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La Maraîchine Normande
1 mars 2016

LA BARTHE-DE-NESTE (65) - INGRANDES-SUR-LOIRE (49) - FRANÇOIS LAY, "PREMIER CHANTEUR AU MONDE" (1758-1831

FRANÇOIS LAY (de La Barthe-de-Neste) 1758-1831
"Premier chanteur du monde"

François Lay 3


Il est rare que d'un homme on puisse dire qu'il fut dans sa spécialité le meilleur artisan du monde. C'est cependant ce qu'un critique musical, M. d'Aubers, a écrit de François Lay, fils légitime à Jacques Lay et à Jeannette Birabent, né le 14 février 1758, à Labarthe-de-Neste. "La carrière de Lay fut aussi longue que brillante. Grand ténor de l'Opéra, professeur au Conservatoire, il a régné plus de quarante ans sans que pas un des nombreux comparses que l'Europe musicale enfanta pour la France pendant ce demi-siècle ait jamais osé lui disputer la couronne. Ce n'est donc pas une exagération que le titre de premier chanteur du monde que ses contemporains et, après eux, l'histoire, se sont plu à lui décerner."

Je sais bien que la Bigorre revendique l'honneur de compter notre artiste comme l'un de ses fils. La Revue régionaliste des Pyrénées, organe des contrées de l'Adour, publia sur lui ... un fort intéressant article le présentant comme pur bigourdan. Or, si, huit siècles avant, les barons de Labarthe étaient vassaux des comtes de Bigorre, cette vassalité n'avait plus, en 1758, que la valeur d'un souvenir historique, et il est encore trop tôt pour invoquer le sort commun qui unira les deux régions dans le département des Hautes-Pyrénées. En 1758, Labarthe-de-Neste est terre des Quatre-Vallées, et comme telle incluse dans le rayon d'action de la Revue de Comminges. A ce titre, François Lay est nôtre ...

Enfant des Quatre-Vallées, il le reste quand les chapelains de Garaison qui, durant une mission prêchée en l'église de Labarthe, l'avaient entendu chanter d'une voix merveilleuse 'Angelus du soir, l'acceptèrent dans leur communauté, espérant faire de lui un religieux et le perfectionner en son art, et qu'ayant été envoyé au séminaire d'Auch, où il suivit rhétorique et philosophie, il entonna, le jour de Pâques, dans la cathédrale de la ville, l'O Salutaris Hostia avec une voix si prenante qu'il fit l'admiration de tous. Et l'Intendant de le faire venir dans ses salons au grand enchantement des invités.

La soutane ne tentait pas Lay. Sous prétexte d'aller prendre un doctorat en droit, le chanteur gagne Toulouse et tout de suite se fait admettre au lutrin de la cathédrale, après un brillant concours : "Jamais, dit le procès-verbal, le chapitre n'avait entendu une voix si étendue et si belle."

Mais voilà qu'un matin de 1779, la police le cueille dans la rue et sans autre formalité, peut-être aussi sans résistance du patient, le dirige sur Paris.

Présenté au directeur de l'Opéra avec un compatriote, du nom de Lagleyze, basse chantante, il est soumis, comme tout postulant, à une audition de contrôle sur la scène même du grand théâtre. Lagleyze, victime du trac, ne put émettre une seule note. Aussi ému, Lay entonnait sa partition d'une voix étouffée : "Aouris et ganitet, animaou ! è enténé ad aquestos bestios quin ets azés de nousté païs saben brama". C'en fut assez pour rendre courage à notre François et à sa voix toute son ampleur.

François Lay


Sa fortune était faite. Admis comme doublure, il accède dès août 1781 aux premiers rôles et signe son engagement. Dès lors, et jusqu'en 1822, il est le grand ténor de l'Opéra de Paris, détaillant doucereusement des mélodies et des pastorales devant Louis XVI et Marie-Antoinette, chantant La Marseillaise ou hurlant la Carmagnole, suivant ses auditoires, entonnant devant l'Empereur les chants de gloire de la Grande Armée, pour finir par là où il avait commencé.

Mais Lay a changé de nom. Les gens du Nord, ne leur en déplaise, ont allure quelque peu fade comparativement à ceux du Midi, et il en est de leur accent comme de leur cuisine toute en sauces blanches ; les syllabes des mots se fondent sur leurs lèvres en un mélange fluide, douceâtre et sans relief. Imaginez le metteur en scène annonçant à la parisienne le ténor Lay ; M. Lai. Quelle catastrophe ! Et ce serait injuste, car notre Pyrénéen n'a rien de semblable au traditionnel physique du ténor petit et ventru. Il a fort belle prestance : témoin le portrait de l'artiste qui, du Musée de Bagnères, a émigré dans le vestibule du théâtre du Casino. Avec un tréma sur l'y, l'amélioration était déjà sensible : comme une gousse d'ail dans la blanquette nordique. L'addition d'un s final, prolongeant l'émission, donnait au nom du panache. C'est un accessoire qu'aime bien tout Gascon authentique.

Et dans sa vie publique, Laÿs se comporte encore en Gascon. Ensoutané tant que la robe lui a permis de poursuivre ses études, vivant des faveurs de la Cour et des Intendants du Roi, il saute la barricade dès les premiers jours de la Révolution et manifeste tapageusement sa foi républicaine. Il se fait le héros à la voix puissante qui, à chaque grande manifestation populaire, fait vibrer les coeurs des sans-culotte. Il est l'artiste que le pigeonnier réclame à l'Opéra, en trépignant.

Ici se place un amusant incident. Un soir, debout à l'avant-scène, Laÿs se préparait à chanter une mélodie hollandaise portée sur le programme. Mais, devant lui, il voit au parterre le groupe des députés représentant le département des Hautes-Pyrénées, dont Barrère et d'Abbadie, élu par les Quatre-Vallées. Et celui-ci lui crie : "Aném, gouyat, un péchic de patouès coumo s'erom  en a lana de Capbern". Laÿs sourit et, de sa plus chaude voix  distilla avec une émotion telle une chanson d'Aure que la salle enthousiasmée ne cessait de rappeler l'artiste.

Mais quand vinrent les sombres jours de la Terreur, malgré ses manifestations de pur civisme, Laÿs fut traduit, en raison de son passé, devant le tribunal révolutionnaire de Paris. Barrère veillait sur lui et le fit acquitter. En 1795, la réaction inverse le menaça à nouveau ; une fois de plus il échappa à la prison.

Dès lors, tout entier à son art, professeur au Conservatoire, tout en continuant à tenir les premiers rôles à l'Opéra, il fut le grand ténor incontesté de France. En 1822, sonna pour lui l'heure de la retraite et du silence. Retiré à Ingrandes, sur les bords de la Loire, il s'y éteignit, rue du grenier à sel, le 30 26 mars 1831.

LAYS FRANCOIS - Acte décès


Paul Carrère
Société des études du Comminges - 1958 (A1958, T71)

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