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La Maraîchine Normande
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16 juillet 2013

JOSEPH CATHELINEAU

JOSEPH CATHELINEAU

Si l'on en croit la notice que M. Célestin Port, dans son Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, a consacrée au Saint de l'Anjou, "trente-trois oncles, cousins, beaux-frères, neveux ou autres parents de Cathelineau ont péri pendant la guerre". Mes recherches personnelles me permettent de citer tout au moins trois frères, deux oncles, neuf cousins germains et six cousins du généralissime qui combattirent sous ses ordres dans les rangs de la Grande Armée.
Voici leurs noms :
Frères : Jean, Pierre et Joseph Cathelineau ;
Oncles : Pierre Baranger, Mathurin Godin ;
Cousins germains : Jean Blon, Joseph Blon, Pierre Blon, René Blon, Charles Godin, Etienne Godin, Joseph Godin, Pierre Godin, Louis Grasset ;
Cousins : André Bouteillier, Joseph Bouteillier, Etienne Chesné, Jacques Chesné, Math. Godin, René Leclerc.

Chacun de ces modestes héros aurait droit à une notice spéciale, car ils méritent tous également de figurer au Livre d'Or de la Vendée militaire.  ...

JOSEPH CATHELINEAU

Joseph Cathelineau fut le premier prisonnier tombé entre les mains des Républicains et la première victime de la Commission militaire d'Angers. Les pièces de son dossier, ainsi qu'on va le voir, renferment des détails on ne peut plus instructifs sur le caractère et les causes de l'insurrection dans les Mauges, en même temps que sur la physionomie du noyau de la Grande Armée.

 

Acte de naissance de Joseph Cathelineau


Joseph Cathelineau naquit au Pin-en-Mauges, le 23 juin 1772. Son père, Jean Cathelineau, exerçait l'humble métier de maçon et remplissait les fonctions de sacristain à l'église de la paroisse. Sa mère, Perrine Hudon, avait déjà donné le jour à de nombreux enfants. Dix frères et soeurs, en effet, formaient une vraie nichée patriarcale au foyer du bon sacristain, et Jacques, l'un des plus âgés, avait treize ans lorsque vint au monde le petit Joseph. Jean Cathelineau et sa femme étaient de ces braves gens comme il en existe encore beaucoup, Dieu merci, dans notre Bocage non moins réfractaire aux principes de Malthus qu'à ceux de la République athée : leur coeur était pur de tout sentiment d'égoïsme ; la religion leur avait appris à ne point douter du bon Dieu, et ils s'en rapportaient en toute confiance à Celui qui a promis de donner la pâture aux petits oiseaux.

Je n'ai pas besoin de dire que le petit Joseph, comme ses frères et soeurs, reçut une éducation profondément religieuse. Entre toutes les familles du Pin-en-Mauges, le ménage Cathelineau se faisait remarquer non seulement par sa grande honnêteté, mais encore par son attachement à la religion : pour être sacristain, en ce temps-là, il fallait être un modèle de piété dans la paroisse, et le père de notre héros l'était en effet ; quant à la mère, elle passait pour une sainte, et il fallait bien qu'elle le fût vraiment puisque c'est sur les genoux de cette Blanche de Castille de la Vendée militaire que fut élevé le Saint de l'Anjou.

Lorsque Joseph fut en âge d'exercer un métier, il embrassa tout naturellement celui de son père. A l'époque de l'insurrection, il avait un peu moins de vingt-et-un ans et était un maçon accompli. Il échangea alors la truelle pour le fusil.

Si l'on s'en tient aux documents, il semblerait bien, à la différence de son frère Jacques, qu'il ne fut point tout d'abord des plus ardents à la révolte. D'une part, en effet, nous verrons qu'il déclare, au cours des divers interrogatoires qu'on lui fit subir après son arrestation, qu'il ne s'insurgea qu'après avoir été relancé par ses camarades ; et, d'autre part, son nom ne figure nullement sur la liste des vingt-huit héros du Pin-en-Mauges qui, d'après les notes de l'un d'eux, Jean Blon, répondirent au premier appel du futur généralissime, dans la matinée à jamais mémorable du 13 mars 1793.

Il ne tarda guère, toutefois, à rejoindre son frère et ses compatriotes, car il est certain qu'il se trouvait à la prise de Jallais, dans cette même journée du 13 mars, et qu'à partir de ce moment - toujours d'après ses interrogatoires - il prit part à toutes les affaires, jusqu'au jour où il fût arrêté. Nous le voyons, en effet, figurer successivement à la prise de Chemillé, dans la soirée du 13, au combat de Cholet, le 14, puis à Vihiers, à Coron et enfin à Chalonnes.

