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La Maraîchine Normande
2 février 2017

SAINT-JUNIEN-LA-BREGÈRE (23) EYMOUTIERS (87) - PAUL ESMOINGT, PRÊTRE RÉFRACTAIRE

La petite ville d'Eymoutiers, chef-lieu de canton dans le département de la Haute-Vienne, et une des moins populeuses du diocèse de Limoges, peut, à juste titre, se glorifier d'avoir donné, à elle seule, à l'Église de France, pendant la Révolution, plus de martyrs et de confesseurs de la foi, que plusieurs de nos grandes cités réunies. Un des plus remarquables de ces généreux athlètes fut PAUL ESMOINGT, curé d'Eymoutiers.

Esmoingt blason

Ce saint prêtre était d'une famille noble et ancienne, connue depuis Bernard Esmoingt (jadis Aimoin), vivant en 1098-1108, et qui a aussi donné à l'Église plusieurs dignitaires distingués, tels que Guillaume Esmoingt, chanoine, comte de Lyon en 1378, et Etienne Esmoingt, abbé de Saint-Martial de Limoges de 1392 à 1401. Elle portait pour armes d'argent à trois chevrons de gueules alias d'azur. Elle s'est divisée en plusieurs branches, répandues surtout dans le département de la Creuse.

PAUL ESMOINGT appartenait à la branche de la Grillière ; il naquit en effet dans ce lieu, dans la paroisse de Saint-Junien-la-Brégère, canton de Royère (Creuse). Il était fils de Pierre Esmoingt, écuyer, seigneur de la Grillière et de Génevière, de Roumanet, de Beaune. Les registres du Grand séminaire de Limoges le disent né le 27 février 1748, et baptisé le 4 mars suivant. Il eut un frère nommé François qui entra aussi dans l'état ecclésiastique et souffrit pendant la Révolution, puis une soeur Marie-Anne, dont il est parlé plus loin.

 

Esmoingt baptême

 

Comme à travers beaucoup de modestie, et même un fond de timidité, Paul Esmoingt laissait entrevoir dans son adolescence d'heureuses dispositions, soit à la vertu, soit aux belles-lettres et aux sciences, ses parents, quoique peu favorisés de la fortune, l'envoyèrent étudier dans l'université d'Angers. Il y prit ses grades en philosophie et en théologie, et revint ensuite à Limoges, où il entrait au Séminaire des Ordinands le 30 décembre 1772 ; il y reçut la prêtrise en 1773.

Esmoingt signature

Ses supérieurs l'envoyèrent aussitôt vicaire à Saint-Martin-Château, paroisse limitrophe de celle où il avait vu le jour. Peu après (en 1775), la théologale du chapitre collégiale d'Eymoutiers ayant vaqué, l'abbé Esmoingt fut pourvu, sur la nomination du chapitre, de ce bénéfice, qu'il ne pouvait d'ailleurs manquer d'obtenir, en vertu de ses grades. Durant l'espace de douze à treize ans, il remplit tous les devoirs de cette charge avec la plus grande édification, s'adonnant à l'aumône, vivant très retiré et d'une manière fort frugale, austère même. Sa société la plus ordinaire était composée de quelques uns de ses confrères, en qui il apercevait le plus de régularité, et en particulier de l'abbé Richard, chanoine comme lui, et aussi exact à ses devoirs qu'il était gai, aimable et spirituel. Il passait sa vie dans le recueillement, la prière et la pratique de toutes sortes de bonnes oeuvres ; se montrait surtout très assidu au choeur de son église, qu'il ne contribuait pas peu à soutenir par la forte voix dont la nature l'avait doué.

L'abbé Esmoingt se rendait aussi utile aux religieuses Ursulines d'Eymoutiers, quand elles avaient recours à lui, et il les édifiait toujours singulièrement, soit par son air pénétré et sa posture aussi humble que respectueuse au pied des autels, durant les longues oraisons qu'il faisait parfois dans leur église, soit par la ferveur et la modestie angélique avec lesquelles il célébrait les saints mystères, sans accorder trop à sa propre dévotion par une lenteur indiscrète, comme aussi sans favoriser par sa précipitation l'indévotion de tant de gens du monde, qui font aux prêtres un mérite de leur célérité à offrir le Saint-Sacrifice. Du reste, il confessait peu, prêchait rarement à cette époque de sa vie, soit que par un reste de défiance de lui-même il crut devoir se borner à remplir parfaitement ses devoirs de chanoine, soit que les fidèles jugeant faussement la sévérité de sa morale par la grande régularité et l'austérité même de sa vie, s'adressassent peu à lui.

