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La Maraîchine Normande
23 août 2015

LAIGNÉ (53) - SOUS LA RÉVOLUTION - LA CHOUANNERIE - BRANCHE D'OR - FRANCOEUR ET MARCADET

Laigné

 

Le pays jouit d'abod de la plus grande tranquillité et le peuple n'usa point à Laigné de représailles contre la petite noblesse dont il n'avait d'ailleurs pas à se plaindre.

Lorsque le 22 décembre 1789, la France fut divisée en départements, districts, cantons, communes. La commune de Laigné fit partie du district de Château-Gontier et elle devint l'un des 9 chefs-lieux de cantons de ce district. Le canton de Laigné comprenait les communes de : St-Gault, les Chaires, Loigné, Marigné-Peuton, Ampoigné et Laigné.

A la même époque, les biens du Clergé furent mis en vente. Tout d'abord, on ne trouva pas d'acquéreur, et ceux de Laigné furent annoncés plusieurs fois sans qu'on trouvât personne, et ce n'est qu'en 1792 que l'on trouva des acheteurs (en grand nombre pour de petits prix (souvenirs d'un témoin).

On maintint à Volney le mandat de député pour notre pays à l'Assemblée législative et à la Convention.

En mars 1792, un curé constitutionnel, Joseph Durand, prit la place du curé Charbonnier qui avait refusé le serment et qui fut déporté en Espagne où il devait rester huit ans. M. Charbonnier revint à Laigné en 1800.

signature Charbonnier curé


Le curé constitutionnel quitta Laigné en octobre 1792 et remit les registres des actes civils à la municipalité.

Voici la formule de remise :

Le vingt huit octobre mil sept cent quatre vingt quatre-vingt douze, l'an premier de la République française, le conseil général de la commune en séance permanente à la réquisition du procureur de la Commune a arrêté et clos le registre courant qu'il a reçu de M. Durand, curé de la paroisse.
Guioullier, Maire
Nobis, officier municipal.
Pointeau, officier municipal
Rocher, procureur de la commune.

signature Guioullier maire


M. Marc Guioullier, le Maire rédigea la majeure partie des actes pendant la Révolution.

M. Miré de la Teillais qui signe en qualité d'officier public le remplace souvent.

M. Guioullier acheta la plus grande partie des biens nationaux en 1792. S'il faut en croire certains habitants, il paya très bon marché l'une des meilleures closeries du pays ; 325 livres. En sa qualité de Maire, il avait affiche la vente sur le derrière d'un volet de fenêtre, de sorte que, pendant le jour, le volet étant ouvert, on ne voyait son affiche. Personne ne se présenta à cette vente, et la closerie et ses dépendances, avec le moulin et l'église, lui furent adjugés pour le prix qu'il voulut bien en dire.

Il essaya d'agir de la même façon quand on vendit les terres de Fontenelle ; mais M. Nicolas Fléchais ayant appris à Château-Gontier le jour de la vente, il acheta le tout et ajoute la personne de qui nous tenons ces faits : "le petit père Guioullier fut bésa".

 

LA CHOUANNERIE


Dès 1791, les premiers de Romfort et de Fontenelle avaient quitté le pays ainsi que le sieur Bouchard de la Poterie. Ils étaient allés retrouver les émigrés en Allemagne et le vicomte de Fontenelle commandait une compagnie de l'armée de Bouillé. A la nouvelle, il revient au pays et court s'enrôler dans l'armée vendéenne.
Il assiste à la défaite de l'armée royale sous les murs du Mans et pendant la retraite il repassa par Laigné. Il mourut quelques jours après dans un des combats qui furent livrés sur les bords de la Loire. Six habitants de Laigné partis avec lui ne revinrent jamais.

Certes l'insurrection vendéenne causa de grands malheurs dans le pays mais ils sont peu de chose comparés à ceux causés par la Chouannerie.


