Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Maraîchine Normande
17 juillet 2014

PONTS-ET-MARAIS (76) - L'ABBÉ PLAINE, VICTIME OUBLIÉE DE LA RÉVOLUTION

UNE VICTIME OUBLIÉE DE LA RÉVOLUTION DANS LA SEINE-INFÉRIEURE
L'ABBÉ PLAINE, CURÉ DE PONTS-ET-MARAIS (CANTON D'EU)

 

Ponts-et-Marais



L'ancienne paroisse de Pont, au comté d'Eu, devenue Ponts-et-Marais, commune du canton d'Eu, district de Dieppe, avait eu pour patron collateur le duc de Penthièvre. En 1789, le desservant de la paroisse était l'abbé Carlu, qui, avec les curés du plus grand nombre des paroisses du comté, se réunit à Abbeville, à l'Assemblée de l'ordre du clergé de la Sénéchaussée du Ponthieu, où il fut représenté par l'abbé Simon, curé de Saint-Martin-le-Gaillard. Ponts, Marais et Haraucourt, ne composant qu'une seule communauté, envoyèrent leur cahier de doléances à l'assemblée du Tiers-État de la même sénéchaussée, par deux délégués : Jean-Charles Du Caurroy de la Croix, avocat au Parlement de Paris, lieutenant du bailliage d'Eu, et Jean-Baptiste Sabot, laboureur à Haraucourt.


L'abbé Carlu s'étant refusé à prêter le serment exigé des ecclésiastiques fonctionnaires, fut remplacé, au mois d'octobre 1791, par l'abbé François Plaine qui, antérieurement, avait été professeur dans un collège, vraisemblablement celui d'Eu, à la tête duquel était l'abbé Auber, un rouennais, dont il parle dans une de ses lettres.

 

acte de naissance de l'abbé Plaine

 


François Plaine était originaire de Dol-de-Bretagne, où il est né le 10 novembre 1744, de père et mère mariés à Saint-Jean-de-Méen, évêché de Saint-Malo.


Il avait su se concilier les sympathies des gens du pays, si l'on en juge d'après une sorte de protection que lui accordèrent les autorités de Pont et d'Eu lorsqu'il fut en butte aux poursuites que n'étaient point parvenues à empêcher de légères concessions aux exigences de la législation nouvelle concernant les ecclésiastiques.


Cependant, les officiers municipaux de Pont ne tardèrent pas à terroriser. Ils sont cités, avec ceux d'Offranville et de Criel, pour s'être permis, à la fin de mai 1793, de parcourir leur "paroisse" pour arracher, raser et faire raser les cheveux et la barbe de tous ceux qu'il leur avait plu de désigner comme aristocrates.


Le 22 mars 1793, devant la municipalité d'Eu, l'abbé Plaine prêta le serment des fonctionnaires publics réglé par le décret du 15 août 1792. Il avait donc juré d'être fidèle à la Nation, de maintenir de tout son pouvoir la liberté et l'égalité, ou de mourir à son poste. Mais il s'abstint du serment auquel les ecclésiastiques restés en fonctions étaient astreints par les décrets concernant la constitution civile du clergé.


La cessation de ses fonctions ne devait pas lui donner la sécurité, ni la liberté. Déjà un décret du 23 juillet 1791, avait chargé le directoire du département de la Seine-Inférieure d'indiquer provisoirement les lieux convenables pour la résidence des fonctionnaires ecclésiastiques n'ayant pas prêté serment. La Convention édictait et organisait contre ceux-ci la peine de la déportation, dans d'autres décrets des 25 septembre 1791, 26 août 1792, 10 mars, 23 avril, 7 juin, 17 septembre, 21 octobre et 25 novembre 1793.


L'ambiguité des termes de ces décrets laissa sans doute le ci-devant curé de Pont dans une trompeuse confiance. Il crut d'abord, comme tant d'autres, que n'étant plus fonctionnaire, n'ayant plus exercé depuis le 25 décembre 1792, il ne tombait point sous le coup de la peine de la déportation, peine terrible, puisqu'en dernier lieu elle ne pouvait plus être que perpétuelle.


Peut-être sans bien prévoir toutes les conséquences de sa résolution, il prit le parti de se rendre à Rouen, dans la "maison de réclusion" des prêtres insermentés.


La lettre qui suit nous apprend comment il fut arrêté, en même temps qu'elle nous révèle quelques détails intéressants de la vie des ecclésiastiques détenus au ci-devant séminaire de Saint-Vivien.


