LA PEYRATTE (79) - 1832-1833 - JACQUES BORY, DIT LE CAPITAINE NOIR
JACQUES BORY, dit LE CAPITAINE NOIR
JACQUES BORY (BORIT) serait né à Beaulieu-sous-Parthenay, paroisse Saint-Benoît, le 14 floréal an III (3 mai 1795) ; fils de Jean Borit et de Marie Garon.
A l'âge d'environ 22 ans, il se serait marié, à La Peyratte, le 22 janvier 1818 avec Suzanne Chatoiceau, veuve de Pierre Texier, âgée de 46 ans, bordière et demeurant au village du Breuil, en cette même commune.
Jacques Bory, dit le Capitaine Noir, est bordier à La Peyratte ; illettré, il commande des bandes dans la région de Bressuire et de Parthenay. (Croquants et nu-pieds par Yves-Marie Bercé 2013)
L'extrait ci-dessous, d'une lettre du Maréchal de Saint-Arnaud adressée à M. Leroy de Saint-Arnaud, avocat à Paris, signale que le Cavalier Noir était plutôt insaisissable :
"Gourgé, 1er juillet 1832 ... Le sous-préfet de Parthenay m'a donné sa parole de me faire nommer capitaine si je parvenais à prendre le chef de bande nommé Bory, dont la maison est à deux lieues de Gourgé. Je l'ai déjà blessé de deux coups de feu, mais légèrement. Il m'a échappé deux fois, gare à la troisième. Je le travaille de près ; si je le manque, je ne crois pas que d'autres l'attrapent. Il m'a fait passer bien des nuits blanches et une entre autre perché sur un arbre. Dix hommes que j'avais avec moi étaient aussi perchés autour du même champ où devait se tenir un conciliabule d'une vingtaine de chouans ; ils furent sans doute prévenus comme à l'ordinaire, car ils ne vinrent pas. ..." (Lettres du Maréchal de Saint-Arnaud, 1832-1854 - Tome 1, Edition 3).
ASSASSINAT DU MAIRE RAVIX
Le 10 août 1832, cinq chouans se présentèrent chez le sieur Ravix, maire de la commune de Lhoumois ; il ne trouvèrent que sa femme, et lui demandèrent où était son mari, auquel ils voulaient parler. Elle répondit qu'il était absent, et qu'elle ignorait où il était. Ils se firent alors servir du vin, de l'eau-de-vie et des liqueurs ; puis, lassés d'attendre, ils s'en allèrent en menaçant de mort la dame Ravix, si elle parlait de leur visite.
En franchissant le seuil de la porte de la cour, ils rencontrèrent le sieur Ravix qui revenait chez lui, le forcèrent à entrer, et exigèrent qu'il leur remit ses armes, de l'argent et de l'eau-de-vie ; il s'y refusa d'abord, mais ils menacèrent de le tuer, et il livra deux fusils, deux bouteilles d'eau-de-vie, une carnassière, une poire à poudre, des balles, du plomb et du pain. Bory, qui était le chef de la bande, lui signifia qu'il fallait les conduire et leur indiquer le chemin de la forge de fer de la Peyratte, que pourtant ils connaissaient bien. Pendant ce temps deux chouans étaient allés à la borderie voisine demander, pour attacher leur victime, des cordes qu'on leur refusa ; ils prirent une courroie dans l'écurie. A peine Ravix avait-il fait avec les chouans cent pas hors de sa maison, que deux détonations se firent entendre ; la dame Ravix accourut aussitôt, et elle vit son mari gisant et baigné dans son sang ; il expira peu de momens après. Le rapport de l'homme de l'art constata que Ravix avait été atteint dans le dos, et à bout portant, d'une balle qui lui avait traversé le corps ; qu'une autre avait passé dans une des manches de sa blouse, et qu'enfin il avait été meurtri à coups de crosses de fusil.
Ce crime fut un de ceux qui motivèrent la condamnation à mort de Bory par la Cour d'assises des Deux-Sèvres (Niort). Mais on savait que Fouchereau marchait à cette époque avec le Capitaine Noir, et déjà des renseignemens indiquaient qu'il n'avait pas été étranger à ce crime. Le 4 mai 1834, après son arrestation, Fouchereau fut confronté avec la veuve Ravix et le nommé Philippon, journalier, qui travaillait ce jour-là à Lhoumois. Tous deux ont reconnu Fouchereau pour un des assassins ; la veuve Ravix surtout affirme qu'il était un des plus acharnés à suivre, dans la maison, tous les pas de son mari. (La Gazette des Tribunaux).
