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La Maraîchine Normande
19 mai 2015

1831 - UNE PETITE GARNISON A RÉAUMUR (85)

 

Réaumur vue

Beaucoup d'entre vous savent-ils qu'en 1831 et pendant quelques années suivantes, Réaumur devint le siège d'une petite garnison ? Voici à ce sujet quelques renseignements que nous devons à l'obligeance de Madame Phelippeau, qui les a trouvés dans des papiers de famille.

Bourbon-Vendée, le 29 mai 1831.
Monsieur le Maire.
J'ai l'honneur de vous informer qu'une Compagnie du 32e de Ligne, composée de trois officiers et de 70 sous-officiers et soldats, arrivera dans votre commune le 21 de ce mois et y restera stationnée jusqu'à nouvel ordre.
Je vous prie de vouloir bien prendre les mesures nécessaires pour que cette troupe reçoive sur ce point le logement chez l'habitant, le pain et le chauffage.
D'après les dispositions que vient de faire le Sieur Coutance, agent comptable des vivres du département, le pain sera préparé par le boulanger de Saint-Pierre-du-Chemin, et envoyé à Réaumur aux époques des distributions. Vous n'aurez donc, M. le Maire, à vous occuper de ce service que dans le cas où il ne serait pas convenablement assuré. Quant au chauffage, les fournitures qui seront effectuées seront payées par le Sieur Sirol, préposé de ce service à Bourbon-Vendée, sur la remise des bons délivrés par le chef du détachement et visés par vous. Les distributions doivent avoir lieu à raison de 1/250e de stère par homme et par jour, ou de 1/750e de corde.
Si l'établissement d'un corps de garde était jugé nécessaire pour la sûreté de la troupe, il y aurait lieu de lui faire fournir pour chaque jour deux chandelles de 15 au kilogramme. Cette fourniture serait acquittée par l'agent du chauffage désigné ci-dessus.
Veuillez agréer, M. le Maire, l'assurance de ma considération très distinguée.
Le Sous-Intendant militaire.


L'agent comptable écrit alors à M. le Maire :


Bourbon-Vendée, le 20 mai 1831.
Monsieur le Maire,
Je suis prévenu à l'instant qu'une compagnie du 32e forte de 70 hommes, a reçu l'ordre d'aller tenir garnison dans votre commune. Je m'empresse d'écrire aux sieurs Vincendeau et Roy, boulangers à Saint-Pierre-du-Chemin, de se mettre en mesure de transporter le pain qui sera dû à cette troupe dans votre commune le 24. Ces deux boulangers ayant pris l'engagement d'y fournir le pain dans le cas du besoin. Je crois utile de vous donner connaissance de cette disposition pour que vous soyez rassuré sur l'exécution du service.
Recevez, M. le Maire, l'assurance des sentiments très distingués avec lesquels j'ai l'honneur d'être votre très humble et très obéissant serviteur.
L'agent comptable des subsistances militaires.
COUTANCE
P.S. - Les bons qui seront remis aux boulangers devront être visés par vous, je vous serai très obligé de vouloir bien les remplir de cette formalité.


Le Sous-Préfet de Fontenay-le-Comte à son tour écrit à la même date du 20 mai :


Monsieur,
J'ai l'honneur de vous informer que je viens de diriger une Compagnie d'Infanterie de ligne forte de 70 sous-off et soldats, commandée par un capitaine et deux officiers, elle y arrivera le 23 de ce mois, pour y stationner jusqu'à de nouveaux ordres de M. le Général commandant le dépôt. Vous veillerez, M. le Maire, à ce que toutes les fournitures soient délivrées à la troupe sur les bons de M. le Capitaine commandant. J'expédie une voiture à un collier pour transporter les bagages de la Compagnie. Veuillez en faire faire le dépôt chez vous afin qu'en arrivant elle puisse les trouver.
Recevez, Monsieur, l'assurance de ma parfaite considération.
Le Sous-Préfet.

1831 soldats

Une compagnie du 32e de ligne arrive à Réaumur le 24 mai 1831. Elle y séjournera pendant trois ans, jusqu'en mai 1834, époque à laquelle une autre compagnie bien plus forte la remplacera. Deux boulangers de St-Pierre, Vincendeau et Roy sont chargés de la ravitailler.


Pourquoi ces deux boulangers d'une commune voisine, alors que Réaumur possède son propre boulanger ? Il faut croire qu'il y a eu réclamation puisque le 27 mai, l'agent comptable des vivres écrit à M. le Maire :
"Puisqu'il existe dans votre commune un boulanger propre à ce service, je suis tout disposé à lui donner la préférence. Le pain qu'il doit fournir doit être de farine de froment blutée à l'extraction de 10 pour 100. Le prix lui en sera acquitté comme dans les communes voisines de la vôtre, à raison de 18 centimes par ration."


Le boulanger s'appelait Grelier. Il y en eut un autre du nom de Lalut puis un troisième du nom de Sourrisseau.
Les actes écrits de l'autorité militaire portent le titre de "Place de Réaumur".


Les soldats sont cantonnés chez les habitants. Il y a un corps de garde pour la sécurité de la troupe, une guérite pour la sentinelle. Une lettre nous apprend que c'est la 4e compagnie du 4e Bataillon du 32e commandée par le capitaine Saval.


