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La Maraîchine Normande
25 février 2016

RIEUMES (31) - 1778 - DES LOUPS DANS LA FORÊT ROYALE !

1778  - DES LOUPS DANS LA FORÊT ROYALE !

par A. de Gaulejac avec le concours de Gilbert Castaing et Bernard Boussès


Nous sommes en l'an 1778. Tout paraît tranquille dans la ville de Rieumes, qui se dore aux derniers rayons du soleil de novembre. Cependant dans les maisons plane une lourde inquiétude.


Le six du mois, le Conseil général de la Communauté est réuni dans l'Hôtel de Ville, par-devant Maître Arnaud Décamps, maire. Sont présents les consuls Jacques Narbonne et Jean Cistac, assistés de Maître Campardon, leur assesseur, Maître Jean Garos, procureur du Roi.

L'assemblée est nombreuse : notables, artisans, laboureurs et même brassiers. Il s'agit d'une affaire importante.

Loups

Mais écoutons le discours de M. Décamps, maire.


"Messieurs, vous n'ignorez pas, sans doute qu'à la suite des fléaux de l'épisootie, perte de nos récoltes par la grêle et autres intempéries des saisons, il nous en reste encore un à combatte, qui n'est pas moins sensible et dangereux et c'est la multitude des loups acharnés ou enragés qui se sont répandus dans la forêt de cette ville, et autres circonvoisines que je me suis proposé de vous parler aujourd'hui, pour obvier aux malheurs, qui viennent d'arriver nonobstant la vigilance que messire de Papus aîné a apporté pour la chasse et qu'il a été assez heureux d'en tuer six depuis le premier novembre en sacrifiant à cette chasse ses chiens qui y donnaient vigoureusement et qui par ces animaux ont été tués.

Il a eu le malheur tout comme nous de voir le carnage que ces animaux viennent de faire non seulement sur les bestiaux mais encore sur le peuple, puisque nous n'ignorons pas, Messieurs, tout comme vous, que le trente octobre dernier un enfant d'environ dix ans du nommé (en blanc) habitant de Forgues a été dévoré dans la forêt ; que le sieur Ugène Castaing, habitant de la Hage, quoique vigoureux et armé d'une fourche et d'une cognée, ayant été attaqué par un de ces animaux n'a pu s'en garantir qu'en se voyant une main dévorée par les morsures de cet animal, qui lui enleva des mains la cognée de laquelle il était armée et mis en poudre le manche par les fréquentes morsures qu'il y donna ; que le nommé Guillaume Gilibert, forgeron, habitant la Hage ayant le trois courant rencontré une louve (qui) se rua sur lui et après s'être débattu avec elle pendant un temps considérable, a eu à la fois les bras et les mains dévorés et une morsure considérable au ventre, et aurait été totalement dévoré si certaines personnes n'y eussent accouru d'après les cris qu'il faisait ; que pareillement le même jour Jacques Nabonne, laboureur de cette ville quoique armé d'un pistolet ne put se défendre de cet animal qu'en se voyant dévoré une main et que pareillement Bernarde et Benjamine (?) Lahille, soeurs, pauvres, de cette paroisse eurent le même jour leurs bras et mains dévorés et les os desdits mordus par ce même animal qui aurait sans contredit continuer le carnage si ledit sieur de Papus n'eut promptement accouru à leur secour, en s'exposant lui-même à un pareil malheur, qu'il arrêta en tuant l'animal de deux coups de fusil, qu'on croit d'ailleurs être enragé, avec d'autant plus de raison que le sieur de Papus ayant été prié par madame la marquise de Lastronques de lui procurer la matrice d'une louve pour certains remèdes la fit éventrer, et chargea le sieur Campistrous chirurgien de cette ville de tirer la matrice susdite du corps de cet animal, auquel il trouva les intestins totalement vides d'aliments et d'excréments, et par les hurlements effroyables que ces animaux font dans les forêts, s'entrebattant et déchirant entre eux, ce qui paraît par les poils arrachés et les pièces de chair qu'ils se sont enlevées entre eux. D'où les gens connaisseurs concluent que ces animaux ou une bonne partie d'entre eux sont enragés.

Et parce qu'il ne saurait être assez promptement donné remède à un si grand mal et attendu que cette ville est d'ailleurs un lieu de commerce et que le peuple des environs aboutissant dans cette fâcheuse circonstance, Messieurs, il nous semble que le plus court expédient serait de prier Messire de Papus de vouloir continuer de faire la chasse desdits loups, et attendu que ses chiens qui y donnaient lui ont été tués et dévorés ... de le prier lui-même, et même au nom de la Communauté, s'il le trouve bon, les seigneurs des environs de lui prêter les chiens qu'ils ont ou qu'ils peuvent avoir, propres à cette chasse, et d'autre côté, attendue la bonté paternelle du plus cher des Rois, vu les circonstances, de présenter une requête à Mgr l'Intendant pour supplier sa Majesté, au nom de la Communauté d'envoyer au dit sieur de Papus des chiens de sa vènerie, afin qu'il puisse parvenir à détruire un ennemi si fatal (et prévenir) la destruction de ses fidèles et dévoués sujets.

Et encore le sieur maire a dit qu'il serait utile de présenter une requête au Sgr Intendant, Maréchal duc de Mouchy, commandant de la Province pour lui exposer qu'en conséquence de ses précédents arrêts, les habitants de cette ville, et notamment ceux de la campagne ont remis leurs armes à feu, en déférant à ses semonces, et le supplier d'avoir pour agréable d'en tenir chez eux et de les porter tant pour la garde de leurs personnes que pour la conservation de leurs bestiaux, autres néanmoins que ceux qui pourraient être supputés d'en faire mauvais usage sauf audit Sgr Maréchal duc de Mouchy d'infliger à ceux qui pourraient en abuser telles amendes qu'il jugera ..."

La délibération approuve à l'unanimité des présents le discours de M. le Maire.

Le 6 janvier 1779, autre assemblée, tenue avec la même solennité.

Voici l'essentiel du délibéré :

"MM. les officiers municipaux feront retirer chez M. Alayrac, subdélégué à Muret vingt fusils, offerts par Mgr l'Intendant, de plus l'assemblée demande qu'il plaise à Mr le subdélégué d'ordonner aux consuls et habitants de Beaufort, Lespèrès, La Hage, Forgues, Mongras, Savères, Labastide-Feuillants, Gratens en Languedoc, Bérat aussi en Languedoc, Poucharramet, de Saint Jean du dit Poucharramet, de venir recevoir les ordres de messire de Papus les jours qui leur seront par lui indiqués, pour la chasse dont il s'agit, auxquelles fins les Communautés des lieux seront tenues de fournir aux chasseurs choisis par lui, sieur de Papus, les munitions ou fonds nécessaires pour se les procurer.

En plus, le seigneur de Papus est très humblement supplié de ne pas souffrir à cette chasse, que la communauté le prie d'accélérer le plus promptement possible ni enfants ni autres personnes inutiles, à raison desquels les officiers municipaux seront tenus en cas de besoin de prêter toute aide ..."


(Archives Communales de Rieumes - Registre D3 - Folios : 76 V° - 77 - 78 - 79°
Société des études du Comminges - 1975/01 (A 1975, T88) - 1975/03)

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