SAINT-CHRISTOPHE-DU-LIGNERON (85) - GASTON, UN PERRUQUIER GÉNÉRAL
GASTON
On ne sait pourquoi la plupart des historiens de la Vendée ont affublé le perruquier de Saint-Christophe du nom de Gaston Bourdic. Il se nommait, en réalité, Jean-François Gaston, sans plus (... un nom qui est encore porté en Vendée, et fort honorablement.)
Il y eut bien, dans les rangs vendéens, un officier du nom de Bourdic, mais il n'a rien de commun avec le perruquier de Saint-Christophe.
Jean-Marie-Claude Bourdic figure, en effet, dans la liste établie en 1815 par le prince de la Trémoille, des officiers qui se sont distingués pendant les Guerres de Vendée. Le R.P. Drochon, dans sa réédition de l'ouvrage de Crétineau-Joly, donne ses états de service (T.V., p. 37) : "A servir sous le général Bonchamps, en 1793. A fait la campagne d'outre-Loire. A rejoint le général Charette en qualité d'aide-de-camp. Fait prisonnier par le général Travaux (sic), il a été détenu pendant quatre ans et demi dans l'île de Ré. Ses deux oncles ont été fusillés pour cause de leur attachement au roi."
Bittard des Portes (Charette et la Guerre de Vendée) le cite, un peu au hasard, semble-t-il, parmi d'autres (p. 347), mais aussi au nombre des derniers compagnons de Charette jusqu'au 21 février 1796 (p. 576).
Insurgé dès le premier jour, il avait eu, déjà, en juin 1791, maille à partir avec les autorités, pour avoir, étant "tambour de la garde nationale" de sa commune [Saint-Christophe-du-Ligneron], tenu "des propos incendiaires". Le 30 juin 1791, il comparaissait devant Claude-Louis-Joseph Boisard, juge de paix du district de Challans, assisté de son greffier, Robert Malescot : "Interrogé sur son nom, âge, qualité et demeure ; a dit s'appeler Jean François Gaston, âgé de 24 ans, perruquier, demeurant à Saint-Christophe-du-Ligneron" ... ce qui clôt la discussion
Est-ce lui, comme on l'a dit aussi, qui envoya, le 12 mars 1793, une sommation au district de Challans ? Peut-être, mais en tout cas, ce n'est pas lui qui commandait à Challans les jours suivants. Aucune des nombreuses dépositions de patriotes prisonniers ne l'y mentionne. Le 12 mars, Gaston battait la campagne aux environs de la Garnache, avec une vingtaine d'hommes qui, dans la soirée, arrêtèrent, à la Maison Neuve, suivant sa déclaration du 27 mai suivant, le chirurgien Julien Letenneur, de Challans, qui visitait des malades. Ils le conduisirent à la Garnache, où ils couchèrent, puis à Challans. Letenneur fut alors mis en prison, d'où il sortit le dimanche suivant, sur ordre du Comité local, dont il donne la composition : Guerry du Cloudy, Baumler, O'Byrn, Louis de Régnier, auxquels vinrent s'adjoindre ensuite les deux Massé de la Barbelais, les deux demoiselles Imbert de la Terrière, la dame Mauclerc, Bethus et Dubois, de Soullans. Ainsi qu'on le voit, pas question de Gaston, qu'on retrouve, dans le courant de mars, à la tête d'une troupe d'insurgés aux environs de Commequiers.
Toutes les pièces officielles suivantes sont signées de Baumler, qui semble avoir été, dès le 13 mars, le Commandant de la garde royale à Challans.
Gaston devait connaître, à l'été suivant, une célébrité aussi éclatante qu'inattendue en Europe. En juin et juillet 1793, il ne fut question, dans les capitales étrangères, que d'un certain Gaston, commandant en chef des armées vendéennes. Les princes et les émigrés lui dépêchèrent aussitôt des émissaires pour le sonder sur ses intentions et ses moyens. Le premier fut Tinténiac qui, en fait de Gaston, ne trouva que les chefs connus, d'Elbée, Bonchamps, Lescure et autres.
