SAINT-SULPICE-LE-VERDON (85) - NOTRE-DAME DE SAINT-SULPICE - 1794
NOTRE-DAME-DE-SAINT-SULPICE
Longtemps avant la Révolution, il existait dans l'église paroissiale une statue en chêne de la sainte Vierge, placée sur un autel latéral (côté de l'évangile), appelée l'autel de la Vierge.
Cette statue, connue de tout temps sous le nom de Notre-Dame de Saint-Sulpice, représente Marie tenant de la main droite l'Enfant Jésus et de l'autre un sceptre ; elle porte sur son front une couronne et est drapée d'un grand manteau, signes de sa royauté : c'est donc l'image de la Vierge-Mère, Reine du Ciel.
La statue, haute de quatre-vingt-huit centimètres est une oeuvre modeste de quelque naïf sculpteur de la fin du XVIème siècle - et non du Moyen-Âge comme on l'a publié - ; le type n'a pas trop de raideur et l'expression du visage est pleine de bonté.
Elle était, depuis deux siècles tout au moins avant la Révolution, l'objet d'une vénération spéciale. Chaque année, à l'époque de la fête de la Nativité, on voyait de pieux pèlerins, accourus quelquefois de très loin, s'agenouiller devant cette image.
Pendant la première période de l'insurrection vendéenne, c'est à ses pieds que les gâs de la paroisse venaient murmurer leur dernière prière avant d'aller faite le coup de feu contre les Républicains, et qu'ils revenaient après chaque combat remercier de sa protection la Reine des batailles. C'est donc évidemment pour remercier la foi des habitants de Saint-Sulpice que Dieu permit que, seul, le fragile morceau de bois représentant sa Mère pût échapper à l'incendie allumé par les colonnes infernales qui consuma l'église tout entière, le 28 février 1794. Ce qui est certain, c'est qu'elle fut respectée par les flammes, et alors que tout était consumé autour de cette statue, qu'il ne restait plus rien de l'autel de la Vierge sur lequel elle était posée, elle fut trouvée au milieu du foyer encore fumant dans un état parfait de conservation.
Le sacristain, Pierre Favreau, du village de la Caillaudière, qui l'avait retirée des décombres, la tint sagement cachée chez lui, derrière un coffre, jusqu'en 1800. Aussi on comprend avec quel respect et quelle joie enthousiaste les pieux paroissiens de Saint-Sulpice réintégrèrent la précieuse relique dans leur église à peine réparée, lorsque le culte put reprendre librement.
Replacée, comme jadis, au-dessus du nouvel autel de la Vierge, la statue demeura longtemps telle qu'on l'avait retirée des cendres, et son aspect noirci ne la rendait que plus vénérable.
Mais, en 1845, M. le curé Cauvin, trouvant que Notre-Dame de Saint-Sulpice n'était pas assez belle sous sa grossière couche de peinture jaune à demi-effacée par le temps et par la fumée de l'incendie, eut l'idée de lui "faire la toilette" ... Il la restaura lui-même avec un soin que nul ne peut contester ; mais il la fit dorer sur toutes les coutures en s'appliquant surtout à faire disparaître toutes les traces de vétusté. Il eut du moins une pensée plus heureuse, en profitant de cette restauration, pour la mettre dans l'église à la place d'honneur sur le maître-autel derrière la croix qu'elle dominait.
En 1889, après l'aménagement définitif de l'église reconstruite, la Vierge miraculeuse fut de nouveau nettoyée, et les visages de la Mère et de l'Enfant-Jésus reçurent une nouvelle couche de peinture, un peu trop rosée peut-être. Une fête superbe eut lieu, le 8 septembre 1889, pour commémorer le miracle de 1794 et mettre la statue à sa place définitive, le long du pilier qui fait face à la chaire. Un grand manteau de velours rouge frangé d'or partant d'un immense diadème royal, emblème du pouvoir qu'elle a sur les coeurs, encadre la Vierge placée sur un socle rouge et or. Deux lampes de style gothique - dont les veilleuses bleues choquent, par leur mauvais goût, à côté de cet ensemble tout rouge et or destiné à rappeler l'incendie de 1794 - brûlent à ses côtés. Une plaque commémorative en marbre blanc porte l'inscription suivante :
CETTE STATUE EN BOIS, DEPUIS LONGTEMPS VÉNÉRÉE DANS LA CONTRÉE, A ÉTÉ TROUVÉE INTACTE AU MILIEU DES RUINES DE L'ÉGLISE DE SAINT-SULPICE INCENDIÉE EN 1793.
NOTRE-DAME DE SAINT-SULPICE, TANT AIMÉE DE NOS PÈRES, PRIEZ POUR NOUS. - 8 SEPTEMBRE 1889.
La date de 1793 est malheureusement erronée, car l'incendie de l'église eut lieu exactement le 28 février 1794.
La dévotion traditionnelle envers Notre-Dame de Saint-Sulpice, par laquelle bien des grâces spirituelles et temporelles ont été obtenues, n'a jamais cessé d'être en honneur à Saint-Sulpice.
Le 8 septembre, jour de la seconde fête patronale de la paroisse, la chère statue miraculeuse est portée solennellement en procession à travers le bourg, procession à laquelle prend part une foule toujours nombreuse et toujours recueillie.
Extrait : Monographie de Saint-Sulpice-le-Verdon - par A. de Goué - 1913