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La Maraîchine Normande
15 décembre 2014

JEAN-BAPTISTE-LOUIS LAREVELLIERE, FRERE DU CONVENTIONNEL

Notice biographique sur JEAN-BAPTISTE-LOUIS LAREVELLIERE

Acte naissance Larevellière


Conseiller en la sénéchaussée et siège présidial d'Anjou, à Angers ; depuis 1790, président du Tribunal du district d'Angers, département de Maine-et-Loire, et, depuis le mois de décembre 1792, président du Tribunal criminel de ce département.

Jean-Baptiste-Louis Larevellière naquit le 21 septembre 1751 dans la petite ville de Montaigu (paroisse Saint-Jean-Baptiste), en bas Poitou (aujourd'hui département de la Vendée), sénéchaussée de Fontenay-le-Comte, diocèse de Luçon. Son père, Jean-Baptiste-Joseph, était conseiller du roi et sous-lieutenant-juge des tailles foraines et autres du bas Poitou et du bas Anjou. C'était un bourgeois d'un mérite généralement reconnu, d'une probité exacte, plein d'honneur et de délicatesse, d'une force d'esprit remarquable et d'un jugement très-adroit : son âme était aimante et son caractère énergique. Pendant vingt-cinq à trente ans qu'il fut maire de Montaigu, il conduisit cette commune avec fermeté et justice. Les passages de troupes y étaient fréquents ; dans ces circonstances, il se fit toujours respecter par les militaires, comme il se faisait chérir et honorer par les habitants. Il épousa Marie-Anne Maillocheau, soeur du père de Jean-Baptiste-Joseph Maillocheau, l'un des accusés dans l'affaire des fédéralistes d'Anjou ; c'était une famille bourgeoise qui passait pour une des plus anciennes du pays.


Jean-Baptiste-Louis Larevellière était l'aîné d'un frère, qui avait deux ans de moins que lui, se nommait Louis-Marie Larevellière-Lépeaux, devint député à la Constituante, membre de la Convention et du Directoire exécutif. Ils avaient une soeur plus âgée, Marie-Charlotte, mariée à François-Frédéric Bellouard de la Bougonnière, assesseur au siège de la maréchaussée de Montaigu, fils d'un subdélégué et sénéchal de cette ville.


Les deux Larevellière, élevés d'abord avec leur soeur dans la maison paternelle, y reçurent une éducation physique sévère ; mais jamais aucune autre ne fut plus morale, plus affectueuse et plus douce. Ils firent leurs premières études au collège de Beaupréau et furent envoyés, pour les achever, à celui de l'Oratoire d'Angers, au mois de novembre 1767. Ils y firent connaissance et s'y lièrent d'amitié avec Jean-Baptiste Leclerc de Chalonnes et Urbain Pilastre, tous les deux devenus plus tard membres de la Constituante et de la Convention.

 

LAREVELLIERE LEPEAUX

De bonne heure, Jean-Baptiste-Louis montra une aptitude suivie au travail, un esprit d'ordre et une activité qui ne se sont jamais démentis pendant tout le cours de son existence. Lui et son frère Louis-Marie firent leurs études en droit à l'école d'Angers ; puis ils allèrent se perfectionner à Paris, où ils se firent recevoir l'un et l'autre avocats. Laissons parler Larevellière-Lépeaux lui-même, dans ses mémoires inédits, sur cette période de leur vie :


