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La Maraîchine Normande
21 juillet 2016

SAINT-HERBLON (44) - LE CLERGÉ SOUS LA RÉVOLUTION - M. HERBAULT, RECTEUR - MM. BODINIER - PLOUZIN, VICAIRES

La Révolution ! Ce seul mot jette toujours une note de tristesse en notre âme, et cela, parce qu'il nous rappelle une des époques les plus lamentables de notre histoire. Mais à côté de la tristesse, la joie doit avoir aussi sa place, si nous tenons compte des héroïques dévouements dont furent témoins les dernières années du XVIIIe siècle. Ce sont quelques-uns de ces dévouements qu'il faut vous faire connaître ou rappeler à votre souvenir. Il les trouve dans les membres du clergé qui avant et pendant la Révolution exercèrent le ministère dans cette paroisse.

A l'approche de la Révolution, la Providence ménagea à Saint-Herblon des prêtres qui furent vraiment de dignes imitateurs des confesseurs de la Foi et des Martyrs des premiers siècles de l'Église.

SAINT-HERBLON vue

M. ANTOINE-JULIEN HERBAULT

M. Herbault naquit dans la paroisse de Saint-Nicolas de Saumur, vers 1740 [?], la date de sa naissance n'est pas très exactement connue. Le 25 janvier 1770, il fut nommé curé de Saint-Herblon, sur la présentation de l'abbé de Saint-Florent-le-Vieil, qui avait droit de présentation pour cette cure. Il était précédemment vicaire à la Varenne, paroisse qui, à cette époque, faisait partie du diocèse de Nantes.

Herbault signature

Invité à prêter le serment d'obéissance à la Constitution civile du Clergé, il refusa et fut de ce fait, déporté en Espagne. Il fut embarqué pour Cadix à bord du navire le Diligent, le 24 septembre 1792.

Après la pacification, en 1803, il revint dans cette paroisse, dont il prit de nouveau la direction, et y resta jusqu'en 1808, époque où il démissionna pour se retirer à Saumur, sa ville natale.

M. Herbault eut beaucoup à souffrir pour la foi au cours de la révolution. C'est lui qui fit reconstruire le presbytère incendié pendant la Terreur. Cette reconstruction lui suscita des difficultés qui furent une des causes de sa démission.

Avant la révolution les deux vicaires de Saint-Herblon étaient MM. Bodinier et Plouzin.

M. CHARLES-MATHURIN BODINIER

M. Bodinier naquit à Anetz, le 2 août 1761, de parents recommandables par leurs vertus et universellement estimés. Son père, tonnelier de son état, jouissait d'une certaine aisance ; sa mère, N... Terrier était originaire de Saint-Mars-la-Jaille.

BODINIER acte naissance

Dès son enfance, on lisait sur les traits du jeune Charles, la charité, la douceur qui devait le caractériser pendant toute sa vie, sans préjudice à son courage et à sa fermeté.

Le bon père Bodinier, remarquant la piété de son fils et ses heureuses dispositions pour l'étude le plaça au collège d'Ancenis d'où il sortit avec le diplôme de maître-es-arts en 1781. Ses maîtres, au collège d'Ancenis, n'eurent, à la fin de ses études, que des louanges à lui décerner.

Entré au séminaire, il y continua en la perfectionnant, la vie qu'il avait mené au collège. "C'était un très bon séminariste, dit un de ses condisciples ; il était d'une société douce et aimable".

A sa sortie du séminaire, en 1787, M. Bodinier fut nommé vicaire à Saint-Herblon. Il y remplissait avec zèle les devoirs de son ministère quand survinrent les mauvais jours de la révolution.

A l'exemple de son curé, il refusa de prêter serment et de se rendre à Nantes, à la préfecture, où étaient convoqués, par un arrêté, tous les prêtres fidèles du diocèse.

Bodinier signature

Demeuré à Saint-Herblon, il dut se cacher et changer fréquemment de retraite. Il coucha même plusieurs fois au milieu des champs sous un abri qu'on lui préparait.

Il était sans crainte pour lui-même et allait de jour et de nuit partout où il était appelé non seulement dans la paroisse de Saint-Herblon, mais aussi dans celles des environs.

Il célébrait la Sainte-Messe quelquefois dans des maisons isolées, le plus souvent dans la Chapelle de Saint-Michel-du-Bois.

