des camarades des autres armées chouanniques.
Depuis le 18 fructidor 1797, journée au cours de laquelle le parti jacobin avait par un coup d'état repris le pouvoir, la pacification chouannique de 1796 était bien compromise.
Dès cette époque, dans les provinces de l'Ouest, le feu couvait sous la cendre et malgré les instructions du comte d'Artois adressées aux Chouans, ces derniers inquiétés et traqués se trouvaient dans l'obligation d'avoir recours aux armes pour défendre leur liberté et leur vie.


L'explosion éclata au début de 1799.


Mais tandis que Cadoudal, Bourmont et Frotté les reprenaient, Mallet se contentait de maintenir ses cadres en haleine et de rassembler ses forces pour intervenir le jour où l'Agence royale de Paris lui en donnerait l'ordre.


Les quelques manifestations de ses contingents sont les suivantes :
A la fin de juin, des troupes montées de Chouans, dont l'une de quarante hommes, véritable horde ambulante, dénotent une organisation cavalière dont on suit difficilement les traces.
Dans la nuit du 20 au 21, vers 11 heures du matin, une quinzaine de cavaliers surgissent sur la place de Grémonville et somment au nom du roi Louis XVIII la garde intervenue de se retirer, ce à quoi elle déféra sans la moindre opposition.
Aussitôt, quelques cavaliers mettant pied à terre abattent l'arbre de la liberté, tandis qu'un second détachement d'une quinzaine de chevaux se tenait en réserve à l'entrée de la localité.
Cet escadron, de la force d'une trentaine d'hommes, était certainement celui désigné comme opérant aux environs de Rouen.
A la suite de cet évènement, une partie des troupes destinées à garder le canton de Doudeville fut appelé dans celui de Motteville l'Esneval, dans le but d'y maintenir l'ordre.
A cette époque le commandement de la 15e division militaire est entre les mains du général Verdière avec, comme sous-ordres les généraux Béthencourt, à Rouen ; Larue, au Havre ; Marchand à Evreux.
Le général Verdière sera ultérieurement remplacé par le général Hatry.
Nombreux étaient alors dans l'Eure et la Seine-Inférieure les déserteurs et les réfractaires qui se cachaient dans les forêts et les bois.
Les troubles gagnent les communes de Monroty et de Neuf-Marché dans la région de Gournay, où certains Chouans portent des masques, d'autres des uniformes.
Devant ces mouvements une colonne mobile, cantonnée à la Feuillée patrouilla dans la forêt de Lyons et y dispersa un gros de Chouans dont quelques-uns avaient déjà été signalés à Rosay, puis à Coudray, dans le canton d'Ecouis.
A la même époque, aux environs de Caudebec, avaient lieu le passage sur la rive gauche du fleuve, de plusieurs détachements des soldats de Deville, le commandant de la division du Pays de Caux, dans le but d'opérer contre les forces de la garde nationale des environs de la Londe et de Bourg-Achard et de lever des contributions sur les propriétaires de biens nationaux.
Partout, les détachements républicains étaient alertés dans cette région.
En juillet, un important rassemblement de Chouans, dénommé "des mécontents" était depuis quelque temps signalé dans la forêt de Lyons, sous les ordres d'un nommé Charette, l'un des seconds de Gaillard, le commandant de la division du Pays de Bray.
On ne savait pas si ce chef s'appelait réellement Charette ou s'il avait prix ce nom du fameux général vendéen pour inspirer plus de confiance à ses gens. Ce Charette, qui dans la suite, parut être Anceaume, logeait tantôt chez le citoyen Lépine, l'un des chefs de la division de Neufchâtel, tantôt à Affigny.
Deux cents de ses gens, répartis en compagnies, campaient dans la forêt d'Eu, près du poteau de Montauban ; cent autres occupaient la Ferrière Sainte-Catherine, les Monts Gosselin et Saint-Rémy.
Aussitôt alertés les colonnes mobiles patrouillèrent dans les communes de Monchaux, Guerville, Fieux, Millebonse et Grancourt.
Entrant ensuite en forêt, elles découvrirent un bivouac récemment évacué, sur lequel on ramassa nombre de fusils, de sabres et de pistolets, abandonnés par les fugitifs dont plusieurs furent rejoints et arrêtés.
La répression fut presque nulle ; le jury du tribunal de Neufchâtel, visiblement bien disposé pour les prisonniers les acquitta tous, y compris les chefs les plus indiscutablement coupables.
