TESSÉ-LA-MADELEINE (61) - LE MAUSOLEE DES GOUPIL
LE MAUSOLÉE DES GOUPIL
"A la fin du règne de Louis XVI, vivait une famille de condition très modeste : les Goupil qui avaient deux fils : "Jean et Louis". Disparus pendant la révolution, on les vit revenir à Tessé en 1829 (1) où ils firent construire une grande maison appelée actuellement "le logis", place de l'église. La soudaine réussite des frères étonna les Tesséens.
Les deux frères meurent en 1850 (2), entraînant avec eux le secret de leur mystérieuse réussite. A leur mort, Anne-Marie Goupil, fille de Jean et épouse de Louis, fit construire le château où elle habita avec son fils et sa bru. Si des doutes ont plané sur l'honnêté des deux frères Goupil, personne ne sut jamais le secret de leur fortune.
Devant ce mausolée, observer les deux grands arbres qui se sont soudés l'un à l'autre par une branche, comme si dans un ultime élan, deux forces avaient voulu se joindre par-delà la mort."
Sans que l'on sache comment, ces fils de modeste famille font fortune en un rien de temps. Au lendemain de la Révolution française, Jean rachète son terrain devenu bien national. Louis, quant à lui, possède une grande partie de Tessé. Pour éviter que toute cette richesse ne se disperse, ce dernier épouse, avec une permission spéciale de Napoléon Ier, la fille de son frère Jean, sa nièce, donc, une certaine Anne-Marie-Catherine. C'est elle qui décide avec son mari, Louis, de faire édifier le château, entre 1855 et 1859, pour y vivre avec leurs fils, et leur belle-fille, [sauf que Louis ne verra jamais ce château puisqu'il décède en 1850.]
[En 1856, après avoir hérité de son oncle de 65 ha de terrains boisés en forêt d'Andaines, Anne-Marie Goupil fait édifier par l'architecte manceaux David, un château de style gothico-renaissance inspiré du château sarthois le Luart.]
Désireuse de montrer à tous l'étendue de son pouvoir, Anne-Marie Catherine choisit comme emplacement un promontoire. Le château est bâti dans un style néo-renaissance, avec de grandes ouvertures, un majestueux escalier double et des bandeaux qui courent le long de la façade.
Par fantaisie, elle s'autorise aussi des emprunts à l'époque médiévale.
M. Louis Goupil (fils) entoura cette demeure d'un parc étendu, où le dessinateur a tiré un merveilleux parti d'un terrain exceptionnellement pittoresque et accidenté. Dans ce parc, toujours ouvert aux visiteurs de Bagnoles, se trouvent deux des principales curiosités de la contrée : le Roc-au-Chien, dont des sentiers ouverts dans le roc rendent l'ascension facile, et une tranchée où, à la surface de grès siluriens, les géologues vont observer de très intéressantes empreintes, connues vulgairement sous le nom de "pas de boeuf". M. Goupil, qui fait du château de la Roche sa résidence habituelle, y est mort en septembre 1895, laissant à Bagnoles et dans tout le pays, des regrets justifiés par son inépuisable bienfaisance.
[1885]
[Gazette Agricole - n° 38 - 16ème année - Dimanche 22 septembre 1895]
Extrait de
La Normandie monumentale et pittoresque
Orne - 1ère [2e] partie
Publication de la Librairie Lemale & Cie, au Havre
1896
(1) Nous pensons que cette date de 1829 est erronée puisque Louis se marie à Tessé-La-Madeleine en 1813.
(2) Les deux frères Goupil ne sont pas décédés la même année (1850) ; voir ci-dessous :
Jean Goupil, propriétaire et rentier, est décédé le 16 juillet 1847, en son domicile, au bourg de Tessé-La-Madeleine, à l'âge de 83 ans.
Louis Goupil, propriétaire et rentier, époux de Anne-Marie-Catherine Goupil, est décédé le 14 septembre 1850, en son domicile, au bourg de Tessé-La-Madeleine, à l'âge de 79 ans.
