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La Maraîchine Normande
2 février 2013

HYACINTHE HERVOUET DE LA ROBRIE, Major-Général de l'armée royale du Bas-Poitou ♣ 1ère partie

HYACINTHE HERVOUET DE LA ROBRIE
Major-Général de l'armée royale du Bas-Poitou

Issu d'une famille très-ancienne des confins de la Bretagne et de la Normandie, dont plusieurs membres (l'un d'eux était à la bataille de Fontenoy) s'étaient distingués  dans la carrière des armes, Hyacinthe-Louis-Ferdinand HERVOUET DE LA ROBRIE naquit le 27 septembre 1771. Il sortait à peine du collège de Thouars, où il avait fait ses études, lorsque la sanglante politique de la Convention provoqua un soulèvement spontané et bientôt général des provinces de l'Ouest.

Plusieurs fois, depuis 1791, les royalistes de la Bretagne, du Maine et du Poitou, avaient essayé de combattre ce pouvoir nouveau, qui, sous prétexte de tout niveler, se débarrassait de tout ce qui était de nature à gêner le despotisme de la guillotine. Mais ces divers mouvements, soit qu'ils fussent mal combinés, soit que la résistance ne fût pas encore passée à l'état de besoin, avaient échoué devant les dispositions énergiques de cette démocratie qui voulait régner, au nom de la liberté, sur les ruines fumantes de la France.

La guerre avait été déclarée à tout ce qui planait dans le pays. Les gentilshommes, fuyant la proscription ou la mort, avaient passé la frontière ; les prêtres, persécutés, avaient pour la plupart été forcés de délaisser leurs troupeaux ; les populations étaient soumises à un régime extra-légal et essentiellement anarchique ; mais tout cela n'avait pu décider l'Ouest à se soulever d'une manière sérieuse contre les entreprises chaque jour plus irritantes de la Convention.

Cependant la république avait été proclamée le 21 septembre 1792, et ce fut avec un frémissement général que l'Anjou, la Bretagne et le Poitou en reçurent la nouvelle. On y comprit alors les tendances véritables des hommes qui, tout en protestant de leur inaltérable amour pour la royauté, renversaient le trône après avoir brisé l'autel, et appelaient la France entière à consacrer, par son adhésion, les crimes inouïs dont la série ne devait pas s'épuiser de long-temps. On s'en émut profondément dans les provinces fidèles, habitées encore par un grand nombre de familles nobles, qui avaient courageusement résisté à la fièvre de l'émigration ; mais on ne courut point aux armes, et malgré quelques affaires partielles survenues sur différents points du pays, ce n'est pas de ce jour que date la grande guerre vendéenne.

Enfin, lorsque Louis XVI, qui, après la journée fatale du 10 août, avait été enfermé dans cette prison du Temple d'où il ne devait sortir que pour monter au ciel, fut juridiquement assassiné ; lorsque, résigné martyr, il arrosa de son sang royal l'échafaud de la place de la Concorde, l'Ouest comprit la nécessité de punir ce criminel attentat ; il ressentit le besoin de mettre enfin un terme aux excès des hommes qui présidaient aux destinées de la France ; mais l'émotion, quoique vive, ne provoqua pas encore une soudaine et généreuse levée de boucliers.

Ce fut seulement lorsque parvint, dans le Bocage du Poitou, la nouvelle d'un appel de 300.000 hommes, décrété par la Convention, le 24 février 1793 ; ce fut seulement lorsque les tribunaux criminels s'installèrent, investis des plus odieuses attributions, que la patience trop éprouvée des populations disparut pour laisser éclater une sublime colère, suffisamment légitimée par la sanglante politique de la révolution.

Le principe de la résistance, le voici. Le 10 mars, une pièce de canon est braquée contre les paysans assemblés à Saint-Florent pour le tirage au sort. Elle répond bientôt à leurs justes réclamations par des décharges de mitraille, qui sèment parmi eux la mort, mais non pas la crainte ; ils se réunissent alors dans une commune pensée, marchent sus à la pièce homicide, s'en emparent, dispersent aisément les administrateurs du district avec les soldats qui leur servent de gardes, et, le soir, allument un feu de joie, dont les flammes devaient être le signal d'un embrasement général.

En effet, tandis que, le lendemain, Jacques Cathelineau, à la tête de vingt-sept volontaires dévoués et résolus, s'empare du château de Jallais et de Chemillé ; tandis que Stofflet rassemble une troupe de douze cents brigands déterminés à tout tenter ; tandis que Sapinaud bat le corps d'armée aux ordres du général Macé ; tandis que le Bocage du Bas-Poitou se soulève et se donne pour chefs MM. de Béjarry et de Verteuil ; enfin, tandis que la Bretagne tout entière devient le théâtre d'une vaste insurrection, les paysans du marais de la Vendée, qui n'avaient pas été les derniers à courir aux armes, veulent élire un général qui les conduise à la victoire. Ils choisissent le chevalier de Charette, et vont par trois fois, le solliciter d'abord, lui ordonner ensuite de se mettre à leur tête. Vaincu par une insistance qui se produisait d'une façon quasi menaçante, CharetteCapture_plein__cran_04062012_115437 s'écria :

"Vous m'y forcez ; je suis désormais votre chef ; mais je fais fusiller sur-le-champ le premier qui me désobéira."

