Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Maraîchine Normande
7 mai 2013

LA RABATELIERE ♣ UN BLEU VERS "LE CHEMIN DU PARADIS"

(Récit "certifié conforme" aux notes manuscrites recueillies par le vénérable curé de la Rabatelière, feu l'abbé Hillairet)

la rabatelière


Julien Robin, ouvrier maçon du château de la Rabastelière, habitait à côté une petite mais¤n mise à sa disposition par Mme la comtesse de Martel.

Un soir, il dit à deux de ses camarades (Drapeau et Chapeleau) : "Tot, le jour n'avez-ve poët entendu daux cops de fusil ? Lé patriotes sont venus pre la route de Montaigu à Saint-Fulgent ; y aura daux soulains et daux trainards. V'lève veni ? Y iérons les dgietter au Potia (Poteau de Chavagnes, sur la grande route de Montaigu à Saint-Fulgent). J'en escofierons bé tchiéqu's-uns !
Les camarades acceptent la proposition, et tous trois partent ensemble, armés d'un seul fusil : nos gâs n'avaient pas peur ; le plus âgé n'avait que dix-huit ans.
Arrivés au Poteau, ils se mettent en embuscade. Le gros des Bleus défilait du côté de Saint-Fulgent ; mais ils aperçoivent, venant en zigzaguant sur la r¤ute de Chavagnes, un patriote chargé de ses armes et d'une foule d'objets divers. Sauter sur lui, le désarmer et l'entraîner dans un champ fut l'affaire d'une minute. Du reste la chose était facile, car le soldat, ivre, se tenait à peine debout.
Julien Robin et ses camarades s'érigent en juges, et leur sentence est facile à deviner. "Mais, disent-ils, faut pas comme ça l'envoyer au diable ! Faut le m'ner à not' curé qui le confessera, et après, i verrons !"
L'abbé Guédon de la Poupardière, curé de la Rabatelière, se tenait caché dans sa paroisse.
Nos trois gâs emmènent donc le Bleu qui peu à peu se dégrise, et voilà que, pendant la nuit, ils veulent à leur manière le confesser.
Ils l'interrogent.
Le Bleu leur répond franchement qu'il n'est qu'une canaille et un assassin. Ancien sacristain au diocèse de Laval, il leur montre pour preuve le petit sac des malades de son curé. Il leur dit qu'il mériterait bien des fois d'être fusillé et que, le matin même, dans les villages de Saint-Georges-de-Montaigu et de Chavagnes, il avait "embroché" quatorze femmes et petits enfants ! ...
Arrivés là où était caché l'abbé Guédon, nos jeunes gens laissèrent le Bleu avec le prêtre, et tous deux eurent un entretien secret qui dura un bon moment.
L'entretien terminé, ils demandèrent : "Maintenant, qu'allons-j-y en faire ?"
Il leur fut répondu : "Faites-en ce que vous voudrez"
- Allons ! dit le Bleu, j'en ai bien fait assez dans ma vie ; il faut en finir !"
Julien et ses compagnons le ramenèrent au village du Poteau. Là, prenant son sort avec résignation et même en brave, le soldat voulut se creuser lui-même une petite fosse pour s'y coucher.
Il avait sur lui trois pièces d'or : "Tenez, dit-il aux gâs, vous en aurez chacun une. Prenez garde de ne pas abîmer mes habits, qui sont tout neufs !" Il s'étendit alors dans la fosse, prit lui-même le canon du fusil, et, l'approchant de son oreille, il dit : "Allez, maintenant ! ... feu ! ... tirez la gâchette !"

Que le Bleu repentant ainsi expédié vers un monde meilleur ait pris tout droit le "chemin du Paradis", je n'oserais l'affirmer ; m'est avis même que, malgré son repentir, cet ex-sacristain embrigadé par la République dans les colonnes infernales n'a point dû s'en tirer, de l'autre côté, sans un petit règlement de comptes supplémentaire ...
Mais je reconnais bien volontiers que sa fin chrétienne avait au moins en partie racheté ses crimes, et qu'à la différence de tant d'autres bandits il sut affronter bravement la mort qu'il avait conscience d'avoir mérité ...

LA VENDEE HISTORIQUE
1911

Publicité
Commentaires
La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
Publicité