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La Maraîchine Normande
21 novembre 2014

1792 - CONDÉ-SUR-SARTHE (61) - M. MARTIN-FRANCOIS-ALEXIS LOUBLIER, PRETRE

M. MARTIN-FRANCOIS-ALEXIS LOUBLIER

 

condé-sur-sarthe

 

 

M. Martin-François-Alexis Loublier naquit, en 1733 (17 octobre), dans l'ancienne paroisse d'O, près Mortrée. Il appartenait à une famille aisée et surtout profondément chrétienne, qui lui fit donner une excellente éducation.
Appelé par Dieu à l'état ecclésiastique, il devint un des prêtres les plus distingués du diocèse par sa science et sa vertu.

 

acte naissance martin Loublier


Après avoir exercé pendant huit ans les fonctions de professeur au collège d'Alençon, il fut présenté à la cure de Condé-sur-Sarthe. Cette nomination fut agréée par Mgr Néel de Christot, qui délivra à M. Loublier des lettres de pouvoirs, le 12 avril 1766. Ce fut alors que le saint prêtre donna un libre cours à son zèle pour la gloire de Dieu. Parmi ses titres à la reconnaissance des fidèles de sa paroisse, on cite les nombreuses importantes réparations qu'il exécuta dans son église. Il fit rebâtir la tour, placer l'autel en marbre qu'on voit encore dans l'église, et entreprendre les décorations de la voûte. Il donnait littéralement tout ce qu'il possédait, et, quand il ne lui restait plus rien, il allait tendre la main pour ses pauvres. Plus d'une fois il lui arriva, lorsqu'il craignait que les pauvres n'osassent lui faire connaître leurs misères, d'aller visiter leurs meubles, pour s'assurer que ses enfants adoptifs ne manquaient pas du nécessaire. Sa charité pour les malades n'était pas moins grande ; il les visitait fréquemment, les consolait avec une tendresse toute céleste, leur apprenait à sanctifier leurs souffrances et les préparait à la mort par la réception fréquente de la sainte communion. Qui pourrait parler dignement de son zèle pour la conversion des pécheurs, de son amour pour la prière et de son dévouement aux intérêts de Dieu ?


Le respect, que les vertus et les talents de M. l'abbé Loublier inspiraient à ses confrères, le fit choisir, en 1789, par le clergé du bailliage d'Alençon pour être l'un des rédacteurs du Cahier définitif de son ordre. Comme ce Cahier est la fidèle expression des sentiments politiques du clergé à cette époque, nous voudrions mettre sous les yeux du lecteur ce monument historique (il a été publié par M. Léon de la Sicotière dans l'Annuaire de l'Orne pour 1867). Mais son étendue nous empêche de le rapporter dans cette notice. Tout ce que nous pouvons dire ici, c'est qu'il est impossible de le lire sans rendre hommage à l'esprit de conciliation, de paix et de tendre charité qui règne dans toutes les pages de cet écrit. L'auteur principal, M. Loublier, y a laissé comme la marque ineffaçable de son respect pour le souverain légitime, de son dévouement aux véritables intérêts du peuple et de son attachement à la sainte Eglise.


Il donna une nouvelle preuve de ce dévouement à l'Église romaine, lorsque l'Assemblée constituante voulut exiger de tous les ecclésiastiques, employés dans le ministère, le serment d'observer ses décrets impies. Comme on connaissait les talents de M. Loublier et que l'éclat de de son mérite eût rejailli sur le clergé constitutionnel, on essaya de le gagner par l'ambition ; on lui offrit de le faire nommer évêque de l'Orne. Mais il rejeta cette proposition avec mépris, et déclara que, moyennant la grâce de Dieu, rien ne pourrait lui faire oublier l'obéissance due au chef de l'Église. Plusieurs ecclésiastiques ayant refusé après lui cet office sacrilège, ce fut alors que, pour ne pas s'exposer à d'autres hontes, on proposa l'évêché de l'Orne à l'abbé Fessier, curé de Bérus, au diocèse du Mans, qui s'empressa d'accepter le triste honneur de conduire un peuple égaré dans les sentiers du schisme et de l'hérésie.


