BEAUVOIR-SUR-MER (85) - JACQUES ET FRÉDÉRIC O'BYRNE, LEUR MÈRE ET LEUR TANTE EN 1794
Ce jeune O'Byrne, aide de camp du Roy sous les ordres de Charette - c'est ainsi qu'il se présenta au général Boussard - était le fils aîné de Jacques O'Byrne, écuyer, seigneur de Newtown, chevalier de Saint-Louis, qui avait épousé à Beauvoir, dans l'église des Mathurins, le 30 janvier 1775, Florence-Marguerite Lefebvre, née à Beauvoir le 8 décembre 1742.
Le 20 avril 1780, Jacques O'Byrne, âgé de 56 ans, décédé la veille, était enterré au cimetière de Beauvoir. Il laissait deux enfants : Jacques-Félix, né le 20 novembre 1778 et Frédéric-Aimé, né le 29 décembre 1779. Deux autres n'avaient pas vécu : Joseph-Henri (7 juillet 1776 - 12 septembre 1778) et Jeanne-Marguerite (2-3 septembre 1777).
Frédéric, le plus jeune, fut pris et fusillé à Noirmoutier le 4 janvier 1794 ; il avait tout juste atteint ses quatorze ans !
Quant à l'autre, Jacques-Félix, il avait fait partie, dès le début de l'insurrection, avec Guerry du Cloudy, Baumler et le chevalier de Régnier, du premier Comité royal de Challans, puis, sous les ordres de Guerry, avait pris part à l'attaque des Sables, au cours de laquelle il avait eu, le 24 mars, son cheval tué sous lui. Interrogé le 24 juin par la Commission municipale du canton de Beauvoir, puis par Boussard, il déclara avoir "pris les armes le 13 mars comme simple individu", puis avoir été nommé quelque temps après "aide de camp de l'armée", puis "commandant de la place de Beauvoir et de la Barre-de-Monts". Il fut envoyé à Nantes et guillotiné quelques jours plus tard : il avait quinze ans et demi (7 juillet 1794).
Quant à leur mère - "Florence-Marguerite Lefebvre, veuve de Jacques O'Byrne, gentilhomme irlandais, cy-devant chevalier de Saint-Louis, âgée de 50 ans, demeurante à Beauvoir-sur-Mer" - prise par les Bleus à Noirmoutier en janvier 1794, elle fut envoyée aux Sables, condamnée à mort par la Commission militaire de cette ville le 14 janvier 1794 (25 nivôse an II), et guillotinée le lendemain, sur les trois heures du soir, avec entre autres, deux jeunes insurgés de 20 ans, Louis Couillon, de la Guérinière de Noirmoutier, et Jacques Bernard, du village du Port de Beauvoir, "convaincus d'avoir fait partie des attroupements en qualité d'instigateurs et de chefs."
CÉLESTE-LOUISE LEFEBVRE, FEMME LEBRETON DE LA JOUCAILLIÈRE, SOEUR DE FLORENCE-MARGUERITE
Fin juin 1791, de nombreux aristocrates songèrent à s'expatrier. L'un de ceux-ci, Pierre Nicollon des Abbayes se mit en rapport, par l'intermédiaire de son fermier de la métairie des Abbayes, Jacques Pinchard, avec une personne de Beauvoir, à laquelle l'attachaient d'ailleurs des liens de parenté, Céleste Lebreton de la Joucaillière. Celle-ci fréta un bateau, la Mignonne, appartenant à Bertrand Gautret, et commandé par le capitaine Guérin, de l'Épine, sous le prétexte de transporter du sel en Angleterre, ainsi que quelques passagers. Le marché fut conclu pour la somme de 600 livres.
Ayant effectivement embarqué sept charges de sel au Grand Pont, le brick se dirigea sur Fromentine. Il s'y trouvait amarré au matin du 30 juillet, lorsque se présentèrent une douzaine de voyageurs ... Mais ceux-ci n'étaient pas passés inaperçus des gabelous qui surveillaient la côte : leur allure suspecte éveilla les soupçons, la Municipalité de Beauvoir fut alertée, de même que la garde nationale et celle de Barbâtre. On trouva, dans la cale du bateau, Nicollon des Abbayes, les deux Masson, les trois frères Gazeau, Nicollon l'Aumondière, Henri Deshommes, Baudry de la Burcerie et un prêtre non assermenté, Louis-Benjamin Robin des Baraudières, ci-devant vicaire des Essarts. Les émigrants furent conduits à Noirmoutier : interrogés, ils reconnurent tous leur dessein de passer à Jersey, pour un temps tout au moins, dans le but de "chercher une tranquillité dont ils ne peuvent jouir dans leur patrie". Ils furent, les jours suivants, par Beauvoir, Challans et l'Aiguillon-sur-Vie, transportés aux Sables, où ils demeurèrent emprisonnés jusqu'à l'amnistie de septembre.
La dame Lebreton-Joucaillière elle-même, arrêtée et interrogée par la Municipalité de Beauvoir, reconnut avoir servi d'intermédiaire entre ses cousins Nicollon et Gautret, le propriétaire du brick, et fut aussitôt relâchée.
Céleste-Louise Lefebvre, née le 3 janvier 1746, avait épousé, le 14 février 1774, Pierre-Jean-Maxime Lebreton, sieur de la Joucaillière (mort le 1er avril 1789). Dès le début, elle afficha ses sentiments contre-révolutionnaires et, en mars 1793, prit une part active à l'insurrection.
En fructidor an II (août 1794), elle fut violemment dénoncée au district de Challans par le citoyen Mourain, ancien maire de Beauvoir, comme "aristocrate, protectrice des brigands et des prêtres réfractaires ..." Ayant rappelé les faits de 1791, Mourain ajoutait : "Au commencement de la révolte, elle a paru être à la tête des gens de la campagne révoltés, dirigeant leurs opérations dans le comité qu'ils avaient formé à Beauvoir ; elle faisait travailler les brigands pour les retenir au lieu de la révolte, elle les a suivis partout, particulièrement à l'île de la Montagne. Elle a eu deux neveux aides de camp de Charette, l'un guillotiné à Nantes, sa soeur l'ayant été aux Sables ..."
Cette dénonciation entraîna l'arrestation de la dame Lebreton, qui fut conduite à Nantes, où son séjour fut, d'ailleurs, de courte durée : le 7 vendémiaire an III (28 septembre 1794), elle mourait au Temple de l'Humanité - ci-devant Hôtel-Dieu - de cette ville.
Bataille des Rouchères
Ce jour-là même, dernier sursaut du Marais, fut un désastre pour les Vendéens : "Quatre cents brigands ont péri, écrivait de Challans le lendemain le général Boussard à Vimeux, successeur de Turreau, on a pris trois mille femmes et enfants, environ cent-cinquante brigands se sont rendus, un drapeau a été enlevé. Un nommé Obirne, âgé de 16 ans, ci-devant aide-de-camp de Charette, est du nombre des prisonniers, on l'envoie à Nantes". Quant aux femmes et aux enfants, ils furent, pour la plupart, d'après Boussard, renvoyés chez eux quelques jours après. Un fort contingent de prisonniers, toutefois, fut dirigé sur Nantes, où la Commission militaire les condamna à la guillotine.
Extrait des Chroniques paroissiales (Archives du diocèse de Luçon) - Nouvelle Série - Tome III - Canton de Beauvoir-sur-Mer - par le Dr Julien Rousseau - 1963
AD85 - Registres paroissiaux et d'état-civil de Beauvoir-sur-Mer et des Sables-d'Olonne