M. de La Robrie père, qui avait personnellement pris part au mouvement, fut, par suite de souffrances physiques vives et croissantes, fruits de ses vingt-quatre années de loyaux services et de plusieurs campagnes, dont deux en Hollande, où il s'acquit quelque gloire, forcé de résigner le commandement de la paroisse de Saint-Philbert, qui agissait sous sa direction ; mais il fut remplacé à l'armée royale par ses trois jeunes fils, qui, aussitôt l'élection de Charette, vinrent spontanément lui offrir leurs services. Le général, heureux de cette fortune, accueillit avec distinction les trois frères ; il nomma l'aîné et le plus jeune ses aides-de-camp, et confia à Hyacinthe un corps de volontaires, avec le titre de capitaine.

Cependant, après plusieurs combats, dans lesquels Charette établit les premières assises de la grande réputation qu'il devait bientôt acquérir, et où les frères de La Robrie se signalèrent par leur intelligence et leur intrépidité, l'on reconnut la nécessité de concentrer le pouvoir dans une seule main et d'organiser la guerre avec quelque ensemble et quelque régularité. Les chefs, indépendants les uns des autres, agissaient chacun suivant ses caprices et sans se préoccuper de combinaisons d'ensemble qui eussent pu assurer la victoire ; de là étaient résultés des échecs de nature à mettre un terme prochain à la lutte, si les soldats royalistes avaient été moins décidés à mourir pour leur foi politique et religieuse. A la suite d'une réunion des divers commandants, Charette fut nommé général en chef du pays de Retz et du Bas-Poitou, vaste contrée qui s'étend depuis les portes de Nantes jusqu'aux alentours de Luçon,  et depuis la rivière de la Maine jusqu'à l'Océan, sur une étendue d'environ vingt-cinq lieues, du nord au sud, et quinze lieues, de l'est à l'ouest. Boisé dans l'intérieur, coupé par un grand nombre de ruisseaux et de petites rivières, et vers la mer par quantité d'étiers ou canaux, ce pays est essentiellement propre à la guerre défensive ; il fut distribué en divisions, dont les chefs avaient sous leurs ordres immédiats les capitaines de paroisse, les capitaines de volontaires et les commandants de cavalerie.

Dans cette organisation, JOSEPH DE LA ROBRIE conserva le grade d'aide-de-camp du général en chef ; PRUDENT fut nommé général de la cavalerie ; enfin, HYACINTHE devint major-général de l'armée, - hautes et périlleuses fonctions dont tous les trois se montrèrent constamment dignes.

Mais, tandis que les trois frères se distinguaient entre tous par leur courage et leur ardeur guerrière, leur père, qui habitait la commune de Saint-Etienne de Corcoué, était arrêté par les bleus et traîné, avec sa femme et sa fille, dans les prisons de Nantes. On devine aisément quel fut leur sort. Coupable d'avoir pour fils trois des principaux officiers de l'armée royale, il fut condamné à mort et monta sur cet échafaud qui servait alors d'irrésistible argument à la révolution victorieuse. Sa noble compagne, convaincue du même crime, le suivit de près, et au tribunal révolutionnaire, et sur la place de Bouffay. Quant à leur fille, les juges eurent de l'indulgence pour sa jeunesse, et ils consentirent à ne la condamner qu'à la prison ... pour un temps illimité.

La guerre de la Vendée eut des chances diverses, et si elle compta des jours de gloire, elle fut attristée par des jours de malheur. Les bornes de cette biographie sont trop étroites pour que nous y tracions, même d'une manière sommaire, le récit de cette moderne et magnifique épopée ; cependant nous en devons dire les principales phases, en tant que les trois frères de La Robrie y prirent part.