A la date du 1er thermidor, le général Béthencourt donne l'ordre suivant au commandant du détachement des troupes stationnées à Goderville : "Le cantonnement de la troupe sera concentré à Doudeville, de façon à assurer l'unité de commandement en cas d'attaque des Chouans ; il y aura au moins six soldats par maison. Après leur équipée dans le district de Doudeville, les Chouans s'efforcent d'insurger ceux de Fontaine-le-Dun, de Saint-Laurent, de Valmont, ce qui laisse à entendre qu'ils ont maintenant jeté leur dévolu sur le district de Cany."
Si à cette époque, Evreux possédait quelques troupes régulières, à peine 800 hommes, Rouen ne pouvait compter que sur un régiment de cavalerie squelettique et le Havre sur rien.
La garde nationale et quelques colonnes mobiles étaient au nord de la Seine, les seules forces républicaines à opposer aux Chouans.
En fructidor 1799, se livrait à Pacy-sur-Eure un combat au cours duquel se signala le valeureux Hingant de Saint-Maur, le commandant des forces chouanniques de l'Eure, tandis que Mallet, sans aucune liaison avec lui, demeurait dans une immobilité absolue, probablement d'accord avec l'Agence royale de Paris.
Par suite de l'inaction de Mallet, la prise de Pacy qui avait inquiété un moment Paris même, n'eût aucun résultat heureux pour la cause du roi.
Le 11 nivôse à Rouen, le général Hatry prenait le commandement.
A cette époque, un nommé Carrey d'Asnières fut chargé par le comte d'Artois de porter de l'argent et des armes sur la côte de Normandie et d'y débarquer un agent du roi qui devait se rendre près de Mallet et prendre avec lui des mesures les plus efficaces pour de nouveaux versements.
Au cours de cette mission qui devait durer 25 jours, Carey d'Asnières devait de Pertsmouth débarquer un nommé Durocher sur la côte de la Seine-Inférieure aux environs du Tréport.
Là, Durocher, porteur de dépêches concernant sa mission et des fonds qui lui avaient été confiés, ne débarquerait que s'il trouvait la voie libre.
Tandis que Durocher accomplira près de Mallet sa mission, le chevalier d'Asnières s'informera de la situation des royalistes en Haute-Normandie, leurs besoins en argent, en armes et en munitions et en quels lieux ces versements pourraient être effectués.
De plus le capitaine du bâtiment portant d'Asnières était chargé de s'assurer qu'il existait des ordres pour l'établissement d'une croisière, du cap d'Antifer jusqu'à l'Authie.
En janvier 1800, à Neufchâtel est arrêté un nommé Laporte destiné, dit-on à prendre le commandement d'une troupe dont le lieu de rassemblement avait été fixé dans les bois de Conteville (canton de Gillefontaine), sur la lisière du département de l'Oise. Le dépôt de ses armes était à Lyons la forêt.
Aussitôt les enrôlements clos, Laporte (ou Delaporte) qui entretenait des intelligences jusqu'à Amiens allait donner le signal de l'insurrection, disait-on.
Pour empêcher ce rassemblement de se former, les colonnes mobiles de Rouen, de Neufchâtel et de Lyons se portent sur les lieux et le disperse.
Chaque enrôlé devait toucher 36 francs en signant son engagement et en plus, une solde journalière de 3 francs 50 jusqu'à l'heure de rallier le point de rassemblement. L'uniforme se composait d'un pantalon rouge et d'une carmagnole de même couleur, bordée de bleu.
En février 1800, l'inique exécution du comte de Frotté, le dernier des généraux Chouans, demeuré sur la brèche, après Bourmont, après même, qui pourrait le croire, l'irréductible Cadoudal, tombé à Verneuil sous les balles du peloton d'exécution avec cinq de ses fidèles à la suite d'un jugement le condamnant comme émigré (Cette qualité d'émigré ne pouvait légalement être invoquée contre Frotté, puisqu'il avait été convié pour traiter à Alençon avec les généraux de la République. On ne traite pas avec un hors la loi.), avait sonné le glas des guerres de la chouannerie comme l'exécution de Charette avait, en mars 1796, sonné celui des guerres de Vendée.
A cette nouvelle, partout les Chouans déposent les armes. Ceux de Mallet, à peu près inexistants, à l'égard du gouvernement républicain, les conserveront. Quelques-uns de leurs officiers feront leur soumission. Citons parmi eux : Cahagues des Andelys, les frères Duchesne, Calonne, le jeune Legendre de la Ferrière, Marie. De plus, la Houssaye, Delaporte, Amyot seront arrêtés.

