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La Maraîchine Normande
17 janvier 2014

GÉNÉRAL CLAUDE-AUGUSTIN TERCIER

MÉMOIRES DU GÉNÉRAL TERCIER

Pendant trente années, celui qui les écrivit combattit, presque sans relâche, pour la cause royale, sans jamais compter ses peines et ses souffrances, et l'on peut dire du chevalier Tercier, suivant une illustre parole, qu'il a connu toutes les extrémités des choses humaines : sa vie entière fut une longue lutte, où il apporta une constante énergie, une persévérance remarquable.

Claude-Augustin TERCIER naquit le 8 novembre 1752 à Philippeville (Pays-Bas).
Son père, retiré dans cette ville, était d'origine suisse et du canton de Fribourg. Capitaine de grenadiers, au titre français, dans le régiment de La Tour du Pin, il avait été attaché à l'état-major du maréchal de Lowendahl, et avait servi avec distinction.
Son oncle paternel, Jean-Pierre TERCIER, écuyer, censeur royal, membre de l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres, avait rempli les fonctions de premier commis aux Affaires étrangères : investi de la confiance de Louis XV, il joua un rôle important dans la diplomatie du temps.

Augustin Tercier pouvait donc, à son gré, embrasser la carrière diplomatique ou la carrière militaire : fils de soldat, ce fut cette dernière qu'il choisit, et à l'âge de dix-huit ans, en 1770, il entrait, en qualité de volontaire, dans le régiment de Normandie-Infanterie, en garnison à Givet.
En 1771, il est nommé lieutenant au régiment provincial de Lille.

Une ordonnance du roi crée, en 1772, quatre régiments pour le service des possessions françaises aux Antilles ; ces régiments étaient dénommés : "de la Martinique", "de la Guadeloupe", "du Cap" et "du Port-au-Prince" ; Tercier fut nommé lieutenant en premier au régiment de la Martinique, dont le colonel était le comte de Sablonet ; et, le 22 janvier 1773, il arriva avec son régiment au Fort-Royal : le gouverneur de la Martinique et de la Guadeloupe était le comte de Nozières, maréchal de camp.

JoséphineCapitaine le 1er septembre 1774, mes années, écrit notre auteur, se sont écoulées doucement au sein du bonheur et des plaisirs jusqu'en 1778, qu'éclata la guerre entre la France et l'Angleterre. Jeune, vif, ardent, recherchant la société où j'étais bien accueilli, j'étais de toutes les fêtes et parties de la bonne compagnie.
C'est parmi les personnes qui la composaient que je fis connaissance de Mlle Tascher de la Pagerie, la célèbre impératrice Joséphine. J'étais fort lié avec toute sa famille et j'ai souvent été passer quelques jours sur l'habitation de madame sa mère.
Elle était jeune alors ; je l'étais aussi ...
Il m'a été possible de faire quelque bon mariage dans ce pays. Plusieurs même se sont présentés. Mais, jeune encore, je ne pouvais me décider, au printemps de ma vie, à sacrifier ma liberté. Je m'étais donné comme principe qu'un officier ne devait point songer à se marier avant l'âge de trente ans, et encore moins aux approches d'une guerre qui paraissait inévitable.

La guerre éclata en 1778 entre la France et l'Angleterre.
Ici reparaît, dans les Mémoires, Mlle Tascher de la Pagerie, dont le souvenir semble particulièrement doux à l'auteur :
C'est vers ce temps-là que partit pour la France le vaisseau Le Fier, de 50 canons, capitaine le commandeur de Turpin, emmenant avec lui celle qui devait être un jour impératrice des Français. Elle avait dix-huit ans, quoique l'Almanach Impérial lui ait toujours donné neuf à dix ans de moins que son âge. Je l'accompagnai du Fort-Royal, avec sa famille à bord du vaisseau sur lequel elle s'embarqua. J'étais, comme je l'ai dit, très lié avec sa famille, qui, toute réunie, la conduisit et la remit entre les mains du capitaine, avec une mulâtresse pour la servir pendant la traversée. Qu'alors elle était loin de tant de renommée ! Elle venait épouser en France le vicomte de Beauharnais, dont le père avait été autrefois gouverneur des Iles du Vent.

Le 18 décembre 1778, Tercier est reconnu en qualité de capitaine des grenadiers de son régiment : il fait, à la tête de sa compagnie, de nombreuses campagnes ; il assiste notamment aux affaires de Sainte-Lucie, de la Dominique, de Saint-Vincent, de la Grenade, etc. et ses Mémoires sont remplis de détails curieux sur les hommes et les choses d'alors.

