Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
La Maraîchine Normande
Publicité
29 janvier 2014

SOEUR AGNES - L'HÉROISME DE LA CLÉMENCE ET DU PARDON

SOEUR AGNES  -  L'HEROISME DE LA CLEMENCE ET DU PARDON

Nous pouvons présenter ici comme une personnification vivante dans la suave et angélique physionomie d'une religieuse, la soeur Agnès, de la Congrégation des Filles de la Sagesse.

Le père de la soeur Agnès avait été fermier du marquis de la Rochejaquelein.
A l'aide de ses économies, il avait acheté, près de Châtillon, une petite gentilhommière, appelée le Logis-de-Bel-Air. Il était connu dans le pays sous le nom de Grand-Pierre, vrai type de l'honnête homme, du parfait Vendéen et du chrétien de la vieille roche.
L'aîné de ses fils fut un prêtre pieux et fervent.
Les deux cadets, Louis et Jean, prirent les armes avec leur père, en 1793, et donnèrent leur sang pour la cause religieuse que défendait la Vendée.
Geneviève, la plus jeune de ses trois filles, entra dans la Congrégation des Filles de la Sagesse, et prit le voile sous le nom de soeur Agnès.


Après avoir pillé le couvent et massacré un certain nombre de religieuses, les républicains emmenèrent à Cholet deux ou trois soeurs, pour soigner les malades et les blessés de leur hôpital. Soeur Agnès fut de ce nombre.

religieuse de Nicolas LancretUn soir, les soeurs Agnès et Victorien étaient occupées dans la pharmacie à préparer des remèdes, lorsqu'elles crurent entendre une voix plaintive, mêlée aux sifflements d'une bise glaciale, qui ébranlait la fenêtre. Ce gémissement semblait venir d'une ruelle qui longeait l'hôpital.
- C'est peut-être un homme qui se meurt, dit soeur Agnès ; il faut voir.
Les deux religieuses se hâtent d'entr'ouvrir la porte ; elles regardent. Un homme était là, assis le long de la muraille, la tête appuyée sur ses deux mains.
La nuit était sombre, de grands nuages noirs couvraient l'horizon ; la ruelle était déserte.
La soeur Agnès prend une lanterne et s'approche de cet homme.
- Que faites-vous là, mon ami ? lui dit-elle ; êtes-vous malade ?
C'était un soldat blessé. Il lève péniblement la tête, et se tourne à demi du côté de la soeur.
En ce moment, la lumière de la lanterne donnait en plein sur le visage du soldat.
La religieuse pousse un cri.
- Mon Dieu ! mon Dieu ! s'écrie-t-elle, c'est Jean, c'est mon frère ! Quoi ! c'est donc toi, mon frère bien-aimé !
- Oui, c'est moi, répond Jean, d'une voix mourante ; ma soeur, ma chère soeur, que je suis heureux de te voir ! mais je suis blessé, blessé à mort !
Le pauvre blessé ne pouvait se tenir debout. Les deux vaillantes filles le soulèvent et le portent sur un lit.
Il avait été frappé en pleine poitrine, et ses vêtements étaient inondés de sang.
Soeur Agnès, les yeux pleins de larmes, regardait son frère.
Celui-ci, serrant dans ses mains crispées la main de sa soeur :
- Je savais que tu étais ici, lui dit-il, d'une voix presque éteinte ... J'étais avec Monsieur Henri, près de Cholet ; j'ai voulu te voir. Arrivé dans la rue de l'hôpital, j'ai rencontré un Bleu, qui, sans rien dire, m'a tiré un coup de fusil dans la poitrine. Je suis tombé. Le soldat me croyant mort, m'a pris ma montre, à laquelle était attachée la médaille de sainte Radegonde que tu m'avais donnée ... Revenu à moi, j'ai pu me traîner sur les mains et sur les genoux jusqu'à l'hôpital. La lumière de la fenêtre m'a guidé.
Après un moment de repos, Jean reprit :
- Je vais mourir, puisque le bon Dieu le veut ; mais je suis content ; j'ai pu te voir, ma chère Geneviève ... Ne me plains pas ; ce matin, j'ai fait mes dévotions ... Je pardonne à cet homme. Je vais rejoindre notre mère et notre soeur aînée ... Prie pour moi ... Je ne t'oublierai pas au ciel ... Mon père ... mon bon frère prêtre ... mon frère Louis ... ma soeur Françoise ... dis-leur aussi ...
Le jeune Vendéen se tut. Ses mains glacées erraient autour de lui, pendant que ses yeux à demi voilés demeuraient fixés sur sa soeur, qui sanglotait et qui priait.
Ses lèvres s'agitèrent de nouveau ; on l'entendit murmurer les saints noms de Jésus et de Marie ; puis il rendit à Dieu sa belle âme.
Soeur Agnès se jette à genoux. "O mon Dieu, dit-elle, cette croix est bien lourde ! donnez-moi la force de la porter pour vous. O Jésus, ô Marie, donnez-moi la grâce de mourir avec les sentiments de mon frère, en vraie Fille de la Sagesse."
Le lendemain, on déposa dans un humble cercueil, le corps du soldat vendéen, revêtu de son uniforme, avec son chapelet autour du cou, et l'image du Sacré-Coeur sur la poitrine.
On l'enterra dans la fosse commune, pêle-mêle avec les cadavres des patriotes.


