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La Maraîchine Normande
10 juin 2013

GABRIEL-ESPRIT VRIGNAUD, CHEF DE LA DIVISION DE VIEILLEVIGNE ET SON SUCCESSEUR GUÉRAUD-BOISJOLY

GUÉRAUD-BOISJOLY

CHEF DE DIVISION DANS L'ARMÉE DE CHARETTE

Coeur-chouanLe premier chef de la division de Vieillevigne, dans l'armée de Charette, en 1793, fut Gabriel-Esprit Vrignaud.
C'était un sellier de ce bourg, qui avait servi sous Louis XVI pendant sept ans, et qu'à cause de cela les insurgés choisirent pour les commander.

A ce moment, d'après le récit de François Loiret, né à Vieillevigne en 1778, et qui y fut plus de cinquante ans concierge de la mairie, ils avaient à leur tête "un M. Poisson qui avait porté la soutane et qui demeurait au Chêne de Vieillevigne. Les révoltés avaient des faulx, des piques, des bâtons. C'était un lundi." (11 mars 1793).

Les débuts de l'insurrection dans cette paroisse ne furent pas très sanglants. Si l'on s'en rapporte au même témoin, "à Vieillevigne, il n'y eut point de vengeance, point de massacres, si ce n'est le père et deux enfants Lefebvre qui furent tués auprès du bourg par les hommes de Charette, parce qu'ils dirent qu'ils voulaient faire une administration et qu'ils étaient patauds".

Les archives de la Mairie et les actes de l'état-civil furent brûlés. Les républicains du pays ayant été mis en prison, "des hommes révoltés qui venaient du côté de Saint-Denis" manifestèrent l'intention de les massacrer, tandis qu'on sonnait le tocsin, M. Bizeul s'y opposa. Il vivait "caché dans la campagne, habillé en veste bleue et un pantalon rayé, un gilet blanc et un bonnet d'étoffe jaune". Il se mit "le dos devant la porte de la prison" et dit : "Vous commencerez par me tuer, si vous voulez "tuer ces Messieurs".

On emmena plus tard les prisonniers à Montaigu. L'abbé Bizeul suivit pour les protéger ; "les patriotes attachés deux à deux" jusque dans cette ville "où au moment d'un combats les trois quarts échappèrent."

Vrignaud était brave, intelligent, mais manquait d'instruction. Il était complètement dominé par la marquise de Goulaine, ennemie personnelle de Charette, qui suscita entre ces deux chefs une rivalité dont M. Bittard des Portes a raconté les péripéties dans son excellent ouvrage : Charette et la Guerre de Vendée. Seul de sa famille, il était royaliste. Ses frères et ses soeurs étaient républicains. "Bel homme", il avait épousé une demoiselle Lemaistre de Saint-Etienne-de-Corcoué et vivait dans l'aisance. A l'époque de la Révolution, il avait trois enfants qui moururent en bas-âge, sauf une fille nommée Marie qui lui survécut et se maria avec un sieur Prou, de la Guichère en Legé. En 1825, tombée dans la misère et chargée de quatre enfants, elle sollicita des secours du gouvernement de la Restauration.

La division de Vieillevigne était forte d'environ 1500 hommes. Gabriel Vrignaud avait alors sous ses ordres, en qualité de commandant en second, Thomas Préneuf qui eut les deux jambes coupées, mais vécut longtemps après ces terribles blessures. Guéraud-Boisjoly était son aide de camp.

Guéraud-Boisjoly, fils de François-Pierre Guéraud, "noble homme, demeurant à Vieillevigne", et de Marie Beziau, appartenait à une ancienne famille bourgeoise.
Son ancêtre Laurent Guéraud, sieur de Boisjoly, licencié en droit, avait été procureur fiscal de la châtellenie de Vieillevigne vers le milieu du XVIIIe siècle.
Il était l'aîné des fils de François Guéraud et avait quatre frères, dont deux pour les distinguer portaient comme lui un nom de terre. Guéraud-Gobinière et Guéraud-la-Houssaye. Les plus jeunes se nommaient Guillaume, né en 1779 et Laurent, né en 1781.