Mais les gouvernements eux-mêmes s'étaient émus, le Cabinet de Londres, et le stathouder de Hollande, et jusqu'au roi de Prusse en personne qui, souhaitant d'entrer en rapports avec lui "Monsieur de Gaston, général et commandant en chef de l'armée royaliste en France", s'enquérait, par le truchement d'un colonel français attaché à sa personne, des moyens d'ouvrir avec l'intéressé "une correspondance prompte et sûre". L'histoire ne manque pas de piquant : "Seriez-vous Gaston de Vauvineux, capitaine de vaisseau, mon cousin et ami ? mandait le colonel ... Si vous n'êtes pas ce Gaston et que je n'aye pas l'honneur de vous appartenir, je vous prie, général, d'agréer de la part d'un bon Français mon tribut d'estime et d'admiration pour vous et de me permettre de vous témoigner combien je suis heureux et flatté des bontés et de la confiance dont Sa Majesté le roy de Prusse veut bien m'honorer, puisqu'elles me procurent l'honneur de correspondre pour le bien de mon pays avec le héros de la France ..."
La renommée auréolait le nom de Gaston, la légende devait s'en emparer et on verra Hugo lui-même lui faire une place dans la galerie des personnages de Quatre-vingt-treize, le transformant, il est vrai, en capitaine de paroisse bas-breton ; des manants partout, déploraient le comte de Boisberthelot et le chevalier de la Vieuville, aussi bien chez les républicains que chez les Vendéens ; et la Vieuville d'énumérer : Santerre le brasseur, Sepher, l'ancien suisse de Saint-Eustache, Cathelineau, le charretier naïf, Stofflet le garde-chasse, Joly l'horloger, et Gaston, le merlan ... Mais Boisberthelot de répliquer : - Mon cher La Vieuville, je fais un certain cas de ce Gaston. Il n'a point mal agi dans son commandement de Guéménée. Il a gentiment arquebusé trois cents bleus après leur avoir fait creuser leur fosse par eux-mêmes".
Mais ceci est du roman et, quand à "Monsieur de Gaston", ce n'était qu'un mythe.
Cependant, les historiens qui veulent voir dans l'insurrection vendéenne l'aboutissement d'une longue conspiration, par exemple Léon Dubreuil (Les Insurrections de l'Ouest, I, p. 255), ne l'entendent pas ainsi et font de ce M. de Gaston - qui n'aurait été qu'un pseudonyme cachant un général vendéen (Bonchamps) - l'un des maillons d'une chaîne allant de La Rouërie à Guillot de Folleville, en passant par le colonel d'Angely, la Godinière et Tinténiac. Le fait que le rôle véritable du pseudo évêque d'Agra n'ait jamais été complètement éclairci n'autorise en l'occurrence aucune conclusion.
La renommée - posthume - du perruquier de Saint-Christophe ne résulte certainement que d'un quiproquo, dont les responsables pourraient bien être tout simplement les représentants Auguis et Carra qui, dès le début de l'insurrection, avaient cité son nom dans un rapport à la Convention. Comment se seraient-ils doutés qu'une mort rapide et obscure allait si tôt mettre fin à sa carrière ?
Extrait :
Charette chevalier de légende
Julien Rousseau
1963
UN PERRUQUIER GÉNÉRAL
GASTON BOURDIC, CHEF VENDÉEN
Quand une guerre civile est sur le point d'éclater, les hommes instruits et réfléchis hésitent en songeant aux violences, aux malheurs effroyables qu'elle doit entraîner fatalement. Ceux dont l'esprit est moins cultivé et dont le caractère est énergique se laissent emporter par leur passion, le désir de faire triompher leurs idées ; ils se jettent dans la lutte, sans en calculer les chances, avec le mépris de tous les périls.
En 1793, dans l'insurrection de la Bretagne et de la Vendée, on vit les paysans et les ouvriers des campagnes prendre les armes avant les gentilshommes et souvent les forcer de se mettre à leur tête.
Le perruquier Gaston, qui pendant plusieurs semaines fut, aux yeux de la Convention et de toute l'Europe, le principal chef des insurgés, était un de ces hommes qui n'hésitent pas à se lancer dans les hasards de la guerre civile.
C'est une figure curieuse qu'on a peu étudiée. J'ai réuni dans la notice qui va suivre des renseignements qui la préciseront.