Le jour même, sur le soir, on amenait à l'hôpital plusieurs républicains blessés.
Pendant que soeur Agnès examinait la blessure de l'un d'eux, elle aperçoit entre ses mains une montre, à laquelle était attachée une médaille de sainte Radegonde.
Cet homme était bien le meurtrier de Jean. Et en effet, quelques instants après, il se vantait à l'un de ses camarades d'avoir tué un brigand et de lui avoir pris sa montre.
Soeur Agnès se sentit défaillir, et souffrit, dans une minute, toutes les angoisses de l'agonie.
Mais quand le chirurgien lui dit : "Voulez-vous m'aider à nouer cette bande ?", la Vendéenne et la religieuse se retrouva ; la nature était vaincue par la charité.
Le lendemain, les Vendéens prenaient Cholet, et on les disait exaspérés par la cruauté des massacres que les patriotes avaient commis à Saint-Laurent-sur-Sèvre.
Soeur Agnès craignait pour ses malades et ses blessés de terribles représailles.
En ce moment, deux républicains, se traînant avec peine, cherchaient à sortir de l'hôpital, et l'un d'eux est le meurtrier de ce frère bien-aimé qu'elle vient d'ensevelir.
- Il est trop tard pour fuir, leur dit-elle ; rentrez, nous allons vous sauver.
Et s'adressant à ses compagnes, elle leur dit : "Pour l'amour de Dieu, mes chères soeurs, sauvons ces hommes. Faisons-les changer de vêtements ; nous cacherons leurs uniformes et on ne pourra pas les reconnaître.
Le plan de soeur Agnès fut immédiatement accepté et mis à exécution.
Tous les malades furent sauvés.


L'héroïne de la clémence et du pardon suivit l'expédition d'Outre-Loire.
Elle mourut trois jours après la bataille de Savenay.
Elle avait été recueillie par une pieuse femme, qui lui fit creuser une fosse sur un tertre, en face de la Loire.
Une petite croix fut plantée sur la tombe solitaire de la vierge chrétienne.
On dit que des faveurs spirituelles et temporelles ont été obtenues par son intercession.
L'humble croix qui dominait le tertre se voyait encore longtemps après la Révolution.
On l'appelait dans le pays la Croix de la Sainte. (1)

(1) V. la Notice sur la soeur Agnès, par le P. Fonteneau

Extrait
Le Martyre de la Vendée
pendant la révolution
L.-P. Prunier, Chanoine
1902

Publicité
Commentaires
X
Bonjour, savez vous qui était exactement soeur Agnès ? Merci
Répondre
La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Archives
Publicité
Derniers commentaires
Publicité
Publicité