Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Maraîchine Normande
29 novembre 2018

ENTREVAUX (04) CRÉPON (14) - 1797 - L'ASSASSINAT DE FOIX-FAURY : LOUIS-DOMINIQUE-ALEXANDRE FAURY, CHEVALIER DE FOIX

L'assassinat de Foix-Faury

Crépon 14 église z


"Dans la soirée du 30 ventôse an V (20 mars 1797), le nommé Foix-Foury, commissaire du canton de Crépon, se rendant à Asnelles, lieu de sa résidence, fut tué d'un coup de pistolet tiré à bout portant au milieu du dos. On a dit que ce coup de feu fut tiré par un jeune homme de 17 à 18 ans, qui faisait partie du groupe et que, s'étant engagé pour échapper aux poursuites, il avait honorablement servi dans les guerres de l'Empire, où il fut tué, capitaine et chevalier de la Légion d'honneur." Tel est le récit de M. Pezet.

L'individu, qu'il désigne sous le nom de Foix-Foury, se nommait exactement Faury, Louis-Dominique-Alexandre, chevalier de Foix, né à Entrevaux (Basses-Alpes), le 18 avril 1755, d'une noblesse très ancienne, marié le 23 août 1782, à Saint-Mâlo de Lisle, paroisse de Saint-Auban, diocèse de Glandèves, même département des Basses-Alpes, avec Jeanne-Perrine Desmarais. Il avait alors 27 ans.

FAURY BAPTEME z

Sa famille, originaire de ce lieu, avait été riche et l'enfance d'Alexandre, entourée de luxe, puis la ruine était venue et ce dernier représentant d'une race noble se trouvait sans aucune fortune au commencement de la Révolution. Il quitta le pays avec quelques débris de son ancienne fortune et réussit à se faire nommer brigadier des douanes à Saint-Mâlo.

Mais sa qualité de gentilhomme le força bientôt à quitter cet emploi. Il ne se soumit pas de bonne grâce à cette dure nécessité, fut incarcéré et il était sur le point d'être envoyé au tribunal révolutionnaire, quand le 9 thermidor ouvrit à beaucoup les portes de leurs prisons.

Réintégré, peu après, dans ses fonctions de brigadier, il fut envoyé à Asnelles et bientôt nommé commissaire du Pouvoir exécutif près l'administration municipale de Crépon. Il acheta nationalement le presbytère d'Asnelles, et y vécut dans une aisance relative avec sa femme et ses quatre filles. On n'a jamais entendu dire qu'il lui eût été reproché aucune vexation, ni aucun acte marquant de sévérité. Les causes de sa mort furent diversement appréciées : selon les uns, la haine venait d'en bas et n'était motivée que par la supériorité d'origine et de tenue ; d'après les autres, il aurait été victime de haines politiques. Ce dernier point de vue rendrait plus plausible la version de M. Pezet, sur cet assassinat.

faury signature z

Un jour, en sortant de Creully avec un camarade, il fut l'objet de plusieurs coups de fusil, dont l'un tua son compagnon ; ce jour-là, Faury eut le bonheur d'échapper à la mort ; mais, peu de temps après, alors qu'il sortait de Crépon, lieu où résidait la municipalité de canton près de laquelle il exerçait ses fonctions, se dirigeant vers sa maison d'Asnelles, précisément le 20 mars 1796, à 6 heures du soir, une douzaine d'hommes l'assaillirent, le jetèrent dans un fossé et l'assassinèrent à coups de couteau. Il avait 32 blessures quand on le trouva. Dans la main crispée du mort était restée une forte mèche de cheveux blonds, bien qu'on lui eût coupé le poignet jusqu'à l'os pour lui faire lâcher prise.

On l'avait entendu crier : "Pitié pour ma femme et mes pauvres enfants". Les assassins, pour l'empêcher de crier, lui tailladèrent la bouche dans toute sa largeur. Leur crime commis, ils allèrent saccager le jardin et incendier la maison de leur victime, non sans en avoir pillé le linge et l'argenterie qu'ils partagèrent plus tard entre eux. Une femme d'Asnelles, nommée Lejonc, eut longtemps en dépôt les objets volés. Comme les enfants de Faury criaient pendant le pillage, les chouans, pris d'un semblant de pitié, leur rejetèrent quelques chemises à leur usage par-dessus le mur.

La malheureuse veuve et ses enfants, en butte à l'inamadversion des uns, objets de craintes de la part des autres, vécurent misérablement des bribes de leur modeste aisance. La veuve succomba bientôt à la peine, et ce fut une soeur à elle qui éleva les orphelines.