Exempt d'ambition et de toute vue d'intérêt, l'abbé Esmoingt se serait borné toute sa vie à son mince bénéfice, dont il avait fait réparer, en partie à ses frais, les bâtiments qui tombaient de vétusté, si un évènement imprévu ne l'eût forcé en quelque sorte d'en accepter un d'un revenu plus considérable, M. La Bachelerie du Theil, curé d'Eymoutiers, ayant été nommé (en 1788) prévôt du chapitre de cette ville, et voulant procurer à la paroisse qu'il allait cesser de gouverner un pasteur selon le coeur de Dieu, jeta les yeux sur l'abbé Esmoingt, dont il avait été à portée d'apprécier, depuis bien des années, le rare mérite, et il le pressa tellement d'accepter ce bénéfice qu'il fut comme contraint de consentir à la résignation qu'il lui en fit. On voit que M. La Bachelerie du Theil signe les registres paroissiaux de Notre-Dame d'Eymoutiers dans les premiers mois de l'année 1789, et la Feuille hebdomadaire de Limoges nous dit, le 9 décembre de cette année : "Le 23 novembre 1789, Mgr a nommé, sur la présentation de M. Léonard de La Bachellerie, chanoine aquilaire du chapitre d'Eymoutiers, M. Paul Esmoingt de la Grillière, théologal dudit chapitre, à la cure de Notre-Dame d'Eymoutiers, vacante par la démission de M. Jean La Bachelerie du Theil, prévôt du chapitre".

Eymoutiers vue

Dès ce moment, on vit cet homme si modeste, si retiré, si concentré, si j'ose dire, dans le soin de sa sanctification personnelle s'élancer avec une ardeur merveilleuse dans la carrière du saint ministère, comme s'il eût été nouvellement revêtu de la vertu d'en haut ; s'appliquer à connaître ses ouailles, les visiter, s'informer de leurs divers besoins et s'efforcer d'y pourvoir ; leur rompre le pain de la parole, leur administrer les sacrements, catéchiser les ignorants, visiter les malades, assister les mourants, consoler toutes les sortes d'affligés et de malheureux, remplir en un mot avec autant de constance et d'assiduité que de zèle et de prudence toutes les respectables fonctions de la charge pastorale.

Mais bientôt la Révolution, en agitant tous les esprits et bouleversant toutes les têtes, vint suspendre d'abord et peu après arrêter entièrement le cours d'un ministère si utile à l'Église. Dès les premiers mois de 1791, tous les prêtres qui avaient refusé le serment impie de maintenir la constitution civile du clergé ayant été expulsés de leurs églises, M. Esmoingt, qui était, comme on le pense bien, de ce nombre, se retira chez sa soeur demoiselle célibataire, très adonnée, comme toute la famille, à la piété et aux bonnes oeuvres, et qui avait pris à ferme la maison de campagne du prévôt d'Eymoutiers, laquelle était isolée de toute habitation et située dans une prairie à une très petite distance de la ville, sur la rive droite de la Vienne. De là le saint prêtre gouverna en secret, pendant près de deux ans, sa chère et bien aimée paroisse, autant qu'il pouvait le faire, sans manquer aux règles de la prudence chrétienne et sans provoquer la persécution, mais aussi sans la redouter, et sans crainte de s'exposer personnellement, quand il s'agissait du salut de quelqu'une de ses ouailles, même de celles qui ne partageaient pas ses opinions et sur la discrétion desquelles il avait moins à compter. C'est ainsi qu'il visita et administra au lit de mort plusieurs patriotes très prononcés, sans s'alarmer des dangers auxquels il s'exposait, en se mettant à la merci de pareils hommes et de ceux qui les entouraient.