Or, Charette avait une confiance illimitée dans JOSEPH DE LA ROBRIE, son aide-de-camp, et lorsqu'il eut besoin de se faire représenter au conseil supérieur de Châtillon, ce fut lui qu'il chargea de cette honorable mission, rendue plus difficile par l'influence qu'exerçait sur le conseil son président, le faux évêque d'Agra. Plus tard, et lorsque le général en chef de l'armée du Bas-Poitou se vit sur le point d'être assailli par toutes les forces disponibles de la République, il se résigna à envoyer son aide-de-camp en Angleterre, réclamer de Pitt des secours en argent et en munitions. Joseph de La Robrie, quoi qu'il en pût coûter à l'esprit de nationalité qui l'animait, partit pour Londres et y réussit au gré de ses désirs. Malgré les préventions que le peuple anglais nourrissait contre les Vendéens, il fut favorablement accueilli de tous ; admis à présenter sa requête au conseil des ministres, il fut reçu à la cour et fêté par les princesses, qui lui firent présent d'un sabre de prix et d'une riche paire de pistolets. L'objet de sa mission une fois rempli, le jeune officier, nommé par le comte d'Artois lieutenant-colonel et chevalier de Saint-Louis, voulut revenir en Vendée partager la gloire et les périls de son général ; il s'embarqua donc en hâte et fut bientôt en vue des côtes du Poitou. Cependant, Noirmoutiers étant, dans l'intervalle, retombé au pouvoir des républicains, il lui fallut chercher un lieu de débarquement sur des bords inhospitaliers où, hélas ! il devait, à vingt-quatre ans, trouver la mort. Une portion de ses dépêches fut saisie et détruite par ses meurtriers ; le reste, demeuré à bord du navire, parvint plus tard à Charette.

PRUDENT DE LA ROBRIE, à la tête de son intrépide cavalerie, fit mille prodiges de valeur ; et, malgré son jeune âge, il était craint et respecté de tous. Il figura au premier rang sur tous les champs de batailles, et chargeant tête baissée l'ennemi, il l'étonna par sa bravoure et en eut souvent raison par son habileté, sa force prodigieuse et son inaltérable présence d'esprit. Sa réputation d'homme de guerre s'est perpétuée avec le souvenir de la grande lutte vendéenne ; et, de nos jours encore, on peut entendre les fils des soldats fidèles chanter, durant l'heure du labour, ce couplet dont la naïve énergie fait pardonner l'expression peu poétique :

Faisons tous une fête
Au jeune de La Robrie,
Son chapeau sur la tête
Et son plumet joli.
Comme un foudre de guerre,
Le sabre en main,
Il f... les bleus par terre,
J'en suis témoin.

Cependant, lorsque l'armée vendéenne cessa de triompher ; lorsque Prudent vit sur le point de finir cette lutte héroïque qui devait demeurer sans résultat, il s'associa à une démarche que firent les principaux chefs vendéens auprès de Charette pour le solliciter d'accepter la paix proposée, à des conditions honorables, par les généraux ennemis. Ce fut lui qui remit au général en chef une note signée de tous ceux qui désiraient se reposer enfin de leurs longues et nobles fatigues. Charette lui fit à ce sujet des représentations amicales, mais vives, qui atteignirent au coeur Prudent de La Robrie. Blessé des reproches de son chef, et ne voyant plus désormais nulle chance de salut, il résolut de mourir comme un brave général, enseveli dans sa gloire. L'occasion lui en fut bientôt fournie. Il s'agissait de débusquer du village de la Thébaudière les républicains, qui y étaient cantonnés. Prudent seconda, à la tête de cinquante cavaliers, Couëtus, chargé de cette mission. Il y avait dans les yeux et sur le front du jeune général de cavalerie quelque chose de fatalement heureux ; il agitait fièvreusement son sabre au-dessus de sa tête et répétait avec une sorte d'égarement chevaleresque : "Voici mon dernier jour." Bientôt les bleus, délogés de leurs positions, prennent la fuite, et Prudent se jette, à leur poursuite, dans un chemin creux, qui devient le théâtre d'un nouveau combat.

Suivi de quelques cavaliers à peine, il sabre la colonne ennemie qui, revenue de sa terreur, décharge ses armes, dont le plomb atteint deux des intrépides Vendéens : l'un est tué sur le coup ; l'autre à la force de s'écrier : "Je suis blessé à mort. Vive le Roi !" Celui-là, c'est Prudent de La Robrie, qui expire, tandis que ses compagnons achèvent de remporter la victoire.

"Chéri de ses camarades et de ses soldats, dit un historien, ayant plutôt la témérité d'un volontaire que le sang-froid d'un général, Prudent de La Robrie était un véritable chevalier des temps antiques, ne possédant jamais rien en propre que ses armes et ses chevaux, et partageant tout avec ses soldats comme avec des frères."

"Prudent de La Robrie, dit Beauchamp dans l'ouvrage intitulé : Guerre de la Vendée et des Chouans, était un des plus anciens officiers de Charette et des plus distingués parmi les braves de cette armées, dont il commandait la cavalerie. Pendant la campagne d'hiver de 1794, lorsque la position difficile de l'armée et le grand nombre de troupes qu'elle avait à combattre l'exposaient chaque jour à des surprises et à des défaites, l'activité et le courage de Prudent de La Robrie surent l'en garantir. Cet intrépide partisan chargeait et faisait le coup de sabre comme un simple cavalier."

Le cadavre de La Robrie, enveloppé dans son manteau de guerre, fut transporté à Saligny ; à sa vue, Charette s'écria avec douleur : "Pauvre et noble Prudent, mort aujourd'hui comme nous mourrons demain !"

... à suivre ICI

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