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La Maraîchine Normande
21 mars 2015

MONTPELLIER (34) - MARC-ANTOINE-FRANÇOIS, BARON DE GAUJAL, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR D'APPEL (1772-1856)

FRANÇOIS DE GAUJAL
Né à Montpellier, le 28 janvier 1772 - décédé à Vias, le 16 février 1856.

Montpellier

Premier président de la Cour d'appel de Montpellier, après M. Viger (1849-1852), fils de Marc-Antoine-Dominique de Gaujal, baron de Tholet, mousquetaire de la garde du roi, & de Marguerite Aldebert. Sa famille, originaire de Milhau en Rouergue, où elle a toujours eu son principal établissement, avait donné, en 1729 & 1755, deux conseillers à la Cour des Comptes, Aides & Finances de Montpellier.

Il fit ses premières études au collège de Rodez, sous la direction de l'abbé Girard, célèbre grammairien, & de l'abbé Bosc, auteur des Mémoires pour servir à l'histoire du Rouergue. Dans ce même collège furent élevés, avec lui ou avant lui, Chaptal, Frayssinous, Monteil, Clausel de Montals, qui ont acquis une légitime célébrité.

Ses parents le destinaient à la marine, & l'envoyèrent étudier les sciences au collège de Montauban, en 1785. La mort de son père, en 1786, vint modifier ses projets, & le jeune Gaujal, rentré à Milhau, resta auprès de sa mère, alors chargée de veiller à l'éducation d'une famille composée de six enfants, dont il était l'aîné.

En 1791, il quitta Milhau avec le chevalier de Tauriac, son parent & son ami, officier dans le régiment de Vivarais, & ils rejoignirent ensemble, sur les bords du Rhin, l'armée du prince de Condé. Après le licenciement de ce corps, en 1792, Gaujal se retira à Liège, se livra avec ardeur à l'étude des sciences, & voulut entrer au service de la Russie en qualité d'ingénieur. La demande adressée à l'ambassadeur de l'impératrice Catherine n'avait pas encore reçu de réponse, lorsqu'il se vit entraîné par ses compagnons d'exil dans le corps organisé par le comte d'Artois, en vue de l'expédition qui aboutit au désastre de Quiberon. Retiré en Irelande, il parvint à l'aide des relations de M. de Planard, son compatriote, à utiliser ses connaissances en mathématiques ; le secrétaire d'État d'Irlande le chargea, comme ingénieur, avec le grade de major, de préparer les travaux de la défense des côtes.

En 1800, son nom ayant été rayé de la liste des émigrés, il rentra en France, avec l'autorisation du Comte d'Artois, & se mêla activement à la politique en collaborant au Journal des Débats, fondé par M. Poujade-Ladevèze, son compatriote ; & plus tard, en 1807, en créant, avec l'imprimeur Carrère, le Journal de l'Aveyron. L'organisation des tribunaux ouvrit enfin à Gaujal une carrière qui promettait à ses talents sérieux un théâtre plus élevé & des récompenses moins fugitives. Il s'était fait recevoir avocat à Toulouse, & avait plaidé avec quelque succès devant le tribunal de Rodez & la cour criminelle de l'Aveyron.

Le 2 juillet 1808, un décret de l'Empereur le nomma juge-auditeur à la Cour de Montpellier, & dans l'espace de quelques années, il fut successivement appelé, aux fonctions de président du tribunal de Lodève en 1809 ; de substitut du procureur général Fabre (dont il avait épousé la fille), à Montpellier en 1811 ; de procureur impérial criminel du département de l'Aude, en 1812. La suppression de cet emploi, en 1815, le rendit pour peu de temps à la vie privée. Dans l'exercice de ces dernières fonctions, il attacha son nom à une innovation qui fut la première ébauche de Statistique criminelle essayée en France : il communiqua au Mémorial administratif de l'Aude le Tableau de l'Administration de la justice répressive dans ce même département. "Le mathématicien, dit avec raison M. Duval son biographe, se révélait ainsi dans le magistrat. Ce travail, apprécié par le ministre de la justice, fut le germe de la grande statistique de la justice civile & criminelle, inaugurée en 1825 par M. de Peyronnet."

Le 13 mars 1816, il fut nommé président de chambre à la Cour royale de Pau, & le 12 février 1821, premier président de la Cour royale de Limoges. Ses voeux envisagèrent longtemps cette haute dignité comme le couronnement de sa carrière de magistrat.