MARIAGE : Louis Goupil, propriétaire, âgé de quarante un ans, huit mois, vingt-cinq jours, domicilié à Paris, épouse Demoiselle Anne-Marie-Catherine Goupil, sa nièce, avec l'autorisation de dispense que lui a accordée Sa Majesté l'Empereur, le 21 août 1811, âgée de vingt-trois ans et dix jours, le 14 novembre 1813.
NAISSANCES : Louis-Jean-Baptiste-Eude Goupil le 12 juillet 1815.
Anne-Marie-Jeanne Goupil, le 26 février 1819.
Jean Goupil, le 21 mai 1824.
Anne-Marie-Catherine Goupil, fille de Jean Goupil, épouse de Louis Goupil, propriétaire, est décédée le 31 mars 1865, au bourg de Tessé-La-Madeleine, à l'âge de 75 ans.
LE MAUSOLÉE
Le Mausolée fut profané pendant la seconde guerre mondiale. Les auteurs de ce crime pensaient sans doute que les défunts avaient choisi d'être enterrés avec leur fortune ...
NON LOIN DU MAUSOLÉE, SEPT PIERRES TOMBALES ...
En 1978, la décision est prise de déplacer l'ancien cimetière hors de la ville, le Conseil Municipal de Tessé-la-Madeleine décide de récupérer, bien sûr sans les ossements, quelques-unes des plus belles sépultures et de les placer près du Mausolée.
François Arthur de Luzignan
Décédé le 29 juillet 1865
Dame Marie-Rose de Caulaincourt
Chanoinesse - Comtesse de Villersvaudey
Décédée
le 8 décembre 1847
THEODOMIR
DE LUZIGNAN
Décédé
le 29 juillet 1865
PAX
Madame la Marquise veuve du Colonel Marquis d'Espinay
de son chef Comtesse Sopie Hermine Robert de Lepinay
Chanoinesse de Sainte Anne de Bavière
née au Château de Lepinay, Eure-et-Loir
Décédée a La Tanière, Orne, le 4 mars 1862
à l'âge de 47 ans.
Elle fut grande par l'esprit
et par le coeur.
Priez pour elle
LOUIS TRIQUET
Décédé le 10 octobre 1882
à l'âge de
81 ans
De Profondis
ALEXANDRE LEMACHOIS
Né à Rouen
Le 23 décembre 1777
Décédé a Bagnoles
Le 5 (?) juillet 1820
dont il étoit
le propriétaire
et le régénérateur
Honneur à sa mémoire
JULIEN MONSALLIER
1789 - 1874
ANNE APPERT
1793 - 1876
Ici repose
ANNE MARIE DIVAY
DÉCÉDÉE A TESSÉ LA MADELEINE
LE 19 OCTOBRE 1896
AGÉE DE 70 ANS
PENDANT 53 ANS
ELLE SERVIT
AVEC LA PROBITÉ LA PLUS SCRUPULEUSE
ET LE PLUS AFFECTUEUX DÉVOUEMENT
MONSIEUR ET MADAME LOUIS GOUPIL
LEURS HÉRITIERS SONT HEUREUX
DE LUI RENDRE ICI CE TÉMOIGNAGE
Faute de descendant direct, le château revient aux héritiers de la belle fille, en 1899 et en 1922, il devient la propriété de Mme Duval.
"Un château doré qui brille au soleil couchant, une chapelle funéraire profanée, un trésor disparu, des ombres derrières les fenêtres ... Que de mystères à démêler !
En menant l'enquête, nous avons avons découvert que c'étaient les boiseries des salons qui brillaient au soleil couchant. Quant aux ombres, Mme Duval, la propriétaire, aimait disposer des masques grimaçants et des mannequins d'osiers costumés derrière les fenêtres."
Puis survient la seconde guerre mondiale, et Mme Duval quitte les lieux. Ses héritiers vendront le site à la mairie en 1957.
(Les photos sont de M. Ludovic Leclair que je remercie vivement pour sa collaboration)