La guerre d'Amérique se termina en 1783.

A la paix, Tercier, dont la santé était fort délabrée par neuf années passées aux colonies, retourna en France et entra dans la maison du Roi, au corps des gardes de Monsieur : il y servit jusqu'au licenciement, qui eut lieu en 1790 : l'année suivante, il fut fait chevalier de Saint-Louis.
Cependant, les évènements politiques se précipitaient à l'intérieur ; la Révolution devenait chaque jour plus menaçante, et les princes avaient dû émigrer.

Fidèle à Monsieur, depuis Louis XVIII, auquel l'attachaient et ses principes de fidélité et une reconnaissance personnelle qui l'honore, Tercier se rend à Coblentz et est admis, en septembre 1791, dans l'escadron des Gardes de Monsieur, commandé par le capitaine comte Charles de Damas.

Mais ses illusions, ses espoirs d'un succès prochain durent peu : bientôt il regrette sa détermination et peint ses tristesses dans cet amer tableau :
"A mon arrivée à Coblentz, je portai partout un oeil attentif et observateur. Après avoir tout vu, tout examiné, sans passion, je ne tardai point à être désabusé des espérances que j'avais emportées de France où tout se peignait en beau. ... Tous les vices et les prétentions de la Cour sont accourus à Coblentz. On voit des gens sans autres talens que ceux de l'intrigue et de la suffisance, se faire nommer aux emplois et aux grades qu'ils sont hors d'état de remplir. L'ambition la plus effrénée, abstraction faite des sentimens, prend effrontément la place du véritable royalisme. Il n'est point un émigré qui ne compte sur un grade supérieur lorsque l'autorité royale sera rétablie. Le luxe le plus révoltant, les moeurs les plus dissolues sont donnés en spectacle aux Allemands, étonnés de notre conduite et de nos habitudes. Nous n'avons aucune de ces vertus d'abnégation qui devraient être l'apanage des militaires dans les circonstances difficiles où nous nous trouvons. Les grands, au lieu de se populariser et de se faire chérir des gentilshommes de province, se font mépriser. Incapables d'aucune privation, ils ne possèdent rien de ces qualités austères qu'il faut savoir opposer à l'adversité. S'ils avaient consulté et étudié l'histoire, ils y auraient appris comment doivent se conduire ceux qui se trouvent aux prises avec l'infortune. Ce n'est point en pantoufles et en robe de chambre qu'on doit espérer de faire une contre-révolution armée. Il faut des vertus que nous n'avons point. Il y a parmi nous plus de philosophes modernes que l'on ne pense, que l'amour-propre a fait venir ici et sur lesquels il n'y a pas à compter. Au premier revers on les verra changer de livrée.
Nos seigneurs de la cour sont mols et efféminés. Je sais, ajoutais-je par correctif, qu'Alcibiade était le plus voluptueux des Grecs et n'en était pas moins l'un des plus braves ; que, forcé de quitter Athènes, sa patrie, et retiré à Lacédémone, il sut se conformer à la vie dure et austère des Spartiates ; il s'asseyait sans répugnance à leurs tables mal servies et mangeait sans se plaindre leur brouet insipide. Je sais qu'à Denain, à Steinkerque, à Fontenoi, la noblesse efféminée se battit avec la plus grande valeur. Mais il y avait alors chez les Français un sentiment unanime de gloire nationale qu'ont altéré les fausses doctrines de nos jours. Si Henry Quatre, disais-je encore, n'eût eu pour reconquérir sa couronne que des hommes semblables à nos émigrés, divisés entre eux d'opinions et dévorés de la soif d'une ambition ridicule, je doute que l'auguste famille des Bourbons eût jamais monté sur le trône de France. Je ne prétends pas, continuais-je, généraliser ici l'exception. Il y a dans nos rassemblements nombre de gens honnêtes, que l'amour et l'attachement pour le Roi ont fait accourir auprès de nos princes, dans l'unique désir de combattre pour la cause royale. Après tout, disais-je en finissant, tout ce que j'ai vu et observé me fait regretter d'avoir quitté Paris, et si j'avais maintenant à émigrer, je ne le ferais pas. Mais quand à mon âge on a pris une résolution méditée, il faut savoir être conséquent, y persister et se résigner à courir toutes les chances du parti qu'on a embrassé. Aussi suis-je resté.