Le père de ces cinq garçons était mort avant la révolution. Guéraud-Boisjoly avait 22 ou 23 ans en 1793. Il était d'un caractère ardent, passionné, et exerçait une grande influence sur son frère Guéraud-Gobinière "charmant jeune homme", d'une nature très douce.

Quand éclata l'insurrection, Guéraud-Boisjoly habitait Nantes et faisait partie de la Garde Nationale. Comme tel il fut forcé de marcher avec les Républicains dans leur première attaque contre Machecoul ; mais là il prit un mouchoir blanc et l'agitant il passa du côté des royalistes en criant : "Je suis Guéraud de Vieillevigne." Il en fut reçu à bras ouverts et Vrignaud le prit pour aide de camp. Il fit alors venir à Vieillevigne ses frères Guéraud-Gobinière et Guéraud-la-Houssaye qui étaient en pension à Nantes et les décida à s'enrôler dans l'armée royaliste.

Tous trois suivirent vaillamment les hasards de la guerre sous les ordres de Vrignaud dont Guéraud-Gobinière fut aide de camp comme son frère aîné. François Loiret, le témoin cité plus haut, les vit un jour partir de Vieillevigne pour une expédition avec leur chef. Ils étaient, dit-il "en habits bourgeois et des plumes blanches à leurs chapeaux".

Charette-1Au commencement de mai 1793, après des alternatives de revers et de succès, Charette, dont l'influence avait effacé peu à peu celle de tous les chefs voisins, fit connaître son projet de reprendre Machecoul dont les Républicains s'étaient emparés. Mais à cette occasion une mutinerie éclata parmi ses bandes. A force de sang-froid et d'énergie, il réussit à l'apaiser, et la division de Vieillevigne qui y avait pris part "le pria de lui nommer des officiers. Il conserva le commandement en chef à M. Vrigneau (Vrignaud), dit le Bouvier-Desmortiers (Vie du général Charette, page 61), et lui donna M. Bertaud (Barteau) pour adjoint. MM. Guéreau (Guéraud-Boisjoly et Guéraud-Gobinière) eurent les grades de major et aide-major."

Ce fut seulement en juin que Charette put attaquer Machecoul. Cette ville était alors occupée par une garnison de 1300 hommes. Il fit appel au concours de Vrignaud qui lui amena le 9 juin sa division à Legé où elle fut accueillie au son des violons et des binious. Les autres divisions du Pays-de-Retz et du Bas-Poitou commandées par la Cathelinière, Savin et Joly avaient marché de leurs côtés, en sorte que toutes ces forces assaillirent Machecoul dans la journée du 10.

Deux bataillons républicains repoussés par Charette s'étaient réfugiés sur la butte des Moulins de la Chaume d'où leurs canons foudroyaient les royalistes. Vrignaud voulut enlever cette position. Écrasés par la mitraille et la mousqueterie ses soldats reculèrent ; il les rappelle et marche en avant, mais tombe aussitôt mortellement blessé. On l'emporta expirant pendant que Charette et Joly, à la tête de 200 cavaliers et appuyés par la bande du Loroux, s'emparaient de la butte et rejetaient les Bleus dans la ville qui bientôt, grâce à Savin devenu maître du château, resta au pouvoir des insurgés.

Le lendemain, après des funérailles solennelles célébrées en l'honneur de Vrignaud, Charette qui avait des ménagements à garder vis-à-vis de l'ombrageuse division de Vieillevigne "traita, dit M. Bittard des Portes, le commandant en second de la division, un cultivateur nommé Barteau, comme le successeur naturel de Vrignault. Celui-ci était sympathique aux paysans qui l'acclamèrent ainsi que Guéraud, capitaine de paroisse, promu major de la division."

D'après Le Bouvier-Desmortiers (page 89), "Guéraud (Guéraud-Boisjoly) fut nommé commandant en second" et non pas major, puisqu'il avait déjà ce grade.