On ne sait pas exactement le lieu de sa naissance. Son nom était Gaston Bourdic. M. Charles Dugast-Matifeux, dans une note de quelques lignes que j'ai trouvée parmi les documents sur la Révolution donnés par lui à la Bibliothèque de Nantes, dit qu'on le croyait originaire du Dauphiné. Il vint à Nantes et y fut garçon chez un coiffeur nommé Boquet, ardent royaliste. Quelque temps avant la Révolution il alla s'établir comme perruquier à Saint-Christophe-du-Ligneron, petit bourg voisin de Challans.
Gaston (c'est sous ce nom qu'on le connaissait), était "un homme de la taille de cinq pieds un ou deux pouces au plus, bien fait, joli de figure," dit le procès-verbal dressé le 15 avril 1793, après son exécution.
Il aimait beaucoup la parure, l'élégance. Petit Figaro, il devait nourrir des rêves ambitieux.
Quand éclata l'insurrection, il y parut un des premiers.
Dans la nuit du 11 au 12 mars, les administrateurs du district de Challans écrivaient au département de la Vendée : "Le tocsin de la révolte a sonné toute la soirée dans plus de dix paroisses de ce malheureux district" (Bibliothèque de Nantes, collection Dugast-Matifeux). Gaston était de ceux qui le faisaient sonner. Il rassembla une bande et, dans un combat contre les troupes envoyées pour la disperser, il tua un officier (M. Dugast-Matifeux dit un colonel), et se revêtit de son uniforme qui lui donna tout de suite un grand ascendant sur les paysans. Ils le proclamèrent leur général.
Le 12 mars, il arrêta au village de la Maison-Neuve, paroisse de la Garnache, le chirurgien Julien Le Tenneur, de Challans, qui s'y trouvait "à voir des malades". (Interrogatoire de J. Le Tenneur, le 27 mai 1793. Collection Dugast-Matifeux).
Le même jour il fit au commissaire départemental Massé sommation de rendre le chef-lieu du district de Challans. (CH.-L. Chassin, Préparation de la Guerre de Vendée, tome III, page 396). Les autorités républicaines de cette ville, se voyant presque enveloppées par l'insurrection triomphante furent obligées de se réfugier aux Sables-d'Olonne, où elles arrivèrent, "après une marche de huit lieues, dans des chemins affreux, avec une pluie presque continuelle," écrit Massé au département.
Une fois maîtres du district, les insurgés adressèrent le 14 mars, à ses administrateurs retirés aux Sables, une longue lettre commençant par ces mots "Nos chers frères" où ils exposent leur attitude et leurs revendications.
"Nous vous écrivons, disaient-ils, les larmes aux yeux et les armes à la main. Nous ne demandons pas la guerre, mais nous ne la craignons pas si vous nous y provoquez. Quelle suite de grands malheurs s'offre à nos yeux si vous nous forcez à prendre ce dernier parti ! Nous sommes ici au moins 18.000 hommes assemblés de toutes les paroisses circonvoisines et à chaque minute il en arrive d'autres et il nous en est offert, tous décidés à mourir pour la victoire ..."
Parmi les nombreuses signatures qui figurent au bas de cette pièce, je ne vois pas celle de Gaston. Peut-être ne savait-il pas écrire ? Peut-être était-il déjà parti de Challans pour soulever d'autres paroisses, car il paraît fort actif ? Cette activité le mit immédiatement en relief.
Dans la séance de la Convention du lundi 18 mars, on lut une lettre du Représentant du peuple Niou, datée de Saint-Hermand (Vendée) le 15 mars, où il racontait les débuts de l'insurrection et ajoutait en post-scriptum : "Les scélérats qui commandent les armées rebelles se font appeler Gaston et Verteuil". (Moniteur du 19 mars 1793, page 354).
C'est ainsi que le nom du perruquier Gaston Bourdic fit son apparition dans l'Histoire et de la tribune retentissante de la Convention se répandit en Europe et dans le monde entier.
A la séance du jeudi 21 mars, on lut encore une lettre des Représentants Trullard et Niou, datée du 19, où se trouvent ces mots : "Nous apprenons de toute part que les divers corps (des insurgés) sont commandés par un Verteuil, un Saint-Hermine, un Gaston." (Moniteur du 23 mars 1793, page 369).