Rouen, au grand séminaire (Saint-Vivien), 18 décembre 1793.


Mon cher frère,


Si vous êtes toujours à Vernon, votre réponse ne doit pas tarder. Vous saurez par la présente qu'étant venu à Rouen le 12 de ce mois tant pour obéir au nouveau décret concernant la déportation que pour solliciter le paiement de mon traitement pour toute (?), j'ai été arrêté et conduit sur le champ dans cette maison de détention, où nous sommes 186 détenus. Nous nous trouvons sept dans une même chambre, avec des lits sans rideaux et pas une table, si bien que je vous écris sur mon lit, qui est fort dur, en comparaison de celui que j'avais à Pont.


Comme je n'avais pas prévu mon arrestation, d'autant plus que le citoyen Auber, principal du collège d'Eu, et un des membres du directoire du département, m'avait dit en propres termes que je n'avais rien à craindre pour le premier serment auquel, disait-il, je n'étais point obligé, et qu'ayant prêté le second j'étais en règle, comme, dis-je, je ne m'attendais pas à être arrêté tout en arrivant, je n'ai pas eu la précaution de mettre ordre à mes affaires avant de partir, et j'ai laissé ma maison seule, n'ayant pas de servante et n'ayant pu trouver personne pour garder ma maison pendant mon absence. Mais je crois qu'elle est bien gardée dans ce moment, parce que mes meubles étant séquestrés par ordre du département, la municipalité de Pont aura mis sans doute un gardien chez moi ; ne m'attendant qu'à faire un voyage de huit à dix jours, je n'ai pas même apporté le plein nécessaire et ai écrit deux fois à celui à qui j'ai laissé une clef, de m'envoyer du linge et des hardes. Je n'ai rien reçu, pas même de réponse, non plus que de notre frère de Dôle, à qui j'ai écrit dès le lendemain de mon arrivée ici. Vous lui ferez passer la présente et vous lui direz de vous payer ce que je vous dois, afin que si on saisit entre ses mains le peu qu'il peut avoir à moi, vous n'ayiez point de discussion avec le district pour votre paiement. Je pense au reste que si, après vous avoir payé les 600 livres que vous m'avez fait passer à Pont et dont il ne me reste plus grand chose, il lui reste encore 50 à 60 livres, ainsi on lui permettra de me les envoyer.


Tout ce que je souhaiterais pour le moment, c'est qu'ayant des relations  à Rouen à cause de son commerce, il voulût bien me recommander à quelqu'un qui me ferait passer de temps en temps de la soupe, car on n'en mange point ici, et nous sommes réduits à trois quarterons de pain par jour, ainsi que les habitants de Rouen, et à deux verres de cidre ou de riz, et nos biens, si nous en avons, seront pour payer nos pensions qui sont ici sur le pied de 500 livres, si bien que le morceau de terre que j'ai à Dol sera vendu et confisqué au profit de la Nation. Il est dû une (rente) de 50 liv. par an pour contribuer à la pension de notre frère Guillaume ; ce sera à notre frère Le Marchand à le déclarer. Vous lui ferez donc passer cette lettre en le priant, de ma part, de m'écrire sur le champ, et vous me ferez réponse vous même dès que vous aurez reçu ma lettre. Je vous préviens que toutes nos lettres sont lues avant d'être mises à la poste, et que toutes celles à notre adresse sont lues de même avant de nous être remises. Voilà près de sept mois que notre frère de Dol ne m'a écrit, quoique je lui aie déjà écrit trois ou quatre fois depuis la fin d'août. Tout ce que j'ai su, c'est vous qui me l'avez appris, qu'il était parti du 26 octobre, pour aller avec sa compagnie de canonniers combattre contre les rebelles de la Vendée qui sont venus deux fois à Dol.
Je crains qu'il ne lui soit arrivé quelque malheur et qu'il n'ait péri en défendant la Patrie.
Votre lettre me rassurera sans doute ; écrivez-moi et faites passer le présent à Dol.
Je vous avais écrit, il y a un mois, à Paris, au Luxembourg, vous y croyant avec la citoyenne d'Orléans, qui y avait été transférée, mais n'ayant point reçu votre réponse, j'ai pensé que vous étiez à Vernon.
Je vous embrasse de tout mon coeur et vous souhaite pour l'année 1794 tout ce qu'on peut souhaiter de mieux.