Nous ne nous étendrons pas sur la série d'évènements tragiques qui suivirent la déclaration de guerre de mars 1792, et qui sont connus de tous. Tercier, son régiment licencié, passa, en qualité d'officier, dans la compagnie des chasseurs nobles de la légion de Damas ; c'est avec cette légion qu'il fit les pénibles campagnes de 1793, 1794 et 1795, dans les Pays-Bas et sur les bords du Rhin ; le résultat de ces campagnes, qu'il étudie longuement dans ses Mémoires, fut des plus funestes aux émigrés, et Tercier, avec sa légion, dut se retirer et se cantonner à Stade, en Hanovre, sur l'embouchure de l'Elbe.

En juillet 1795, les corps émigrés réunis en Hanovre furent transportés à Portsmouth, et, de là, dans la baie de Quiberon, où ils arrivèrent le 16 ; le débarquement s'effectua le surlendemain.

 

Episode_de_la_déroute_de_Quiberon



Les Mémoires décrivent avec un intérêt puissant les différentes phases de cette malheureuse expédition. Tercier, fait prisonnier, n'échappa que par une audace et une présence d'esprit extraordinaires au sort de ses compagnons d'armes : il réussit à se faire passer pour étranger devant les commissions militaires, et après mille péripéties, parvint à se réfugier dans une partie de la Bretagne soumise à l'autorité du chef royaliste Georges Cadoudal.

Georges le fit conduire, avec son compagnon, M. de Guéfontaine, au comte de Puisaye, qui, après le désastre de Quiberon, était venu reprendre en Bretagne le commandement général des forces insurgées : l'entrevue fut assez vive de part et d'autre, et Puisaye refusa à Tercier et à Guéfontaine les passeports qu'ils lui demandaient pour passer en Angleterre ; il leur en accorda cependant pour se rendre auprès du général Charette, en Vendée.
Mais ils ne purent passer la Loire : après un mois de marche, Tercier et Guéfontaine arrivèrent au quartier générl du vicomte de Scépeaux, établi à quelques lieues d'Angers ; Tercier prend part, comme volontaire, à plusieurs affaires, au milieu des soldats de Scépeaux, et s'initie à la tactique spéciale aux Vendéens.

Quelque temps après, Tercier accepte, sur les instances de Scépeaux, le grade de chef de division et se rend à son poste situé dans les environs de Laval ; il est adjoint au célèbre Taillefer, un chouan brave comme son sabre, mais dont l'instruction est incomplète. Sa division a quarante lieues de circonférence et comprend trois mille hommes armés, et habitués à la guerre de partisans.
Dans cette guerre des provinces de l'Ouest, dit Tercier, les chefs ne sont jamais plus en sûreté que lorsqu'ils ont un rassemblement (à la tête duquel ils se trouvent toujours), parce qu'alors ils sont environnés d'une force militante, et que chacun est à son corps deffendant. Tandis qu'au contraire, dès qu'ils sont isolés avec leur état-major, ils courent à chaque instant le danger d'être enlevés ou de tomber dans un parti ennemi. Il est vrai de dire aussi que dans ce pays tout le monde veille au salut de l'armée. Les femmes, les vieillards, les enfants mêmes qui travaillent dans les champs, sont constamment en observation, et la nouvelle de l'apparition de l'ennemi sur le pays arrive de village en village, de métairie en métairie, avec la célérité des télégraphes. Pendant la nuit, les chiens de ferme aboyent et se répondent à plusieurs lieues à la ronde. Chacun alors se tient sur ses gardes, on se lève, on va aux informations pour s'assurer du côté d'où vient l'ennemi.
Je confirmerai ici ce que Madame la marquise de la Rochejacquelein a écrit dans ses mémoires. C'est que les chiens de ce pays sont tellement identifiés avec les opinions des habitants et de leurs maîtres, que si une troupe royaliste traverse le pays, pas un chien n'aboye. Ils viennent au contraire caresser silencieusement les hommes de la troupe. Ils étaient toujours muets pour nous, que nous fussions isolés ou en nombre, et ils auraient étranglé un soldat républicain. Admirable instinct de cet intelligent et fidèle animal !
Dans les différentes affaires où je m'étais trouvé, soit en Bretagne, soit en Anjou, à l'armée du vicomte de Scépeaux, j'avais bien observé la tactique vendéenne, à laquelle les anciens militaires, accoutumés à combattre dans des armées régulières, sont d'abord si étrangers. Avec un peu de jugement et de bon sens, j'en eus bientôt approfondi la simple théorie, qui consistait à savoir bien s'embusquer pour surprendre et combattre avantageusement son ennemi, et surtout à perdre peu de monde ; à se précipiter sur lui lorsqu'il chancelle, et à le poursuivre avec rapidité ; dans le cas contraire, s'il tient ferme trop longtemps, à l'abandonner, et à prendre ce que les Vendéens appellent "la déroute", sûrs de n'être point poursuivis, parce qu'ils se retirent par vingt chemins différens, et un à un, à travers les hayes, les champs et les marais, qu'ils laissent en un clin d'oeil derrière eux. Au contraire, le soldat français, qui a de l'ordre et de la discipline, ne peut point se débander pour poursuivre l'ennemi. Comment se rallierait-il ? Il craint les embuscades, parce qu'il ne connaît pas les chemins du pays : il n'a point la légèreté du soldat vendéen, qui, vêtu d'une simple veste, n'a que son fusil à porter, et éparpille ses cartouches dans ses poches. Cette guerre, dis-je encore une fois, est une guerre toujours à la course. Vainqueurs, les Chouans, les Vendéens, avec la légèreté du cerf, poursuivent avec ardeur les Républicains, qui, plus pesamment armés, sont obligés de suivre leurs compagnies et de garder leurs rangs, tandis que le soldat royaliste, dès qu'il cesse de combattre, ne se voit plus astreint à aucune règle : il s'en va où il veut, et par les chemins et sentiers qu'il juge le moins dangereux : s'il est trop pressé, il fuit rapide et ne craint pas d'être atteint dans sa course : il franchit les hayes, les fossés, avec d'autant plus de confiance qu'il connaît tous les chemins.
Voilà en peu de lignes l'aperçu raisonné que je me suis fait de cette guerre, devenue si fameuse, et qu'il est très facile d'apprendre pendant le peu de tems qu'on l'aura faite. Mais c'est au chef actif et intelligent à la bien conduire et à y adapter quelques-uns des principes du véritable art de la guerre, comme celui de suppléer à la faiblesse par la ruse.
Cette manière de guerroyer est celle de tous les pays qui s'insurgent contre un parti fort et puissant.
J'ai souvent réfléchi sur cette tactique des armées vendéennes, dont les généreux efforts et les brillants succès ont fait l'admiration de toute l'Europe dans les deux premières années de l'insurrection royaliste. Tous n'avaient alors qu'un même désir, un seul but vers lequel ils marchaient avec ardeur. L'ambition, les intrigues, se sont ensuite glissées dans les camps, et la Vendée n'a plus jeté que de pâles lueurs. Elle n'était déjà plus en 1795, ce qu'on l'avait vue les deux années précédentes. La perte de ses chefs, la ruine totale des campagnes, ont forcé un peuple indompté à accepter des propositions de paix dont les traités étaient bientôt violés par la foi punique républicaine.