Tout en récompensant les services rendus par M. de Gaujal dans la magistrature, les princes de la branche aînée n'oublièrent pas ceux qu'il leur avait rendus pendant l'émigration. En 1814, le comte d'Artois le créa chevalier de Saint-Louis, & en 1817, le roi Louis XVIII lui accorda un brevet honorifique "de chef de bataillon" pour reconnaître son dévouement à l'armée des princes. Le titre héréditaire de baron de Gaujal lui fut accordé par lettres-patentes en 1822 ; & le 8 août 1823, il fut nommé chevalier de la Légion d'honneur.

Une ordonnance royale du 8 août 1829 l'avait appelé à la Cour de Cassation, & le siège de premier président de la Cour de Limoges était donné à M. Bourdeau, Garde des Sceaux, mis en disponibilité par l'avènement du ministère Polignac. M. de Gaujal, qui avait refusé de se prêter à la combinaison quand l'ouverture lui en avait été faite, opposa un refus non moins énergique, après la publication de l'ordonnance royale faite au Moniteur universel, & il resta à Limoges, où son nom servit de drapeau à l'opposition royaliste contre le ministère Polignac.

Élu député par le grand Collège de la Corrèze, le 8 juillet 1830, il serait parvenu au ministère si les royalistes modérés avaient pu renverser le cabinet avant la publication des ordonnances de juillet. Il donna sa démission de député après la session de 1831, & conserva le siège de premier président jusque en 1837.

A cette époque, il consentit à la Cour suprême, & des raisons de convenance personnelle lui firent demander en 1849 de venir terminer sa longue carrière judiciaire dans une Cour qui avait été le témoin de ses débuts. Il remplaçait, en 1849, à Montpellier, M. Viger qu'il avait remplacé en 1837 à la Cour de Cassation. Il prit possession de son siège avec l'assurance & la satisfaction d'un chef de famille qui rentre chez lui après une longue absence. Ayant à parler devant l'élite de la société Montpelliéraine, voici comment il rappela, en fort bons termes, les titres glorieux de sa patrie d'adoption :

"J'aurais un reproche à me faire, Messieurs, si je ne vous témoignais pas combien je me sens heureux d'habiter désormais Montpellier, cette ville si attrayante par son climat & par le charme de sa société ; cette ville célèbre dès les temps les plus reculés par son opulence, son industrie, son commerce, répandu jusqu'au fond de l'Orient, quand l'Orient était encore ignoré de presque toute la France ; cette ville si renommée par ses savantes écoles qui devancèrent toutes les autres, par celle surtout qui lui a valu le nom de la moderne Epidaure ; cette ville fameuse par les hommes illustres qu'on y a vus dans tous les temps, & plus encore par ceux qui, de nos jours, en sont sortis plus nombreux & plus éminents qu'à aucune autre époque."

Il y eut une émotion réelle dans l'auditoire lorsqu'il entendit ce magistrat vénérable, presque octogénaire, évoquer, dans les termes suivants, les souvenirs de ses jeunes années :

"Si ce séjour paraît désirable à l'étranger qui vient le chercher même des extrémités de l'Europe, combien ne doit-il pas être doux, à moi qui ai tant de motifs de le chérir ! C'est dans vos murs que je suis né ; c'est au milieu de vous que, il y a quarante-un ans, j'ai commencé ma carrière ; c'est ici que, jeune encore, j'ai contracté des liens de famille qui ont donné pour aïeul à mes enfants un de vos anciens chefs les plus vénérés (le procureur général baron Fabre). Mes traditions d'origine me reportent jusqu'à cette Cour des Aides qui fut votre devancière dans cette enceinte, & qui dans d'autres temps & sous l'empire d'autres institutions jeta aussi de l'éclat. Ne m'est-il pas permis de rassembler ces souvenirs qui me rattachent plus étroitement à ce sol où se sont écoulées les meilleures années de ma vie, & qui sont de nature à resserrer davantage les liens d'honneur & de solidarité que je viens de contracter avec vous, & qui doivent nous réunir ? C'est pour la seconde fois, Messieurs, que je viens siéger parmi vous, & cette fois c'est pour ne plus vous quitter."

Il ne quitta la Cour, en effet, que par suite de l'application du décret du Ier mars 1852 sur la limite d'âge, le 23 octobre 1852 ; il fut nommé premier président honoraire & se retira à Vias (Hérault), dans une propriété de sa femme ; là il s'occupa de travaux historiques jusqu'au jour où frappé d'une attaque d'apoplexie foudroyante, il mourut, le 16 février 1856, âgé de 85 ans.