Plusieurs fois il échappa comme par miracle à la troupe qui le poursuivait. Il fut un jour demandé par un fougueux révolutionnaire de Varades, qui se trouvait dangereusement malade. Il veut aussitôt partir. - Mais, lui dit-on, cet homme est-il sincère ? Varades est plein de troupes. - Et qui rendra compte de l'âme de cet homme, répond l'admirable prêtre, et il court à Varades, passant au milieu des soldats sans en être reconnu.

Averti, pendant la nuit, qu'un malade réclamait le secours de son ministère, au village de la Gendronnière, aujourd'hui paroisse de Roche-Blanche, il s'y rendit immédiatement. Des traitres avaient averti la troupe. La maison est cernée, on frappe à la porte. Le maître de la maison va ouvrir, parle au commandant, et le prie d'attendre quelques instants, car un malade près de mourir, est occupé de ses dernières dispositions et il n'y a pas de temps à perdre ... Le malade, en effet fait ses dernières dispositions, reçoit les derniers sacrements.

Après avoir accompli son ministère, le prêtre se présente à la porte, un rouleau à la main ; on le prend pour un notaire et il se retire tranquillement après avoir salué le commandant.

Un soir, il vint demander l'hospitalité à une pieuse famille, au village de la Haye, il y avait douze nuits qu'il ne s'était pas couché. - Nous craignons lui répondit-on, l'arrivée des troupes. En ce cas, répond M. Bodinier, je coucherai dans la chambre qui donne sur le jardin, si les soldats viennent, je pourrai plus facilement me sauver dans la campagne.

La troupe vint, en effet, mais le généreux confesseur, fatigué, n'entendit rien.

Éveillé cependant par le bruit, il se lève, ouvre la fenêtre et veut se sauver à travers le jardin, mais il tombe au milieu d'un groupe de soldats républicains. - Qui es-tu ? Bodinier, prêtre, répond-t-il courageusement.

Les misérables aux mains desquels il était tombé voulaient le mettre à mort sur le champ, mais un homme, auquel il avait autrefois rendu service, fit observer que ce serait commettre un assassinat.

Le confesseur fut alors conduit au commandant qui l'envoya à Ancenis, où il fut insulté et bafoué par la populace.

Condamné à mort, il réfuta si bien l'acte d'accusation portée contre lui que la sentence capitale fut changée en celle de la déportation à la Guyanne.

Après cette condamnation, M. Bodinier fut conduit à Nantes, et renfermé dans la prison du Bouffay où plusieurs personnes de Saint-Herblon et des environs vinrent le visiter et lui offrir aide et consolation. De Nantes, il fut conduit à Lorient et incarcéré dans la citadelle de Port-Louis. Là, continuant d'être ce qu'il avait été et ce qu'il sera jusqu'à sa mort, il gagna par son amabilité l'amitié du gouverneur qui lui permit de sortir en ville où il put exercer son ministère.

De Lorient, M. Bodinier fut transféré à l'île de Ré où il arriva le 30 octobre 1797. Il resta dans cette île jusqu'au 1er août 1798, gagnant tous les coeurs de ses compagnons d'infortune, prêtres et laïques, par son affabilité et sa charité.

Le 2 août, il fut embarqué, avec vingt-quatre autres ecclésiastiques, sur la corvette la Vaillante, et dirigé sur Cayenne. Il est impossible d'exprimer ce qu'eurent à souffrir ces vingt-cinq confesseurs de la foi pendant les huit jours qu'ils passèrent sur le navire. Entassés les uns sur les autres, ils ne pouvaient presque faire aucun mouvement, et ils seraient certainement morts avant d'arriver à destination si la Providence divine ne les eut miraculeusement délivrés. Ils voguaient déjà au delà des côtes d'Angleterre lorsqu'ils aperçurent une frégate anglaise qui se rapprochait d'eux rapidement.

Arrivée à une portée de canon, elle engagea le combat avec la corvette française qui au bout de quelques instants fut mise en état d'infériorité et obligée de se rendre. Le capitaine anglais délivra les prisonniers en témoignant l'horreur qu'il éprouvait de voir des ministres des autels aussi indignement traités.

 

SIR EDWARD PELLEW

 

Par les soins de ce digne capitaine anglais, SIR EDOUARD PELLEW, les généreux confesseurs de la foi furent amenés en Angleterre et débarqués à Plymouth. M. Bodinier fut conduit à Londres.

Peu de temps après il rentra en France et revint à Saint-Herblon où il exerça de nouveau le saint ministère.

