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La Maraîchine Normande
3 août 2014

LE VICE-AMIRAL COMTE D'HECTOR

LE VICE-AMIRAL COMTE D'HECTOR
(1722-1818)

Extrait des Notes laissées par M. Ludovic VALLETTE
Recueillies et mises en ordre par
M. RENÉ VALLETTE

 

acte de naissance de charles Jean d'Hector


Charles-Jean d'Hector est né à Fontenay-le-Comte, le 24 juillet 1722, dans ce vieux faubourg des Loges qui a donné naissance à tant de nos hommes illustres.
Son père, Charles-Louis d'Hector, seigneur de la Cheffretière, marin lui-même, périt dans une campagne au Canada, sous le commandement de M. de Sévigné.
Le jeune Charles n'avait alors que neuf ans.


Venu au monde chétif et malingre, il s'était vite fortifié, et, sous l'influence de la vie au grand air, sa constitution n'avait pas tardé à devenir robuste. En effet, pour pouvoir vivre avec ses faibles ressources, Mme Madeleine de Raguaine, sa mère, avait dû se retirer à Saint-Georges-de-Montaigu, dans le peu de biens que lui avait laissé son mari. Le jeune Charles ne reçut donc pas d'autres leçons que celles du maître d'école de l'endroit.


Sa mère se remaria bientôt, et voulut alors lui faire donner une instruction plus complète. L'esprit léger et inattentif de l'élève rendit, paraît-il, ces essais inutiles. C'est alors qu'on tenta de le faire entrer dans la compagnie des Cadets, à Rochefort. Cette fois, ce fut son défaut d'âge et de taille qui y mit obstacle. Cependant, au lieu de le renvoyer chez son beau-père, le chevalier de la Saussaye, qui était son parent, l'embarqua sur la flotte qu'il commandait. Après une campagne de six mois à la Martinique, il revint auprès de sa mère avec une vocation désormais arrêtée pour la marine, et résista à tous les efforts qu'on pût faire pour l'en détourner. En 1740, il était nommé garde de la marine.

 

CHARLES-JEAN COMTE D'HECTOR


S'il est vrai que son instruction avait été quelque peu négligée, il faut au moins reconnaître qu'il avait reçu une éducation des plus soignées, la maison de ses parents étant le rendez-vous habituel de la plus exquise société. Ces qualités ne tardèrent pas à lui ouvrir les premiers salons de la ville. Mais ses succès mondains ne l'empêchaient point de songer à la situation qu'il voulait se créer.


Le 28 avril 1741, il s'embarquait sur l'Apollon, commandé par M. de Macnémara, et désarmait le 20 décembre de la même année. De retour à Rochefort, il monta successivement sur le Diamant, sur l'Heureux, sur le Terrible et sur le César-Auguste. Son ardeur à étudier la science maritime et son zèle dans le service, furent remarqués de ses chefs ; aussi cherchèrent-ils à améliorer sa position. Il fut mis à bord d'une frégate, pour y faire fonctions d'officier. Peu après, le 1er février 1744, il était nommé enseigne, et s'embarquait le 1er mai sur la Mégère, faisant voile pour Chibouctou.


Tombé malade dans cette campagne, d'Hector revint à Angers pour s'y soigner. Là, il fit la connaissance de Mme de la Haye-Monbault, veuve qu'on disait fort riche, et il l'épousa. Mais cette union ne fut pas très heureuse. D'Hector, ébloui d'abord, se laissa aller à une existence de luxe et de prodigalité, qui ne tarda pas à obérer cette fortune déjà compromise à l'avance. Il laissa là sa femme, et revint à Rochefort comme aide-major de la marine et des troupes. Il n'y resta pas longtemps. Nommé, en effet, le 11 février 1756, lieutenant de vaisseau, il fut, à la reprise des hostilités avec l'Angleterre, au sujet du Canada, attaché comme second à la Pomone (capitaine vicomte de Noé), et après la démission de cet officier, chargé en titre du commandement de la frégate.


En 1757, il croisa avec la Pomone, de concert avec la Thétis, sur les côtes de France, et l'année suivante, il fut nommé major de l'escadre commandée par M. de Bompar, à destination des Antilles. Grâce à l'intervention de son chef d'escadre, d'Hector ne se trouva pas à la journée désastreuse des Cardinaux, à la suite de laquelle la flotte du maréchal de Conflans, dispersée, ne réussit qu'à sauver quelques-uns de ses vaisseaux dans les eaux de la Vilaine. Six navires s'y étaient réfugiés, mais les Anglais bloquaient l'ouverture de la rivière. Néanmoins d'Hector et le chevalier de Ternay furent assez heureux pour amener à trois fois dans le port de Brest les six vaisseaux (Brillant, Dragon, Robuste, Éveillé, Glorieux et Sphinx).
Aussitôt son arrivée, et après avoir rendu compte de sa vaillante conduite au commandant de la marine, d'Hector partit pour Versailles. Comme bien on le pense, il fut très gracieusement accueilli par le roi Louis XV, qui lui accorda quinze cents livres de pension sur les Invalides de la marine, et l'appela au commandement du Minotaure.


