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La Maraîchine Normande
26 août 2013

SAINT-MARTORY (31) - UNE TRANSLATION DE RELIQUES EN 1797

SAINT-MARTORY (31)

UNE TRANSLATION DE RELIQUES EN 1797

saint-martory gravure

Notre Revue étant ouverte aux communications intéressant l'histoire ecclésiastique autant que l'histoire civile de l'ancien pays de Comminges, nous utilisons volontiers, pour cette chronique, l'envoi tout récent qu'a bien voulu nous faire M. l'abbé Saint-Laurens, curé-doyen de Saint-Martory, d'un procès-verbal de translation des reliques du patron local, effectuée à une époque où durent être bien rares de pareilles cérémonies.

Celle qui est relatée dans ce document eut lieu le dimanche 20 août 1797, au cours de la période révolutionnaire, alors que le culte public de la religion catholique devait encore attendre quelque temps son rétablissement officiel.

Les autorités républicaines étaient présentes au milieu d'une nombreuse assistance.

Cet acte de réparation envers de pieuses reliques est d'autant plus digne de remarque qu'à ce moment l'hostilité envers le catholicisme, née de l'effervescence révolutionnaire et des excès des années précédentes, était toujours très-ardente de la part des pouvoirs publics.

Ce n'est pas que le besoin de rattacher l'âme populaire à quelque idée supérieure, religieuse même, ne se fût manifestée par des tentatives successives d'une religiosité dévoyée.

A l'exaltation de "la Déesse Raison" avait succédé avec Robespierre l'inauguration du culte de "l'Etre suprême" ; puis, un autre idéologue, La Réveillère-Lepaux, avait imaginé, dans ses élucubrations, une sorte de dogme qu'il prétendait "conforme à la Religion naturelle" et avait appelé d'un nom beaucoup trop savamment tiré du grec "la Théoanthropophilie", - l'amour de Dieu et des hommes - désigné ensuite, d'un terme un peu moins compliqué, "Théophilanthropie".

Ce qui va suivre montre bien, à la louange du peuple de Saint-Martory, que son attachement à la vieille foi de la France s'était maintenu malgré tout et il en donnait ici un témoignage solennel.

"Ce jourd'hui Dimanche, 20 août 1797, an 5 de la République française, 3 fructidor, dans l'église paroissiale de Saint-Martory, vers les six heures et demi du matin, se sont réunis, avec un concours immense de peuple, le citoyen Jean-Bertrand Bonin-Ferran, curé de Rouède, desservant provisoirement la présente église, Arnaud Chanfrau, curé du présent lieu, hors d'état de servir à cause de ses infirmités et de son grand âge, Alexandre Balaresque, curé de Lafite-Toupière, Joseph Mollin, curé de Signac et Dominique Chanfrau, prêtre du présent lieu ; Michel Bonneau, Pierre Dispagne et Jean-Baptiste Lacoste, administrateurs marguilliers de la dite église ; Jean-Bertrand Lapeyre, juge de paix ; Jean-Bernard Sarrère, Barthélémy Dubourg et Jean-François-Louis Pégot, officiers de santé, et grand nombre d'autres habitants de cette ville, aux fins d'assister à l'office divin et à la translation des reliques de saint Martiry, qui furent dérobées à la fureur de la persécution, il y a environ trois ans, quand Dartigoïte et Mallarmé, membres de la Convention nationale, parcouraient le département de la Haute-Garonne et renversaient partout les monuments de la piété et de la religion catholique. Le nommé M.... cadet, citoyen de St-Gaudens, un de leurs principaux agents, vint à St-Martory, dans le mois de vendémiaire de l'an second de la République, correspondant au mois de septembre 1794, pour présider au pillage et à la dévastation de l'église, fit ouvrir le sépulchre du patron de St-Martory, tracé en marbre, exhaussé sur le mur de l'autel de la chapelle annexe à l'église du côté du midi, en fit enlever le corps de ce saint, qui reposait dans ce sépulchre depuis un temps immémorial, et le fit jetter aux flammes sur le pont de la ville où étaient déjà entassés et livrés au feu dévorant les bustes, les images, les tableaux précieux et autres ornements magnifiques qui faisaient la décoration de cette église.

