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La Maraîchine Normande
29 juillet 2013

LA MIRACULEUSE GUÉRISON DE COULOMBON - RECETTES MÉDICO-CULINAIRES

Le 2 prairial an IV, le chef de bataillon Coulombon, qui commandait à Lamballe, se mettait en route pour Saint-Brieuc, escorté d'un faible détachement. Il allait prendre en cette ville les ordres du général Valletaux, son supérieur, lorsqu'arrivé à la hauteur du moulin de Sainte-Anne, relevant jadis des Tournemine, Srs de Carlan et de la Villepierre, il tomba dans une embuscade de chouans. "Son cheval tué sous lui, son escorte mise en fuite, il fut pris et subit un interrogatoire pour la forme. Le chef qui venait de prononcer la sentence lui offrit sa grâce, à la condition qu'il divulguerait le mot d'ordre de l'armée et faciliterait la prise de Lamballe.
Coulombon, quoique déjà père de famille (il n'avait alors que 28 ans), refusa noblement ces honteuses propositions. Il répondit : "Faites votre devoir ; mes enfants n'auront pas à rougir de ma conduite." Aussitôt le malheureux fut fusillé. Il reçut deux coups de feu dans le bas-ventre et huit dans la poitrine. Pour plus de certitude, les exécuteurs y ajoutèrent quatre coup de baïonnette et de nombreux coups de crosse sur la tête.
Déjà la fosse du mort était creusée : on allait l'y jeter, lorsque le bruit du tambour se fit entendre. L'escorte avait été donner l'alarme à la garnison de Lamballe, qui arrivait au secours du commandant.
Le corps de Coulombon fut trouvé dans un fossé. Il donnait encore quelque signes de vie ; on le transporta chez lui, où, après de longs jours de léthargie, il reprit connaissance, grâce aux soins assidus de huit médecins.


... ... "Cet homme si cruellement maltraité et qu'on allait mettre en terre vécut encore soixante ans. Pendant vingt ans, il porta sur la poitrine un appareil formé d'une plaque d'argent et recouvrant une plaie qui mit quatorze ans à se cicatriser. (1)


L'officier supérieur si miraculeusement guéri d'une fusillade aussi complète que celle-là avait appartenu aux gardes du Roi. Au licenciement de ce corps, il avait été promu, de simple sergent-major qu'il était en 1792, chef de bataillon à la 184e demi-brigade. Trois ans plus tard à Quiberon, il se signalait par une série d'actions d'éclat, notamment en dirigeant l'assaut du fort Penthièvre qu'il enlevait aux émigrés.
On sait combien, en cette funeste expédition, furent sanglantes pour les royalistes les suites de ce combat. Parmi les victimes, il y eut trois Courson. L'embuscade en laquelle le vaillant commandant venait de tomber, aux environs de Villepierre, fut regardée, non sans raison peut-être, comme une représaille de ce qui s'était passé à Quiberon et aussi du redoublement de sévérité avec laquelle on traitait, à Lamballe, les proches des martyrs d'Auray.

Au nombre des huit médecins qui opérèrent dans la résurrection de feu Coulombon ne pouvait manquer de se trouver le docteur Taburet, l'une de ses ordonnances. Elle est datée du 16 juillet 1788, et je ne sais par quelle fantaisie du hasard elle nous est tombée sous la main :
"Bouillon adoucissant et vectoral.
Prenez un jeune poulet maigre dont on farcira le corps avec six figues une once de riz, douze amandes douces concassées et pelées. Faites bouillir le tout à petit feu dans trois pintes d'eau de pulmonaire et de chicorée sauvage ; de chaque, demy poignée. Passez, un demy quart d'heure après, sans exprimer.
Mademoyselle la malade prendra trois bols de ce bouillon par jour : la première dose à jeun ; la seconde dose deux heures après avoir dîné, et la troisième en se mettant au lit. Elle les continuera pendant quinze jours de suitte.
A Lamballe, ce 16 juillet 1788.
Taburet, d. m."

Que l'on voit bien, à la facture de cette recette médico-culinaire, que les Esculapes dirigeaient eux-mêmes autrefois les apprêts de leurs potions ! Il est probable que Lamballe manquait autrefois d'apothicaire, ce qui n'en valait pas moins pour les malades et leurs huit guérisseurs. Et l'histoire des docteurs de l'héroïque Coulombon ne dit pas si, dans la ville, il n'y en avait pas davantage.

Dans les papiers de maître Taburet, nous avons rencontré une "Façon de guérir les blessés", approuvée par M. Godreau, évêque de Vence, en 1687, et mise en pratique en sa présence, à Paris, sur un officier dont les playes avoient été estimées mortelles :
"Le cavallier qui faisoit les fonctions de chirurgien commença par réciter l'himne "Vexilla Regis" jusques au bout à haute voix, et à genoux au bord du lit du malade. Il fit trois signes de croix sur les playes aux trois mots : Veluerone diro lanceae. Il se fit apporter du vin blanc qu'il fit chauffer. Il prit de la meilleure huile d'ollive ; il avait du feu dans un réchaud. Il succa les blessures et les lava jusqu'à ce que le sang cessa de couler. Il versa quelque goutte d'huile sur les charbons, et par le moyen d'un cornet de papier il en dirigea la fumée sur les playes, ce qu'il renouvella plusieurs fois pendant un quart d'heure. Il âplica des compresses de linge fin qu'il imbiba de fumée d'huille. Il ordonna à son malade d'évitter touttes sortes de mouvements pendant vingt-quatre heures et de se tenir assez couvert pour conserver une chaleur modérée et luy fit prendre un bouillon de trois en trois heures."

Sans doute était-ce le bouillon pectoral et adoucissant !

... ... "Le cavallier changea d'appareil pendant deux jours, à seize fois différentes, observant la même distance la nuit comme le jour et continuant de se servir de la fumée d'huille pour imbiber les appareils. Il eut soin de donner quelque liqueur spiritueuse au malade pendant la première opération. Trois jours après il fut soulagé visiblement, et guéri radicallement huit jours après."

Et le pieux Taburet termine par cette réflexion :
"Il n'est pas une affaire que l'on récite le Vexilla Regis."

Qui nous dit que la récitation du Vexilla Regis (ce n'est pas une affaire en effet) ne fût pas le secret de la miraculeuse guérison du commandant Conlombon ?

(1) "Je certifie que les faits mentionnés ci-dessus m'ont été attestés par le général Hoche et que j'en ai rendu compte, dans le temps, au Directoire - Boulogne, le 6 thermidor an XIII - Le commissaire général des camps et armées, signé : Petiet." - Lamathière, Panthéon de la Légion d'honneur - Paris - Dentu.

Revue illustrée des provinces de l'Ouest

1892

 

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