ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS - TOULON (83) - CHARLES-IGNACE-VICTOR BUISSON, CURÉ CONSTITUTIONNEL (1771 - 1794)
CHARLES-IGNACE-VICTOR BUISSON, curé constitutionnel de Néoules, était un curieux personnage.
Il était né à Roquebrune-sur-Argens, le 14 février 1771 et était fils de Paul Buisson, "noble verrier", et d'Anne-Gabrielle-Félicité Gaston.
Il fut dénoncé par le représentant en mission Ricord, au comité de surveillance de Néoules. Enquête faite par cet organisme jacobin, il fut arrêté début 1794 et incarcéré à Grasse. Son interrogatoire nous fait connaître son état d'esprit et ses prises de position pour le moins surprenantes : "Sa politique depuis 1789, dit-il, fut toujours celle d'un bon patriote. Ayant été obligé de quitter sa commune natale, compte tenu du fanatisme des prêtres réfractaires et des menées de l'aristocratie qui y régnait, il s'en vint à Fréjus auprès de l'évêque constitutionnel Rigouard qui l'avait accepté avec enthousiasme et lui avait donné une place de sacristain à la cathédrale. A Fréjus il avait été reçu membre de la Société populaire et avait monté la garde toutes les fois qu'il en avait été requis, il avait évidemment approuvé la Constitution civile du clergé, avait été ordonné en 1792 (il avait 21 ans !) par Rigouard, et avait bien entendu prêté serment."
Continuant sa schismatique profession de foi, il déclara que "la Convention avait fait acte de justice en faisant tomber la tête des tyrans (Louis XVI) et en arrêtant les Girondins."
Malheureux jureur qui pensait sans doute par une telle confession obtenir l'absolution du tribunal ! On l'écouta sans l'entendre, car Vachier, inébranlable dans sa fureur anticléricale qui n'épargnait pas plus les assermentés que les réfractaires, lui reprocha avec véhémence le "sacrilège laïque" d'avoir fait deux processions le 15 août 1793 et, faute irrémissible, il avait chanté l'antienne Exaudat et le verset Domine salvum fac ..., méprisant ainsi le mandement de l'évêque intrus Rigouard qui avait interdit cette prière, ce dont en fait se moquait bien le sinistre accusateur public. Mais celui-ci avait deux autres chefs d'accusation en réserve : Buisson avait osé, prétendait l'interrogateur furieux, tenir dans l'église de Garéoult un discours incendiaire pour exciter les sectionnaires à marcher contre les patriotes ; plus que cela : il avait pris les armes à Toulon et avait monté la garde au fort du Malbousquet dans les rangs des royalistes en 1793 ! Écoeuré par ces allégations qu'il prétendit mensongères, Buisson nia avec une véhémence telle qu'elle se retourna contre lui.
La délibération fut très brève, il fut condamné à mort, c'était le 24 ventôse an II (14 mars 1794) et fut exécuté le lendemain matin 25 ventôse (15 mars) à 11 heures.
Pauvre Buisson, mort à 23 ans, dans un état d'esprit tel qu'on ne peut pas le classer parmi les martyrs de la foi de la région grassoise, mais seulement comme une victime ecclésiastique de la Révolution.
Les victimes de la Révolution dans l'arrondissement de Grasse - Monseigneur Denis Ghiraldi - pdf
AD83 - Registres paroissiaux de Roquebrune-sur-Argens