LES ATTAQUES DE DILIGENCES

Au début de 1800, l'argent anglais faisant défaut, une nouvelle Agence royale, dénommée anglaise, au service direct du Comte d'Artois, ignorée totalement de l'Agence royale de Paris et, à ses débuts, du Prétendant lui-même, celle-ci très favorable à la politique des coups de fusils, sollicita du comte d'Artois qu'un ex-officier de Frotté, chef de deux compagnies parisiennes de Chouans, fut nommé commandant d'une organisation qu'elle venait de créer dans le but de remplir la caisse royale au préjudice de celle de l'Etat.
Cet officier était le chevalier de Margadel, dit Joubert.
Nous devons observer que ces prises n'étaient, aux yeux des royalistes, qu'une très juste récupération des biens enlevés jadis aux émigrés. Elles étaient destinées, non à entrer dans les poches des dévaliseurs, mais à grossir la caisse des Chouans qui estimaient agir pour le Roi, en lui restituant un bien pris au gouvernement des rebelles.
Pour l'exécution de ces coups de main, on avait des intelligences avec les agents de la trésorerie, de façon à connaître à temps la date des transports de numéraire. Un quart de la prise, quand ce n'était pas un tiers, était ordinairement remis aux indicateurs et aux complices.
Margadel prit comme sous-ordres les frères Pelletier d'Avranches, dont l'aîné était le commandant de la compagnie de Lyons la forêt, qui probablement, sur les ordres de Mallet, passa au service d'Hingant de Saint-Maur, dans la région de Pacy-sur-Eure, d'où il dirigea les attaques de malle-postes et diligences.
Il y a lieu d'observer que l'Agence royale anglaise avait créé une petite armée de détachements devant particulièrement opérer sur les routes de Rouen à Paris au nord de la Seine, par Magny, au sud, par Vernon et sur celle de Paris à Caen.
Recrutée en grande partie dans la capitale, parmi les amnistiés de la dernière heure, soldée mensuellement, au taux de 60 francs, répartie en petits détachements stationnés à proximité des routes précitées, cachée dans les bois et forêts, cette petite armée allait terriblement inquiéter les trésoreries et leurs courriers.
Au commencement de 1800, le siège de ces enrôlements fut découvert à Paris par la police dans une maison située au coin des rues Saint-Honoré et Saint-Florentin, chez le comte de Malartic.
Ces attaques de malle-postes et de diligences portant la trésorerie eurent particulièrement lieu de Brumaire à Nivôse an IX.
Comme ces voitures étaient gardées par une escorte de cavaliers et souvent même de fantassins, de véritables combats avaient quelquefois lieu.
Il y a lieu d'observer que ces attaques, les seules manifestations chouanniques, à la fin de 1800 et au commencement de 1801 se produisirent tout particulièrement en Haute-Normandie sur les routes précitées et presque toujours à hauteur du château de Tournebu distant de quatre lieues de la grand'route de Rouen-Paris par Magny, à travers le Vexin et de quelques kilomètres de celle par Vernon.

 

château de Tournebu


Ce château situé sur la commune d'Auberive, proche de Gaillon au bas d'un éperon boisé dont les pentes nord aboutissaient à la rive gauche de la Seine, adossé à un bois, ceint de murs percés de plusieurs portes et séparé du fleuve par une prairie marécageuse, se trouvait à l'écart des grandes routes et par conséquent très isolé.
Il était alors habité par la marquise de Combray, agente royale pour la région de Rouen, qui, en 1792, avait machiné dans ce château des caches s'étant alors proposée de donner asile au roi Louis XVI, lors d'un projet de fuite par Le Havre, conçu par ses familiers, mais que la reine sa funeste conseillère, fit avorter.
Tournebu n'aurait-il pas été en 1800, et dans la suite, le réceptacle des fonds de l'Etat enlevés des malles-postes, répartis dans des bissacs, jetés sur l'encolure de chevaux, dirigé nuitamment par des sentiers peu suivis, à travers une région émaillée de bois et de boqueteaux que, tant au nord qu'au sud, ne traversaient aucun chemin important ?
Lenôtre dans "Tournebu" l'a prétendu.
Mallet rassemblait alors des déserteurs et réfractaires pour être en mesure d'appuyer si possible, un débarquement de troupes anglo-russe et d'émigrés qui, sous les ordres d'un prince de la Maison de Bourbon, devait marcher d'ici peu sur Paris.