Mais tandis que les commissaires de la Convention, reculant devant l'insurrection qui inondait déjà toute la Basse-Vendée et ignorant absolument ce qui s'y passait, ne voyaient pour chef de ce grand mouvement qu'un perruquier vêtu d'un uniforme de colonel, des hommes plus redoutables et plus autorisés, le vieux chirurgien Joly, les frères Guerry du Cloudy et Guerry de la Fortinière, le lieutenant de vaisseau Athanase de Charette, se mettaient en mesure d'organiser les forces catholiques et royalistes.
D'après la déposition un peu confuse d'un tailleur de pierres nommé Perraudeau devant le district des Sables (Chassin, préparation de la guerre de Vendée, tome III, page 410), Gaston à la tête des insurgés de Commequiers dut prendre part, le 24 mars, à l'attaque dirigée contre cette ville par Joly et les Savin.
Le 30, les représentants Carra et Pierre Auguis, dans une proclamation datée de Fontenay, promirent au nom de la Convention nationale six mille livres de gratification à ceux qui le leur livreraient.
Le 8 avril, le général Boulard, l'un des officiers républicains les plus habiles, sortit des Sables avec son armée pour combattre les insurgés.
Le 12, avec deux divisions, il arriva à Challans d'où les royalistes s'étaient retirés dans la nuit. Le 13, à cinq heures du matin, les bandes de Charette, jointes à celle de Gaston, de Joly, de Guerry du Cloudy, se ruèrent sur Challans. Boulard les repoussa en leur infligeant une perte considérable, puis marcha sur Beauvoir avec une de ses divisions, laissant à Saint-Gervais l'autre commandée par le lieutenant-colonel Esprit Baudry d'Asson, républicain farouche qui signait souvent ses lettres "le sans-culotte Baudry" et portait une haine féroce à son frère Gabriel, chef royaliste dont il avait mis la tête à prix. (Beauchet-Filleau, Dictionnaire des Familles de l'ancien Poitou, tome Ier, page 232). Il est à remarquer d'ailleurs qu'un certain nombre de familles nobles étaient très divisées par la politique. La plupart des généraux qui réprimèrent l'insurrection à ses débuts et arrêtèrent son développement appartenaient à l'aristocratie. C'étaient Canclaux, la Bourdonnaye, Biron, Beaufranchet d'Ayat, etc. anciens officiers des armées de Louis XVI qui avaient conservé leurs fonctions.
Le 15 avril 1793, à midi, les insurgés commandés par Charette et Gaston "au nombre de huit mille hommes sur trois colonnes" (Rapport de Boulard ; Chassin, Vendée patriote, tome Ier, pages 220,221), attaquèrent la division d'Esprit Baudry au village de la Salle près Saint-Gervais.
"L'action fut très vive, dit le commissaire départemental Gallet dans une lettre écrite des Sables, le 17 avril 1793, aux administrateurs du département de la Vendée. La position de notre armée n'était pas fort avantageuse pour faire jouer l'artillerie ; le succès de cette affaire est dû au feu nourri et soutenu de l'infanterie qui fonça sur les brigands, bayonnette à la main. La perte des rebelle est de quatre-vingt, parmi lesquels on a reconnu le fameux Gaston et deux prêtres dont l'un a été tué dans un confessionnal de l'église de Saint-Gervais". (Bibliothèque de Nantes. Collection Dugast-Matifeux).
Le récit de Boulard porte, contrairement à celui de Gallet, qu'une partie de la division d'Esprit Baudry "occupait une hauteur et canonna avec tant de succès que l'ennemi prit la fuite ; la cavalerie chargea à merveille ; la déroute fut si forte que l'ennemi poussa presque à la course jusqu'à Challans ; la route avec des marques de sang et un de ces malheureux a laissé une de ses jambes à la chapelle de Challans".
Le manuscrit du général Boulard "fut revu par les Représentants en mission", dit M. Chassin. Il fut aussi peut-être corrigé par eux, car il est difficile de le mettre d'accord avec la lettre de Gallet et le procès-verbal dressé par les officiers d'Esprit Baudry, le 15 avril, à sept heures du soir, au bourg de Saint-Gervais, après le combat, procès-verbal que M. Chassin a copié aux Archives historiques de la Guerre et publié dans sa Vendée patriote, tome Ier, page 192.