Les chouans se levèrent en masse dans le pays de Château-Gontier et en particulier à Laigné. Le pays faisait partie de la division de Craon. La brigade de Laigné avait à sa tête le célèbre chef HAMAR dit BRANCHE D'OR, (Son nom véritable est Hoisnard ; il habitait la ferme des Bretonnières, en Marigné-Peuton). Il fut l'un des premiers à répondre à l'appel du célèbre Coquereau qui s'était réfugié dans le bois du Coudray de Marigné où il reconstituait sa bande. Les chouans PIMOUSSE, CHASSE-BLEU, PETIT-CHOUAN furent pendant quelque temps la terreur du pays.

BRANCHE D'OR avait sous ses ordres douze hommes de Laigné : BODINIER Pierre du Mortier et son frère Louis, Laurent de la Mauconnière, HOUSSIN de la Traverserie, GIGON de la Houdonnière, PELLERIN du Bourg, BURAIS de la Cosnerie, POULAIN, MADIOT, OUILLOT, et trois garçons de ferme réfractaires.
Le rendez-vous était le logis de Souvigné.


HOISNARD ayant cessé de faire partie de la bande de Coquereau s'unit à JAMBE D'ARGENT et pris part à toutes les expéditions du redoutable boiteux, notamment à celles dirigées contre Houssay, Ampoigné.

A l'attaque d'Ampoigné, Jambe d'Argent ayant été grièvement blessé, les chouans se replièrent sur Laigné, et un combat sanglant s'engagea près du moulin. Hoisnard y fut blessé et six hommes de sa bande restèrent sur le terrain. Un cinquantaine de chouans perdirent la vie dans ce combat qui fut moins meurtrier pour les bleus qui s'étaient abrités derrière le moulin à vent, aujourd'hui disparu. Le combat, un moment interrompu, recommença à la chute du jour. Les républicains avaient pris position dans l'église, et, se servant des ouvertures du clocher comme de meurtrières, faisaient un feu plongeant sur les chouans qui mirent le feu à l'église pour forcer les ennemis à sortir. Une troupe de renfort étant venue , les compagnons de Jambe d'Argent lâchèrent pied. (Récit de M. T. H.... qui le tenait de M. Maillard)

La couverture de l'église fut entièrement consumée ainsi que les bancs, stalles. Il ne resta que les murs de la nef.


Trois autre combats eurent lieu la même année 1794 à Laigné, et le lendemain de l'une de ses rencontres, on trouva les cadavres de deux bleus et d'un chouan qui avaient été jetés dans le puits de Basse-Cité.

Hoisnard dont la blessure n'était pas grave, reconstitua sa bande à l'aide de secours venus particulièrement de Peuton, Simplé, et rejoint la campagne. Il fut arrêté à la Maison-Neuve, mais ses gardiens s'étant trouvés ivres, il s'échappa, alla retrouver Jambe d'Argent et vint avec lui attaquer Château-Gontier en juin 1795. Cette attaque fut repoussée par le général Dalhancourt.


Hoisnard avait dans sa bande des individus assez peu recommandables. L'un d'eux surnommé FLEUR DE LYS, maltraita une pauvre fille de la closerie de Jauveau (?) qu'elle mourut peu de temps après.

Le pays continua à être troublé jusqu'à l'établissement du Combat. Bonaparte ayant rétabli la religion catholique et les chefs royalistes ayant fait leur soumission, le calme se rétablit.

M. Charbonnier revint à Laigné et M. Guioullier, par son acte en date du 22 germinal an X lui rendu l'église qui fut réparée avec le produit des quêtes faites dans la commune.


Il y eut à cette époque de nombreux réfractaires à Laigné. L'un d'eux, nommé GUILLET fut fusillé au bourg près de la demeure de sa famille. Un poste de soldats fut établi près de l'église pour appliquer la loi du recrutement.


Laigné possédait un autre officier dans les armées catholiques et royales, il se nommait Pierre LEMESLE. Sa famille habitait la Renaudière.


Par jugement en date du 18 thermidor an X, le tribunal criminel spécial d'Angers condamne à mort : Michel Quinoiseau, René Quinoiseau, Marin Guillé de Laigné, tous trois, anciens chouans, et dit qu'ils seront exécutés en chemise rouge.


