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La Maraîchine Normande
9 avril 2023

TOUTLEMONDE (49) - LA CRILLOIRE, PAROISSE DISPARUE ...

LA CRILLOIRE
Village de la commune de Toutlemonde, et précédemment d'Yzernay.

la crilloire carte


Ancienne seigneurie avec château-fort, au fond d'une vallée, coupée jadis de nombreux étangs, dont deux subsistent, le plus important de 1 hect. 67 ares. L'édifice, entouré de vastes douves vives encore existantes, formait un quadrilatère irrégulier, les plus grands côtés vers l'Est et vers le Sud, avec cour intérieure, flanqué de quatre énormes tours rondes. Il ouvrait vers l'Est par une porte unique à pont-levis.

Le 17 avril 1793, le commandant Villemet (1), le second du général Leigonyer, en reconnaissance avec douze cavaliers républicains, y fut surpris et entouré par une bande de 150 Vendéens commandés par le garde-chasse de La Frogerie, Tonnelet. Il se délivra, le sabre au poing, avec toute sa troupe, sauf deux laissés morts, les neuf autres blessés, lui-même atteint d'un coup de crosse à l'épaule, d'un coup de feu dans la cuisse. Un décret proclama qu'il avait bien mérité de la patrie.

Du château, incendié pendant la guerre de Vendée et depuis démoli peu à peu complètement, il ne reste que la base des tours, aux larges brèches à demi recouvertes de lierre ; à 50 mètres, un puits qui a pour margelle une dalle de tombe au nom de Renée Barbot, morte en février 169. ; une autre dalle, celle d'un ancien receveur, mort en 174., sert de seuil à une ferme. A 500 mètres, des ruines s'élève sur une éminence un vaste château moderne, dont les angles et les pieds droits des portes et des fenêtres sont en briques, entouré d'un joli parc, appartemant à la famille de Formon.

ruines de l'ancien château 4 la tour du Sud

Tour Sud

La terre donnait son nom jusqu'au XVIe siècle à une famille de chevalerie de qui elle passa à la famille Laurent ou de Laurens. En 1588 Pierre Laurent ou de Laurens, sieur de la Crilloire, guerroyait dans l'armée du roi de Navarre. En peine d'argent sans doute, comme son maître, et piqué d'ambition, il envahit un jour le château de Vezins et avec l'aide de quelques soudards, en enleva la jeune baronne, Louise de Maillé de Lathan, récemment veuve, qu'il conduisit à la Crilloire. Après un jour de réflexion pour tout répit, il la traîna le pistolet au poing dans la chapelle, où un prêtre consacra le mariage. Mais ni prières ni menaces n'ayant pu dompter la belle, il espéra mieux en lui rendant sa liberté, après une captivité de onze jours. La baronne porta plainte immédiatement au Présidial d'Angers, et pendant que ses parents et tenanciers venaient assiéger le ravisseur, celui-ci hors d'état de se défendre, regagna l'armée. Couvert un instant par l'amitié du roi, il se laissa prendre dans une embuscade d'archers, fut conduit à Angers, condamné à mort et décapité le 7 mai 1588 ...

La terre néanmoins resta dans la famille Laurens, qui la possédait encore en 1626 ; elle était passée quelques années plus tard à la famille de Vezins.

- En est dame en 1709, Louise-Madeleine de Gargain, veuve de Charles de la Porte de Vezins.

- En 1723, en est seigneur messire Philippe-Alexis Durand de Saint-Eugène, chevalier, conseiller d'État, maître d'hôtel ordinaire du roi, président de la Chambre des Comptes de Bourgogne.

- Pierre-François de Siry, chevalier, comte de Marigny, président au Parlement de Paris, en 1766.

- Paul Robert de la Palun, en 1781.