Voici ce qui concerne Gaston, qui avait fui du côté d'un village voisin.
"Dans le village, entre une grande et une petite maison, où est un pradeau fermé de fossés couverts d'une haie d'ajoncs, dans lesquels plusieurs volontaires étaient accourus pour faire des recherches, des volontaires trouvèrent dans les ajoncs un homme de la taille de cinq pieds un ou deux pouces au plus, bien fait, joli de figure et fort leste, vêtu d'un habit de drap gris blanc, revers et parements rouges, ayant sur l'avant-bras gauche deux galons bleus et sur les bras un galon d'or en chevron brisé, un gilet de soie à petits carreaux, culotté gris blanc, bottes aux jambes, chapeau gancé bordé d'un galon blanc en fil, cocarde de basin blanche, armé d'un pistolet à deux coups et d'un briquet pendant tout le long de la cuisse.
Il sortit des ajoncs où il était caché et franchit le fossé pour se sauver. Trois volontaires le franchirent en même temps et le terrassèrent. Accoururent alors des chasseurs du Midi et des volontaires de Châteauneuf. Chacun le dépouillait de ses armes et effets. Un volontaire de Châteauneuf lui ayant donné un coup de sabre à la tête, il s'écria : Quel est le j. f. qui me fait du mal ? Il répéta plusieurs fois : Ne me tuez pas ! Ne me tuez pas ! Chacun se disputa la gloire de l'amener. On le conduisit au bourg de Saint-Gervais ; et plusieurs particuliers du bourg et des volontaires de l'armée ayant reconnu cet homme pour être Gaston, on cria : Gaston est pris ! Il convint lui-même qu'il était Gaston de la paroisse de Saint-Christophe. Les uns disaient : C'est lui qui m'a pillé ! d'autres disaient : C'est celui qui a rançonné et persécuté tous les patriotes ! D'autres disaient enfin : Ce scélérat doit avoir plus de deux cent mille livres en bourse ; c'est de son arrivée dont on nous menace toujours !
Dans cet endroit, ayant aperçu une autre colonne de brigands fort nombreuse, qui à la faveur d'un taillis et futaie de large étendue sur la droite dudit bourg, entrait en icelui, on fusilla Gaston de peur de le laisser échapper, et les volontaires de notre armée n'eurent que le temps de se replier sur nos canons, hors du bourg, sur le chemin de Beauvoir, parmi les fusillades des brigands, qui étaient entrés dans plusieurs maisons et tiraient par les croisées, tandis que d'autres, dans le bourg, dont un à cheval, grand homme sec (c'était Charette), criait aux volontaires : Rendez-vous, malheureux, rendez-vous ! mais aucun ne fut pris ; un seul fut frappé d'un coup de baïonnette en traversant le fossé d'ajoncs".
M. Dugast-Matifeux dit que Gaston fut fusillé "dans la rue principale de Saint-Gervais, à la rencontre du chemin du cimetière". Si après sa mort, les volontaires républicains "n'eurent que le temps de se replier sur leurs canons, hors du bourg, sur le chemin de Beauvoir" pour se soustraire aux bandes de Charette rentrées dans Saint-Gervais, celles-ci n'étaient donc pas en pleine déroute comme le racontent Gallet et Boulard qui n'assistaient point à la bataille.
Il est très difficile de savoir la vérité exacte sur ces combats. Les deux partis cherchaient à grossir leur succès et à cacher leurs pertes.
La division d'Esprit-Baudry réclama la récompense de six mille livres promise par Carra et Auguin, le 30 mars, dans leur proclamation affichée sur les murs de Fontenay et répandue dans toute la Vendée.
Gaston était mort, mais l'Europe l'ignora jusqu'au mois d'août 1793, car le Cabinet anglais adressa, à cette époque, "au général Gaston" les lettres qu'il confia au chevalier de Tinténiac pour les chefs de l'insurrection royaliste dont il semblait ne pas soupçonner le caractère et l'importance.
JOSEPH ROUSSE
Revue de Bretagne et de Vendée
Quarante-deuxième année - Tome XX
1ère livraison - Juillet 1898