Le soulèvement de 1815, replongea le pays dans la guerre civile. Les anciens chefs de bande du pays, PIMOUSSE, BRANCHE D'OR reprirent les armes, allèrent former une véritable armée que commanda Gaullier. Un engagement eut lieu à Champigné. Les royalistes furent vaincus. Charles DE CHAMPAGNÉ, major de Gaullier, fut tué et HOISNARD rentra blessé une seconde fois avec la moitié seulement de ses partisans.


En 1832 la duchesse de Berry ayant formé le projet de placer son fils sur le trône, elle s'entendit avec les chefs royalistes de la contrée pour soulever le pays.


Un certain nombre d'habitants de Laigné partirent pendant la nuit du 25 mai et se rendirent à Château-Gontier en blouses sous lesquelles ils dissimulaient leurs armes. Pour n'être pas reconnus, ils avaient pris des vêtements si usés que, passant par Bazouges, un homme qui les vit passer, ne put s'empêcher de s'écrier : "B... D... ont-ils mauvaise mine !", ce qui donna naissance à un dicton qui ne s'emploie plus (Être foutu comme un chouan de Laigné !)

Rendus à Château-Gontier, les royalistes de Laigné y séjournèrent, mais à la suite de l'affaire de Chanay, ils se hâtèrent de rentrer chez eux. On ne les inquiéta pas pour ce beau fait.

Un poste de soldats fut établi dans le bourg.


C'est alors que deux chouans, FRANCOEUR  et MARCADET, poursuivis, traqués partout, vinrent chercher un refuge à Laigné. Pendant un certain temps ils errèrent de ferme en ferme, ne vivant que de pillage et de rapines. C'est pendant leur séjour à Laigné qu'ils assassinèrent un soldat  (voltigeur du 53e) qui revenait de Craon à Château-Gontier. La terreur était dans la contrée.

Ces bandits furent pris, transférés à Laval et condamnés à mort par la Cour d'Assises de la Mayenne dans son audience du 3 août 1835.

Extrait : Monographie communale - Laigné - AD53 - MS80 25/01 - p. 55 à 59

FRANCOEUR
François-Marie-Napoléon Serrebourse est le fils d'un ancien employé de l'octroi de Mayenne. Ses antécédents sont juridiquement constatés par un arrêt de la Cour d'Assises de la Mayenne rendu en 1827, et qui le condamna pour vol à deux ans de prison et cinq ans de surveillance : mais il était sorti de prison en 1831, et dès lors il fut jugé digne de figurer activement dans les noyaux de l'insurrection légitimiste qui étaient préparés dès cette époque. Depuis ce temps aussi Serrebourse a noblement continué sa carrière de chouan ; mais pour cela il a cru devoir abdiquer un nom mal sonnant, et s'est baptisé du surnom de Francoeur. Ce sobriquet a long-temps dérouté les investigations de la justice ; car on l'a pris tantôt pour un nommé Louis Oger, tantôt pour un sieur Cercleux, força évadé, afin d'échapper à une condamnation à mort prononcée pour crime d'assassinat.

Francoeur, plus grand, mais moins gros que Marcadet, paraît doué d'une grande force musculaire, sa physionomie est sans expression ; ses yeux bleus sont habituellement baissés, il a l'air d'écouter à peine, il ne répond qu'avec timidité, et sa voix ne s'anime presque jamais ; on dirait qu'il y a dans tout son maintien une affectation calculée de laisser-aller qui contraste avec l'assurance qu'il avait montrée il y a quelque temps dans le procès à ses receleurs habituels, au Tribunal de Château-Gontier. Au reste, Francoeur détourne constamment les yeux de Marcadet, tandis que celui-ci lui lance de temps en temps des regards de mécontentement.  (Extrait : La Gazette des Tribunaux - Dimanche 9 août 1835 - n° 3111)

