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La Maraîchine Normande
13 novembre 2014

MIRANDE (32) - 1835 - QUATRE VICTIMES D'UNE LOUVE

MIRANDE - QUATRE VICTIMES D'UNE LOUVE
(Correspondance particulière de la Gazette des Tribunaux)

31 juillet 1835

 

MIRANDE

 

La ville de Mirande, d'ordinaire si tranquille, vient d'être plongée dans la douleur et la consternation par un affreux évènement.


Le 30 juillet, quelques chasseurs s'étaient réunis à l'ancienne abbaye de Berdoues, pour fêter joyeusement le retour de la chasse. Sur la fin du dîner, et déjà la tête un peu échauffée par les fumées du vin, s'étant aperçus que Prosper de Cours n'était pas parmi eux, ils résolurent à l'unanimité de se rendre immédiatement chez lui, à l'effet d'y tout mettre sens dessus-dessous. Les voilà en conséquence partis pour le château de Pousan. Comme ils n'étaient nullement pressés, et que d'ailleurs peu leur importait le chemin, ils chevauchaient au hasard à travers la forêt de Berdoues, attentifs aux aventures étonnantes, ainsi qu'aux exploits de chasse que racontait, avec force mensonges, Dutour (Ferdinand), lorsque soudain ils entendent des cris effrayans. Ils étaient parvenus à la lisière du bois ; ils se dirigent en toute hâte vers l'endroit d'où leur semblaient venir les cris, et là s'offre à leurs regards le spectacle le plus épouvantable qui puisse se concevoir. Mlle Amélie de Rieutort, dévorée par une louve, et son petit frère monté sur un arbre, où il se lamentait !

 

Loup et femme


Aussitôt Dutour se précipite sur la louve, et lui tire un coup de fusil à bout portant ; mais malheureusement il ne fait que la blesser. Celle-ci furieuse se retourne vers son nouvel assaillant, et lui fait au bras une cruelle morsure. Ferdinand a une force de corps prodigieuse. Il la prend entre ses bras et l'étreint avec tant de vigueur qu'il la jette à terre presque mourante ; et là, la saisissant à la gorge et la broyant sous ses doigts de fer, il a bientôt arraché le peu de vie qui lui restait.


La lutte fut sitôt terminée que les autres chasseurs ne purent être d'aucun secours à leur camarade qui, outre sa blessure au bras, a reçu encore quelques légères écorchures. Ils coururent à Mlle de Rieutort, mais il n'était plus temps : sa figure et son sein étaient dévorés ... C'était hideux à voir !


L'habitation de Mlle de Rieutort se trouvant près de là, ils la portèrent chez elle, et après l'avoir remise entre les mains de ses domestiques, ils se retirèrent ; mais ce n'était que le commencement des malheurs qui devaient accabler quatre familles. Cours vient de se brûler la cervelle. Il aimait depuis long-temps Mlle Amélie, dont il était lui-même tendrement aimé. Leur mariage devait être célébré dans les premiers jours de septembre. Pauvre Prosper ! ... Il n'a pas résister à sa douleur.


Quant à Dutour, son sort est épouvantable ; souffrant beaucoup de sa blessure, il se mit au lit dès son arrivée à Mirande, avec une fièvre très forte. Le lendemain matin, deux de ses amis, MM. Aubin et Duclos, étant allés le voir avec le docteur Siame ; celui-ci lui demande en entrant, comment il se trouvait. Pour toute réponse, Ferdinand les regarde. Duclos alors lui réitérant la même question : "Ah ! dit-il, tu me demandes comment je me porte," et d'un bond sautant hors de son lit, il lui applique un si vigoureux coup de poing derr'ière la tête, qui l'étend raide mort. Se précipitant alors sur lui, il le déchire avec les dents, et se met à sucer à sang, en faisant entendre pendant ce temps là un grognement semblable à celui d'un pourceau. Revenus enfin de la stupeur où les avait plongés cet acte de démence, M. Aubian et le docteur Siame prennent la fuite en criant au secours. Notre Han d'Islande les poursuit alors armé d'une barre de fer qu'il avait prise dans la cheminée. Qu'on juge de la frayeur des habitans en voyant sortir d'une maison deux hommes effarés, que poursuivait un autre homme en chemise, brandissant une barre de fer, poussant des hurlemens, et ayant ses cheveux tout hérissés. On est enfin parvenu à se rendre maître de ce fou furieux, en le liant avec des cordes. Le sous-préfet, M. Jarry, et le lieutenant de gendarmerie ont manqué d'être assommés. On doit les plus grands éloges à la conduite du maire et de l'adjoint, M. Grèce. Le malheureux Ferdinand va être conduit à la maison de force, à Auch.

La Gazette des Tribunaux
Mercredi 5 août 1835
N° 3108

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