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La Maraîchine Normande
25 juillet 2014

SAINT-AUBIN-CELLOVILLE (76) - UN SANATORIUM, AU XVIIIe SIECLE, A CELLOVILLE - L'ABBÉ DELARUE

LE PLATEAU DE BOOS


UN SANATORIUM, AU XVIIIe SIECLE, A CELLOVILLE

On désigne généralement sous la dénomination de Plateau de Boos le vaste quadrilatère limité à l'Est par la rivière d'Andelle, à l'Ouest et au Sud par la Seine avec le cap dit côte Sainte-Catherine ; au Nord par l'Aubette et les vallons de Letteguives.
Dans le périmètre de ce polygone se rencontrent des altitudes dépassant 160 m. Aussi, le plateau de Boos fut-il choisi, dès les temps reculés, comme un séjour favorable aux malades. Les religieuses de Saint-Amand de Rouen y avaient établi leur maison des champs, dans laquelle Anne de Souvré est venue, au XVIe siècle, demander la santé : C'était déjà "la cure d'air" le "Sanatorium".

 

Blason Saint-Aubin-CellovilleD'autres témoignages attestent encore la faveur dont jouissaient, auprès des malades, les stations des altitudes élevées. Une sentence du bailliage de Rouen, du 9 juin 1690, prouve que dès cette époque, il existait à Saint-Aubin-la-Campagne (aujourd'hui Saint-Aubin-Celloville) une maison où on traitait les aliénés. Ce fut jusqu'à la création des asiles départementaux une spécialité de la commune de Saint-Aubin, qui était alors désignée, par le peuple, sous le nom de Saint-Aubin-les-Fous. On montre encore, dans plusieurs maisons de ce village, les anneaux fixés dans les murailles et auxquels les malheureux déments étaient attachés. Le Dr Charcot, dans son Etude sur la Salpétrière, a décrit les souffrances du traitement barbare imposé aux pauvres aliénés, et M. Ch. de Beaurepaire, dans le Bulletin de la société de l'Histoire de Normandie, a mentionné la plainte des habitants de Saint-Aubin qui réclamaient, en 1780, contre le peu de surveillance exercé sur les malheureux pensionnaires de leur commune.


Cependant, si Saint-Aubin était une station d'aliénés, CELLOVILLE, village voisin, était le lieu où de nombreux malades venaient chercher la santé. Ici, ce ne sont plus des mercenaires qui soignent les infirmes et tous ceux qui souffrent : C'est un vénérable prêtre, l'abbé Nicolas Delarue, curé de la paroisse. Cet ecclésiastique voit accourir à sa consultation et de tous les points de la Normandie, on pourrait dire du monde, les malades qu'Esculape est impuissant à guérir.


M. Théodore Lebreton a d'ailleurs donné dans sa biographie normande (p. 391) une courte notice sur le savant curé : "Nicolas Delarue, y est-il écrit, est né à Rouen, vers la fin du XVIIe siècle, d'un trésorier de la paroisse de Saint-Vivien. Il avait étudié dans sa jeunesse la botanique, la pharmacie et la médecine, sciences qui plus tard, ne restèrent pas pour lui sans utilité. Entré dans le sacerdoce et pourvu de la cure de Celloville, cet ecclésiastique fut visité par un grand nombre de malades riches ou pauvres, venus de tous les points de la province pour le consulter.
Devenu célèbre par les cures qu'il faisait et surtout par celles qui lui étaient attribuées, l'abbé Delarue vit se continuer jusqu'aux derniers moments de son existence la réputation qu'il s'était acquise comme médecin. Il mourut dans un âge avancé, le 13 septembre 1780."
A. Pasquier et Mme Oursel, dans leurs biographies normandes, sont moins explicites que T. Lebreton, mais la célébrité dont a joui l'abbé Delarue peut encore être appuyée par l'inscription qui accompagne son portrait gravé par Le Carpentier.

 

Celloville l'abbé Delarue



D'ailleurs, une délibération de l'Assemblée municipale de Celloville, du 6 juillet 1788, et souvent reproduite, mentionne en ces termes la célébrité de l'abbé Delarue :
"Pendant quarante ans qu'a régné M. Delarue, curé ..., chacun se trouvait occupé et soulagé par le grand nombre de gens de première distinction qu'attirait l'art de médecine qu'exerçait si libéralement le respectable pasteur."


La réputation de l'abbé Delarue lui survécut dans son élève l'abbé Soury (Gillebert Soury, ordonné prêtre en 1764, d'abord chapelain de Saint-Adrien, puis des sieurs de Rouville à Alizay et curé de la paroisse Saint-Antoine d'Alizay. Il mourut à Celloville, le 16 janvier 1818.), enfant de Celloville, dont le mausolée se voit encore dans le petit cimetière de l'humble village. Cependant, l'art de l'abbé Gillebert Soury fut loin d'égaler celui de son maître. De nos jours, son nom, inscrit sur les enveloppes d'une tisane devenue une panacée universelle, l'ont rendu populaire et remplacé dans la mémoire des hommes celui du savant que fut l'abbé Delarue.
Quoi qu'il en soit de ces guérisseurs, abbés Delarue ou Soury, la mort qu'ils combattirent, souvent victorieusement, ne fut pas sans leur disputer et arracher des clients. La nécrologie qui va suivre, dressée à l'aide d'un travail de M. J.-B. Mulot, qui fut maire de Celloville, montrera jusqu'à l'évidence de quelle faveur furent entourés les curés-médecins, et qu'elles étaient les origines de leurs malades.