Mais au commencement de 1793, la peine de mort ayant été décrétée par la Convention contre les fonctionnaires publics et les prêtres insermentés, qui dans un temps très court, déterminé par la loi, n'auraient pas quitté la France, et contre toutes les personnes, même les parents, qui leur donneraient asile, M. Esmoingt dût se séparer de sa soeur, pour ne pas l'exposer à périr avec lui s'il venait à être découvert chez elle. Il ne s'éloigna pourtant pas tellement d'elle qu'il ne la vit tous les jours. Il passait les journées entières, avec quelques uns de ses confrères, insermentés comme lui, dans une espèce de grotte qu'on avait pratiquée pour eux sous terre, à peu de distance de la ville d'Eymoutiers. Les soirs, un peu avant la nuit, il retournait coucher chez sa soeur, où il trouvait une cache en apparence assez sûre qui pouvait au besoin lui fournir une retraite. Le lendemain, il allait de nouveau, avant le point du jour, se confiner dans sa triste demeure, aussi incommode que froide, humide et malsaine. Pendant l'espace d'environ deux mois, le saint confesseur de la foi n'eut pas durant le jour d'autre demeure que cet obscur réduit, presque entièrement dépourvu de lumière et plus semblable à l'habitation d'une bête fauve qu'à l'habitation d'un respectable ministre des autels.

Au bout de ce temps, il eut le malheur, ou, pour parler plus chrétiennement, le bonheur d'être découvert par les persécuteurs. Ils apprirent (Dieu sait par quelle voie) qu'il était caché chez sa soeur ; et ils connurent si positivement l'endroit précis de cette maison où il était, que, sans faire de perquisitions, ils s'y portèrent de suite et trouvèrent d'autant plus facilement le saint prêtre que n'ayant pu, à raison de sa surdité, entendre assez tôt l'avis qu'on lui donnait, que ces furieux venaient pour le prendre, un des pans de sa lévite, qu'il n'eut pas le temps de retirer à lui, acheva de le trahir. On s'empara aussitôt de lui et on le conduisit sur le champ en prison, à travers les rues les plus peuplées d'Eymoutiers, avec un air de triomphe, en faisant retentir les vociférations accoutumées dans ces temps de vertige et en répétant mille fois, avec l'accent d'une joie féroce : Nous le tenons enfin le réfractaire ! Nous le tenons ! Cependant, les gens de bien étaient indignés et criaient vengeance, prévoyant bien le sort que l'on réservait à leur digne pasteur, qui n'était resté en France que pour leur donner les secours de la religion et pour ne pas abandonner au fort de la persécution son troupeau chéri à la merci des loups dévorants. Plusieurs, ne pouvant soutenir la vue de ce révoltant spectacle, fermaient avec précipitation leurs fenêtres et sanglotaient d'une manière lamentable, comme s'ils eussent perdu les auteurs de leurs jours.

A Limoges, le club des Jacobins ou société populaire, dans sa séance du 15 brumaire (5 novembre 1793), mentionne dans son procès-verbal que "les nouvelles venues d'Eymoutiers annoncent une grande capture d'aristocrates, et des levées d'argent sur les modérés". Puis à la séance du lendemain 6 novembre, "Sauger donne des détails sur ce qui s'est passé à Eymoutiers ; il en résulte que le peuple a livré 30 personnes suspectes, sur lesquelles 20 ont été conduites à Limoges, avec 17 autres, de Saint-Léonard et 8 des environs. De plus les commissaires ont fait une levée de 30.000 livres. On applaudit beaucoup cette expédition, et, comme les volontaires de service n'ont reçu qu'une pièce de trois livres, par jour, la société leur alloue cinq livres".

On trouve aux Archives de la Haute-Vienne les deux pièces suivantes se rapportant à ces arrestations :

"Le citoyen Antoine Roux et onze volontaires de la garde nationale d'Eymoutiers ont conduit à la maison d'arrêt Pierre Gautier, (deux mots illisibles), Dupuis, ci-devant gendarme ; Esmoingt ci-devant curé ; Esmoingt sa soeur, Pierre Faye, jardinier, arrêtés par mandat de la municipalité d'Eymoutiers de ce jour, dont je le décharge, Limoges le 20 brumaire an 2e de la Rép. fr. (10 novembre 1793). Signature illisible."

"Le C. Filloux, dépositire des fonds disponibles du Comité de surveillance, payera au citoyen, Antoine Roux, commandant le détachement de la garde nationale d'Eymoutiers, qui a conduit à la maison d'arrêt les sus-dénommés de l'autre part, la somme de cent-soixante-huit livres, savoir : celle de 150 livres pour frais de conduite par douze gardes nationales, pour deux journées et demy, à cinq livres, par jour, et celle de 18 livres pour frais de garde du sr Dupuis, pour trois gardes pendant deux jours, à trois livres chacun par jour. Fait en Comité le 21 brumaire l'an 2e de la Rép. une et indivisible (11 novembre 1793, Signé : Jevardat, Rougier.
Pour acquit : Roux."

