NIORT - VITRÉ (79) - PIERRE-FRANÇOIS-ALCIDE TAILLEFERT, DÉPUTÉ PUIS SÉNATEUR DES DEUX-SÈVRES (1808 - 1888)
PIERRE-FRANÇOIS-ALCIDE TAILLEFERT
Pierre-François-Alcide Taillefert naquit à Niort le 5 janvier 1808 ; son père, François-Louis-Marie, fut sous-préfet de Melle pendant toute la monarchie de Juillet ; sans ambition il ne voulut jamais d'avancement, se contentant de faire le bien autour de lui et de se faire aimer de ses administrés qui étaient devenus ses amis. Il abandonna la sous-préfecture en 1845, au moment où son fils se présenta à la députation contre le candidat ministériel, M. Vuitry.
Alcide Taillefert, après avoir terminé ses études, entra dans la magistrature et fut successivement substitut aux parquets de Civray et de Saintes.
En 1845, il occupait le siège de procureur du Roi aux Sables-d'Olonne, lorsque la mort de M. Auguis, député de l'arrondissement de Melle, obligea le Gouvernement à faire procéder à une élection dans le collège électoral de Melle.
Immédiatement Taillefert donna sa démission de magistrat et posa sa candidature ; il eut à lutter contre deux candidats, M. Demarçay et M. Vuitry.
Dans sa profession de foi, il s'exprimait ainsi :
"Messieurs les électeurs ... mes principes politiques se résument dans le seul serment que j'ai prêté : fidélité au Roi, obéissance à la Charte. - Tel est le symbole de ma foi politique ... Je combattrai énergiquement toute atteinte aux droits de la dynastie régnante ... Je veux pour tous la liberté d'enseignement, mais sous la surveillance de l'État ..."
Taillefert eut le plus de voix au premier tour de scrutin, mais sans avoir la majorité absolue ; au troisième tour, il échoua seulement de quelques voix contre M. Demarçay (165 contre 176).
L'année suivante, en 1846, des élections législatives eurent lieu dans toute la France. Taillefert se présenta de nouveau dans le collège de Melle et se trouva en présence des mêmes adversaires que l'année précédente.
Dans sa nouvelle profession de foi, il s'exprimait ainsi :
"... Quand je me suis présenté devant vous pour la première fois j'étais fonctionnaire ; cependant je n'ai pas craint de déclarer qu'à la Chambre je siégerais dans les rangs de l'opposition. Aujourd'hui je suis rentré dans la vie privée. En recouvrant ma complète indépendance, je n'ai pas senti se modifier mon opinion ; on peut toujours me compter au nombre des partisans les plus sincères de la dynastie régnante et des institutions démocratiques que nous avons conquises en 1830 ..."
L'élection, comme la précédente, donna lieu à trois tours de scrutin, les électeurs restèrent fidèles à leur député et la répartition des voix fut à peu près la même que l'année précédente ; Taillefert obtint 191 voix contre 208.
Ce fut à cette époque qu'il épousa à Melle, le 12 décembre 1837, Pauline-Virginie Thomas Belleroche, dont le père était alors juge au tribunal de Melle.
De 1849 à 1870, M. Taillefert remplit les fonctions de juge de paix du canton de Celles. Grâce à son intervention bien des procès, bien des querelles de famille furent apaisées ; d'un jugement sûr, d'une aménité parfaite, Alcide Taillefert se fit aimer, comme son père l'avait fait, de tous ceux qui l'approchèrent.
En 1848, il entra au Conseil général et il en fut renommé membre chaque fois qu'il y eut des élections, jusqu'en 1877. A plusieurs reprises, il fut élu vice-président de cette assemblée.
Le 14 août 1867, l'Empereur le nomma chevalier de la Légion d'honneur.
Après les événements de 1870, lorsque le pays fut appelé à élire les membres d'une Assemblée nationale, M. Taillefert fut l'un des candidats à la députation du parti conservateur. Il fut élu le troisième sur sept par plus de 53 mille voix.
