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La Maraîchine Normande
27 mai 2013

UNE LETTRE DE CHARLES-LOUIS BONNEAUD, CURÉ CONSTITUTIONNEL D'OLONNE

église Olonne

UNE LETTRE DE CHARLES-LOUIS BONNEAUD
CURÉ CONSTITUTIONNEL D'OLONNE

Oblitérée du timbre postal de La Rochelle, possédant encore les débris du sceau de cire rouge qui la cachetait et - détail piquant - écrite sur un papier vergé dont le filigrane porte l'emblème lionné de la royauté, j'ai retrouvé parmi de vieux papiers, une lettre de l'ex-curé d'Olonne, Charles-Louis Bonneaud, qui, je le pense, sera susceptible d'intéresser quelques lecteurs de la "Revue du Bas-Poitou".

Notre épistolier, originaire d'une famille de La Rochelle, honnête, mais sans fortune, paraît être un personnage assez singulier et de bien peu de caractère. Pour avoir renié ses convictions religieuses et avoir fait siennes les idées des maîtres républicains du moment, il semble qu'en dépit de son civisme qui lui valut - notre lettre en fait foi - un emploi de commis au district de La Rochelle, les vicissitudes ne lui furent pas épargnées.

Le 22 mai 1791, en l'église Notre-Dame-des-Sables, les électeurs du District procèdent à la nomination des curés des vingt-six paroisses dont les curés étaient réfractaires. Charles-Louis Bonneaud fut élu curé d'Olonne. Ces élections n'allèrent pas sans quelque trouble en ville, puisque la Municipalité des Sables invita le Commandant de la Place "à multiplier les patrouilles et à faire arrêter, dans les cabarets, tous ceux ou celles qui, par des injures ou des voies de fait, essayeraient de troubler l'ordre et la tranquillité".

En mars 1792, Bonneaud, dont la popularité était probablement fort restreinte, adressa une requête au directoire du district "pour qu'il soit fait défense au prêtre réfractaire Girard, de le troubler dans l'exercice de ses fonctions ecclésiastiques". Le Directoire fit comparaître devant lui les deux rivaux qui étaient accompagnés des officiers municipaux d'Olonne.

Dans ses réclamations, Bonneaud ne fut guère soutenu par les officiers municipaux de sa résidence, avec lesquels il entretenait des relations sans aménité et qu'il accusait de l'avoir laissé sans recours.

Moralement, il n'obtint pas satisfaction. Tout au plus, fut-il enjoint au sieur Girard, dont les offices étaient probablement plus suivis que les siens "d'avoir à se comporter paisiblement dans la commune d'Olonne, d'être circonspect avec le sieur Bonneaud, et de lui laisser le libre exercice de ses fonctions".

Quand à l'Abbé Girard, il fut autorisé à continuer à célébrer sa première messe, comme auparavant.

Cet échec ne pouvait qu'augmenter la rancune du Curé Constitutionnel d'Olonne. Aussi ne faut-il guère s'étonner de le voir, à peine un mois après, signer une pétition dont il fut peut-être l'inspirateur et demandant la déportation, dans les Etats du Pape, des prêtres vendéens non assermentés. Le court passage suivant donnera une idée de la modération du factum, "Nous demandons la déportation et l'exil de ces furieux, nous demandons qu'ils soient transportés par vos ordres dans les marais fangeux de l'Italie, pour y purger le venin dont ils nous empoisonnent". Le député Goupilleau, de Montaigu, appuya cette demande qui fut présentée à l'Assemblée Législative.

Le précieux journal de Collinet sur Les Sables et La Chaume, nous donne enfin un dernier détail concernant la vie privée de l'ex-curé d'Olonne. Charles-Louis Bonneaud avait un frère, Jean-Louis, qui, curé des Magnils, prêta lui aussi serment, fut élu curé de La Chaume et officier municipal. Peu avant d'abandonner la prêtrise, il poussa l'amitié fraternelle jusqu'à marier notre personnage avec une lingère, née Couteau, de La Rochelle. Il célébra religieusement cette union, dressa le lit nuptial dans sa cure et, en présence de tous les assistants ... y conduisit lui-même les époux.