Cependant nous trouvons un certificat du docteur Boullaud, de la Châtaigneraie, attestant que le nommé Baron Thomas Marie, fusilier au 32e régiment de ligne, 1er bataillon, 6e compagnie, est atteint d'une fièvre intermittente qui l'oblige d'entrer à l'hôpital et le met dans l'impossibilité de voyager à pied.


M. Audé, Maire, donne ordre à Bourdeau, voiturier, de transporter avec un cheval de selle le soldat ci-dessus désigné à l'hôpital de Fontenay.


Le séjour de cette troupe à Réaumur pendant trois ans n'a pas été sans tracas pour l'administration communale aux prises sur une foule de détails avec l'autorité militaire. Nous possédons un énorme dossier de lettres, de pièces administratives et de la Préfecture et de l'Intendance adressées à M. le Maire et qui nécessitaient évidemment de la part de celui-ci réponses, signatures et autres nombreuses démarches. Il faut croire toutefois que l'entente cordiale régnait entre les deux autorités et que les habitants étaient heureux d'héberger leurs hôtes puisqu'en 183, alors qu'un départ de la troupe semblait être envisagé, M. le Maréchal commandant le dépôt écrit de Bourbon-Vendée à M. le Maire :
"Je n'ai, jusqu'à présent, pas l'intention de changer le cantonnement de Réaumur. Il peut arriver d'un moment à l'autre que des raisons de service nécessitent ce changement. Je ferai ce qui dépend de moi pour qu'il ait lieu le plus tard possible. Je sens bien l'importance qu'il y a à laisser dans les mêmes cantonnements les officiers qui sont devenus localistes."
Le Maréchal de camp
commandant le dépôt : ROUSSEAU.


Le cantonnement de la troupe établi à Réaumur est supprimé en 1834. Nous avons dit que les relations entre l'autorité communale et l'autorité militaire étaient au moins courtoises. Il y eut cependant quelques nuages. Une fois entre autres, M. Audé et M. Martin d'Auch, commandant alors le détachement, eurent une altercation un peu vive dont le Préfet et le Général eurent à connaître.


Le commandant avait opéré un déplacement dans le logement de quelques militaires. De son autorité, il les avait logés chez les nommés Bard et Coutaud. Ceux-ci refusèrent de recevoir les soldats alléguant qu'ils n'étaient pas désignés pour le logement militaire.


M. Audé ayant demandé au commandant pourquoi il empiétait sur ses attributions : "Parce que cela me fait plaisir" lui répondit-il. Cette réponse fut jugée inconvenante et amena des explications un peu vives entre l'officier et M. le Maire, qui se quittèrent en se menaçant l'un l'autre de se plaindre à l'autorité supérieure.
M. le Préfet écrivant au Général, juge ainsi le litige : M. le Maire de Réaumur a pu de son côté avoir mis un peu de vivacité, aussi lui ai-je rappelé la nécessité d'apporter tous les égards que les hommes se doivent entre eux ; mais vous jugerez sans doute convenable de faire sentir également à M. Martin d'Auch qu'il a manqué de mesure et de convenance dans sa réponse et dans sa conduite envers M. le Maire de Réaumur.


A part cet incident de minime importance, il n'y eut que cordialité entre les deux autorités.


- Une question assez brûlante fut agitée sur le cas où des officiers refuseraient d'aller à la messe. La question se posait en général mais les différents corps de troupe de la région en furent avisés puisque nous trouvons copie d'une note à ce sujet transmise au détachement de Réaumur.


Nantes, le 3 septembre 1831.
Copie de la lettre écrite à M. le Général Rousseau par M. le Général Commandant la Division.
Général.
Le ministre consulté sur le cas où des officiers refuseraient d'aller à la messe répond le 30 août que l'ordonnance du 13 mai 1818 en ce qui concerne, ne doit pas être considérée comme imposant l'obligation d'y assister, mais seulement comme énonçant l'ordre dans lequel ils doivent s'y rendre lorsqu'il y a lieu de les y conduire ; qu'ainsi les militaires jouissent comme tous les autres citoyens de la liberté religieuse garantie par la Charte, sauf le cas où les cérémonies du culte auraient lieu à la demande de l'autorité et où les troupes auraient reçu l'ordre formel d'y assister.
Le général Rousseau commandant le Département ayant écrit à M. le Général commandant la Division pour savoir de lui quel parti il avait pris relativement à la lettre ci-dessus en a reçu l'avis que le général Pinoteau conduit habituellement les troupes du 14 et 32e à la messe et que lui-même s'y rend avec elles, que cela n'a jamais fait de difficultés et pense comme lui que cela produit un bon effet, notamment dans les campagnes. Il en a conféré avec MM. les officiers de la garnison qui tous ont été d'avis de se conformer aux avis de M. le Maréchal ministre de la guerre. Ainsi la messe continue à se dire à Bourbon-Vendée tous les dimanches et fêtes d'obligation, qu'il en sera de même dans tous les cantonnements et que MM. les officiers sentiront combien il est important de ne pas froisser les opinions religieuses du Pays et qu'ils seront convaincus que la présence de la troupe à la messe ne peut qu'affermir de plus en plus la bonne harmonie qui n'a pas cessé de régner entre elle et les habitants.

Bulletin paroissial de Réaumur - 1934 - AD85

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