Après la prise de cette ville, Joseph Cathelineau avait suivi le gros des troupes à Montjean, non loin de Saint-Florent-le-Vieil. Ce fut de là qu'il partit en mission vers Chalonnes, dans la journée du 25 mars, en compagnie de son frère Pierre et d'un nommé Joseph Chollet, l'un de ses compatriotes du Pin-en-Mauges. Tous trois, bien armés chacun d'un fusil, d'un sabre et d'un pistolet pris aux Bleus dès les premiers combats, étaient montés sur des chevaux de même provenance, et les chefs les avaient chargés, lisons-nous dans l'un des interrogatoires, d'aller "chercher des habits chez un tailleur" de Chalonnes.

Au moment où ils allaient entrer dans la ville, les trois insurgés se trouvèrent tout à coup en face d'une patrouille de gardes nationaux, partie à pied, partie à cheval. Ils s'empressèrent de battre en retraite, mais les deux compagnons de Joseph Cathelineau purent seuls s'échapper, grâce à la vitesse de leurs montures : quant à lui, il fut bientôt rejoint par les cavaliers de la patrouille et fait prisonnier, ainsi qu'il résulte du procès-verbal suivant, dont l'original se trouve aux Archives départementales de Maine-et-Loire :
"Nous commandant en second du canton de Rochefort, résident à Denée, s'étant porté à Rochefort, dimanche 25 du présent mois, accompagné des citoyens Lemonnier, Orffray, Vollay, Lauriou, à cheval, et plusieurs à pied, de la commune de Meurs, (et autres y dénommés), mais étant disposé à aller battre patrouille sur les environ de Chalonne, n'ayant rien rancontré, nous sommes porté sur Chalonne. An arrivant à Chalonne, avons aperçu trois brigands de l'armée chrétienne, et nous avons chargé dessus. Nous n'en avons pu arrêter qu'un. Quand aux deux autres, nous n'avons pa pu les rejoindre. De suitte nous nous sommes repliés pour le ramener au Département.
Tous les citoyens cavaliers étant réunis au nombre de dix-neuf, ont nommé ledit Duchastel pour leur chef et ont signé :
P. Lauriou ; Michel Orfray ; Jean Gachet ; Julien Gachet ; François Jahan, l'aîné ; Vaullé.
Arrêté dans la chambre commune de Rochefort, l'an II de la République française, le 25 mars 1793.
Lemonnier, maire de la commune de Murs."