Ce serviteur infidèle avait auparavant quelques relations avec M. Loublier, qui le recevait de temps en temps à sa table comme son voisin et son compatriote. Mais à partir de cette honteuse apostasie, le saint prêtre ne voulut plus avoir de rapport avec lui. Cependant l'évêque intrus mit tout en oeuvre pour l'attirer dans les rangs de son clergé, et, un jour qu'il le rencontra dans une des rues d'Alençon, il s'avança vers lui en souriant et en lui tendant la main. M. Loublier le regarda un instant avec pitié, leva les mains au ciel, et s'éloigna en disant : "Le malheureux, qui a trahi son Dieu !" L"évêque intrus resta comme foudroyé.


M. Loublier exerça encore quelque temps le ministère dans sa paroisse ; mais, voyant que les idées révolutionnaires y faisaient de rapides progrès et que sa vie était même en danger, il sortit en pleurant de son presbytère et se rendit à Alençon par des chemins détournés. Ce jour-là, qui était un dimanche, le bon pasteur avait encore dit la grand'messe pour son troupeau. Mais, pendant son instruction, on l'avait fréquemment interrompu en criant : "Assez, assez, à bas l'aristocrate !" En descendant de la chaire, il dit à ses plus ardents interrupteurs : "Vous serez bientôt fatigués de voir ce que vous désirez. Que Dieu ait pitié de vous alors et de vos enfants !" Ce furent les dernières paroles qu'il adressa à son troupeau.


Il demeura quelque temps caché dans la ville d'Alençon, puis se rendit à Paris, où ses amis lui promettaient plus de sûreté. S'il n'y trouva pas un abri contre la tempête révolutionnaire, il y trouva, ce qui vaut infiniment mieux aux yeux de la foi, la porte du ciel et la couronne du martyre. En attendant le jour heureux où il devait répandre son sang pour la foi, le bon pasteur s'occupa à composer plusieurs ouvrages pour la défense de la religion catholique.


M. Loublier, arrêté le 31 août 1792, par les ennemis de la religion, il fut conduit à travers les huées de la populace au Comité de la Section dite des Sans-culottes, qui siégeait dans l'église de Saint-Firmin.
- Quel est ton nom, lui dit le président du Comité ?
- Je m'appelle Martin-François-Alexis Loublier.
- Ton âge ?
- Cinquante-neuf ans.
- Ta profession ?
- Prêtre catholique et curé de Condé-sur-Sarthe, au diocèse de Séez.
- As-tu prêté le serment exigé par les décrets de l'Assemblée nationale ?
- Non.
- Veux-tu le prêter maintenant ? Il en est temps encore.
- Je ne puis renoncer à la foi catholique."


M. Loublier fut alors, sur l'ordre du Président du Comité réuni à la troupe des confesseurs de la foi, incarcérés au Séminaire de Saint-Firmin et condamnés secrètement à mort par le Comité. On rapporte qu'un de ses amis, instruit de cette injuste sentence, alla trouver les membres du Comité et les supplia de sauver la vie de ce bon et vénérable prêtre, qui s'était toujours montré le père des pauvres.
"Qu'il prête serment, répondirent les persécuteurs, et il sera sauvé".


- Ne consultant que son affection, cet homme courut aussitôt à la prison de M. Loublier, et le conjura, en versant des larmes, de se conformer à la loi révolutionnaire. "Faites ce serment pour sauver votre vie, lui disait-il, vous le rétracterez ensuite, et vous irez chercher un asile sur une terre plus hospitalière".


- "Mon ami, lui répondit M. Loublier, Dieu me défend de prêter ce serment ; je ne le prêterai pas, dussé-je mourir. Si je meurs, n'y a-t-il pas au ciel un asile encore plus sûr que celui dont vous me parlez ? Je désire être délivré le plus tôt possible des liens de cette vie malheureuse pour régner avec Jésus-Christ".


Le 3 septembre 1792, à sept heures du matin, les désirs du saint prêtre étaient accomplis. Enveloppé, dans le massacre général des prêtres enfermés à Saint-Firmin, M. Loublier avait passé de cette vie malheureuse aux joies de la patrie céleste.

Les Martyrs de la Révolution dans le diocèse de Séez
par M. l'abbé J.-B.N. Blin
Tome 1 - 1876

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