- Guillaume-Robert Pinel de la Palun, en 1786, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis ; dans un acte notarié passé devant René-François Bodé, notaire royal à Maulévrier, Guillaume-Robert Pinel de la Palun se fait représenter par Louis-Jean-Baptiste-Étienne Baguenier Desormeaux, maître en chirurgie ; mort le 21 août 1821 à La Guadeloupe où il résidait. Il est dit dans des actes officiels "millionnaire américain".

PROCÈS DE LA CRILLOIRE :
Guillaume Robert Pinel de la Palun mourut célibataire en Guadeloupe, le 21 août 1821. Sa fortune en France était la terre de La Crilloire, qu'il avait léguée, par un testament de 1817, à Joséphine Gourdon, sa servante maîtresse, pour qu'elle en jouisse et la transmette à l'enfant qu'elle portait.
Les héritiers de Guillaume Robert étaient, en 1821, du côté paternel, Mme veuve Devarieux, M. Sannois de Maupertuis et Mme Pintard ; du côté maternel, M. Hurault de Gondrecourt et Mme veuve des Cornets.
Un procès s'ensuivit devant le tribunal de Beaupréau (Maine-et-Loire), entre les héritiers et la demoiselle Gourdon, procès qui dura deux ans. Intervint alors M. Formon (Conseiller d'état sous la Restauration, député de la Loire-Inférieure), légataire de Mme de Vaultier, tuteur officieux d'Eugène de Vaultier et mandataire de M. Devarieux, tous alors héritiers de Guillaume Robert Pinel. Les négociations durèrent trois ans et, en 1826, aboutirent à un traité entre les parties : la valeur de la Crilloire, estimée à 300.000 francs, serait divisée entre tous les héritiers et la légataire, Joséphine Gourdon, qui prendrait la part de M. de Maupertuis, renonçant. Le partage ne pouvant se faire en nature, M. Formon paierait les parties et, en revanche, demeurerait propriétaire de la totalité de La Crilloire.
M. Formon n'accepta ce traité que par lassitude et avec réticence ; il en tira beaucoup de soucis. Puis, Joséphine Gourdon était décédée en 1846, sa fille, Robertine, qui se faisait appeler Mademoiselle de La Palun, épousa en 1850 M. Dénéchau, médecin de Trémentines, et, en 1852, le couple attaqua le traité de 1826 et réclama la terre de La Crilloire. Il y eut un nouveau procès. M. Formon mourut, son fils étant en Crimée (1854-1855) ; sa veuve et ses filles négligèrent de se défendre d'abord et c'est alors, vers 1856, que fut rédigé ce document.

- Étienne-Joseph de Formon, ancien député, mort à Paris le 12 octobre 1854, acquit la terre de ses héritiers et fit reconstruire le château vers 1847.

Capture z

La seigneurie de la Crilloire formait une paroisse, comprenant le château - dont la chapelle dédiée à St-Sébastien servait d'église, - une métairie, un moulin, quelques-unes seulement des borderies et non pas même toutes celles qui s'élevaient aux alentours du château. Il ne reste plus trace ni de l'église ni du cimetière, placé en dehors du château vers le Sud.

La Cure qui a conservé son nom est une maison basse à 900 m à l'Ouest du bourg, datée à la clé de sa porte principale 1775 - avec les lettres CHE, diminutif de Chemineau, maître maçon à Maulévrier. Elle a servi quelque temps d'habitation à l'ancien seigneur après la Révolution.

la cure z

Cette paroisse, qui comptait tout au plus 12 ou 13 feux en 1789, n'élut alors ni syndic ni municipalité et ne payait ni taille ni vingtième ni aucun impôt par une libéralité de Louis XIV, dit-on, au regard du seigneur, Charles de la Porte de Vezins. Elle dépendait de l'évêché de la Rochelle et du doyenné de Bressuire. 