"J'arrivai à Paris avec la ferme résolution de me mettre en état d'exercer la jurisprudence avec succès ; vains projets ! Il me fut impossible de prendre goût aux affaires du barreau et de m'y livrer. L'étude de la morale, de la politique, l'amour des beaux-arts, remplissaient tous les moments que je pouvais dérober à une occupation, dont, au surplus, je ne recueillais aucun fruit, malgré le désir sincère que j'avais de satisfaire en cela mes parents et de me procurer une existence indépendante, ce qui eût été pour eux un grand soulagement. En voyant nos condisciples qui étudiaient la médecine, je sentis trop tard que cette étude et celle de l'histoire naturelle étaient celles qui m'eussent le mieux convenu. Je pris cependant le parti de redoubler d'efforts, mais le dégoût l'emporta. Un homme s'en aperçut ; celui-là, que cette circonstance de ma vie me défendrait seule de jamais oublier, c'était mon généreux frère, qui sera l'objet de mes éternels regrets, comme il est celui de ma plus profonde reconnaissance. Il vît avec peine que je perdais mon temps à paperasser sans en tirer aucune instruction. Il se chargea seul de l'étude de M. Potel, procureur au parlement de Paris, où nous avions été admis comme clercs, et, par son travail soutenu de jour et de nuit, il gagna nos deux pensions et des appointements assez forts qui servirent à notre entretien, ce qui fut un grand allègement pour nos parents, qui n'avaient que peu de fortune. Non content de cela, il fournissait à mon instruction et à mes plaisirs : il me forçait de suivre mon penchant pour d'autres études qui m'étaient favorites et d'abandonner un travail stérile, afin que je me livrasse sans réserve à ces dernières, pour perfectionner ma raison et polir mon esprit. Il me mettait souvent, malgré moi, l'argent à la poche, pour aller à quelque bon théâtre, et l'on pense bien que cet amusement était fort de mon goût. Pourrais-je, au surplus, exprimer toute la sollicitude de sa part dont j'était l'objet ? Frère unique en bonté, en générosité, en délicatesse, si jamais je venais à me consoler de sa perte, je serais le plus vil et le plus ingrat de tous les hommes !"


Le coloris et la sincérité de ce récit ne peuvent laisser dans les esprits aucun doute sur les nobles sentiments de Larevellière aîné. Il était devenu l'ami de M. Potel, le directeur des travaux de son étude, et pendant toute sa vie, il lui donna des preuves de son estime et de son attachement.


Enfin, le temps du retour à Angers étant arrivé, il vint s'y fixer, et plus tard, lorsque la guerre civile eut rendu le séjour de Montaigu inquiétant, il y appela sa mère et sa soeur, toutes les deux veuves depuis plusieurs années. L'une et l'autre étaient restées attachées à leurs anciens principes catholiques et royalistes ; aussi leur maison devint-elle, au péril de leur vie, le refuge d'un grand nombre de prêtres et de nobles contre lesquels sévissait alors la tempête révolutionnaire. Larevellière ne tarda pas à acheter une charge au présidial d'Angers. La régularité de sa conduite, son amour pour le travail, sa bonne tenue et les agréments de sa belle et noble physionomie l'avaient fait rechercher de la bourgeoisie du Tertre Saint-Laurent, où habitait Mme Du Bignon, soeur de M. Pilastre, aimable femme, qui aimait le monde et recevait chez elle une grande partie de la société d'Angers. Il y fit la connaissance de Victoire-Marie Berger, la plus jeune des enfants de François Berger, de son vivant docteur-régent de la Faculté de médecine de l'Université de cette ville, et de Marthe Coullion. Il y avait beaucoup d'aisance dans cette famille, et quoique Larevellière eût très-peu de fortune, il fut le préféré dans les nombreuses demandes en mariage qui furent faites de cette charmante personne, d'un caractère plein de bonté et de douceur. Lorsqu'il l'épousa, il avait trente-deux ans, en ayant onze de plus qu'elle. Désormais fixé, il se livra tout entier aux soins de son intérieur et à son penchant entraînant pour le travail. Chargé de presque toutes les affaires du présidial, il y acquit une grande influence et une considération méritée, basées l'une et l'autre sur l'estime qu'on lui portait.