La paix, signée avec l'Angleterre, rendit le comte d'Hector à ses relations du monde. Il n'en goûta pas longtemps les charmes. Le 8 février 1766, en effet, il faisait partie de l'escadre du comte d'Estaing, et en qualité de capitaine de pavillon du Défenseur, faisait voile vers la Martinique et Saint-Domingue.


Nous le retrouvons, deux ans plus tard, avec le Sphinx, sur la route des Iles de France et de Bourbon. Il va conduire le chevalier de Rohan, qui vient d'être nommé gouverneur. Et à son retour à Brest, il reçoit lui-même sa nomination de major de la marine.


D'Hector, qui était devenu veuf, contracta alors un second mariage ; il épousa une femme d'une grande distinction, Jacquette de Kérouartz, fille d'un président au Parlement de Bretagne et veuve d'un chef d'escadre, M. de Kéruzoret. Cette union fut, paraît-il, plus heureuse que la première.


Sur ces entrefaites, la guerre éclata de nouveau avec l'Angleterre. D'Hector, quoique souffrant, prit le commandement de l'Actif, sur lequel l'amiral Du Chaffault - un autre vendéen d'illustre mémoire - avait arboré son pavillon. Et, passant plus tard de l'Actif à l'Orient, il assista sur ce navire, fort de soixante-quatorze canons, à la fameuse bataille d'Ouessant, qui fut pour lui une nouvelle occasion de montrer sa valeur.

 

COMBAT D'OUESSANT

 


Tant et de si glorieux faits d'armes ne pouvaient passer inaperçus. Le 4 mai 1779, d'Hector était nommé chef d'escadre. Il fut alors attaché au comte de Guichen, commandant du port de Brest, en qualité de directeur-général ; mais comme ses ennemis cabalaient contre lui, répétant sans cesse qu'il était plus facile de faire des armements que de prendre part à la guerre, il écrivit au ministre de l'appeler à un service actif, en même temps que, par une autre lettre, il donnait au roi une nouvelle assurance de son dévouement le plus entier.


Le 20 mai 1783, un traité avec la Grande-Bretagne rendait à la France son rang en Europe ; d'Hector, capitaine de vaisseau au début de la guerre, était alors lieutenant général et chevalier de Saint-Louis.

 

LOUIS XVI A CHERBOURG

 

La visite que Louis XVI fit au port de Cherbourg valut à notre illustre compatriote un nouveau témoignage de la confiance royale : Il fut chargé de l'inspection générale des ports de France, dans le but de leur appliquer un règlement uniforme. Cette mission dura six mois, après lesquels l'inspecteur se rendit à Versailles soumettre au Conseil de la marine ses observations et ses projets. Le roi, pour le remercier de ses services, inscrivit d'Hector pour une pension de six mille livres, réversibles sur la tête de la comtesse, en lui promettant la première décoration vacante de grand'croix de Saint-Louis.

 

Mais nous arrivons à 1789 : D'Hector, sans adopter les idées nouvelles, s'y soumit avec résignation, comme un soldat esclave de son devoir.


Obligé, pour céder aux injonctions du Conseil de Brest, de prendre, ainsi que ses officiers, la nouvelle cocarde, il vit son autorité lui échapper peu à peu - on le sait - à cette époque, le souffle démagogique se faisait sentir. Malgré cela, d'Hector s'efforçait de maintenir la discipline parmi ses équipages ; mais ses efforts étaient le plus souvent neutralisés par le mauvais esprit dont ils étaient animés, et l'entente était loin de régner entre le corps de la marine et les citoyens.


Les choses en étaient là, lorsque la date du 14 juillet (1790) amena la Fête de la Fédération. La Société des Amis de la Constitution, de Brest, voulut la célébrer pompeusement. D'Hector, qui n'avait reçu aucun ordre, refusa les salves d'artillerie qu'on lui demandait. A son tour, la municipalité ne voulut pas, un mois plus tard, - le 15 août - assister au Te Deum chanté à bord du vaisseau amiral. Bref, la garde nationale ayant suivi l'exemple de la municipalité, il s'en suivit, le lendemain, un désordre épouvantable, qu'on eût grand'peine à réprimer. C'était le premier coup d'essai de la Révolution à Brest.