L'un de ces traités fut signé en mai 1796 ; depuis une année, Tercier guerroyait contre les républicains, sans cesse sur le qui vive, se battant presque chaque jour, et remportant des succès à peu près continus : il avait réussi, par son énergie, et en payant de courage et d'audace, à mettre dans sa division autant de discipline et d'obéissance que pouvaient en comporter des rassemblements de volontaires non soldés, sans grande instruction militaire, mais loyaux, déterminés et fidèles.
Pendant cette période, Tercier reçut des généraux commandant en chef les armées royales du Maine et de Normandie les éloges les plus flatteurs, et ses adversaires même lui rendirent hommage.
Le traité de 1796 signé, Tercier se rendit à Amiens, puis à Paris.

Le gouvernement directorial venait de s'établir, et déjà le mécontentement était général dans toute la France ; persécutions, visites domiciliaires, mauvais traitements, rien n'était épargné aux royalistes, qui lassés d'une paix hypocrite à laquelle ils préféraient une guerre déclarée, se préparèrent bientôt à reprendre les armes : les élections de l'an V, suivies du coup d'Etat de fructidor, ne firent que les encourager dans cette résolution.
Ce fut le comte de Rochecotte qui reçut des princes les pouvoirs pour commander en chef dans les provinces du Maine, Anjou, Perche, et pays Vendomois : Tercier, nommé son général en second, fut chargé de dresser un plan d'organisation générale, mis sous les yeux du comte de Provence et agréé par lui. L'organisation effective commença à se faire aussitôt, malgré des difficultés et des dangers de toute sorte.
Mais le comte de Rochecotte fut pris à Paris et fusillé dans la plaine de Grenelle, et Tercier, bien que devenu général en chef par sa mort, demanda aux princes de confier le commandement général au comte de Bourmont, ancien major général du vicomte de Scépeaux : Tercier jugeait nécessaire de mettre à la tête de l'armée royaliste un homme particulièrement connu du gouvernement britannique et des princes, et capable d'accréditer son parti près de l'Angleterre. Poussant l'abnégation de soi-même et l'oubli de toute ambition personnelle jusqu'au bout, il s'offrit à passer la Manche pour faire agréer cette proposition, acceptée de ses officiers, à Monsieur. Il ne put réussir dans cette tentative, que fit avorter la surveillance constante des autorités maritimes, et retourna à Paris.