Aussi, en mars 1800, une lettre adressée de Rouen au ministre de la police générale lui donne-t-elle les renseignements suivants :
"... Tous les lundis, un chef fait sa ronde dans le canton habité par les soldats chouans et s'assure par lui-même :
1° De leur présence sur les lieux ;
2° S'ils ont encore leurs armes et si elles sont en bon état, s'il y en a qui ne soient pas munis de pistolets ;
3° S'ils sont bien animés et prêts à agir.
Il les solde pour la semaine.
Il y a deux chefs qui ne bornent pas là leur rôle.
Ils exercent leurs soldats dans la grange, tandis que quelqu'un veille au dehors.
En outre des prêtres circulent souvent dans le pays et ne manquent pas d'encourager les soldats.
Aussitôt le débarquement de l'armée anglo-russe, on verra à nouveau le pays se couvrir de Chouans."


En août, un nommé Frédéric Fermanel dit "Brave la mort" ex-chevalier du Brésil, de la division du Pays de Caux, très lié avec Tamerlan et Pierre Gaillard, condamné par contumace à Rouen en l'An X pour vols des fonds de l'Etat et assassinat, parvint à se réfugier en Hollande.
Ce Fermanel fréquentait jadis à Rouen une fille Talbot, femme Pierre Gaillard, l'oncle du second de Mallet et une femme Levasseur correspondante très active des Chouans et il aurait, dit-on, fait partie des bandes des dévaliseurs de la petite armée de Margadel.
La femme Gaillard, mère de onze enfants, dont le mari, potier d'étain était domicilié à Rouen rue Percière, n° 49 était la trésorière des Chouans de la région et elle se chargeait des commissions les plus délicates, poussant le dévouement jusqu'à acheter des cartouches et des balles pour son mari qui tenait un dépôt de munitions.
Elle aurait souvent correspondu avec ses neveux, Raoul et Armand Gaillard, auxquels elle était particulièrement attachée.
Quand à la femme Levasseur, épouse d'un commis de comptoir, elle était la maîtresse de Raoul Gaillard pour lequel elle faisait tous les sacrifices les plus inimaginables. Elle aurait caché chez elle Tamerlan.
La femme gaillard employait une femme Siret, pour la transmission de sa correspondance à ses neveux.
Se cachant sous le nom de Charles et d'autres, à Rouen où il habitait, alternativement, chez un prêtre à l'extrémité du faubourg Bouvreuil, près de la porte Verte, à proximité d'un carrefour, au milieu de jardins ; chez Madame Marguerie domiciliée dans une rue en face la Mare-Rouge, chez une dame de la Granderie, rue de la Cigogne n° 8, Mallet de Crécy qui ne sortait de ces repaires que la nuit avait des rendez-vous très fréquents avec Mesdames de Saint-Paer et Marie ses confidentes, ainsi qu'avec la femme Levasseur la si fidèle messagère de Mallet.


Au milieu de l'année 1801, effrayé des soumissions et des arrestations des officiers de son armée, prélude de la destruction de ses cadres, et se sachant activement recherché par la police, Mallet quitte subitement Rouen pour gagner Caen, et par les îles Saint-Marcouf, passer en Angleterre, après avoir prescrit à ses sous-ordres, demeurés encore sous les armes, d'attendre sans bouger ses instructions.
De Londres, Mallet émigre en Suisse et gagne Neuchâtel d'où il entretiendra une correspondance avec Dutheil, l'agent des princes à Londres, au sujet de laquelle des rapports de police ultérieurs, déclareront qu'il serait aisé d'arrêter à Neufchâtel ce royaliste qui est le complice de tous les complots réacteurs de l'époque.
En août, Mallet réside à Nyons où il est sur le point d'épouser une des filles de sa confidente et si dévouée gente, Madame de Saint-Paer, qu'il a engagée à se rendre, munie d'un passeport, aux eaux de Leneck, en Savoie, en vue du mariage qui pourrait, dit-il, avoir lieu sans danger à Neuchâtel, sous la dénomination du roi de Prusse.
Loin de suivre l'exemple de Frotté, au moment critique, Mallet avait abandonné ses cadres, il est vrai squelettique de son armée fantôme, pour se marier. On ne peut s'en étonner. Il n'était ni héros, ni même soldat et il n'avait été élevé au grade de commandant des forces de la rive droite de la Seine qu'au titre de favori de la néfaste Agence royale de Paris.