M. Esmoingt subit un premier interrogatoire à Eymoutiers, et le lendemain, il fut lié, garrotté et jeté sur une charrette avec sa soeur, prévenue d'avoir donné asile chez elle à un prêtre réfractaire. C'est au son du violon, du tambour et de la cornemuse qu'ils furent ainsi conduits à Limoges. Là, il comparut de nouveau sur la fatale sellette, et quatre ou cinq jours seulement après son arrivée, il fut condamné à la peine de mort.

On va lire un extrait du jugement rendu à cet effet par le tribunal criminel de Limoges, qui le juge et le condamne à mort comme émigré, pendant qu'il était prêtre réfractaire et déporté. Aucun des articles cités dans ce jugement ne se rapporte au cas de l'abbé Esmoingt, ils concernent seulement les émigrés. C'est ce que Cherrier, le représentant du peuple en mission dans notre département, dit dans son arrêté du 8 germinal an III (28 mars 1795), qu'on lira plus loin. Ce tribunal usait du procédé recommandé au club de Limoges dans sa séance du 21 mai 1793 par Nicaud, disant que l'opinion publique devait suffire pour juger les hommes qui ont eu soin de couvrir leurs trames criminelles d'un voile épais et d'une apparence de patriotisme.

"Tridi, vingt trois brumaire l'an 2e de la République française (13 novembre 1793).

Entre l'accusateur public du tribunal criminel du département de la Haute-Vienne demandeur et accusateur en crime d'émigration.

Paul Esmoing et Marianne Esmoing sa soeur, prisonniers détenus dans la maison de justice du département.
Vu, etc.

Le tribunal criminel faisant, aux circonstances du délit dont Paul Esmoing est prévenu, l'application de la loi du vingt huit mars dernier contre les émigrés, condamne Paul Esmoing à la peine de mort, conformément aux articles 76, 77, 78 et 79 ...

Ordonne qu'à cet effet ladite peine de mort soit exécutée le jour de demain quartidi, de la troisième décade, du second mois, de la deuxième année de la République, et ce à la diligence de l'accusateur public qui fera livrer ledit Paul Esmoing à l'exécuteur des jugements du tribunal criminel, pour subir la peine à lui infligée sur la place de la Fraternité de cette ville ...

Considérant que Marianne Esmoing est dans le cas de la loi du vingt sept février 1793, qui enjoint au propriétaire, locataire des maisons, de donner la liste nominative des personnes logées chez eux, qui porte en l'article 4, que toute personne qui aura recueilli, ou caché, moyennant salaire, ou gratuitement une autre personne assujettie aux lois de l'émigration, ou déportation, sera punie de dix ans de fers.

Conformément aux lois qui pour les femmes convertissent la peine des fers en celle de la réclusion, ladite Marianne Esmoing à être renfermée pendant six ans dans la maison de force de ce département.

Considérant qu'il n'y a aucune charge dans la procédure contre les dits Pierre Fayé et Villemougeanne, le tribunal les acquitte et ordonne qu'ils seront de suite mis en liberté.

Condamne ledit Paul Esmoingt et sa soeur aux dépends de la procédure ainsi qu'au payement de la somme de cent livres en faveur de ceux qui ont arrêté ledit Paul Esmoing. Au surplus ordonne, que les biens de Paul Esmoing seront confisqués au profit de la République.

Fait les jour, mois et an que dessus.
Signé : J.-J.-B. Gonneau, président, Cousin greffier."

Pendant son jugement, l'abbé Esmoingt, par amour pour la vérité, ne voulut jamais déclarer qu'il avait pris un passe-port pour s'expatrier, comme on lui insinuait d'en faire la déposition, dans l'intention, disait-on, de lui sauver la vie. Il alla courageusement au supplice, avec autant de calme que s'il fût allé remplir une des augustes fonctions de son ministère.

Pendant les divers changements de scène qui eurent lieu lorsqu'on instruisait le procès de ce saint prêtre, à dater du moment où il fut arrêté jusqu'à celui où il perdit la vie, il parut toujours tranquille, serein et impassible, sans laisser apercevoir la moindre altération sur sa figure, et sans dire un mot à sa décharge, comme un homme qui craignait bien plus d'être acquitté que de répandre son sang pour Jésus-Christ. Il ne s'occupait que du danger que courait le propriétaire de la maison où il avait été arrêté. Craignant qu'il n'eut été enveloppé dans sa proscription, il s'informait souvent, non sans quelque anxiété, de son sort ; mais quand il sut positivement qu'il avait été acquitté, il ne parut plus inquiet, ni pour lui ni pour sa vertueuse soeur, qu'il savait être dans les mêmes sentiments, non seulement de résignation, mais de joie et de désir du martyre que lui-même.