Après son arrestation, Joseph Cathelineau avait été conduit à Rochefort-sur-Loire et interrogé aussitôt par le juge de paix du canton. Ce premier interrogatoire est des plus intéressants et mérite d'être reproduit en entier ; le voici donc tel quel, d'après la minute conservée aux Archives d'Angers :
"Aujourd'hui, lundi 25 mars 1793, l'an II de la République,
Nous, Pierre-Louis-Thomas Bonneau, juge de paix du canton de Rochefort-sur-Loire, nous nous sommes transporté à la maison commune dudit lieu, où, y étant, nous a été représenté par la garde nationale de Rochefort un inconnu arrêté par les citoyens gardes nationaux de Denée, Rochefort et Murs, lequel, présent, interrogé de ses noms et prénoms :
A répondu s'appeler Joseph Catelineau.
De son âge - A dit être âgé de 21 ans.
De sa profession - A dit être maçon.
De sa demeure - A dit être du Pin-en-Mauges.
D'où il a parti ? - De Montjean pour venir à Chalonnes.
Qui est-ce qui l'a envoyé à Chalonnes ? - A dit que c'était le commandant.
Quel est ce commandant ? - A dit qu'il s'appelait Monsieur Scoffelé, de Maulévrier, avec le nommé Delbet, de Saint-Martin-de-Beaupréau, Jacques Catelineau, voiturier au Pin-en-Mauges, son frère.
De quelles troupes sont ces commandants ? - A dit que c'était de l'Armée chrétienne.
De combien est forte cette armée ? - A répondu qu'elle était de 20,000 hommes.
Quel est le projet de cette armée ? - A dit qu'elle demandait que tout le monde fût d'un même accord.
Où est sa position ? - A dit qu'elle était à Montjean.
Où a-t-il dessein d'aller ? - A Saint-Florent-le-Vieil.
S'il y a des prêtres avec l'Armée ? - A dit qu'il y en avait deux et qu'il ne les connaissait pas.
Pourquoi il était venu à Chalonnes ? - Pour y chercher des hardes, sans savoir chez qui et sans s'y être arrêté.
Avec qui il était ? - Avec Pierre Catelineau, son frère, et Joseph Chollet, du Pin-en-Mauges.
S'ils étaient porteurs de quelque ordre ? - A dit que non.
Si on ne leur avait rien remis à Chalonnes, soit effets ou lettres ? - A répondu que non.
S'il ne reconnaît pas avoir été porteur d'une lettre, laquelle nous avons cotée et paraphée de la lettre A, adressée à René Gallard, au Pin ? - A répondu que oui ; qu'il l'avait dans son gousset.
Qu'est-ce qui la lui avait remise en mains ? - A répondu que c'était la soeur du frère Delaunay, de Chalonnes.
S'il savait le contenu de cette lettre ? - A répondu que non.
En sortant de Chalonnes, où il comptait aller ? - A répondu qu'il avait dessein de retourner à Montjean, pour aller à Saint-Florent.
Faire quoi ? - A dit qu'il n'en savait rien.
Combien il y a de temps qu'il est à cette armée ? - A répondu qu'il y avait quinze jours.
Où a commencé à se former cette armée ? - A dit que c'était à Jallais.
Quels en ont été les chefs à Jallais ? - A répondu que c'était les nommés Bosellier et Usureau, de la Poitevinière, un marchand de chevaux et l'autre serger.
Interrogé, s'ils avaient été jusqu'à son domicile pour les solliciter à prendre leur parti ? - A dit que oui, qu'ils les avaient menacés, s'ils ne se rendaient pas à Jallais pour se révolter.
De quelles armes il était armé, ainsi que son frère et le dit Chollet ? - A répondu qu'ils avaient chacun un fusil, un sabre et un pistolet de poche.
Qui est-ce qui leur a donné leurs chevaux ? - A dit que son frère en avait un de Cholet ; que le sien était d'un maire du côté de Coron, et celui de Chollet, il ignore à qui il appartient.
Combien aviez-vous de canons ? - Ils en avaient vingt-deux à Saint-Laurent-de-la-Plaine.
Quel est celui qui a mis en joue le citoyen Fourmond en les poursuivant ? - A dit que c'était le nommé Chollet.
Interrogé s'il sait signer ? - A répondu que non.
Arrête le présent interrogatoire ...
Bonneau, juge de paix."

A noter, dans cet interrogatoire, la qualification de chrétienne donnée par le prisonnier à l'armée insurgée. Si l'on se reporte au procès-verbal d'arrestation transcrit plus haut, on verra que les gardes nationaux républicains qualifiaient eux-mêmes de "brigands de l'armée chrétienne" Joseph Cathelineau et ses deux compagnons. On était donc bien d'accord, de part et d'autre, pour reconnaître à la révolte un caractère essentiellement religieux ; je souligne le fait en passant, à l'adresse des sceptiques et des politiciens qui osent encore, en dépit de l'évidence, ergoter sur les véritables causes de la grande insurrection.

Quant à la réponse du prisonnier au sujet des menaces dont il aurait été l'objet de la part des premiers insurgés, je ferai remarquer, tout d'abord, qu'on serait peut-être en droit de ne point la prendre rigoureusement à la lettre. Telle qu'elle nous est parvenue, en effet, la rédaction de cette réponse est l'oeuvre personnelle du juge de paix de Rochefort-sur-Loire, qui avait évidemment intérêt à forcer quelque peu la note en vue de charger les insurgés ou de diminuer leurs mérites ; or, nous savons, pour les avoir pris plus d'une fois la main dans le sac, que les magistrats patauds en prenaient à leur aise avec les pièces dites officielles au bas desquelles ils mettaient leur griffe, et le citoyen Bonneau, dans la circonstance, pouvait d'autant mieux se permettre d'allonger impunément la sauce, qu'il avait affaire à un prévenu illettré, incapable de contrôler ce qu'on lui faisait dire.