Arrivé à l'Assemblée nationale, il prit place au centre droit et fit partie de la réunion politique dite des Réservoirs, et plus tard se fit inscrire au groupe de Clercq. Nommé rapporteur de la commission chargée d'examiner les décrets du Gouvernement de la Défense nationale, son travail fut très remarqué.
Au 24 mai 1873, M. Taillefert vota l'ordre du jour Ernoul, qui amena la démission de M. Thiers et l'avènement du maréchal de Mac-Mahon à la présidence de la République.
En 1874, il fut nommé membre de la commission du budget, fit le rapport sur le budget du Ministère de la justice et en soutint la discussion.
M. Taillefert vota contre l'amnistie, contre le retour des Chambres à Paris, contre le Gouvernement républicain et contre les lois constitutionnelles ...
Lorsque l'Assemblée nationale eut terminé son mandat et qu'il fallut mettre en vigueur la constitution nouvelle qu'elle avait créée, le pays fut appelé, aux mois de janvier et février 1876, à nommer les nouveaux sénateurs et députés. Taillefert se présenta aux élections sénatoriales du 30 janvier ; il fut porté à la fois sur la liste de l'Union conservatrice et sur la liste bonapartiste, et il fut élu sénateur par 226 voix.
Il siégea dans cette haute Assemblée de 1876 à 1882.
En 1878, il fit un rapport sur une proposition de M. Jules Favre relative à la constitution et à l'administration des tutelles des indigents, puis en 1879, il fut le rapporteur devant le Sénat du projet de loi qui portait déclaration d'utilité publique du chemin de fer de Niort à Montreuil-Bellay.
Enfin, en 1880, il prit part à la discussion du budget.
Au point de vue politique, il vota constamment avec la droite, votant contre le retour des Chambres à Paris, contre l'amnistie, accordant au maréchal de Mac-Mahon la dissolution de la Chambre des députés, repoussant l'article 7 de la loi sur l'enseignement supérieur, qui interdisait aux congrégations non autorisées le droit d'enseigner.
Soumis par le sort à la réélection en 1882, M. Taillefert, déjà malade et affaibli par l'âge, ne sollicita pas de ses électeurs un nouveau mandat ; il se retira de la vie publique et vint habiter son château de Fontiville, où il vécut les dernières années de sa vie au milieu de l'affection des siens et entouré de l'estime et de la considération de tous.
Il mourut le 9 février 1888 à l'âge de 80 ans. Ses obsèques eurent lieu à Celles, au milieu d'une affluence de population considérable.
Sur sa tombe, M. Monnet, en adressant un dernier adieu à son ami, retraça la vie si digne et si bien remplie de son ancien collègue à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Le nom de la famille est éteint ; M. Taillefert n'a en effet laissé que deux filles :
- l'une, Anne-Fanny, née à Melle, le 11 janvier 1839 ; elle a épousé à Vitré, le 10 avril 1866, Jacques-Louis-Alfred Guille-Desbuttes, capitaine adjudant-major au 64e régiment d'infanterie de ligne ; né à La Mothe-Saint-Héraye le 20 mars 1830 ; ils habitaient le château de Fontiville ; elle est décédée à Vitré (79), le 21 mai 1898 ;
- l'autre, Jeanne-Marguerite-Laure, née à Melle, le 18 octobre 1845 ; elle a épousé, à Vitré, le 22 septembre 1862 Jean-Téophile-Dominique-Auguste Poinsignon, ancien commandant des francs-tireurs des Deux-Sèvres, chevalier de la Légion d'honneur ; le couple habitait le château de Lussaudière (Prailles), elle y est décédée le 16 juillet 1937.
Voir ICI les tombes de la famille Taillefert / Poinsignon.
Archives politiques du département des Deux-Sèvres : 1789 - 1889 - Tome 2 - par Émile Monnet - 1889
AN - Base Leonore - LH//2563/65
AD79 - Registres d'état-civil de Niort et de Vitré




