SOTTEVILLE-SOUS-LE-VAL - FRENEUSE (76) - QUELQUES INFOS SUR LE CHÂTEAU DE VAL-FRENEUSE
Datant du XVIIe siècle et implanté sur les communes de Sotteville-sous-le-Val et Freneuse, le château de Val Freneuse a eu plusieurs vies. Il fut successivement résidence de Pierre Le Cornier (conseiller du roi au parlement de Rouen) et lieu d'accueil pour les enfants durant la seconde guerre mondiale. Le château de Val-Freneuse se trouve essentiellement dans la commune de Sotteville, seuls son parc et une aile de bâtiment sont à Freneuse.
PIERRE-ROBERT LE CORNIER, sieur de Cideville, né à Rouen, paroisse Saint-Lô, le 2 septembre 1693, avait succédé, en 1716, à son père dans la charge de conseiller au Parlement de Normandie. Il donna sa démission en 1736, pour se livrer entièrement à son goût pour les Lettres. Il mourut à Paris, le 5 mars 1776. Les armes de Cideville étaient "d'azur, à deux molettes d'or en chef, à la tête de licorne d'argent en pointe".
ÉLOGE DE M. DE CIDEVILLE par M. Haillet de Couronne
M. Pierre-Robert Le Cornier, chevalier, ancien conseiller au parlement de Normandie, né à Rouen, le 2 septembre 1693, eut pour père et mère messire Robert Le Cornier, chevalier, sieur de Cideville, conseiller au Parlement, et noble dame Louise Le Cornier de Sainte-Hélène. Il fut allié à l'ancienne famille des L'Huillier, et par conséquent parent du célèbre Chapelle.
L'éducation du jeune Cideville, et dans la maison paternelle et au collège, fut extrêmement soignée ; son goût pour la belle littérature se développa de bonne heure, et comme Fontenelle, avant que d'entrer dans le monde, il fut couronné aux palinods de cette ville.
Tandis qu'il se livrait aux exercices qui donnent de la force et de la grâce au corps, il cultivait les arts agréables qui font le charme de l'esprit, la musique, la peinture, la poésie.
M. de Cideville le père, après avoir longtemps supporté le poids de la magistrature, crut devoir appeler son fils à lui succéder en qualité de conseiller au parlement de Normandie.
Les Muses durent le regretter, mais sans perdre le goût qui l'entraînait vers elles, M. de Cideville se livra tout entier à l'étude des lois, et mérita sa propre estime en captivant celle du public.
Il eut le bonheur d'avoir à la campagne des voisins amis des lettres, MM. de Joigny et de Vertot, dans le commerce desquels il put perfectionner ses connaissances. Placé dans un monde plus nombreux, et dans la plus haute compagnie, il s'y fit distinguer par son goût naturel et par son aménité. Il sut plaire à M. de Luxembourg, gouverneur de cette province. Admis dans son intimité, il proposa l'institution d'un concert public, établissement agréable qui réunit longtemps la compagnie la plus distinguée.
C'est à la protection de M. de Luxembourg, et de l'amitié de M. de Fontenelle qu'il dut le succès d'une entreprise plus importante, l'érection d'une Académie des sciences, belles-lettres et arts dans cette capitale.
On trouvera dans le premier volume de ces mémoires, la part que M. de Cideville eut à cet établissement et à celui d'une école publique de dessin, et les peines qu'il prit pour les faire réussir.
Non content d'avoir mérité le titre de fondateur de l'Académie, il lui donna encore pour collaborateurs ses amis distingués dans tous les genres de connaissances, MM. de Fontenelle, du Renel de Bettencourt, Linant, Bréant, l'abbé Pinaud, et l'abbé Fontaine. Lui-même ne demeura pas oisif parmi nous. Nous possédons de lui plusieurs mémoires qui respirent l'amour des sciences et ce feu sacré pour la propagation des lumières dont lui-même était animé.
Il avait quitté les fonctions de la magistrature, et s'était retiré à Paris, où il passait les hivers dans la culture des lettres et le commerce délicieux de sociétés choisies. L'était n'était pour lui qu'une alternative de jouissance ; sa maison de campagne de l'Aunay (Duclair) était le temple de l'amitié et celui des talents.
Intimement lié d'amitié avec M. de Voltaire, son camarade d'études au collège de Louis-le-Grand, serait-il possible que la poésie fût demeurée étrangère à ses goûts ? Il nous a laissé l'ébauche de plusieurs pièces de théâtre, parmi lesquelles le Triomphe de la Beauté mérite d'être distingué. Ce titre seul indique une sensibilité et un esprit de galanterie qui lui procurèrent d'illustres amies. Nous citerons MMmes de Staël, Bignon, Ogier, Dupin, Duboccage, la marquise de Créqui, etc.
Il entretenait avec ses amis une correspondance active ; c'est à ce doux commerce que nous devons plus de cent lettres originales de M. de Voltaire, et les lettres charmantes de Mme la marquise de Créqui.
A tous les titres que M. de Cideville avait à la reconnaissance de l'Académie, il en voulut ajouter un dernier, en faisant passer dans ses mains son excellente bibliothèque, ses manuscrits et les recueils de plusieurs de ses illustres amis. Il en avait été l'un des fondateurs, il en devint le bienfaiteur ; que de titres pour vivre éternellement parmi nous ! Cet homme excellent cessa de vivre le 5 mars 1776.
