LE BOUPERE (85) - LA PELLISSONNIERE
LA PELLISSONNIERE
A quelques envolées de ce bourg du Boupère que son église fortifiée a pour toujours rendu célèbre, se dressent, au sein de forêts séculaires, les jolies tours féodales de la Pellissonnière.
L'origine de cette seigneuriale demeure est lointaine et remonte vraisemblablement à une famille Pellisson, dont un des membres fonda, le 13 septembre 1383, dans l'église du Boupère, une chapelle dite des Pellisson, plus tard de la Madeleine, et qui est aujourd'hui disparue.
Un aveu de 1647 nous donne la description de ce qu'était l'antique Pellissonnière : "Item, mon hôtel et château de la Pellissonnière, ses haultes et basses cours, tours, pavillons, fuyes, greniers, escuries, prissons, celliers, granges et autres édifices, fossez, pont-levis et aultres murailles ; la cour de hault, granges, greniers et estables joignant et tenant à la basse-cour, le dict fossé et murailles entre deulx est close et renfermée de haultes murailles avec ses prés clos, jardin, terrasses, garennes, pasturages, contenant le tout cent cinquante bosselées de terre ou environ ..."
Une des tours de cette enceinte se voit encore, pittoresquement habillée de lierre, dans la partie sud-est du parc.
Au sombre manoir du moyen-âge a succédé une des plus riantes demeures de cette contrée, si riche en sites pittoresques et en élégantes habitations.
Le château actuel, sous les fenêtres duquel se déroule à l'horizon l'onduleuse chaîne des Alpes Vendéennes, se compose de deux vastes corps de bâtiments formant équerre au nord, avec une tour à pans coupés du XVIe siècle, à l'angle, et flanqués au midi de deux pavillons carrés du temps de Louis XIII. La tour d'angle, de forme octogonale, qui contenait jadis l'escalier, est accompagnée d'une petite tourelle moderne et percée d'une jolie porte du XVIe siècle à linteau carré encadré de pieds droits surmonté de pinacles, lesquels sont reliés par une accolade à branches très surbaissée, ornée de choux frisés et de fleurons. Un médaillon sculpté au dessus du linteau de la porte renferme l'écusson des Grignon. Sur une autre porte Renaissance, à l'aile droite, on voit également les armes d'Antoine de Grignon et de Charlotte d'Ausseure, sa femme, avec la date de 1587.
Successivement possédée par les Grignon et les Bagneux, la Pellissonnière appartient aujourd'hui à l'un des descendants de cette dernière famille, originaire du Haut-Poitou, M. le vicomte Zénob Frottier de Bagneux, qui l'a restaurée avec un goût parfait.
Il y a notamment transporté, en 1861, un très précieux vestige de l'ancien prieuré de Moureuil, une fort belle cheminée Renaissance, qui daterait suivant M. O. de Rochebrune, de 1530, et devrait être attribuée aux mêmes artistes qui ont exécuté celle de Coulonges-les-Royaux.
Aussi bien, le culte des arts n'est point le seul que professe M. Zénob de Bagneux. Bibliophile, numismatiste et voire même géologue, l'aimagle châtelain de la Pellissonnière y a réuni une triple collection de livres, de médailles et de minéraux, qui mérite d'être signalée. Nous devons une mention spéciale au médaillier qui renferme de nombreuses monnaies grecques, romaines et gauloises, une collection importante de monnaies royales françaises, et une merveilleuse série de monnaies féodales ...
Ses cartons ne sont pas moins riches en manuscrits. Nous signalerons notamment les Archives du Marquisat de Pouzauges, colligées au siècle dernier par Moigast, l'avocat feudiste de Mortagne, et qui ont échappé par miracle aux torches incendiaires de la Révolution ; un Registre des professions de la Chancellerie du grand prieuré d'Aquitaine (1706-1791) où sont inscrites, avec les signatures, les professions dans l'ordre de Malte d'un grand nombre de personnages appartenant à des familles du Poitou ; et enfin un nombre considérables de pièces signées, concernant les évènements vendéens de 1793, 1815, 1830.
Les souvenirs historiques ne manquent pas davantage à la Pellissonnière.
En voici deux :
Au milieu du XVIIe siècle, Claude Olivereau, seigneur du Boitissandeau, s'étant pris de querelle avec son voisin, M. de Légonnière, seigneur d'Ardelay, un duel s'ensuivit. La rencontre fut terrible et messire Olivereau y ayant été grièvement blessé, fut porté à la Pellissonnière, où il succomba, au bout de trois semaines, entre les bras du Père Ambroise de Ste-Anne, qu'on avait mandé du couvent de la Flocellière.
L'autre évènement eut lieu à près de 2 siècles de là.
Le 9 juillet 1828, la duchesse de Berry vint à la Pellissonnière et y passa la nuit. Elle y arriva des Herbiers à cheval et fut saluée par les acclamations enthousiastes de la foule accourue de toutes les localités environnantes. En souvenir de l'excellent accueil qu'elle reçut à la Pellissonnière, elle fit don à M. le Comte de Bagneux de son portrait à l'huile par Paulin Guérin. La copie de cette toile existe à la Pellissonnière. L'original appartient à M. Alfred de Bagneux, frère de M. Zénob. C'est également lui, qui, en sa qualité d'aîné, possède le précieux original de la Commission donnée à son père par la duchesse de Berry à l'occasion du soulèvement vendéen de 1832.
Parmi les illustrations anciennes des Frottier, nous citerons un archevêque de Bordeaux au IXe siècle, un évêque de Poitiers au Xe. Pierre Frottier, qui assiste à la 1ère croisade de St Louis, et nombre de vaillants officiers dont le nom se retrouve à toutes les pages glorieuses de notre histoire ...
(R. VALLETTE)
Archives Départementales de Vendée
Bulletin paroissial Le Boupère
1911