Admettons que Joseph Cathelineau, tout d'abord un peu lent à la révolte, ait été réellement menacé par les premiers insurgés, le 13 mars, avant de se décider à marcher sur Jallais ; encore faudrait-il préciser en quoi auraient consisté les menaces. Ceux-là seuls pourraient s'offusquer de l'expression qui ne connaissent point à fond le caractère de nos paysans des Mauges et du Bocage vendéen ; même aujourd'hui, un jour d'assemblée, de préveil, de tirage ou d'élections, lorsqu'il s'agit d'une manifestation collective à faire, il y a toujours des ardents et des hésitants, et il faut voir comme ceux-ci sont traités de faignants et bousculés par ceux-là, sans que pour cela l'harmonie cesse de régner entre eux ! ...
A la différence de son frère Jacques, Joseph Cathelineau était parmi les hésitants, et il a bien pu être quelque peu pris à partie par les ardents ; voilà tout. Mais au fond, comme on dit dans le langage de chez nous, lui et les camarades étaient bien d'assent ; une fois décidé et lancé, il marcha au feu non moins bravement que les autres, et la mission en éclaireur qui lui avait été donnée, le 25 mars, montre bien qu'il était de ceux sur lesquels les chefs pouvaient compter.

Ce même jour, 25 mars, le prisonnier fut dirigé sur Angers, comme prévenu, dit un billet du juge de paix de Rochefort, "d'être espion de l'armée chrétienne". Arrivé dans la soirée au chef-lieu du département, il comparut aussitôt devant le Comité de surveillance, où on l'interrogea de nouveau. Ce second interrogatoire contient également plusieurs détails intéressants sur les débuts et les premiers chefs de la future Grande Armée. En voici quelques passages :
"... A lui demandé pour quelle raison il est entré dans cette armée ? - A répondu que c'était à cause du recrutement, qui avait occasionné une agitation générale dans le pays et donné lieu à la réunion de tous ceux qui composent cette armée, convoquée par le tocsin sonné dans toutes les paroisses et définitivement dans celle du Pin, où il habitait ; qu'ainsi il a été forcé de marcher avec les autres habitants de la paroisse, quoi qu'il se fût caché ...
A lui demandé le nom des commandants qu'il connaît ? - A répondu qu'il connaît les nommés Delbée, de Saint-Martin-de-Beaupréau, Cady, chirurgien, de Saint-Laurent, Stoufflet, Cathelineau, frère du prévenu, demeurant au Pin-en-Mauges, Perdriau, de la Poitevinière, voiturier audit lieu ...
A lui demandé comment se fait l'élection des commandants ? - A répondu que ce sont ceux qui paraissent les plus hardis et qui se mettent d'eux-mêmes à la tête ...
A lui demandé quels sont les lieux que l'armée a successivement habités depuis quinze jours qu'elle existe ? - A  répondu qu'elle a commencé par habiter Jallais pendant une demi-journée, où, après avoir brisé des meubles, des portes, des croisées et y avoir mangé chez les citoyens, l'armée a été à Chemillé le soir et en est sortie le lendemain ; de là à Cholet, une bataille ; de Vihiers à Coron, où l'on n'a fait que passer et revenir à Chemillé, de Chemillé à Saint-Laurent (la-Plaine), où l'on a couché ; et de Saint-Laurent à Chalonnes, d'où l'armée est partie pour Montjean et doit se rendre à Saint-Florent ...
A lui demandé comment subsistaient les dites armées et qui leur procure les vivres nécessaires ? - A répondu que les métayers des campagnes se réunissent pour apporter des charretées de pain, des boeufs et des pois ; ce qu'ils font de bonne volonté et gratuitement, dont une grande partie se réunit à l'armée."

L'interrogatoire terminé, les trois membres du Comité qui y avaient procédé libellèrent un mandat de dépôt ainsi conçu :
"Vu par nous, membres du Comité de surveillance du Département de Maine-et-Loire, l'interrogatoire du juge de paix du canton de Rochefort fait à Joseph Catelineau, arrêté ce jour à Chalonnes, l'interrogatoire fait ensuite par nous audit Catelineau, mandons à la gendarmerie et autres exécuteurs des mandats de justice de conduire en la maison d'arrêt de cette ville ledit Catelineau, et enjoignons au gardien de ladite maison de le recevoir et de lui faire administrer de suite les secours dont il a besoin, comme aussi de le placer dans l'infirmerie.
Donné en l'hôtel du département, le 25 mars 1793, l'an II de la République française.
Fauconnier ; F. Coullion ; Couraudin."

En exécution de ce mandat, Joseph Catelineau, qui était arrivé malade à Angers, fut admis à l'infirmerie de la prison ; on l'en tira le surlendemain, 27 mars, pour le conduire devant la Commission militaire, où, après un nouvel interrogatoire, il fut condamné à mort séance tenante. L'exécution eut lieu dans les vingt-quatre heures : c'était la première goutte de sang que la famille Cathelineau versait pour la cause de la Religion et de la Liberté.

H.B.
La Vendée Historique
1902

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