(Précis analytique des travaux de l'Académie Royale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen - par M. Gosseaume, D.-M. - Tome 4e 1771 à 1780 - 1819)
En 1886, Charles-Joseph-Clément Cordonnier épouse à Elbeuf, le 29 juin, Marie-Noémi-Joséphine-Alice Flavigny, née à Elbeuf le 29 mai 1867, fille de Constant-Joseph-Robert Flavigny, manufacturier à Elbeuf, et de Jenny Lanseigne (elle est décédée à Sotteville-sous-le-Val, le 18 janvier 1893, à l'âge de 25 ans).
Le père d'Alice, Constant-Joseph-Robert Flavigny, lui donne le château de Val-Freneuse.
Constant-Joseph-Robert Flavigny fut Président de la Chambre de Commerce d'Elbeuf de 1880 à 1886.
Sous la direction générale de M. Charles Flavigny, les deux aînés, MM. Louis et Constant Flavigny, conduisent la fabrique proprement dite, composée d’une filature, d’un tissage, d’une foulerie et de plusieurs ateliers d’apprêts; le troisième fils, M. Ernest Flavigny, associé à M. Crabit, dirige depuis 1858 le dégraissage de laine et la teinture, également sous l’inspiration du chef de la famille.
Flavigny est né à Elbeuf le 10 juillet 1832 ; il avait épousé à Elbeuf, Jenny Lanseigne, le 26 novembre 1861 ; il est décédé au même lieu le 19 octobre 1902.
En 1886, le peintre Joseph-Félix Bouchor, alors âgé de 33 ans, découvre le village de Freneuse, sans doute à l'occasion d'une visite à la famille Cordonnier, alors propriétaire du château du Val-Freneuse. L'artiste est de suite conquis par le calme de la vie normande, la luminosité et la richesse de la végétation. Il s'installe dans les bâtiments à colombage de l'ancien presbytère, en contrebas de l'église. Il y réalisa une partie importante de son oeuvre de paysagiste.
En 1893, le 6 juin, le château du Val-Freneuse est mis en vente, en un seul lot, en l'audience des criées du Tribunal civil de Rouen par l'étude de Me Alaboisette, avoué à Rouen. L'annonce précise qu'il est situé sur les communes de Sotteville-sous-le-Val et Freneuse, canton d'Elbeuf-sur-Seine, ensemble toutes les dépendances du château, cour d'honneur, jardins, bosquets, futaies, bois taillis et pièces de terre d'une contenance de 9 h 75 a. 35. Mise à prix : 45.000 fr.
1942 - LE MANOIR DE L'ENFANCE
Des enfants vivent un rêve éveillé. Ils ont un château pour résidence, un parc pour se "desporter", des chèvres pour jouer, des vaches pour les nourrir de lait, un personnel dévoué pour les servir.
Tout cela les console d'être pour un temps orphelins. Leurs parents, en effet, sont allés travailler en Allemagne, mais ils n'en sont pas pour cela inquiets sur leur progéniture, logée à bonne enseigne.
Nous l'avons pu voir au cours de l'inauguration officielle du foyer de Sotteville-sous-le-Val, à laquelle avaient été conviés les représentants de la presse parisienne.
Tout comme pour le foyer de Tourville-la-Rivière, en pleine activité, le génie organisateur de M. Fischer, le directeur du Centre d'accueil de Rouen, a fait merveille.
Selon les principes qui lui sont chers, les enfants seront alimentés en grande partie par les produits du domaine.
Une visite de cette oeuvre subventionnée par les Amis des travailleurs français en Allemagne nous a permis de constater que tous ceux qui ont contribué à la création de ce centre, et dont M. Maynial a su coordonner les efforts, en ont fait un foyer où rien n'a été négligé pour le confort et le bien-être des enfants.
Les premiers pensionnaires du château de Sotteville-sous-le-Val ont accueilli avec une rieuse cordialité le cortège officiel où on remarquait la présence de MM. Pujes, préfet délégué ; les représentants des autorités allemandes ; Poissant, maire de Rouen ; Maynial, délégué régional de la Main-d'oeuvre française ; Balensi, de l'oeuvre des services français de la Relève.
Dans la salle d'honneur du château, des allocutions furent prononcées par MM. Pujes, Balensi et Bernier, qui exposèrent les heureux résultats de la collaboration franco-allemande.
Les invités visitèrent ensuite les divers services du foyer, où une quarantaine d'enfants ont déjà pris leurs quartiers d'hiver.
Des mamans bénévoles en blouse blanche s'affairent à servir ces hôtes bruyants, à coucher les plus petits et à distraire les autres.
Le château pourra recevoir 200 pensionnaires.
Avant de quitter les jeunes hôtes de Sotteville-sous-le-Val, M. Pujes, préfet régional, leur fit la promesse de revenir les voir pour la fête de Noël qu'on attend avec une telle impatience que déjà certains châtelains, brûlant le départ, mettent, m'a-t-on dit, leurs galoches en faction devant la cheminée.
Article signé Guy Lormont - Journal Les Nouveaux temps du 12 décembre 1942.
Maurice Poissant fut maire de Rouen du 9 juin 1940 au 28 avril 1843.