MARCADET
Marcadet est le fils d'un ancien percepteur de la restauration, qui avait conquis cet emploi par des moyens à-peu-près analogues à ceux reprochés à son fils ; mais ce jeune homme, né avec des inclinations vicieuses, n'a pas de même profité de la position que l'ancien gouvernement avait faite à sa famille. Après avoir appris l'état de peintre et vitrier, il l'abandonna bientôt et se vendit comme remplaçant. En cette qualité, il fut incorporé dans le 11e régiment de chasseurs à cheval, il obtint une permission pour passer quelque temps dans sa famille, au commencement de 1832 ; mais bientôt entraîné autant et peut-être par ses mauvais penchans que par les antécédents de son père, il se joignit dès le mois de mars 1832 aux bandits qui préparaient dès-lors l'insurrection de la chouannerie ; depuis il n'a cessé jusqu'à son arrestation de diriger en premier et en second ordre quelques misérables bandes de brigands ...

Marcadet est un homme de cinq pieds deux pouces, ayant de larges épaules, une belle figure, des traits réguliers et des yeux d'une mobilité et d'une vivacité remarquables. (Extrait : La Gazette des Tribunaux - Dimanche 9 août 1835 - n° 3111)

 

EXÉCUTION DES CHOUANS FRANCOEUR ET MARCADET
Laval, 21 octobre 1835.

Condamnés à mort depuis le 5 août dernier, ces deux malheureux espéraient, ou l'admission de leur pourvoi en cassation, ou une commutation de peine ; mais l'ordre d'exécuter l'arrêt est venu le 17 de ce mois. Jusqu'à l'arrivée à Laval des exécuteurs de Rennes et d'Angers, que M. le procureur du Roi, avait mandés, des précautions avaient été prises dans l'intérieur de la prison, pour que les condamnés ne fussent instruits qu'à temps du sort qui les attendait. Ce n'est donc que ce matin, vers huit heures, qu'ils ont connu cette nouvelle terrible. Francoeur et surtout Marcadet l'ont reçue avec une fermeté qui ne s'est pas démentie jusqu'au moment fatal.

Renfermés dans la chapelle de la prison avec leurs confesseurs, ils y sont restés jusqu'après onze heures. Pendant ce temps, Marcadet a fait prier M. Dumans de Chalais, son défenseur de venir le voir, et après l'avoir embrassé, il lui a recommandé sa famille, et principalement sa mère. Les deux condamnés, après avoir subi leur première agonie, vulgairement appelée la "toilette", sans paraître aucunement émus de ces préparatifs affreux, ont franchi les portes de la prison.

Conduits sur place, où devait se faire l'exécution, par cinquante gendarmes, ils ont marché d'un pas assuré, écoutant les exhortations que leur adressaient MM. Boullier et Favrole, que la sainteté de leur ministère armait dans cette terrible mission du sacerdoce, d'un courage bien supérieur à leurs forces physiques. Arrivés au pied de l'instrument de leur mort, Francoeur le premier est monté ; mais après avoir franchi deux marches de l'escalier, il est redescendu pour embrasser et son complice et son confesseur ; puis s'étant mis à genoux, il a demandé à haute voix pardon à Dieu et aux hommes du mal qu'il avait fait.

Marcadet, attaché à son tour, et ayant sur sa tête le fer qui va la trancher, demande pardon à Dieu, et déclare qu'il meurt pour Henri V ; il semble vouloir parler encore, mais l'exécuteur le saisit, et un instant après il n'était plus.

Nous pouvons sans exagérer taxer à 6.000 le nombre de personnes que cet affreux spectacle avait attirées sur la place Dehercé, où, comme de coutume, les femmes se trouvaient en majorité. Les villes voisines et les campagnes surtout avaient voulu fournir leur contingent de spectateurs.

Francoeur et Marcadet avaient tellement glacé d'épouvante les habitants des champs, que ceux-ci semblaient avoir voulu s'assurer par leurs yeux, que désormais ces deux noms ne leur inspireraient plus d'autres sentimens que ceux d'une juste horreur pour les crimes qui pèsent sur leur mémoire et sur la conscience de leurs instigateurs.


Extrait : La Gazette des Tribunaux - Jeudi 29 octobre 1835 - n° 3180

 

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