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La Maraîchine Normande
5 septembre 2015

SAINT-LAURENT-SUR-SÈVRE (85) - LES SOUVENIRS DE JACQUES POIRIER, SOLDAT VENDÉEN

 

Vendéen 9

 

Jacques POIRIER était un colporteur, devenu simple soldat dans les armées vendéennes. Après la guerre, il semble avoir surtout vécu à Saint-Laurent-sur-Sèvre.

Dans son manuscrit qui compte une cinquantaine de pages, il relate tout d'abord le combat des Aubiers le 12 avril 1793, sous les ordres d'Henri de La Rochejaquelein.

"Nous avons eu l'honneur de parler à Mr de La Rochejaquelein qui nous commandait, et nous avons obéi à ses ordres. Il nous a fait marcher par les endroits les plus bas parce que le clocher des Aubiers était extrêmement haut et que ces scélérats étaient embusqués beaucoup dedans pour voir de plus loin ...

Nous avons foncé sur eux en foule. Quand ils ont vu ça, il se sont retranchés dans le milieu d'un grand champ qui était auprès d'un logis qui se nomme "le Cafard". Et nous les avons toujours rembarrés. A la fin, ils ont été obligés de prendre la déroute et d'abandonner tout ce qu'ils avaient, leur artillerie et autres munitions ...

D'autres qui étaient restés dans le bourg ont été commandés de ramasser plusieurs couettes et linges et courtepointes, draps et toute sorte de linge à l'usage du ménage que les autres avaient volés pour faire coucher leurs blessés. Il y en avait comme cela trois charretées, la plus grande part toute ensanglantée que nos commandants ont fait conduire à Châtillon pour faire des lits aux pauvres blessés. On nous a laissés pour monter la garde à Châtillon."

Puis Jacques POIRIER va participer le 5 juillet à la bataille du Château-Gaillard si importante pour Châtillon. Et il va en laisser un récit assez différent de ceux qui étaient connus jusqu'alors. On remarquera aussi ... le rôle important joué par les espions. Il y en avait de toute évidence qui travaillaient pour chacun des deux camps. Et ils ont parfois fourni des renseignements essentiels sur le dispositif des armées adverses.

"Puis nos commandants ont fait leur rassemblement et eux (les Républicains) sont venus à se camper auprès de Châtillon sur une hauteur qui se nomme le Château-Gaillard. Puis il y a eu un homme de bonne foi et bien charitable qui a monté dans un chêne creux, et qui y a passé une partie de la nuit, pour voir comme ils posaient leurs canons. Il a vu qu'ils les posaient tous pour porter sur la route qui conduit de Cholet à Châtillon, et qu'il n'était pas possible que nous puissions approcher d'eux et qu'ils nous auraient en partie tous écrasés. Cet homme bien charitable est venu au Temple parler à un homme de confiance aussi bien que lui."

A Mortagne ensuite une lettre fut rédigée et un courrier fut dépêché à l'état-major de toute urgence.

"Lorsqu'il a monté sur son cheval, lui a donné deux coups d'éperon et il a été bientôt rendu à Cholet. En même temps est monté en l'état-major et a présenté cette lettre à Mr d'Elbée, comme elle était adressée à lui. Et en même temps, Mr d'Elbée a décacheté cette lettre et l'a lue à haute et intelligible voix. Puis après tous ces commandants ont entendu cette lettre et M. de La Rochejaquelein a dit que c'était bien à propos.

Et en même temps on a commandé à la troupe de se mettre en marche et de passer par le Puy-Saint-Bonnet ... pour aller droit aux landes du Temple. On a fait arrêter là la troupe pour attendre que ce soit tout arrivé, comme cette troupe était bien longue puisqu'elle a commencé à partir de Cholet sur les huit heures du soir. Et ils n'étaient pas encore tous rendus à huit heures du matin ! Et ça passait toujours à plein chemin et aussi par les champs, partout où ça se trouvait ... On s'est transporté sur la route de Mallièvre à Châtillon.