En 1803, Mgr Duvoisin, évêque de Nantes, qui connaissait les éminentes qualités de M. Bodinier le nomma vicaire à la Cathédrale, puis en 1811, supérieur de son grand séminaire, en même temps qu'il lui conférait la dignité de chanoine et de vicaire général.

Deux ans plus tard, le 9 juillet 1813, Mgr Duvoisin mourait et M. le Chanoine Bodinier était désigné pour prendre la direction du diocèse, direction qu'il garda jusqu'en octobre 1819.

A cette époque, Mgr d'Andigné vint prendre possession du siège épiscopal de Nantes, et M. Bodinier lui remit le soin de gouverner le diocèse. Mais le nouvel évêque ne voulait pas se priver d'un collaborateur si précieux ; il nomma premier vicaire général l'ancien vicaire de Saint-Herblon, charge que celui-ci conserva jusqu'en 1832.

A cette époque, M. Bodinier donna sa démission et se retira chez les Missionnaires diocésains, rue du Bocage. C'est là qu'il termina, le 21 août 1838, une vie toute entière consacrée à procurer la gloire de Dieu et le salut des âmes.

M. RENÉ PLOUZIN

Le second vicaire de Saint-Herblon, M. René Plouzin [fils de Jean Plouzin et d'Isabelle de Launay, des Chauvinières] naquit à Belligné d'une famille honorable et très chrétienne.

Après son ordination il fut nommé vicaire à Riaillé, puis peu de temps après à Petit-Mars.

C'est vers la fin de 1787 qu'il fut envoyé comme vicaire à Saint-Herblon.

Plouzin signature

A l'exemple de son curé et de son confrère, il refusa le serment et resta avec M. Bodinier, dans la paroisse.

Aux plus mauvais jours de la révolution, il exerça le saint ministère avec le zèle et l'intrépidité d'un apôtre ... A peine voulait-il se cacher.

Lorsque de pieux fidèles lui recommandaient de ne pas tant s'exposer, il leur répondait : "Je ne crains rien, je me sauverai toujours facilement, pour peu que j'ai quelqu'avance sur ceux qui me poursuivront!" Cent fois il eut le bonheur d'échapper à ses ennemis.

[Aux archives diocésaines de Nantes, est conservé un « Registre des Baptêmes, Mariages et Sépultures faits par nous, Plouzin, prêtre, vicaire de la paroisse de St Herblon, actuellement aux Mines de Montrelais, pour la commodité du public, à cause de la disette de prêtres catholiques dont le grand nombre a été exilé ou massacré dans la persécution qui existe de la religion catholique, apostolique et romaine »]

Son mépris du danger ne fit que s'accroître au point qu'il dégénéra en témérité.

Un jour de l'année 1794, il fut surpris à exercer le saint-ministère aux mines de Montrelais. Il voulut fuir et déjà il était arrivé à un village appelé la Silardière, lorsque ses ennemis, désespérant de l'atteindre, firent feu sur lui et le blessèrent.

les silardières

Arrêté dans sa course par sa blessure, M. Plouzin tomba entre les mains des bandits qui le poursuivaient.

Ils s'acharnèrent sur lui, en furieux, et lui fendirent la tête d'un coup de sabre. Ainsi mourut, à trente-huit ans, ce glorieux martyr de l'amour de Dieu et de la Charité des âmes.

Quelques jours auparavant, il avait fait sa retraite annuelle, sous la direction de M. Souffrand. Belle et digne préparation à la couronne du martyre !

On l'enterra d'abord dans un champ ; puis l'année suivante, le 11 août 1795, M. Souffrand fit solennellement transporter son corps à Maumusson et enterrer dans l'église en présence d'un grand nombre de fidèles et de MM. Lambert, vicaire à Anetz. Bodinier, vicaire de cette paroisse et Bourgeonnière, curé de Linière, au diocèse d'Angers, qui présida la cérémonie.

Plouzin rené acte d'inhumation

M. Pergeline, curé de cette paroisse de 1830 à 1856, raconte dans les notes qu'il a laissées sur Saint-Herblon, que M. Plouzin fut tué à Montrelais par un homme auquel il avait sauvé la vie, alors que cet homme, dans un duel, avait eu la mâchoire fracassée par son adversaire.

C'est ainsi que périrent souvent, trahies par ceux qui auraient dû les sauver, les victimes de la révolution.

AD44 - Almanach paroissial - 1er janvier 1912

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