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La Maraîchine Normande
3 février 2017

CHALLANS (85) - 1906 - INVENTAIRES - UNE BELLE LETTRE DE M. GASC, RECEVEUR DES DOMAINES

CHALLANS
INVENTAIRES

Challans

Notes d'un témoin :

"1er Acte - L'inventaire a été fixé au 1er février. Ce jour-là, chant d'un service à 10 heures, pour M. Branchereau, ancien curé, et pour les défunts de la paroisse ; assistance nombreuse. Notre receveur donne sa démission.

Pendant l'office, dépêche apportée par un gendarme : "Inventaire renvoyé à une date ultérieure."

2e Acte - Lundi 5 février, à deux heures, grand émoi dans Challans.

Il a été dit dans un café que l'Inspecteur d'Enregistrement est arrivé pour opérer immédiatement. A six heures, M. le Curé reçoit la visite de l'inspecteur, très aimable, très conciliant, qui lui fait des excuses, etc., et lui donne rendez-vous à la sacristie pour le lendemain à 8 heures et demie. - M. le Curé avertit l'agent Texier qu'il a été signalé et qu'alors ... L'agent convient que les curés n'étaient pas les maîtres ! ...

La nuit vient et porte conseil à beaucoup de gens.

Mardi 6 - A 7 h. et demie, le tocsin, le glas, la volée sont sonnés par des anges invisibles, qui, entre temps chantent : Nous voulons Dieu, Dieu pour sa cause aura des hommes, etc., Vive la Religion ! Église pleine de monde, barricadée. L'inspecteur ne peut y entrer, avec ses douze gendarmes.

Il s'en va. Les barricades disparaissent, mais M. Delgay arrive. Le soir, on demande à la mairie cent vingt billets de logement pour la troupe ; anxiété, veilles, craintes d'un assaut pour le lendemain à la première heure. Prières.

Mercredi : 3e Acte - A 8 heures du matin, départ des soldats pour la Garnache, exécution.

Challans doit être assailli à 4 heures le soir, on l'apprend. M. Delgay essaie de nous tromper, il fait semblant d'embarquer les soldats à la gare. La feinte est découverte.

Les cloches sonnent à l'occasion d'un baptême. Les sonneurs s'aperçoivent qu'on veut nous surprendre, alors les deux cloches sont mises en branle. Gendarmes à cheval, soldats, fidèles accourent au galop. M. le Curé veut entrer dans l'église : il est trop tard. Le commissaire est furieux : "Croyez-vous qu'il soit agréable de défoncer les portes des églises ?" - Croyez-vous qu'il nous soit agréable de recevoir votre visite ? - C'est votre faute ! vous avez la police de l'église. - Oui, Monsieur, quand je suis dedans ! - Vous deviez penser que nous viendrions ! - Qui m'avait prévenu ?

Alors les cérémonies d'usage : sommations, arrivée et travail du crocheteur, qui fait sauter, sous les yeux de deux mille spectateurs, appuyé et soutenu par les gendarmes, un panneau au-dessus de la porte d'un bas-côté.

Trente francs de dommage. Résultat moral excellent. Pas de blessés, pas de procès-verbaux. Il est cinq heures un quart ; l'inventaire, plus que sommaire, est terminé dans un quart d'heure.

L'effet produit dans tout le pays est immense : on vient en pèlerinage à notre église, qui gardera la trace de sa blessure."


 

UNE BELLE LETTRE

Voici la belle lettre par laquelle M. GASC, receveur des Domaines à Challans, a offert sa démission plutôt que de procéder à l'inventaire des biens d'église ; elle honore grandement celui qui l'a écrite :

"Challans, 30 janvier 1906.

Le receveur des Domaines à Challans à Monsieur le Directeur des Domaines à La Roche-sur-Yon.
Monsieur le Directeur,

Par votre dépêche d'hier, vous m'invitez à procéder, en exécution de la loi du 9 décembre 1905, à l'inventaire descriptif et estimatif des biens de l'église de Challans.

J'ai l'honneur de vous faire connaître, si mon dossier administratif est muet à cet égard, que j'appartiens à la religion catholique, et je déclare hautement que la mission dont je suis chargé est incompatible avec mes convictions les plus profondes. Je commettrais, en effet, un sacrilège en essayant de dénombrer et d'évaluer un patrimoine intangible, qui ne saurait être, d'ailleurs, apprécié à la quantité, au poids ou à la mesure ; à plus forte raison en franchissant un sanctuaire qui a droit à toute ma vénération.

Je n'exécuterai donc pas !

De même vous pourriez, demain, me prescrire de pénétrer pour le même objet dans un temple ou une synagogue. Citoyen respectueux de toutes les croyances, je craindrais de blesser, en obéissant à vos ordres, les sentiments d'autres français.

Je n'exécuterais également pas !

Il me reste à protester de toutes mes forces contre la violation flagrante, chez le fonctionnaire, de la liberté de conscience inscrite au frontispice de la loi, liberté que j'ai le droit de revendiquer en ma qualité principale de citoyen.

Après vingt-trois ans de loyaux services, j'ai été contraint de me démettre, comme je le déclare par les présentes, de mes fonctions de receveur des Domaines. La perte d'intérêts matériels sera douce, si je puis contribuer par mon sacrifice à détourner de la Patrie les malheurs qui la menacent".

Signé : GASC.

 

AD85 - La Semaine Catholique du Diocèse de Luçon - 1906 - p. 129-130 - p. 132-133

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