Votre frère,
FRANCOIS PLAINE.


Non seulement cette lettre fut lue comme le prévoyait son auteur, mais au lieu d'être expédiée à son destinataire, elle fut adressée le 25 nivôse an II (14 janvier 1794), à la municipalité de Pont, chef-lieu de la Charente-Inférieure, qui la retourna à Rouen en affirmant que l'abbé Plaine ne possédait rien en cette localité. L'employé chargé de cet envoi, ayant vu que l'abbé Plaine citait Dol, en avait, sans doute, induit que c'était à Pont qu'il avait exercé les fonctions ecclésiastiques. Cette erreur, déjà singulière, puisque l'abbé Plaine mentionnait l'abbé Auber, membre du département, sans doute se trouva réparée, lorsque le 27 du même mois de décembre, l'abbé Plaine en écrivit une seconde au citoyen Deschamps, jardinier à Pont, et accompagnée d'une note écrite au bas d'un assignat de 15 livres, et indiquant à ce jardinier "où était son argent et l'invitant à le soustraire." Ces lettre et note avaient été, comme la lettre du 18 décembre, retenues par la municipalité de Rouen et transmises au district de Rouen qui les envoya au district de Dieppe, avec invitation de prendre toutes les mesures convenables pour mettre l'argent sous la main de la Nation.


Le district de Dieppe fit ses diligences, et dans la journée du 29 nivôse an II (18 janvier 1794), un gendarme se présenta à la maison de réclusion de Saint-Vivien, et demanda au citoyen Franconville, économe, de faire descendre l'abbé Plaine. Celui-ci étant venu, le gendarme lui communiqua un mandat d'amener pour le conduire à Dieppe. Ils convinrent de l'heure du départ pour le lendemain, après quoi il remonta à sa chambre.


"Vers deux heures du matin de la nuit de ce même jour, 29 nivôse, les nommés Gosset et Guillot, camarades de chambre de Plaine, vinrent éveiller Franconville pour lui faire part que celui-ci s'était couché vers dix heures et demie du soir." S'étant levé environ une heure après, disant tout haut qu'il ne pouvait reposer, il avait ouvert la porte de la chambre en leur disant qu'il allait devant Dieu. Ils ne l'avaient point revu.


Franconville s'en fut éveiller le citoyen Grave, portier de la maison de Saint-Vivien, dépositaire des clefs, afin d'appeler la garde extérieure du poste. Il trouva la porte bien exactement fermée à trois clefs. Pendant que Grave gardait cette porte, Franconville, "escorté de la garde, composée de huit citoyens qu'il partagea avec son épouse", continua la recherche du reclus dans tous les endroits de la maison, recherche qui fut infructueuse. Ils en conclurent qu'il n'avait pu s'échapper que par le jardin derrière ladite maison ou par le bout d'un corridor où il y avait une croisée gardée par un grillage de bois en barreaux donnant sur la rue Orbe, où quelques vestiges furent remarqués.


Continuant ou plutôt recommençant ces investigations, le commissaire de police, et "le vrai sans-culotte" Pinel, notable de la commune de Rouen, délégué à la surveillance de Saint-Vivien, assistés de Franconville, s'aperçurent que la porte de la chapelle était ouverte, comme celle de la sacristie ouvrant sur le jardin de la rue Orbe. Ils notèrent qu'un serrurier qui, le 29, avait travaillé à la porte de la sacristie, était parti sans dire qu'il laissait son travail inachevé.


Mentionnons tout de suite que l'évasion de l'abbé Plaine eut immédiatement des conséquences sérieuses. Dès le lendemain, 1er pluviôse, Franconville et Grave furent écroués à la maison d'arrêt de Saint-Lô de Rouen ; le jury ayant déclaré, le 15 du même mois, qu'il y avait lieu à accusation, ordonna la prise de corps ; ils furent transférés le 24 pluviôse à la maison de justice, où Grave mourut le 15 ventôse. Franconville resta détenu jusqu'après brumaire an III.