En date du 18 floréal 1801, le ministre de la police générale reçoit le rapport suivant :
"Le département de la Seine-Inférieure renferme beaucoup de partisans du roi Louis XVIII et d'hommes dévoués au gouvernement anglais".
A l'époque de l'établissement du gouvernement consulaire on avait envoyé des émissaires et répandu de l'argent pour tâcher d'y réorganiser les troubles et le brigandage. Rouen et Caen étaient les deux points principaux de correspondance entre Paris et l'Angleterre.
On comptait beaucoup sur la plupart des maires de campagnes ; mais on est parvenu à faire entrer dans les administrations beaucoup d'hommes dévoués aux Bourbons.
La Seine-Inférieure a été pendant longtemps le théâtre de beaucoup de vols et de brigandages.
Les nobles y sont restés fortement attachés aux préjugés de leur naissance et ont une grande influence sur les campagnes.
Il faut particulièrement surveiller les points suivants : Dieppe, surtout quand Le Havre est bloqué ; la direction de Montivillier sur Harfleur ; le petit Havre Saint-Jacques dans la commune de Saint-Vigor, le hameau de la Bouille près de Rouen et surtout la maison de la veuve Chauvignon qui sert d'asile à tous les chefs chouans.

CONCLUSION

En Haute-Normandie, la guerre des Chouans avait eu, malgré les apparences, un caractère plus militaire qu'en Bretagne et dans les autres régions de l'Ouest.
Renonçant à se mesurer avec les Bleus dans des combats, les royalistes de cette région n'en formaient pas moins le projet de créer une armée, dont ils organisèrent de solides cadres ouverts, de façon à préparer en temps voulu le retour des Bourbons ; mais leur activité fut à peu près nulle.
Si l'Eure, virtuellement demeurée, malgré les intrigues de l'Agence royale et du comte de Bourmont, sous les ordres de Frotté, fut, grâce à ses forêts peuplées de réfractaires et de déserteurs, un foyer assez actif de Chouannerie, la Seine-Inférieure dont, sous les ordres de Mallet, l'armée chouannique si peu agissante a été ironiquement désignée "l'armée de l'arme au bras" se contenta de conspirer.
Dans cette dernière région, le feu couva sous la cendre et ne s'aviva un peu qu'en 1800.
A cette époque il fallait de l'argent : les guinées fournies par le cabinet anglais ne suffisant pas, on attaqua les diligences portant les fonds de l'Etat.
Mais l'inactivité de Mallet, eut d'un côté cela de bon, que cette région n'étant pas considéré par le gouvernement comme en insurrection, elle facilitait la sécurité de la correspondance, le débarquement des agents secrets sur les côtes et la circulation des Chouans.
Enfin quand Bonaparte eut rétabli l'ordre dans le pays, restauré la religion et radié les émigrés des listes de prescription, la Chouannerie disparut partout.
Pour conclure, sans vouloir établir le moindre parallèle entre les Chouans de la Basse-Normandie et ceux de la Haute-Normandie, reconnaissons que si "l'armée du comte de Frotté et celle de son lieutenant Hingant de Saint-Maur lança en mourant une superbe étincelle, celle de Mallet s'éteignit comme une chandelle".
Quant aux braves lieutenants de Mallet, Raoul Gaillard et Deville dit Tamerlan, (avec Picot et quelques autres officiers de Mallet, ils s'employèrent activement comme fourriers de Cadoudal, dans son attentat criminel de 1804, contre Bonaparte), leur destinée ne leur permit pas d'acquérir la renommée d'autres chefs qui n'avaient pas cependant plus de valeur qu'eux.
La faute en incombe à Mallet et au milieu dans lequel ils furent appelés à agir.

BARON LE MENUET DE LA JUGANNIERE
Annuaire des cinq départements de la Normandie
publié par l'Association Normande
1938

François MALLET-BUTTINI est né le 09.04.1765 à Genève. Il épouse Anne MOLESWORTH, née le 3 juin 1770 en 1807. Il est Baron héréditaire comme Guillaume MALLET, par lettres patentes du 16.08.1817. Il est Lieutenant dans le Régiment Suisse de Châteauvieux, puis Maréchal de Camp sous les pseudonymes de Crécy et Grand Alcandre dans les troupes royalistes sous la Révolution, et, enfin, Lieutenant Général des Armées du Roi en 1827. Il décède le 4 mai 1839 près de Paris. Grand-croix de l'ordre du mérite militaire, officier de la légion d'honneur, commandeur de l'ordre de Sl-Léopold d'Autriche.

Enfants :

- Molesworth Mallet-Butini, né le 2 septembre 1808

- François-Michel Mallet-Butini, né le 26 août 1810

- Charles-Philippe Mallet-Butini, baron de Mallet, né en mars 1812

Tous trois se sont fixés en Angleterre.

(Celtic Royal Genealogy)

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