L'ABBÉ ANTOINE GAIFFE
Fils de Pierre-François, imprimeur, et de Amiette-Félicité Rateau, Antoine est né à La Rochelle, paroisse Notre-Dame, le 26 septembre 1763, et a été baptisé le lendemain.
M. Gaiffe étudia chez les Sulpiciens, puis il fut ordonné le 6 mai 1788. Quand il arriva au Canada, le 23 septembre 1798, il déclara qu'il était âgé de 35 ans, et prêtre depuis dix ans.
Avant de quitter la France, il avait été vicaire à La Jarrie, dans le diocèse de La Rochelle, puis, s'était retiré chez les Sulpiciens, où on lui assigna la charge de professeur dans une classe de sciences.
En 1792, il se sauva à Londres, où il vécut pendant six ans, travaillant à gagner sa vie par l'enseignement ; mais sa faible santé le détourna si souvent de ses occupations, qu'il se vit dans l'obligation de chercher un poste où il serait plus à l'abri des vicissitudes de la vie d'exil.
La route du Canada lui ayant été ouverte, il en profita avec un joyeux empressement, et à l'automne de 1798, on le voit installé à la tête d'une classe au séminaire de Montréal. C'était son goût, mais sa santé marchait au plus mal. Il lui fallut changer de milieu et abandonner du coup une besogne qui seyait si bien à ses aptitudes.
Mais le professeur dut obéir et prendre le chemin de Saint-Régis. La vie du prêtre dans cette mission, sans être pénible, comportait certaines obligations auxquelles il était difficile de se soustraire. L'étude de la langue iroquoise en était une, et M. Gaiffe, déjà affaibli, ne pouvait se livrer assidûment aux travaux du cabinet, à moins de compromettre gravement une santé débile. Au bout de quelques mois, il n'était déjà plus que l'ombre de lui-même. Cependant il avait conservé assez de forces pour lutter victorieusement contre la maladie. Si bien que l'évêque lui ayant offert d'agir temporairement comme curé de Saint-Pierre du Portage (L'Assomption), il accepta la charge avec joie, comme s'il eut dû y vivre longtemps. Personne autour de lui ne soupçonnait que ce curé, toujours fidèle au poste, plein de zèle et d'activité, souffrît d'un mal qui pouvait l'emporter en un bien court temps. Voilà précisément ce qui devait arriver.
Le Vieux-Séminaire sulpicien de Montréal
Retourné au séminaire de Montréal, M. Gaiffe reprit ses études particulières et suivit ponctuellement les exercices commandés par les règlements de la maison. Mais il souffrait en silence d'humeurs scrofuleuses, qui n'étaient elles-mêmes que la période débutante de la phtisie pulmonaire. Cette impitoyable maladie devait bientôt se déclarer avec son cortège de symptômes plus ou moins alarmants.
Un jour, l'abbé Gaiffe demanda avec instance les sacrements du mourant. On le savait malade, on ne le croyait pas moribond. Mais lui-même ne s'était jamais fait illusion sur le sort qui l'attendait. Peu de jours plus tard, il rendit sa belle âme à Dieu, après avoir donné tous les signes de prédestination. C'était à la date du 15 juillet 1800.
M. Gaiffe n'avait connu de l'existence que les côtés tristes. Ce fut d'abord la séparation d'avec ses parents et amis de France, et puis l'exil et ses amertumes, le tout aggravé par la maladie, la souffrance corporelle avec l'idée d'une mort prochaine. La vie, dans ces conditions, ne saurait être agréable. Cependant ce prêtre du Seigneur sut la supporter avec une patience toujours inaltérable.
Les ecclésiastiques et les royalistes français réfugiés au Canada à l'époque de la Révolution, 1791 - 1802 - par N.E. Dionne - 1905
AD17 - Registres paroissiaux de La Rochelle et de La Jarrie