Le 27 nivôse, c'est-à-dire trois jours avant l'évasion de l'abbé Plaine, les représentants du peuple Legendre, Delacroix et Louchet, en mission dans la Seine-Inférieure, avaient destitué Jacques-Louis-Mathurin Thibaut, juge-de-paix du canton d'Eu, pour avoir relâché un prêtre, desservant à Pont, qui voulait dire une messe pour Capet. Cela visait évidemment l'intention déjà annoncée par notre abbé Plaine avant son voyage et son incarcération à Rouen (28 décembre 1793) à l'approche de l'anniversaire de la mort de Louis XVI. Sur la réquisition du substitut de l'agent national du district de Dieppe, du 8 pluviôse an II (27 janvier 1794), et par ordre du maire et des officiers municipaux de la commune d'Eu, du même jour, signé Jacob Gros, maire, et Varin, l'ex-juge-de-paix Tibaut fut écroué le 11 pluviôse dans la maison de justice du tribunal criminel du département, et le 28 ventôse condamné à garder prison trois mois à Eu, où il était transféré le lendemain 29 (Thibaut était redevenu juge-de-paix d'Eu en floréal an VIII). Puis, par un autre arrêté du même jour, 27 nivôse, les conventionnels avaient chargé l'accusateur public près le tribunal criminel de poursuivre, conformément aux lois, François Plaine, desservant la succursale de Pont.


Que fit le fugitif ? Reprenant la route de Pont et voulant, en vrai breton persévérant qu'il était, mettre à exécution le projet qu'il avait déjà publié avant son départ, il se trouvait dans son église "le dimanche 27 janvier 1794 (1)" (8 pluviôse), y officiait tranquillement, et annonçait publiquement, à la grande messe et aux vêpres, qu'il ferait le lendemain un service pour le repos de l'âme de Louis XVI ; il ajoutait qu'on pouvait bien célébrer ce service pour le bien qu'il avait fait pendant son règne. Le lendemain, effectivement, il célébrait le service et y faisait chanter les chantres de son église.


Mais après ce coup d'audace, il ne pouvait plus demeurer à Pont. Il en partit se dirigeant cette fois nous ne savons où. Il est douteux qu'à une telle époque il ait pu aller jusqu'à Dol. Nous supposons qu'il se réfugia à Paris où il paraît ne pas avoir été inquiété avant le 3 germinal (23 mars 1794). A cette date, il y fut arrêté et conduit immédiatement devant le comité révolutionnaire de la section du Panthéon français qui, après un interrogatoire sommaire, le renvoya par devant les administrateurs de police de la commune de Paris, parce que son passeport n'indiquait pas le lieu où il allait, portait qu'il avait été à Rouen, sans visa de ce lieu, sans avoir eu le droit d'en partir et de se rendre à Paris, et sans indiquer le lieu de la déportation.


On le mit un instant à la "chambre d'arrêt", puis, le jour même, il comparaissait devant les administrateurs de police, qui dressaient un procès-verbal duquel nous extrayons ce qui suit :


D. Enquis de ses noms, prénoms, âge, pays, profession et demeure ?
R. A répondu se nommer François Plaine, âgé de quarante-neuf ans, né à Dol, département d'Ille-et-Vilaine, ci-devant prêtre séculier, et demeurant à Pont, près la ville d'Eu.
D. A lui demandé quelle est la cause de son voyage à Paris ?
R. A répondu : pour tâcher de trouver une place dans quelque collège, ainsi qu'il y avait été autrefois.
D. En quel lieu il officiait ?
R. A la ville d'Eu ? depuis le mois d'octobre jusqu'au mois de décembre 1792.
D. S'il a prêté serment à la constitution civile du clergé ?
R. Non, qu'il n'a pas cru y être assujetti.
D. S'il a prêté le serment de liberté et de l'égalité ?
R. Oui, et nous en a exhibé un certificat.
D. Quels sont ses moyens de subsistance ?
R. Qu'ils consistent en un petit bien situé à Dol, qui était loué cent écus par an, et un contrat de 700 livres de fonds, venant de sa famille.


Cet interrogatoire fut repris le 7 germinal :


D. S'il n'a pas été déjà incarcéré ?
R. Oui, qu'il a été emprisonné au séminaire de Saint-Vivien, à Rouen, le 12 décembre (vieux style) comme prêtre insermenté.
D. Comment il est sorti de cette maison d'arrêt ?
R. Qu'il est sorti dans la nuit du 29 au 30 nivôse par une porte d'un jardin qu'on avait négligé de fermer, et ensuite en escaladant un mur pour passer dans une petite cour, et, de là, dans la rue.
D. Si, avant de sortir de la maison d'arrêt où il était détenu, il était porteur des passeports et certificats que nous lui représentons ?
R. Oui, qu'il les avait avant son incarcération.


