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La Maraîchine Normande
2 janvier 2017

7 JUIN 1959 - LA GRANDE MANIFESTATION DU PIN-EN-MAUGES

7 JUIN 1959
LA GRANDE MANIFESTATION DU PIN-EN-MAUGES


La Vendée et avec elle le pays Nantais et la Bretagne se sont unis ce premier dimanche de juin à l'Anjou pour célébrer, avec solennité et sous un ciel d'azur, le second centenaire de la naissance du généralissime des "Armées Catholiques et Royales" : JACQUES CATHELINEAU.

 

Cathelineau

Sur les lieux même où vit le jour et grandit le futur commandant en chef de l'épopée vendéenne, près de l'humble maison où il vécut avec sa femme, Louise, et ses enfants, quinze mille pèlerins sont venus - au Pin-en-Mauges - évoquer le courage, la foi et le sacrifice de Cathelineau.

Grandiose rassemblement, certes, placé sous le signe de la fidélité et de la prière : ce sont là en effet les deux éléments mis en relief par Mgr Morilleau. L'évêque de La Rochelle, dans son homélie du matin, avec une insigne éloquence, en des sentiments empreints et nourris d'une riche théologie en même temps que d'une psychologie très sûre, rappela que cette journée est une journée de prières, avant tout, et qu'elle doit, à l'évocation de la foi ardente de Cathelineau, nous inciter à plus de fidélité à la religion et à Dieu.

On sait que quelques mois avant sa mort, Mgr Chappoulie avait lui-même arrêté les plans dans leurs moindres détails de cette journée à laquelle il attachait un intérêt particulier. Chaque paroissien, du reste, mit tout son coeur à la réalisation de cette fête. Nous pensons aux confectionneuses de ces 5 kilomètres de guirlandes qui ornaient les rues de la localité, comme à ces acteurs qui, depuis six mois, se plièrent à une rude discipline pour parvenir à la mise sur pied parfaite d'un drame historique, spécialement préparé par l'abbé Tricoire. Nous pensons à tous ceux qui, plus ou moins obscurément, eurent à s'acquitter d'une tâche matérielle, et qui permirent à cette manifestation d'atteindre à la perfection.

A partir de 9 heures, le carrefour central du Pin-en-Mauges ne cessa de voir l'affluence grandir. Une foule déjà nombreuse assistait à la réception des personnalités religieuses et civiles qu'accueillaient M. le chanoine Riobé, vicaire capitulaire, M. l'abbé René Lépine, curé, M. Raimbault, maire, entouré des conseils municipal et paroissial, et du "Comité Cathelineau" créé pour la circonstance.

A quelques minutes d'intervalle, arrivaient successivement LL. EE. NN. SS. Derouineau, archevêque de Kunming ; Villepelet, évêque de Nantes ; Cazaux, évêque de Luçon, accompagné de M. le chanoine Loizeau ; Vion, évêque de Poitiers, accompagné de M. le chanoine Peignault ; Morilleau, évêque de La Rochelle. Autour de Leurs Excellences se pressaient : NN. SS. Oger, Bonneau, Brec ; le Révérendissime Père Abbé de Bellefontaine, Dom Coutant ; Mgr Olivier Riobé, recteur de l'Université Catholique, etc ...

Parmi les personnalités civiles présentes : Son altesse royale le prince Xavier de Bourbon-Parme ; M. de Villoutreys, sénateur ; MM. Le Bault de La Morinière, Turc, députés de Maine-et-Loire ; Guitton, député de la Vendée ; Salliard du Rivault, député des Deux-Sèvres ; de Jourdan, président du Conseil général, etc ...

Dans la foule, au premier rang, un groupe attire les regards : ce sont les descendants directs de Jacques Cathelineau, autour de M. le comte Marc de Cathelineau, chef de la branche aînée, et de Mme la comtesse.

"Nous sommes ici au nombre de cent quarante, ce matin, nous dit M. le comte Marc, les yeux brillants de joie. Jamais, nous n'avions pu réunir autant d'enfants de la lignée des Cathelineau ... Et encore, nous espérions voir quelques-uns de nos parents du Canada. Malheureusement, mon frère, qui devait les conduire au Pin, est décédé voilà deux mois ..."

D'autre part, nous avons noté la présence de plusieurs représentants des familles des autres généraux de l'armée vendéenne.

M. Raimbault, maire, s'avance au micro pour dire la joie qu'il éprouve à rendre, au nom des petits-fils de Jacques Cathelineau, un hommage solennel à celui que tous ont surnommé le "Saint de l'Anjou". Il salue la mémoire de Son Exc. Mgr Chappoulie qui se faisait une joie de présider lui-même ces belles cérémonies après en avoir minutieusement tracé le programme. Il rappelle brièvement les glorieux souvenirs de cette guerre qui, pendant six ans, compta 700 combats particuliers ; "faire l'histoire de la Vendée, c'est redire le touchant héroïsme de tout un peuple". Il évoque le riche passé historique de la petite bourgade du Pin et la vie qu'y passa Cathelineau dont il trace un portrait vivant. Il précise enfin dans quelles conditions naquit le soulèvement, et que ce même calice qui tout à l'heure sera élevé sur l'autel fut celui que tenait l'abbé Cantiteau, célébrant la messe dans les granges, sous la Terreur ...