Arrêté et emprisonné, mais bientôt mis en liberté, Tercier retourna dans le Maine. Il acheva de réorganiser la chouannerie, qui s'étendit jusqu'au département de l'Orne, il nomma partout des chefs de division et de canton, et bientôt, fin de 1799, l'Ouest reprenait les armes.

A cette époque, M. de Bourmont arriva dans le Maine, pour prendre possession du commandement en chef de l'armée, que lui remit Tercier, nommé général en second.
La guerre civile dura peu de temps d'ailleurs : Bonaparte, devenu Premier Consul, employa tous ses soins à y mettre un terme : il sut user tantôt de la diplomatie et tantôt de la force, les membres de l'agence royaliste de Paris, politiciens sans habileté ou sans conscience, l'aidèrent dans sa tâche, et le 4 février 1800, le comte de Bourmont signa le traité de paix.
La paix signée, Tercier se retira à Paris.
Impliqué en 1803 dans la conspiration de Cadoudal, Moreau, Pichegru, il fut arrêté et emprisonné pendant une année au Temple. En décembre 1804, il fut relâché, faute de preuves, et aussi, paraît-il, grâce à l'influence de l'impératrice Joséphine, et mis en surveillance à Amiens.

C'est dans cette ville qu'il épousa, le 27 mai 1807, Mlle Jeanne Le Picart de Millencourt, ancienne lectrice de Madame Sophie de France.
A la Restauration, il reçut le brevet et la retraite de maréchal de camp, 28 août 1816. Il avait bien gagné l'un et l'autre.

 

acte de décès du général Tercier



Le général Tercier mourut à Amiens le 23 février 1823, à l'âge de soixante-et-onze ans.

"En écrivant ces Mémoires, ce sont, dit-il, mes souvenirs que j'ai voulu mettre un peu en ordre, pour, dans ma vieillesse, y avoir recours, lorsque je voudrai faire un examen de ma vie. S'il m'arrive parfois de les compulser, ce ne sera point pour y chercher les jours de bonheur, ce serait peine inutile. Mais, en les feuilletant, je me promets la consolation d'y récapituler les évènements et les nombreux dangers par lesquels il m'a fallu passer avant de parvenir au port de la tranquillité, de remercier la Providence de ce qu'elle a fait en ma faveur.
Mal passé n'est qu'un songe, dit-on avec raison. J'espère n'avoir plus à courir de nouveaux hasards. Retiré maintenant du tumulte des affaires, je vis isolé, fuyant les grands personnages qui figurent à leur tour sur les tristes débris de la scène du monde. J'ai trop appris à connaître les hommes. Il en est peu dont j'aie eu à me louer ; je ne leur ai jamais fait que du bien quand je l'ai pu, et ils m'ont abreuvé du fiel de leur perfidie.
Dans l'état où la société se trouve actuellement, elle marche rapidement à son déclin. Le luxe, les arts, la mollesse, l'amour immodéré des richesses, l'égoïsme surtout, ce ver rongeur des Etats, l'oubli de tous les principes religieux et moraux, seuls conservateurs des gouvernements établis, et qu'on s'est plu à détruire dans nos temps modernes, voilà les causes majeures de notre prochaine subversion, si Dieu, touché de nos malheurs, n'opère un nouveau miracle.
Je ne serai point témoin, j'espère, de ce grand désastre. Mais nos neveux auront à se débattre encore plus que nous avec les calamités dont sont menacées les générations futures. ...
Je n'ai jamais visé à d'autre réputation qu'à celle d'homme de bien et exempt de reproches, et ne suis point sûr d'avoir réussi : mais ma conscience me suffit et je m'estime heureux de pouvoir dire, comme Nérestan dans Zaïre :
J'ai rempli d'un Français le devoir ordinaire.
Ce vers renferme toute ma vie.

Le général Tercier fut un robuste soldat, un chef déterminé et habile, un chrétien et un royaliste sans faiblesses : il mérite, à plus d'un titre, de partager les honneurs que décerne l'histoire aux combattants de la Vendée militaire, à ces paysans homériques qui se sont faits immortels par leur fidélité et leur foi - deux choses que notre judaïsante fin de siècle classe au rang des vieilles lunes.

C. DE LA CHANONIE
Revue du Bas-Poitou
Fontenay-le-Comte
1890

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