Néanmoins plusieurs fidèles, dont les noms sont ici-bas rapportés eurent le soin et la pieuse adresse de soustraire aux flammes dévorantes quelques parties des ossements de saint Martiry, qu'ils ont religieusement conservés chez eux pendant cet intervalle. C'est pourquoi tous les fidèles, vrais patriotes de St-Martory, ayant fait ériger un nouveau buste de saint Martiry et réparer son tombeau, ont demandé la présente translation de ses reliques conservées, à laquelle a officié le citoyen Bonin-Ferran, prêtre desservant, de l'aveu du Sr Chanfrau, curé, lequel a commencé par faire la bénédiction du nouveau buste immédiatement après la messe de paroisse qu'il a célébrée ; puis chaque individu, conservateur des reliques, est venu déposer, sur le grand autel, les divers parties des ossements qu'il avait retirées des brasiers enflammés, savoir : Pierre Dispagne, Noël Cazeneuve, François Duclos, Pierre Duclos, forgeron, François Bernadet, Bernard Sales, Pierre Cassé, Martiry Dégé, Baptiste Cavé, Pierre Senac, Mathieu Mourlan, François Basties, Jean Poueich, Blaise Sarlabous, Jean Dubois, Raymond Sensat ; Pierre Dardignac, Bernard Barthe, Mathieu Cazeneuve, Françoise Verney, Magdelaine Camus, Jeanne Sarlabous, Catherine Coumes, Françoise  Chanfrau, Jeanne-Marie Gramond, Rose Gramond, Marie Sarlabous, Rose Guitoanet, Flore Vital, Paule Prébost, Barthélemie Bernadet, Flore Dilhan, Françoise-Victorienne Balabesque, Paule Sales, Marie Larrieu, Toinette Cazeneuve, Catherine Yrle, Catherine Duclos, Catherine Lafite enfant. Plusieurs autres individus, du parti schismatique, ont encore conservé d'autres reliques qu'ils ont refusé de remettre.

Lesdites reliques, c'est-à-dire celles qui ont été remises, ont été attestées par des témoins oculaires et vérifiées pour être celles du patron saint Martiry que les susnommés avaient retirées du bûcher allumé sur le pont.

Cette déposition et cette remise ayant été faites et reçues, les citoyens Sarrère, Pégot et Dubourg, chirurgiens anathomistes, ont vérifié et reconnu la partie du corps à laquelle chacun des ossements remis, et il se trouve qu'on a conservé et remis du corps de saint Martiry un fragment de l'os occipital de la partie postérieure de la tête, l'os temporal ; les deux têtes de l'humérus de l'extrémité supérieure de l'avant-bras droit et gauche, l'os fémur, la tête du fémur, la cavité de la tête du fémur faisant partie de l'os isle, une clavicule, une vertèbre, deux côtes, la tête supérieure de l'os tybia, plusieurs fragments du fémur et une infinité d'autres particules presque réduites en cendres et dont il n'a pas été possible de faire une description exacte.

Après cette vérification le citoyen Bonin-Ferran a choisi, de l'aveu et du consentement des assistants, le fragment de l'os occipital, l'os temporal, l'une des deux têtes de l'humérus et la tête du fémur qu'il a placés dans la roële pratiquée au corps du nouveau buste ; plus l'autre tête de l'humérus qu'il a placée dans la roële de la figure du bras et de la main de saint Martiry ; et toutes les autres parties ont été religieusement transportées et replacées au tombeau où elles auraient été auparavant renfermées et sur le même suaire qui a été encore conservé par Noël Cazeneuve.

Ensuite le saint Buste, enrichi des reliques ci-dessus mentionnées, a été processionnellement promené dans l'intérieur de l'église et placé sur son autel, où il est demeuré jusqu'au soir exposé à la vénération des fidèles, à qui ces ossements pieusement conservés ont rappelé tout à la fois la férocité des vandales modernes et les vertus douces et bienfaisantes d'un saint religieux qui fut digne de charger sur ses épaules le Rédempteur du monde sous la forme d'un pauvre lépreux.

Fait à St-Martory les jour et an cy-dessus et ont signé :
CHANFRAU, curé ; MOLLIN, curé ; BONNIN-FERRAN, prêtre desservant ; CHANFREAU, prêtre ; BONNEAU, LAPEYRE, DISPAGNE, François DUCLOS, LACOSTE, administrateur ; CAVÉ.
Pour copie conforme :
P. ST-LAURENT, C.D.

Revue de Comminges
1898

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