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La Maraîchine Normande
19 février 2016

SOLLIÈS-PONT (83) - LE MANS (72) - JEAN GUIBAUD, PRÊTRE LAZARISTE INSERMENTÉ (1765 - 1794)

Solliès-Pont

JEAN-LOUIS GUIBAUD était né à Solliès-Pont, au diocèse de Fréjus, le 10 mars 1765.

acte naissance Jean-Louis Guibaud

Ses supérieurs l'avaient envoyé à la fin de 1787 pour remplir les fonctions de missionnaire dans le diocèse du Mans. Il s'acquitta de son ministère avec zèle, prudence et talent, mais surtout avec un profond esprit de foi.

Proscrit pour refus de serment, mais n'écoutant que la voix de la conscience, qui lui criait de braver les périls pour travailler à maintenir le règne de Dieu au milieu de la persécution, il se cacha dans le pays, et parvint à se soustraire à la déportation. Sa santé robuste lui permettait de supporter les privations et les fatigues, compagnes inséparables du genre de vie qu'il adoptait ; et il les embrassa avec calme et empressement. Ses travaux furent très-fructueux, au Mans surtout et dans la contrée voisine.

Jean Guibaud avait trouvé refuge dans une propriété nommée La Motte, dans le quartier des Arènes, à la porte du Mans, il y célébra souvent la messe, y confessa, y baptisa et y bénit plusieurs mariages. C'est dans cette retraite qu'il fut arrêté le 10 mars 1794. Il avait été dénoncé par une malheureuse femme à laquelle il avait souvent rendu service, et qui se laissa gagner par le misérable appât de cent livres, offertes en prime à tous ceux qui livraient un prêtre catholique.

Chez cette femme, le remords se changea en haine furibonde contre la religion ; et, quoiqu'elle ait survécu longtemps à son crime, elle mourut dans les mêmes sentiments et sans vouloir entendre le ministre de Dieu, qui venait lui offrir le pardon. L'un de ses frères, qui avait poursuivi les Vendéens avec une fureur sauvage, expira aussi dans les transports d'une rage forcenée.

LE MANS 3

Quand au sain prêtre, il fut renfermé dans la maison d'arrêt des Ursulines, où se trouvaient, à la même époque, plusieurs prêtres fidèles, qui furent déportés. Un moyen d'évasion fut proposé à Jean Guibaud, mais il refusa d'en profiter dans la crainte de compromettre ceux qui le lui procuraient.

Il comparut le 18 mars devant le tribunal criminel du département de la Sarthe, et entendit prononcer contre lui la sentence conçue en ces termes :

"28 ventôse, an II (18 mars 1794).

Jugement de mort contre Jean Guibaud, prêtre lazariste insermenté.

Au nom de la République française une et indivisible, à tous présents et à venir salut.

Le tribunal criminel du département de la Sarthe a rendu le jugement suivant :

Vu le procès-verbal dressé le six de ce mois par le citoyen Guy, l'un des membres du comité de surveillance de cette commune du Mans, en présence du citoyen Mesruau, commissaire du troisième canton de la section de la Liberté, duquel il résulte que s'étant transportés en une maison nommée La Motte, au lieu des Arènes, ils auraient enquis la citoyenne Pavet, ci-devant religieuse, occupant ladite maison, de leur déclarer si elle ne logeait point d'autres personnes que celles désignées sur la liste dudit commissaire de quartier ; à quoi ayant répondu négativement, ils avaient fait perquisition dans l'intérieur de ladite maison et trouvé dans un des appartements d'icelle un particulier qui a dit se nommer Guibaud, originaire de Toulon, lequel ils avaient arrêté et fait conduire à la maison d'arrêt, ainsi que la citoyenne Pavet, ci-devant religieuse, la citoyenne Pavy et la nommée Denis, et mis sous le scellé les meubles et effets incombants à ladite maison ;

L'interrogatoire subi par ledit Guibaud, le huit de ce même mois, devant les membres du comité de surveillance, duquel il résulte entre autres choses qu'il est prêtre lazariste, originaire de Favier (lisez Solliès-Pont) district de Toulon, demeurant en la maison dite de la Mission de cette ville jusqu'au temps où la loi l'a obligé d'en sortir, depuis cette époque jusqu'à la fin du mois de février mil sept cent quatre-vingt-treize chez le citoyen Dorison, basses rues de cette ville, et enfin, à partir de là, chez ladite citoyenne Pavet, où il a été trouvé ;

Que ses fonctions dans le temps où il était à ladite maison de la Mission, étaient d'aller prêcher dans les campagnes : ce qu'il a cessé de faire lors de l'installation de l'évêque constitutionnel ; et qu'il n'avait fait aucun serment à la République, parce qu'il n'était pas fonctionnaire public ;

Vu pareillement les procès-verbaux d'interrogatoires subis devant lesdits membres du comité de surveillance par René Grassin, bordager audit lieu de La Motte, Jeanne Bleu, femme dudit Grassin, ladite Pavet, ci-devant religieuse, et Victoire Pavy et Françoise Denis, ledit jour huit et le onze de cedit mois ;

Et après avoir de nouveau ouï et interrogé publiquement en la présente audience ledit Guibaud, le tribunal ouï l'accusateur public se déclare compétent pour juger révolutionnairement le procès dont il s'agit, et après que les avis ont été donnés à haute voix, déclare :

1° Que le fait est constant que ledit Guibaud est prêtre de la ci-devant congrégation de Saint-Lazare ;

2° Qu'il est convaincu d'avoir été sujet à la déportation. ...

Ledit tribunal, d'après l'autorité des différents articles de la loi dont la lecture a été publiquement faite, condamne ledit Jean Guibaud à la peine de mort ; renvoie pour l'exécution au commissaire national près le tribunal du district de cette ville ; déclare ses biens meubles et immeubles acquis et confisqués au profit de la République ; ordonne que le présent jugement sera imprimé au nombre de cent exemplaires, et affiché, tant en cette ville, que partout ailleurs où besoin sera, et trois desdits exemplaires signés du greffier et adressés par l'accusateur public, l'un au conseil exécutif, le second à l'administration des domaines nationaux, et le troisième à la régie nationale de l'enregistrement et du domaine.

Fait et prononcé publiquement en la salle d'audience du tribunal du district du Mans, par territoire emprunté, par René G....., l'un des juges du tribunal, faisant, pour l'empêchement par maladie du citoyen Ysambart, président de celui criminel, où étaient les citoyens H....., T..... et R....., remplaçant les citoyens Lavalette, Lemore et Launai, juges des tribunaux de La Flèche, Sablé et Sillé, qui étaient de service au tribunal criminel pour le trimestre actuel, et qui ont été empêchés d'en continuer les fonctions, les deux premiers par maladie, le troisième par mort.

Le vingt-huit ventôse l'an second de la République française.

Au nom de la République, il a été ordonné à tous les huissiers de faire pour l'exécution du présent jugement les actes de leur ministère requis et nécessaires ; à tous commandant, etc ...

En foi de quoi ledit jugement a été signé par les juges et par le greffier."

La sentense prononcée le 18 mars fut exécutée le lendemain.

Jean Guibaud n'avait pas encore trente ans. Il marcha à la mort avec un calme et une sérénité qui témoignaient hautement de la noble cause pour laquelle il souffrait. ...


Extrait : L'Église du Mans durant la révolution - par le R.P. Dom Paul Piolin - Tome troisième - 1869

AD83 - Registres paroissiaux - Solliès-Pont

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