CAEN (14) - CRIMES D'UN DÉNONCIATEUR A CAEN LE 3 FÉVRIER 1793
CRIMES D'UN DÉNONCIATEUR A CAEN, LE 3 FÉVRIER 1793
Au tems où la terreur pesait particulièrement sur les prêtres ; Gombaud, curé de Saint-Gilles, à Caen, et qui s'était refusé constamment à prêter le serment civique, quitte la ville, où de jour en jour il devenait plus suspect, et se réfugie à Paris. Ne pouvant plus vivre dans la capitale, faute de ressources, il prend le parti de retourner à Caen, et s'y cache dans la maison d'un ami. Un de ses anciens paroissiens hantait cette maison ; un jour qu'il vint y faire visite, l'hôte du Curé lui dit : "Retirez-vous dans votre chambre, une de vos ouailles est ici, un tel pourrait vous voir ... Qu'ai-je à craindre de lui, répond Gombaud ; je lui ai toujours fait du bien, c'est mon compère ; j'ai tenu un de ses enfans sur les fonds baptismaux."
L'imprudent Curé se laisse donc voir ; son paroissien, sans lui rien dire, sort de la maison pour aller de suite dénoncer son ancien Pasteur.
L'asyle de celui-ci est cerné le jour même ; Gombaud trouve moyen de s'évader ; il se sauve dans les bois voisins, on l'y poursuit ; on lâche même des chiens sur lui, il ne peut échapper à de telles recherches ; ramené à Caen, il y est presqu'aussitôt guillotiné.
Le peuple, présent à cette exécution, la trouva un peu sévère ; il n'osait dire illégale et cruelle. Le Curé montra d'ailleurs beaucoup de constance sur l'échafaud. On veut lui faire prêter le serment civique ; il répond : Citoyens ! vous n'avez pas plus de droit d'exiger ce serment, que de me guillotiner.
L'exécution à peine achevée, un citoyen demanda la parole aux assistans, qui entouraient l'échafaud ; "Citoyens ! vous venez de voir justicier un prêtre pour refus de serment ; j'ai à vous dénoncer un bien plus grand coupable. Depuis plusieurs années, il existe dans nos prisons un assassin qu'on semble avoir oublié, et pourtant il devait passer le premier."
On crie bravo. Ordre est donné, par le peuple, à l'Exécuteur des jugemens, de rester auprès de l'instrument. On va à la prison pour vérifier le fait dénoncé ; le criminel est trouvé. On fait assembler les Juges à la hâte ; l'affaire est rapportée sommairement en moins d'une heure, et le malheureux est guillotiné.
Histoire générale et impartiale des erreurs,
des fautes et des crimes commis pendant la Révolution
Tome 6
1797