Il fut conduit sur la place Tourny, appelée d'abord place de la Fédération, et en 1793 place de la Fraternité, où la guillotine était dressée, et aprèsqu'il y eut été exécuté, on inscrivit dans le registre de l'état civil de la commune l'acte de décès suivant :

"Aujourd'hui vingt-quatrième brumaire l'an second de la République française (14 novembre 1793) est décédé ce matin à onze heures et demie, sur la place de la Fraternité de cette commune et section de l'Égalité, Paul Esmoingt, ci-devant curé d'Eymoutiers, âgé d'environ cinquante-sept ans, ainsi qu'il résulte de l'extrait du procès-verbal en date de ce jour, signé Cousin, greffier du tribunal criminel, lequel demeurera annexé aux présentes. - Signé : Pézaud, officier public."

 

Esmoingt décès

 

Après sa mort, on trouva sur son corps un cilice, ce qui put bien causer de l'étonnement et peut-être quelques remords à ses juges et à ses bourreaux, mais ne surprit nullement les personnes pieuses d'Eymoutiers, qui soupçonnaient depuis longtemps qu'il portait habituellement sur sa chair nue quelque instrument de pénitence. Quand au peu de biens qu'il pouvait avoir, ils furent confisqués au profit de la nation ...

On voit dans le jugement du tribunal criminel de Limoges condamnant à mort l'abbé Esmoingt la condamnation de sa soeur Marie-Anne Esmoingt à six ans de prison ; elle n'eut que la crainte de la guillotine. Elle fut aussi attachée au carcan pendant quelques heures, et au sortir de là, renfermée à la maison de force avec les gens sans aveu, les aliénés et les filles de mauvaise vie. Elle était alors âgée de 36 ans. C'est le 16 décembre 1793 qu'elle entra dans cette maison, où la soeur de l'abbé Tiquet, autre victime du même tribunal, vint bientôt la rejoindre.

[Quelques jours plus tard, le 1er frimaire an second (21 novembre 1793), quatre ecclésiastiques subirent le même sort, au même lieu : Joseph Raymond, ancien vicaire de la commune de Bonnac (?), district de Limoges, âgé de 37 ans ; Jean Raymond, ancien curé de Bussy, canton d'Eymoutiers, âgé de 60 ans ; Pierre Cramouzaud, ancien curé de Beaumond, âgé d'environ 62 ans ; Jean Tiquet, ancien vicaire de Chateauneuf, district de Saint-Léonard, âgé de 35 ans.]

Seize mois plus tard, en mars 1795, Cherrier, représentant du peuple en mission dans la Haute-Vienne, découvrit l'erreur, probablement volontaire, du tribunal criminel de Limoges, et prit un arrêté pour rendre à la liberté Marianne Esmoingt et Catherine Tiquet, mais il ne pouvait rien faire pour les prêtres injustement condamnés à mort et exécutés.

Marianne Esmoingt est morte célibataire en 1817.

François Esmoingt, frère du curé d'Eymoutiers, était entré dans l'état ecclésiastique, et avait été tonsuré dans la chapelle de l'évêché de Limoges le 8 novembre 1757 ; il fut prieur-commendataire de Sainte-Croix de Josselin, au diocèse de Vannes. La mort de son père l'ayant rendu chef de famille, nous le voyons, en cette qualité acquérir, avec sa mère, la seigneurie de Saint-Pardoux-Lavaud, par acte du 23 octobre 1776, passé au Château de la Grillière.

Un mois après que son frère eut été guillotiné à Limoges, le Comité central de Guéret ordonna son arrestation, le 13 décembre 1793. Il le désigne en ces termes : "N... Esmoingt, ex-bénéficier. Deux castes proscrites, la sacerdotale et la nobiliaire. A ces deux titres il n'a pu montrer et n'a effectivement montré que de l'éloignement pour la régénération française ; il est en outre frère d'émigré."

François Esmoingt émigra pendant la Révolution, mais il était encore dans ses foyers en l'an II. Il mourut en 1819.

Le tribunal criminel de Limoges sous la Convention - par l'abbé A. Lecler - 1918

AD23 - Registres paroissiaux de Saint-Junien-la-Bregère

AD87 - Registres d'état-civil de Limoges

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