On est parvenu à saisir dans la métairie de La Roucherie, à deux lieues de Parthenay, le chef de bande Bory, qui s'étoit acquis de la célébrité. (L'Ami de la religion et du Roi - Vendredi 23 novembre 1832)
Bory, le Capitaine Noir, a avoué dans ses interrogatoires avoir contribué avec cinq autres à l'enlèvement et à la séquestration du gendarme Saugier (commune de Saint-Germain-Longue-Chaume). Lorsqu'il fut arrêté, il avoua aux militaires de l'escorte qu'il avait participé au désarmement du sieur Bouchet (du Plenître, commune de la Peyratte) (Cour Royale de Poitiers - Arrêt qui renvoie à la cour d'assises de Niort, François Petit et 41 autres individus)
Jugé à Niort, Jacques Bory a été condamné à la peine de mort pour attentat contre la sûreté intérieure de l'Etat, pour assassinat précédé de vol commis sur la personne du sieur Ravix, maire de la commune de Lhoumoy, et pour tentative d'assassinat. (Journal des débats politiques et littéraires - Dimanche 22 septembre 1833)
COURS D'ASSISES DES DEUX-SEVRES (NIORT)
Audiences des 11, 12 et 13 juillet 1833
Bory comparaissait sous le coup de sept chefs d'accusation, tous très graves ; il avait fait partie des bandes qui infectent la Vendée, et y avait exercé un emploi ou commandement ; aussi lui reprochait-on :
1° d'avoir pris part à un attentat dont le but était de détruire le gouvernement ou d'exciter à la guerre civile ;
2° de s'être rendu coupable d'un vol avec violence, au préjudice d'un sieur Lemoffe, colporteur ;
3° d'avoir commis un vol à main armée, ensemble et de concert avec une ou plusieurs personnes, la nuit, au préjudice de M. Ravix ;
4° de s'être rendu coupable de meurtre avec préméditation sur la personne de ce même Ravix ;
5° d'avoir tenté de donner la mort au sieur Bouchet fils, étudiant en droit ;
6° d'avoir commis, avec un autre brigand, un vol avec armes et sur la voie publique, au préjudice d'un sieur Feslxeuf ;
7° d'avoir volé les armes du sieur Bouchet père, après avoir fait usages d'armes.
Cette affaire, portée aux assises d'avril, n'y reçut point solution, quoique Bory eût formé, avant celles du précédent trimestre, un pourvoi en cassation pour cause de suspicion légitime, et que trois mois après il ne justifiât qu'imparfaitement de la réception de sa requête à la Cour. En effet, aux assises d'avril, il laissa, suivant le conseil qu'il en avait reçu sans doute de ses amis politiques, procéder aux débats de l'affaire, et, fidèle au système qui lui avait été suggéré de garder le plus absolu silence, il se tût sur la décision de la Cour de cassation qui ordonnait communication. Le ministère public put cependant éviter le piège qui lui était tendu, parce qu'il fut officiellement informé, au moment où il allait faire son réquisitoire. ...
M. le président a résumé les débats et posé les questions au jury, qui y a répondu affirmativement pour l'attentat contre la sûreté intérieure de l'Etat, pour le vol et l'assassinat de Ravix, pour la tentative de meurtre avec préméditation sur Bouchet fils. En conséquence Bory a été condamné à mort, et on n'a point aperçu la moindre altération sur ses traits pendant la longue lecture de tous les articles qui répriment les divers faits dont il avait été déclaré coupable. (la Gazette des Tribunaux, mercredi 24 juillet 1833, n° 2477)
Bory a reçu, avant de mourir, toutes les consolations de la religion. Il est parti de Niort le matin même de l'exécution, et un prêtre de cette ville l'a accompagné pendant la route. On dit qu'à ses derniers instants il paraissait fort abattu. Ce sanglant spectacle avait attiré très peu de monde. (La Gazette des Tribunaux - Lundi 23, Mardi 24 septembre 1833 - huitième année - numéro 2531)
Voici ce que dit le procureur général de Poitiers : "Hier, 18 septembre 1833, a eu lieu à Parthenay l'exécution de Bory. C'était un jour de marché. Les spectateurs se pressaient en foule sur la place publique. Bien qu'aucun cri n'ait été proféré pendant l'exécution, celle-ci a produit le meilleur effet possible, d'autant plus qu'il y avait déjà eu beaucoup de criailleries sur le bruit que l'on avait répandu de la réussite de son pourvoi en grâce." (Y.-M. Bercé, Croquants et nu-pieds, Paris, 1974, p. 195).
En 1833, Bory, dit le "Capitaine Noir" et qui fut guillotiné à Parthenay le 18 septembre 1833, se rendit avec ses chouans chez le maire du Pin qui était débitant de tabac. Si l'on se contenta de le maltraiter, par contre sa maison fut mise au pillage. (Cerizay - Constant Vaillant - Tome 1 - 1980 - Hérault Maulévrier)