Le crime resta impuni.

FAURY DECES z

 

Un certain nombre d'individus furent cependant arrêtés, en l'an V et en l'an VI, sous l'inculpation d'avoir machiné ou favorisé cet assassinat et d'en avoir été auteurs ou complices. Les registres d'écrou de la maison d'arrêt de la rue Quicangrogne, où Caillet était concierge, portent les noms de Mallet Louis-François, officier de santé de 3e classe à Meuvaines ; Mallet Louis, fils Louis, fermier de la grande ferme de Bazenville ; Loiseau Michel, sergent à la 2e compagnie franche stationnée à Bayeux ; Le Véel Paul, 33 ans, marchand de chevaux, herbager et cultivateur à Saint-Germain-de-la-Lieue ; Adeline Charles, dit La Pigacière, 47 ans, cultivateur au Manoir ; Renaude Charles, fils François, 24 ans, cultivateur à Crépon, qui furent transférés aux prisons de Caen, le 4 brumaire an VII.

Furent ensuite incarcérés, dans les mêmes prisons, toujours pour cet assassinat : Denis Jean-François, dit Desnoyers, cultivateur à Sully, 52 ans, "inculpé spécialement d'avoir conseillé et provoqué cet assassinat et d'en avoir facilité et préparé l'exécution" ; Gast François, 45 ans, cultivateur à Courseulles, auteur et complice de l'assassinat "de Foix-Faury, auquel des brigands volèrent sa montre, ses boucles de jarretières, son mouchoir de cou et ses souliers, après l'avoir tué."

On inquiéta aussi pour la même cause : Lefevre Pierre, dit Poulidor, bourrelier à Colombiers, âgé de 46 ans ; Creveuil Michel, volontaire aux compagnies franches ; Lieuray Jean-Louis, cultivateur à Sommervieu. Ce dernier fut mis en liberté par le directeur du jury d'accusation, le 8 brumaire an VIII (30 octobre 1799).

On prononça encore les noms de Marnet, Connin, etc.

Parmi la bande homicide, se trouvait un nommé Labbé, serrurier-arquebusier à Creully, frère de la servante de l'infortuné Faury, une misérable qui aida ces brigands à faire un trou dans le mur pour pénétrer dans la maison et la mettre au pillage.

M. Bunouf-Bunouville, alors magistrat de sûreté, suivit rigoureusement l'instruction, mais ne put parvenir à faire parler les témoins.

Le vrai motif de l'impunité des gens arrêtés fut-il le mutisme des témoins dont la terreur paralysait la langue ? ou plutôt faut-il chercher dans une influence occulte qui, dans la crainte de révélations compromettantes, aurait triomphé de l'habileté et du bon vouloir du magistrat instructeur ? A l'appui de cette hypothèse viendrait ce propos, dont il n'existe pas, il est vrai, de preuve palpable, mais qui circulait couramment dans le public, au témoignage de M. Charles Le Sénécal, et d'une des filles de la victime, Sophie de Faury, morte le 19 février 1875, rue Franche, à l'âge de 86 ans 11 mois, qu'une dame d'un rang élevé, Mme de Chivrey, aurait été présente à la perpétration du crime qu'elle aurait éclairé d'un falot.

Le fait n'étonnera pas outre mesure ceux qui ont lu les livres publiés, sur la baron d'Aché, surtout sur Tournebut, par Le Nôtre, le manuscrit de notre Bibliothèque publique sur la Conjuration de Crépon, et où on trouvera et ce nom de Mme de Chivrey, et beaucoup d'autres de gens de la noblesse d'alors : Hue Lérondelle Hippolyte, de Crépon ; Le Roy Désiles ; Lepelletier Louis ; Vast la Cour Pierre-Louis ; Leroi de Dès ; André Duhomme ; Desmares ; Desvarennes, dont Bunouf-Bunouville, faisant allusion aux diligences dévalisées par lui, disait que ses armoiries étaient inscrites aux portières de celles-ci, etc. ; car, républicains comme royalistes usèrent alors de tous les moyens pour faire triompher leurs opinions politiques.

L'amnistie, qui fut accordée à l'occasion du Consulat, rendit la liberté à tous les inculpés, dont plusieurs furent détenus plus de trois ans, rue Quincangrogne.

 

FAURY rue Quincangrogne Bayeux z

 

E. Anquetil - Société des sciences, arts et belles lettres de Bayeux - 9ème volume - 1907

AD04 - Registres paroissiaux d'Entrevaux

AD14 - Registres d'état-civil de Crépon

 

Publicité
Commentaires
La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
Publicité