Dès lors, le comte d'Hector fut l'objet de calomnies et de dénonciations incessantes.


L'Assemblée envoya des commissaires à Brest ; mais leur faible et humble attitude devant la municipalité ne fit que rendre plus critique la position de d'Hector. Journellement, son autorité était attaquée dans les clubs, et sa tête mise à prix. Et pendant ce temps, au lieu d'être appuyé par le gouvernement, il était sans cesse humilié par les dessous qu'on lui faisait essuyer. C'est vers cette époque, cependant, - le 18 janvier 1792 - qu'il fut informé par M. Bertrand de Molleville, ministre de la marine, qu'il venait d'être nommé vice-amiral.


Cette haute distinction, aussi bien que les instances de ses officiers, ne furent point assez puissantes pour lui faire renoncer à la détermination qu'il avait prise en face des progrès croissants de la Révolution. Il abandonna la marine, et se retira à Morlaix d'abord, puis, bientôt après, avec son beau-frère, M. de Soulanges, dans la terre de Preuillé, en Poitou. Mais, là encore, il ne tarda pas à paraître suspect. C'était l'heure, en effet, où se préparait la grande insurrection vendéenne. Il n'y prit cependant aucune part ; émigré bientôt, et alla rejoindre les Princes à Coblentz. Ses éminents services le désignèrent immédiatement au commandement du corps en formation à Enghien, et composé exclusivement d'anciens officiers de la marine royale.


Le dévouement n'enrichit guère. Après le licenciement de ce corps, d'Hector se trouva avec sa femme dans un véritable dénûment. C'est alors qu'il adressa un appel à l'empereur de Russie, qui l'avait pris en haute estime, lors de sa visite au port de Brest. Ce prince lui envoya aussitôt une somme de huit mille francs.


Le 14 août 1794, d'Hector passe enfin en Angleterre, et est nommé colonel du Corps de la marine royale, qui venait d'être reconstitué. Formé en vue d'une descente en Bretagne, ce corps n'était composé que d'hommes d'élite. Il fut anéanti presque complètement lors de la funeste expédition de Quiberon, et d'Hector lui-même dut peut-être d'échapper au désastre, à ce fait que des intrigues auprès des Princes l'avaient privé de tout commandement en cette circonstance. Soixante-quatre officiers, dont son beau-frère, avaient péri dans cette sanglante journée.


D'Hector, accablé par ce désastre, et d'un âge déjà très avancé, résolut de vivre tout à fait retiré.


Une nouvelle gratification de l'empereur de Russie, la pension de retraite qu'il reçut du roi d'Angleterre, et quelque argent qu'il avait réussi à retirer de France. lui permirent de s'installer tranquillement à la campagne, sans même vouloir rentrer en France, lorsque les portes en furent ouvertes aux émigrés. Ne voulant pas abuser des bontés du duc de Glocester, qui lui avait offert gracieusement comme asile une de ses maisons de chasse, il trouva, près de la ville de Reading, à une dizaine de lieues de Londres, une résidence conforme à ses goûts, et où il pouvait recevoir la visite de quelques amis qui lui restaient encore, - car il avait déjà eu la douleur de perdre son épouse, au moment même où il espérait passer paisiblement la fin de son existence. C'est dans une modeste retraite qu'il mourut, le 18 août 1818, à 96 ans. [(?) ou le 18 août 1808, à 86 ans, date le plus souvent citée dans diverses biographies]


ARMES CHARLES JEAN D'HECTORLe 8 février 1798, il avait été fait par Louis XVIII grand'croix de Saint-Louis.


On a pu voir quels brillants états de services  fournit le comte d'Hector. Nous pouvons donc affirmer, sans exagération, qu'il serait certainement arrivé au plus haut grade de la marine, si les évènements politiques n'étaient venus briser sa carrière. Mais, fidèle au roi, d'Hector avait préféré se retirer, le jour où le triomphe de la Révolution ne lui permettait même plus de servir au moins la France.

 

Revue de la Société littéraire, artistique et archéologique de la Vendée
1ère année - 1ère livraison
1882

Le comte d'Hector n'a pas laissé d'enfants. Il avait adopté Georges Hector de Tirpoil, son petit neveu, qu'il institua son légataire universel.
(Archives généalogiques et historiques de la noblesse de France - Volume 8 - par P. Louis Lainé)

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