Mr de La Rochejaquelein nous a dit à nous autres de passer dans ces bois et d'y faire la fouille pour voir s'il n'y a personne pour nous surprendre. C'est ce que nous avons fait et dans les genêts aussi ; nous n'avons rien trouvé qui puisse nous nuire. Et en même temps, j'ai sorti par un chemin qui conduit à la Tuilerie de la Congrière, et nous avancions grand train parce que nous entendions la colonne qui se battait à toute force ...

Mr de La Rochejaquelein nous a fait embusquer et à tous les coups qu'on tirait on abattait un homme parce qu'on mussait les canons de fusil par les trous d'un petit mur de sorte qu'ils ne voyaient point d'où ça venait ... Et à la fin ils ont pris la déroute et ils ont fui grand train. Puis après nous avons couru après eux, de toutes nos forces, mais il y avait une grande dévallée pour descendre ... Nous ne pouvions pas descendre comme nous voulions. Nous étions obligés de nous laisser glisser sur le derrière et nous avons couru après eux, la cavalerie et les piétons, de toutes nos forces jusqu'au pont du Gué Pillier ...

Et en nous y rendant nous avons trouvé plusieurs barriques de vin et d'eau-de-vie et nous en avons bu. Et on a fait rendre le reste à Châtillon. Et l'eau-de-vie a été dispersée dans les hôpitaux où il y avait des blessés pour traiter les blessures. Puis en arrivant à Châtillon, nous avons bien trouvé une vingtaine de femmes et de filles qui nous ramenaient six cavaliers qu'elles avaient arrêtés, et les conduisaient devant elles à coups de broc et coup de seque et de bâton ..."

Après avoir participé à de nombreux combats pendant l'été et dans toute la Vendée, Jacques POIRIER sera de nouveau à Châtillon du 9 au 11 octobre et il sera présent lors de la seconde bataille qui se terminera par l'incendie de la ville. Son récit est beaucoup plus bref et n'apporte pas d'élément nouveau relatif à ces évènements. Le dernier paragraphe toutefois vient confirmer les traditions orales relatives aux barriques d'eau-de-vie trouvées après la retraite de WESTERMANN.

"Et puis ce mauvais Westermann avait eu la charité de laisser plusieurs barriques d'eau-de-vie et de vin par les chemins. Et puis notre armée s'est amusée à boire ! Et lui, comme un scélérat, a foncé sur nous avec le sabre nu à la main et toute sa cavalerie s'est enfoncée sur ces pauvres gens qui étaient ivres. Et ils ont passé comme des lions tout autour de la ville de Châtillon, tuant et sabrant partout. Ils nous ont détruit beaucoup de monde".

Extrait : Michel Chatry - Les Carnets du Pays Mauléonnais - n° 4 - 1993

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Commentaires
J
Je peux vous adresser l'extrait du témoignage de Jacques Charrier concernant l'évènement de Cheffois du 9 mai 1793. Cet extrait était inclus dans le texte rédigé par l'abbé Dubin curé de Mouilleron sur Mouilleron du temps de la révolution. C'est cet extrait dont l'origine n'est pas mentionnée hormis le fait qu'il s'agit du témoignage de Jacques Poirier
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D
Bonjour,<br /> <br /> Normalement, les souvenirs de Jacques Poirier sont intitulés "État des combats que nous avons fait pour le soutien de Louis seize roy de France et de Navarre" et ils sont publiés, parmi d'autres, dans "Les oubliés de la guerre de Vendée, mémoires et journaux présentés par une équipe de chercheurs", sous la direction d’Alain Gérard et Thierry Heckmann, Société d’Émulation de la Vendée, 1993. Mais je n'ai pas lu ces mémoires et ne sais pas si cette messe est évoquée.
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J
Auriez vous le texte ou le lieu concernant les notes du soldat Jacques Poirier . Je recherche le texte qui relate la messe de l'ascension le 9 mai 1793 à Cheffois et les combats près de la Chataigneraie
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La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
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