Après l'allocution de M. le Vicaire capitulaire, une longue procession se met en marche en direction du terrain où se dresse le podium gigantesque qui abritera la célébration de la messe pontificale. En tête, la croix du "grand choc" de Chemillé, celle que porta Cathelineau au cours de cérémonies nombreuses d'action de grâces qu'il rendit après chaque victoire. Suivent de nombreuses délégations : enfants des écoles, groupes folkloriques du Pin, de Cholet, de Saint-Florent, des Herbiers, représentations du Mans, de Lyon, de Paris, puis les membres des familles Cathelineau, les personnalités, les parlementaires, les choristes, la maîtrise de la Cathédrale d'Angers.

La messe pontificale est célébrée par Son Exc. Mgr Villepelet et le discours prononcé après l'Évangile par Son Exc. Mgr Morilleau.

A l'issue de la messe, le cortège officiel se dirige vers le bas du bourg et s'arrête devant une maison d'aspect modeste : celle qui vit naître et grandir Jacques Cathelineau et sa famille.

Au nom du "Souvenir Vendéen", M. le Dr Coubard félicite les organisateurs du rassemblement et découvre une plaque qui portera désormais gravé le nom du généralissime et rappellera aux passants l'épopée de la Vendée.

Par quelques mots empreints d'une délicate et courtoise attention, qui vont droit au coeur des assistants, M. le Vicaire capitulaire invite alors Mgr Cazaux, "l'évêque de la Vendée", à bénir la plaque commémorative.

Suit une réception officielle à la mairie du Pin où M. Raimbault accueille ses hôtes et leur fait servir un vin d'honneur, avant de les entraîner vers le musée Cathelineau, constitué par M. le curé du Pin et ses prédécesseurs.

Au banquet, qui réunissait plus de 400 convives, deux toasts furent portés.

La parole est donnée d'abord à M. le comte Marc Cathelineau qui dit à tous la vive reconnaissance des membres de la famille Cathelineau, profondément touchés de la glorification rendue en ce jour à leur illustre aïeul.

M. le Vicaire capitulaire se lève ensuite. Sa joie est visible et les mots pour la traduire jaillissent spontanément de son coeur.

"Si la mort tragique de Mgr Chappoulie et la vacance du siège, dit-il, me font un devoir de prendre la parole, c'est au nom de tout le clergé du diocèse réuni ici que je le fais, au nom du chapitre de la cathédrale d'Angers à qui je dois d'être à cette place aujourd'hui".

Dans la gerbe de compliments qu'il compose, M. le Vicaire capitulaire voudrait n'oublier personne.

Il adresse ses remerciements à tous les artisans de la splendide manifestation de ce 7 juin.

Il salue les hautes personnalités civiles présentes, au premier chef S.A.R. Mgr le Prince Xavier de Bourbon-Parme qui a voulu apporter aujourd'hui l'hommage des princes d'Anjou, ses ancêtres, au "Saint de l'Anjou".

"Personne, poursuit l'orateur, ne doutera du plaisir que j'ai à saluer officiellement le Recteur de notre Université Catholique avec tout le respect que je dois au recteur et toute l'affection que je porte à un frère qui est prêtre.

Merci au Révérendissime Père Abbé de Bellefontaine qui a quitté le silence de la Trappe pour être avec nous. Les Mauges sans Bellefontaine ne seraient plus les Mauges. Et Cathelineau n'aurait peut-être pas été ce que nous admirons en lui, s'il n'y avait eu Notre-Dame de Bon-Secours."

A Mgr Derouineau, M. le Vicaire capitulaire apporte, avec sa reconnaissance personnelle, celle de toutes les paroisses de l'Anjou, pour le dévouement empressé dont Son Excellence a continué de faire bénéficier le diocèse durant la vacance du siège. En ce jour qui rappelle si douloureusement à Monseigneur l'Archevêque de Kunming le sanglant calvaire de ses diocésains, la prière des pèlerins du Pin-en-Mauges supplie le ciel de rendre à tous les persécutés du monde la liberté religieuse.