On trouve comme curés :

- René Chastin, ancien curé de Mazières, 1660, 1670 ;

- F. Loriôt, 1693 ;

- Gillebert, 1705 ;

- François Malineau, 1706, décédé le 23 juillet 1723 ; Mgr Étienne de Champflour, évêque de La Rochelle, visita la paroisse le 12 septembre 1706 :

SAINT-SÉBASTIEN DE LA CRILLOIRE - Le 12 septembre 1706, nous sommes arrivé à Saint-Sébastien de la Crilloire, sur les 7 heures du matin. Après avoir été reçu par le sieur François Malineau, curé de cette paroisse, nous en avons fait la visite de la manière qui suit, après avoir observé les cérémonies accoutumées. Étant entré dans l'église, l'antienne du patron ayant été chantée, nous en avons dit l'oraison, après laquelle nous avons fait une exhortation au peuple et ensuite célébré la sainte messe à laquelle ont communié plusieurs personnes. Nous avons ensuite été au cimetière, que nous avons trouvé en bon état et bien fermé. Étant de retour à l'église, nous avons visité les fonts baptismaux, qui sont en bon état aussi bien que les vases des saintes huiles. Nous avons ensuite visité le confessional, dont nous avons trouvé les grilles un peu trop larges ; nous avons ordonné de les rétrécir. Nous sommes entré dans la sacristie, que nous avons trouvé en bon état. Il y a des ornements de toutes les couleurs, très propres, et du linge autant qu'il en faut. Nous avons ensuite visité le Saint-Sacrement que nous avons trouvé dans un tabernacle de bois doré en dehors, dans un petit ciboire d'argent doré en dedans. Le tabernacle est doublé d'une étoffe de soie. Il y a un calice de vermeil doré avec sa patène. Nous n'y avons point trouvé de soleil, mais le sieur curé nous a dit qu'il en avait acheté un qu'il nous présenterait pour être bénit dans le cours de notre visite. Le sieur curé est âgé de 36 ans ; il a une servante que nous lui avons permis de garder, attendu qu'il a ses deux soeurs avec lui. La cure est à la présentation de Mme la marquise de la Porte et vaut de revenu 4 à 500 livres.

- Sébastien Soucheleau, 22 octobre 1723, décédé le 26 février 1741, âgé de 64 ans ;

- Pierre Besnard, précédemment vicaire d'Yzernay, 11 avril 1741, décédé le 22 avril 1771, âgé de 63 ans ;

- Jean-François Verdon, ancien vicaire de Saint-Pierre de Cholet, arrivé le 12 août 1771, jusqu'à la suppression de la paroisse en 1790 ; le dernier acte rédigé par l'abbé Verdon est en date du 18 novembre 1790 ; il est décédé "aux Roches" (Yzernay ?) le 20 juillet 1792 "par accident comme il est constaté par un procès-verbal du juge de paix et de la municipalité", à l'âge d'environ 52 ans, et inhumé le lendemain (décès constaté dans les registres paroissiaux des Aubiers par le "Prieur" Aignan Pisseau, curé constitutionnel).

 

verdon signature

verdon décès 1792

ruines de l'ancien château 5

ruines de l'ancien château 3 la tour de l'Ouest

Tour Ouest

 

(1) - Le commandant Villemet pourrait être Noël-Dominique Villemet, né dans le département du Morbihan en 1735 et décédé en 1793, probablement des suites de ses blessures reçues à La Crilloire.


Dictionnaire historique, géographique et biographique de Maine-et-Loire - par Célestin Port - 1878

"Procès de La Crilloire" - G.H.Caraïbe - numéro 27 : mai 1991 - p. 331

Photos de l'ancien château : AD49 - 11 Fi 6151 - 11 Fi 6152 - 11 Fi 6153

L'Anjou historique du 1er novembre 1905 - pp. 230 et 231

AD79 - Registres paroissiaux des Aubiers

 

 

 

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Commentaires
M
Superbe article et très intéressant pour moi puisque je passe devant l'allée du château à vélo assez souvent entre Yzernay et Toutlemonde.
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