L'abbé Plaine était porteur de dix-sept pièces qu'on lui avait laissées à Saint-Vivien de Rouen. C'étaient l'acte de mariage de ses père et mère, son acte de naissance, un certificat de civisme délivré par la commune de Pont, le 7 avril 1793, un certificat du 9 décembre 1793 attestant sa résidence à Pont, et qu'il y avait rempli fidèlement ses fonctions, trois certificats du maire et des officiers municipaux d'Eu, l'un constatant son serment civique, signé Du Caurroy, maire, Capperon, Richard et Courtin, l'autre, du 12 frimaire an II (2 décembre 1793), signé : de Banne et Gros, maire, attestant "qu'il a prêté les serments voulus", et le troisième, signé de douze personnes, daté du 19 février 1793, attestant sa résidence à Eu ; ses lettres de prêtrises, diaconat, etc. ; deux baux de lui à son frère, de 1783 à 1786.


Ces pièces ne pouvaient absoudre l'abbé Plaine aux yeux des fonctionnaires parisiens informés des poursuites dont il était l'objet. Dès le 8 germinal, ils l'envoyèrent à leurs frères et amis de la commune de Rouen, de brigade en brigade, par la gendarmerie, comme prêtre insermenté, suspect. Ils priaient les maire et officiers de Rouen de faire passer les 17 pièces saisies au tribunal qui devait en connaître.


L'abbé Plaine, après avoir séjourné dans quelque autre maison de détention, fut écroué, comme prévenu de délit contrerévolutionnaire, à la prison du ci-devant Palais seulement le 11 floréal an II, sur un mandat d'arrêt de Leclerc, accusateur public, du 1er pluviôse, c'est-à-dire du lendemain de son évasion de Saint-Vivien. C'était, au surplus, une régularisation d'écrou qui n'implique pas nécessairement que son transfert de Paris ait eu lieu à cette date.


Leclerc avait dressé, dès le 4 pluviôse, l'acte d'accusation, relevant seulement le fait de l'annonce et de la célébration "méchamment et à dessein" d'un service "pour le repos de l'âme de Louis Capet", les dimanche 27 janvier précédent et le lendemain. Il n'est pas un républicain, s'exclame l'accusateur public, il n'est pas un français victime des trahisons, des crimes de notre dernier tyran, qui ne sente combien est coupable, imprudent et fanatique qui a osé faire son apologie, qui a osé faire pour lui un service public et solennel.
Sur ce, le 4 pluviôse, pendant que l'abbé Plaine, échappé de Saint-Vivien, parcourait la campagne, le tribunal ordonnait contre lui la prise de corps.


La justice humaine ne devait pas avoir la possibilité de prononcer sur le sort de l'abbé Plaine. Elle n'eût pas hésité à le juger sévèrement.


Mais le pauvre prêtre, succombant aux fatigues, aux souffrances, aux luttes et aux émotions qu'il avait eu à subir depuis six mois, mourut en la prison de la Conciergerie du Palais de Rouen, le 27 prairial an II (dimanche de la Trinité, 15 juin 1794).

(1) Cette date "dimanche 27 janvier dernier (vieux style)" est prise dans la copie faite sur un registre d'écrou de la maison de justice d'un acte d'accusation dressé contre Plaine par Leclerc, le 4 pluviôse an II. Or, le 27 janvier 1794 n'était pas un dimanche, mais bien un lundi. Le 27 janvier 1793 est un dimanche. Mais le lendemain de ce dimanche devait être un décadi. En 1793 comme en 1794, le lendemain n'est pas un décadi. L'acte d'accusation impliquerait qu'il s'agit en réalité d'une messe annoncée et dite avant le voyage et l'arrestation de l'abbé Plaine à Rouen.

F. CLÉREMBRAY
La Normandie Littéraire
1901 (A16, T9)

Publicité
Commentaires
La Maraîchine Normande
  • EN MÉMOIRE DU ROI LOUIS XVI, DE LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET DE LA FAMILLE ROYALE ; EN MÉMOIRE DES BRIGANDS ET DES CHOUANS ; EN MÉMOIRE DES HOMMES, FEMMES, VIEILLARDS, ENFANTS ASSASSINÉS, NOYÉS, GUILLOTINÉS, DÉPORTÉS ET MASSACRÉS ... PAR LA RIPOUBLIFRIC
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
Publicité