 

l'abbé Soury



1° SÉPULTURES DANS L'ÉGLISE

Le pavage de l'église a été refait vers 1855. De nombreuses dalles tumulaires ont été brisées ou ont disparu dans cette transformation moderne. Cependant, dans le choeur, et quoique les inscriptions en soient très effacées, on peut encore citer les tombes de :


1° Messire Charles Potiers, écuyer, sieur de Pelletot, lieutenant d'infanterie dans le régiment de Ponthieu, âgé de seize ans. Inhumé le 23 février 1748.
2° Corps de noble dame Marie-Anne-Françoise Le Dévé, femme de J.-B. Thoret, écuyer, seigneur de Saint-Martin-aux-Arbres et autres lieux, âgée de cinquante-deux ans. Inhumation du 30 août 1750.
3° Corps de Mme Louise-Ursule-Blanche Boilay, âgée de dix-neuf ans, femme de maître Pierre-Jacques-Nicolas Bourdon, avocat en la juridiction d'Arques. Inhumation du 11 juin 1776.
Dans le choeur repose également le corps d'un autre personnage, mais la pierre qui le recouvrait a disparu. Néanmoins, nous pouvons inscrire le nom de : Messire Michel-Alexandre Le Maître, conseiller du roi, président et lieutenant civil et criminel du bailliage, subdélégué de M. l'Intendant de Rouen, âgé de cinquante-quatre ans. Inhumé le 23 mai 1749.
Cette sépulture qui a été relevée sur les registres de la paroisse, porte à quatre le nombre des inhumations faites dans le choeur de l'église de Celloville pendant le XVIIIe siècle.
Les sépultures creusées dans l'église même sont beaucoup plus nombreuses. Elles peuvent être évaluées à neuf environ dont voici la nomenclature :
18 avril 1750 - Pierre-Nicolas Decoularé de la Fontaine, âgé de dix-neuf ans, né à Rouen.
30 août 1750 - Jean-Jacques de Clay, de Saint-Pierre-d'Aubeuf-la-Campagne.
1er décembre 1763 - Très-haut et très-puissant seigneur monseigneur Gui-René de Montmorency-Laval, âgé de treize ans et demi, fils de feu T.-H. et T.-P. seigneur monseigneur de Montmorency-Laval et de T.-H. et T.-P. dame Elisabeth de Maupéou, dame de compagnie de Madame.
25 avril 1764 - Messire Antoine-Pierre-Prosper Godart de Belbeuf, fils de messire Jean-Pierre-Prosper Godart, marquis de Belbeuf et dame Marie-Marguerite-Françoise Lepetit d'Avesne.
15 octobre 1765 - Messire Louis-Adrien Lucas de Sainte-Honorine, fils de messire Lucas de Sainte-Honorine, seigneur et patron de Fléville et autres lieux et de noble dame Marie-Françoise-Hortense Bons.
19 février 1770 - Jacques Poris, de Londres (Angleterre), âgé de treize ans.
21 mai 1774 - Charles-Marie Protais Le Masson de Prenois, âgé de neuf ans, originaire de Paris.
21 décembre 1774 - Mme Angélique-Constance Aubin, femme de M. François Blondel, receveur de la vicomté de Dieppe.
17 juin 1751 - Louise-Marguerite Corbin, cette sépulture fût creusée auprès de l'autel de Saint-Jean.

2° CIMETIERE

Dans le cimetière, on peut relever, au cours du XVIIIe siècle sept sépultures de personnages non originaires de Celloville. Ce sont celles de :


9 décembre 1740 - Noble et discrète personne maître Gabriel Le Fay de Matillon, prêtre, curé de la paroisse.
3 février 1753 - Marie-Adrienne-Elisabeth de Bethfort, fille de Jacques de Bethfort, officier-lieutenant dans la Capitainerie du Tréport.
25 mars 1753 - Damoiselle Françoise du Flaquet, fille de feu messire Robert-Alphonse du Flaquet, écuyer, sieur du Boz, et de noble dame Marguerite de l'Epinay, âgée de vingt-six ans.
15 septembre 1753 - Noble dame Catherine Baron, femme de messire François-René de Thercelin, écuyer, seigneur de Jorovay et autres lieux.
4 octobre 1772 - Messire Antoine Chappe, âgé de dix ans, fils de messire Antoine Chappe, seigneur d'Auteroche et de dame Marie-Renée de Verney.
26 décembre 1760 - Jean-Baptiste Rintot de Florimont, de Saint-Sulpice à Paris.
4 avril 1780 - Louis-Eléonor Vasse, né en la paroisse de Sainte-Rose-de-Laogane, Ile Saint-Dominique, âgée de neuf ans.

Pour clore cette liste, peut-être faudrait-il y ajouter les noms des abbés Nicolas Delarue (13 septembre 1780) et Guilbert Soury (16 janvier 1818). Cependant leurs noms sont inutiles pour aider à la démonstration de l'existence d'un sanatorium à Celloville, sur le plateau de Boos, pendant le XVIIIe siècle. Ils en ont été les créateurs et les artisans. La nécrologie aide plutôt à définir les origines d'une clientèle qui, si elle faisait appel à leur science, ne demandait pas un traitement gratuit.

LÉON DE VESLY
La Normandie Littéraire
1906 (A21, T13)

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