Il avait eu, en mariage, de son côté, un petit vignoble, situé au village de Chaumes, dans la commune de Rochefort-sur-Loire, où M. de Barrin, comte de la Galissonnière, gouverneur de l'Anjou, possédait des pressoirs et une grande étendue de vignes, dont le produit en vin blanc passait pour un des meilleurs de la province. Comme voisin de Larevellière, il avait pu apprécier ses qualités ; il le nomma sénéchal des hautes justices, fiefs et seigneuries dépendant de la terre et marquisat de la Guerche, paroisse de Saint-André-de-Luigné, en Anjou, par ordonnance du 9 novembre 1776.

 

Le Fléchet Avrillé


Larevellière avait eu de sa femme une propriété pour laquelle il avait une grande prédilection ; c'était la terre du Fléchet, possédée depuis longtemps par la famille Berger, dépendant du fief de la Désière, situé commune d'Avrillé ; les bénédictins de Saint-Nicolas en étaient seigneurs et exerçaient droit de suzeraineté sur ses propriétaires. Le Fléchet n'est qu'à deux lieues d'Angers ; aussitôt que le magistrat avait quelques moments de libres, il venait les passer dans cette campagne, près de sa femme et de ses enfants, non pour y rester inactif, cela lui était impossible, mais pour s'y délasser par des travaux horticoles et ruraux des labeurs du conseiller. Il était bon marcheur, et de ces courses, loin de le fatiguer, procuraient un exercice favorable à son tempérament sanguin, que l'assiduité au travail troublait quelquefois. Il y fit planter un beau grand potager et plusieurs avenues. D'une sobriété exemplaire, quelques sardines ou un coing cuit sous la cendre suffisaient, au besoin, à ses repas improvisés, auxquels il ne songeait guère. Esprit sérieux, il était sans cesse occupé des affaires dont les rapports lui étaient confiés ; sitôt qu'il était forcé à un repos absolu, il s'endormait. Cette disposition naturelle aux hommes très-actifs, lui causa quelquefois de singulières distractions. Un jour ayant assisté à une cérémonie funèbre, il alla faire sa visite, après l'office, aux parents du défunt. Il était d'usage alors, dans ce cas, de fermer les volets de l'appartement où se faisaient ces visites et d'y garder un profond silence. Dans cette situation, Larevellière ne tarda pas à s'endormir, et lorsque la file des visiteurs fut écoulée, les recevants se trouvèrent fort embarrassés de la présence du dormeur. Vainement ils s'agitèrent sur leurs sièges, éternuèrent, se mouchèrent, toussèrent bruyamment : tout fut inutile ; enfin ils prirent le parti de se retirer. Au bout d'un certain temps, Larevellière se réveilla, tout surpris de se trouver dans l'obscurité ; puis, se rappelant où il était, il s'en alla tout honteux de s'être ainsi oublié.

 

Le Fléchet 3


Quoiqu'il parlât avec facilité, il plaida rarement pendant qu'il fut simple avocat au parlement ; mais les consultations de son cabinet arrêtèrent souvent de fâcheux débats de famille et rendirent de véritables services à ses clients et à la société, en évitant le scandale public et en maintenant la concorde, ou la ramenant entre les parties. Il n'aimait pas les procès ; il regardait comme une calamité ces ferments de discorde et de haine se perpétuant quelquefois d'âge en âge. Les malheureux étaient surtout l'objet de sa constante sollicitude ; ses bons avis ne leur faisaient jamais défaut, et toujours, dans ce cas, ils étaient donnés gratuitement. Les ouvriers des carrières avaient particulièrement en lui une confiance sans bornes et une vénération qu'il méritait. Ayant un jour rendu de grands services et sauvé l'honneur à l'un d'eux, qui était né avec une véritable vocation d'artiste, celui-ci voyant le désintéressement de son conseil, imagina de prendre une pierre d'ardoise de choix et d'en faire un cadran régulier et sculpté avec soin, qu'il lui envoya comme souvenir de reconnaissance de ses bons offices. Rien ne faisait plus de plaisir à Larevellière que d'aller prendre l'heure à ce méridien, qu'il avait fait placer au rond-point des allées du parterre, entouré de douves, du Fléchet, où il existe encore, quoiqu'il ne soit plus à la même place. C'est ainsi qu'il s'attira l'estime et l'affection de tous ses concitoyens. Il a fallu une bien grande perversité, ou une aberration d'esprit inexplicable, pour envoyer à la mort un tel homme, comme ennemi du peuple et du pays.