Devenu commis du district de La Rochelle, sa ville natale, les modestes appointements de commis de l'ex-curé Bonneaud ne lui enlèvent point le souci de l'entretien de son nouveau ménage. De là cette nouvelle requête aux administrateurs de la Vendée que nous publions ci-dessous.

MAURICE POIGNAT,
Conservateur du Musée de Parthenay.

La Rochelle, le 14 Floréal, an V de l'Ere Républicaine.
Liberté
Egalité

C.L. Bonneaud, Commis au district de La Rochelle,
aux Citoyens administrateurs du département de la Vendée.

Au moment, Citoyens, où j'allais me pourvoir auprès de la Convention Nationale au sujet de deux arrêtés pris par le Département de la Vendée, le 25 Pluviose dernier, contre tous les principes et toutes les lois, sur deux pétitions que je lui ai présentées, j'apprends que cette administration vient d'être renouvellée ; c'est pourquoi, comptant sur l'intégrité, la justice et l'impartialité des nouveaux administrateurs, je vais leur représenter l'objet de ma demande, le district de La Rochelle, qui a mûrement examiné mon affaire, a appuié inutilement auprès de ce département la réclamation que ma position m'a obligé de répéter ; mais avant d'entrer dans le détail, je vous prie, Citoyens administrateurs, de prendre lecture des lois du 12 juillet 1790, article XXV, titre premier, du 28 octobre 1790, article XIII, titre premier ; du mois de septembre 1790, article IV ; du 10 février 1791, articles 1, 2 et 3 ; du 16 septembre 1791, article IV et du 17 août 1792 ... et des arrêtés du département des 18 juillet et 31 août 1792.

La loi m'obligeait à acquitter des fondations : je les ai acquittées pendant deux ans, la municipalité d'Olonne l'atteste. Ces fondations n'étaient ni érigées en titre perpétuel de bénéfice, ni réunies à la cure, la municipalité l'atteste encore, ainsi que les titres que le Département a reçu dans le ... (effacé), par la voie du district des Sables qui a certifié cet envoi au bas de ma pétition.

Il est question actuellement des émoluements attachés à ces fondations, dont je n'ai pu encore me procurer le payement.

Je demande en conséquence depuis le 19 juin 1791, jusqu'au 7 octobre de la même année, époque de la vente des biens des fondations, sur le produit de la ferme induement perçue par Alizard, receveur des droits d'Enregistrement aux Sables, à raison de 1709 l 3 s 3 d pour l'année, la somme de 332 l 2 s 1 d. Et depuis le 7 octobre 1792 jusqu'au 19 juin 1793, où j'ai cessé d'acquitter ces fondations, la somme de 1.022 l 5 s 4 d pour l'intérêt à 4 pour cent du prix des objets vendus 16.700, ce qui fait un total de 1354 l 4 d 2 centimes pour l'acquit de deux années des dites fondations.

Il serait difficile de dire pour quelle raison le Département a déclaré n'y avoir lieu à délibérer sur cette demande, parce qu'il n'en donne aucune.

Quant à la desserte de l'isle, il s'appuie pour ne pas faire droit à ma demande, sur un arrêté qui, dit-il, rapporte le précédent ; sur un arrêté destructif du principe qui dit que toute peine nécessite salaire. Cependant, pour cette desserte il m'est dû 9 mois à 500 l. par an, 375 l. qui jouints aux 1354 l 4 d 2 centimes pour la fondation, font la somme de 1729 l 4 d 2 centimes.

J'ai été pillé dans la Vendée, j'y ai perdu pour environ 6.000 francs d'effets ; je suis sans bien, sans fortune, j'ai des engagements que je ne puis remplir si je n'obtiens justice. Je ne puis donc cesser de réclamer jusqu'à ce qu'il me soit démontré que je ne suis fondé. Pesez, citoyens, administrateurs, mes motifs dans votre sagesse, et prononcez d'après la loi : Salut et Fraternité.

Bonneaud, cy-devant Curé d'Olonne
et desservant de l'Isle.

Revue du Bas-Poitou - 4ème livraison

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