A nos Seigneurs les quatre évêques de la Vendée militaire, il exprime enfin sa profonde gratitude : "Vous ne pouviez pas ne pas être là aujourd'hui, Excellences. Cathelineau a été le généralissime de toute la Vendée militaire, c'est-à-dire des actuels départements de Nantes, des Deux-Sèvres, de la Vendée, de La Rochelle, dont faisaient partie avant 1802 beaucoup de nos actuelles paroisses : vingt-deux de nos paroisses, de Champtoceaux à la Renaudière, étaient du diocèse de Nantes ; vingt-trois, de Concourson à Fontevrault, du diocèse de Poitiers ; quarante-huit, dont tout le Choletais, du diocèse de La Rochelle. Tous les diocèses ici représentés doivent en partie à Cathelineau, le combattant de Dieu, leur liberté religieuse. Il s'est battu pour la foi en Vendée à Fontenay-le-Comte, dans les Deux-Sèvres à Thouars et à Châtillon. Et il a versé son sang, en plein coeur de Nantes, sur la place Viarmes, ou trois années plus tard était fusillé Charette.

Merci, Excellences, d'avoir maintenu votre présence à cette fête et tenu l'engagement que vous aviez pris l'an passé avec Mgr Chappoulie. C'est un exemple de fidélité qui consacre le magnifique enseignement que vient de nous donner à la messe Monseigneur de La Rochelle.

"Notre manifestation dans la foi, dit en terminant M. le Vicaire capitulaire, montre en quoi consiste l'héroïsme chrétien : être fidèle jusqu'à la mort dans les plus petites choses. Quand on accepte de porter sa croix, on comprend mieux un prêtre, on comprend mieux une paroisse, on comprend mieux la Vendée, on comprend mieux l'Évangile et l'Église".

Le programme de l'après-midi débute avec la maîtrise de la cathédrale d'Angers, dont l'un des ténors, une voix au timbre des plus agréables, d'une belle ampleur et d'une rigoureuse discipline, interpréta le célèbre Petit Mouchoir de Cholet, sur un accompagnement à bouche fermée des petits maîtrisiens.

Puis, Son Exc. Mgr Villepelet parle à l'immense auditoire qui s'étale sous ses yeux.

Et la représentation commence du drame historique écrit pour la circonstance et intitulé : Jacques Cathelineau le généralissime.

Cet "essai dramatique" met le spectateur au contact, en relation plutôt, avec un personnage qui a vécu, qui fut doué des qualités humaines les plus nobles et plus efficaces, une grande figure, une haute conscience, témoin de la grâce et des transformations qu'elle peut réaliser dans un coeur pour le rendre sensible immédiatement et comme instinctivement aux besoins aux besoins aux conséquences possibles, voire inéluctables, que les évènements découvrent, pour le rendre clairvoyant.

L'oeuvre de M. l'abbé Tricoire est d'abord une page d'histoire : le premier tableau permet au spectateur de lier connaissance avec Jacques Cathelineau le voiturier, de mesurer son influence sur les habitants de la région et de recevoir le rayonnement de son haut idéal. Et sa destinée, sa courte destinée de quelques semaines, mais, en vérité, semaines décisives en vue d'un avenir dont l'aube ne poindra cependant pas avant les premières années du siècle suivant, sa destinée se déroule ensuite à nos yeux, grâce à quelques scènes choisies. Un texte lie les tableaux les uns aux autres, donnant à l'oeuvre comme une allure d'oratorio parlé.

Mais, en vérité, ce qui frappe le plus fort et le plus durablement l'auditeur, qui peut avoir, qui a des souvenirs de son histoire dans notre région, c'est la peinture, c'est le portrait du personnage. On fera d'abord mérite à M. l'abbé Tricoire d'avoir su mettre en relief, par un mot, une attitude, une décision prise, les qualités extraordinaires de ce jeune homme : sa clairvoyance, répétons-le, la sagesse de sa parole, et plus encore, sa fierté, sa pureté insondable, l'exigence de sa droiture, mais dépouillée de toute rigueur et laissant place à l'humour, signe de cet optimisme chrétien qui se nomme confiance en Dieu, espérance. On trouverait dans le texte des phrases pour illustrer cette appréciation, des phrases magnifiques de solidité, de concision, de portée morale ou simplement psychologique.

Drame humain, avec ses instants de tension poignante et ses moments de détente, qui a trouvé au Pin-en-Mauges "ses" acteurs, comme on peut dire que telle ou telle "Passion" a aussi les siens. Des hommes et des femmes du pays natal de Cathelineau, fiers de l'homme dont la statue est campée sur la place et qui porte sur son socle le prestigieux nom de "généralissime". Des acteurs qui ont su rendre ce que la mission des personnages qu'ils incarnaient pouvait avoir de surhumain et aussi les sentiments qu'inspirent les humbles soucis quotidiens, ou bien les grandes, les profondes inquiétudes.

Une mise en scène sobre, mais suggestive, un bruitage bien au point, des costumes parfaitement corrects, rien ne manquait à la qualité du spectacle, dont M. Maurice Morier de Cholet avait préparé avec une patience inlassable l'exécution. Ce qui fut particulièrement sensible aux interprètes du drame et les récompensa justement de leurs multiples efforts : la foule suivait leur jeu avec une attention émue, participant de tout coeur au déroulement de l'action.


AD59 - Semaine Catholique du Diocèse de Luçon - 1959 - 4 Num 115/84

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