 

acte décès baron Gaujal

 

L'année qui précéda sa mort, l'Académie des Inscriptions & belles-lettres, dont il était membre correspondant, avait distingué par une mention honorable, sur quarante concurrents, un mémoire de M. de Gaujal, ayant pour titre : Quels furent les habitants primitifs de la Gaule transalpine ?

La vie judiciaire de M. de Gaujal a été appréciée par M. Mestre, avocat général de la Cour de Montpellier, dans un discours de rentrée du mois de novembre 1856.

En parlant de cette longue carrière qui n'embrasse pas moins de quarante-cinq années de services, M. Mestre rend hommage à l'activité de son intelligence, à sa pénétration, à l'élégante facilité qui semblait apporter au siège comme un écho lointain des triomphes que lui avait promis le parquet, & il ajoute :

"On admirait en lui la vaste érudition dont les trésors embrassaient, comme couronnement, la science du jurisconsulte, & l'ont s'étonnait de la part qu'il avait pu faire à cette étude spéciale dans une vie remplie par tant d'autres travaux."

Cet esprit universel, véritable encyclopédie vivante, avait donné lieu à une épigraphe qui n'était qu'une boutade spirituelle, dont sa mémoire n'aura point à souffrir. On dit un jour de M. de Gaujal, "qu'il savait tout, même un peu de droit". Raillerie injuste, car bien qu'il eût pris ses grades fort tard, il était supérieur à la plupart des magistrats de son temps, & ne fut jamais au-dessous des éminentes fonctions qu'il eut à remplir.

"L'âge, dit encore M. Mestre, avait pu, sans l'affaisser, enrichir de ses dons cette vigoureuse vieillesse, & le temps, en le couronnant de cheveux blancs, semblait n'avoir passé que pour donner à son front la noblesse, à son esprit la maturité. Qui n'a admiré les éclairs de cette intelligence, si mûre dans l'appréciation de l'ensemble, si vive dans la perception des moindres détails ! Qui n'a tour-à-tour subi l'attrait de sa douce philosophie & le charme de cet esprit dont l'élégante délicatesse, empruntant à sa mémoire d'inépuisables souvenirs, prêtait, aux récits d'un passé qui revivait sur ses lèvres, un irrésistible intérêt !"

M. de Gaujal donna aux lettres & aux études historiques tout le temps qui n'était pas consacré à ses fonctions. Jeune encore pendant le séjour qu'il fit à Milhau avant la Révolution, il aida l'abbé Bosc, son ancien maître, dans la recherche des documents sur l'histoire du Rouergue, & le goût de ces travaux lui était resté. Il en fit l'objet de communications intéressantes aux diverses Sociétés savantes qui l'avaient admis dans leur sein.

En 1819, il publia le Tableau historique du Rouergue, suivi de Recherches sur des points d'histoire peu connus, & en 1824 & 1825, deux volumes d'Essais historiques sur le Rouergue. A l'occasion du premier de ces ouvrages, l'Académie des Inscriptions & belles-lettres l'admit au nombre de ses correspondants, & lui décerna pour le second une médaille d'or.

Pendant les loisirs que lui laissaient ses devoirs publics, il s'attacha à donner à ces premières recherches tous les soins dont un esprit laborieux comme le sien était capable. Ce travail, refondu & complété par lui, est devenu pour le département de l'Aveyron un véritable répertoire historique, dans lequel sont spécialement indiqués les effets & les résultats produits dans le Rouergue par les grands évènements de l'Histoire de France. M. de Gaujal légua le manuscrit de cet ouvrage au département de l'Aveyron, & le Conseil général, par sa délibération du 28 août 1857, en décida l'impression terminée en 1864. Il parut sous ce titre : Études historiques sur le Rouergue, Paris, 1863-1864 ; quatre vol. in-8°, précédés d'une notice biographique, par M. Jules Duval. Cette notice a été publiée en outre, dans les Biographies Aveyronnaises, t. I, p. 114-160, Rodez, 1866, in-8°.

Armes : "De gueules à l'épée antique d'or, au chef du même chargé de trois étoiles d'azur".

Histoire de la Cour des Comptes de Montpellier - par Pierre Serres - 1888

 

de Gaujal - écrits

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