On savait si bien au présidial, combien Larevellière était infatigable au travail, qu'on ne se faisait aucun scrupule de lui laisser le soin de presque toutes les affaires, qu'il traitait d'ailleurs en magistrat instruit dans la législation et en homme de sens et de jugement. Il participa, avec son frère Larevellière-Lépeaux et le docteur Tessier du Closeau au projet de cahier qui fut imprimé et servit de base à celui qu'adopta l'Assemblée bailliagère d'Angers, composée des électeurs choisis par les commune en 89.


En 1790, il devint président du district d'Angers, et, au mois de décembre 92, président au criminel du département de Maine et Loire. Il ne tarda pas à être appelé au Conseil général ; il y devint l'ami et obtint toute la confiance de son président M. de Dieusie, homme d'un noble caractère et d'une haute capacité. Il fut chargé par le voeu de ses collègues de plusieurs missions délicates à Paris, en Anjou, dans la Sarthe et ailleurs, pendant les temps difficiles de 1793. Enfin il fut l'un des rédacteurs et des signataires de l'adresse énergique et courageuse du 31 mai de la même année, envoyée à la partie modérée de la Convention, et qui devint, plus tard, le prétexte de l'arrestation et de la condamnation des honorables Angevins, accusés de fédéralisme.

Larevellière avait la candeur d'un homme de bien n'ayant rien à se reprocher. Lorsque la Montagne l'eut emporté sur les Girondins et eût immolé leurs plus illustres orateurs, tous ses amis lui conseillaient de fuir, ou de se cacher pendant quelque temps. Honteux de ces moyens qui répugnaient à sa conscience pure, il s'y refusa constamment et finit par se constituer prisonnier à la citadelle d'Angers, après sa destitution. L'état de situation de ses affaires, qu'il fit ce jour même, 15 octobre 1793, et que nous avons sous les yeux, prouve par sa netteté, sa précision, la fermeté de l'écriture, la tranquillité de sa belle âme et sa confiance entière dans son innocence. Au reste, ce fut bien plus de son frère, Larevellière-Lépeaux, l'honnête et probe républicain, qui avait fait tant d'efforts pour arrêter l'anarchie, que les atroces terroristes se vengèrent, en envoyant à l'échafaud le magistrat intègre, patriote modéré de 89, que de lui-même qui n'avait joué qu'un rôle secondaire.

[Accusé de fédéralisme, J.-B. Larevellière, tout comme Brevet de Beauséjour, le comte de Dieusie et Tessié-Ducloseau, fut incarcéré à Angers et traduit au tribunal révolutionnaire de Paris. Ils furent condamnés ensemble le 25 germinal an II (14 avril 1794) et exécutés le lendemain (Monit. 4 floréal an II) (Revue de l'Anjou - Tome 13 - 1886)]

Mme Larevellière, frappée dans sa plus tendre affection, ne survécut à son mari que quinze mois, emportée parla douleur de cette perte irréparable. Elle laissa trois fils mineurs : Jean-Baptiste, l'aîné, mort à Paris, étudiant en droit, le 7 juillet 1808 ; Anselme, le plus jeune, qui succomba, après la bataille de Leipzick, dans les Gardes d'honneur ; enfin, Victorin, ancien député, ancien membre du Conseil général de Maine et Loire, du Conseil académique d'Angers et maire pendant près de vingt ans de la commune d'Avrillé. Retiré des affaires, il habite le Fléchet.

Les Fédéralistes de Maine-et-Loire en 1793 - par V. Larevellière - 1864

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