Sur "l'Etat des anciens officiers de la division de Vieillevigne de l'armée catholique et royale de la Vendée depuis 1793-1794 et 1795" dressé à Vieillevigne, le 11 novembre 1814, par M. Grelier du Fougeroux, ancien député de la Vendée, Barteau ne figure point parmi les commandants en second ni parmi les chefs de division. Il est probable qu'après l'attaque de Nantes (29 juin) où il accompagna Charette, il fut pour quelque motif inconnu remplacé très promptement par Guéraud-Boisjoly qui est porté comme chef de division immédiatement après Vrignaud sur la liste de M. Grelier du Fougeroux.

Quand au mois de septembre 1793 les troupes de Charette se réunirent à la grande Armée Vendéenne pour combattre et vaincre à Torfou la fameuse armée de Mayence, la mère des cinq enfants Guéraud quitta Vieillevigne avec les deux petits, Guillaume et Laurent, âgés alors le premier de 14 ans et le second de 12. Elle suivit les bandes où combattaient ses trois autres fils. Elle dut être poussée à prendre cette décision par eux et aussi probablement par Mlle Thérèse Pineau du Pavillon, ancienne religieuse de Saint-Charles de Nantes, ardente royaliste quoique belle-soeur de Pierre Francheteau, maire de Legé, massacré par les insurgés et dont elle avait recueilli chez elle trois enfants orphelins, un garçon de neuf ans nommé Joseph, et deux filles Marie et Rose. La dernière de huit ans et l'autre de dix. Avec ces pauvres petits, l'intrépide religieuse s'était jointe à l'armée royaliste et avait traversé Montaigu où Mme Goupilleau, femme du Conventionnel, essaya vainement de la dissuader "d'emmener ainsi à l'aventure des enfants aussi jeunes et offrit même de les garder chez elle."

Mme veuve Guéraud associa son sort à celui de cette famille et de la foule immense de fuyards qui après la défaite de Cholet s'achemina vers la Loire. Son fils, Guéraud-la-Houssaye périt au passage du fleuve, dit François Loiret. Son autre fils Guéraud-Gobinière mourut également à la Grande Armée, on ne sait en quelles circonstances. Elle-même fut tuée à La Flèche, après d'affreuses misères. ...

Guillaume pris par les Républicains à Laval et Laurent ramené à Nantes finirent par être réunis à Vieillevigne où on leur donna comme tuteur M. Luc Delavauguyon.

Quant à Guéraud-Boisjoly, il ne s'était pas séparé de Charette et combattit auprès de lui, à la tête de sa division de Vieillevigne, jusqu'à sa mort que Crétineau-Joly a racontée dans les termes suivants : "Vers les derniers jours d'avril (1794)", dit-il, (Histoire de la Vendée Militaire, tome 2, page 231, édition Drochon), Charette, apprenant que la petite armée rassemblée par Sapinaud au centre de la Vendée était très menacée par les Républicains, "se portait en personne du côté de Pouzauges, afin de délivrer cette nouvelle division entourée de forces supérieures. Lorsque le général parut, le combat était engagé et Sapinaud reculait. Tout-à-coup Guérin d'un côté, Charette de l'autre s'élancent sur les Bleus. Sapinaud, à ce secours inespéré, rallie ses soldats ; il les ramène à la charge. Après trois heures de mêlée, les Républicains sont repoussés, Guéraud (le typographe par erreur a imprimé Guéroult), chef divisionnaire de Vieillevigne, se jette à leur poursuite ; il est tué. Ses soldats, pour venger cette mort, s'acharnent avec plus de fureur sur les Bleus qui, dans un désordre complet, se laissent massacret sans se défendre."

Le lieu précis où succomba Guéraud-Boisjoly est Bazoges-en-Paillers.

Il eut pour successeur, comme chef de la division de Vieillevigne, Dulac, officier républicain qui avait passé dans les rangs royalistes et mourut de maladie, en 1794, aux environs de Saint-Etienne-de-Corcoué.

JOSEPH ROUSSE
Revue de Bretagne et de Vendée (Vannes)
1907

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